Association pour la Défense des Droits de l'Homme et des Libertés c.
Djibouti, Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, Communication
133/94, 27e Session Ordinaire, Alger, 11 mai
2000.
133/94 Association pour la Défense des Droits de l'Homme et des Libertés
c/ Djibouti
Rapporteur:
17ème session : Commissaire Amega
18ème session : Commissaire Ndiaye
19ème session : Commissaire Ndiaye
20ème session : Commissaire Beye
21ème session : Commissaire Ben Salem
22ème session : Commissaire Ben Salem
23ème session : Commissaire Ben Salem
24ème session : Commissaire Ben Salem
25ème session : Commissaire Ben Salem
26ème session : Commissaire Ben Salem
27ème session : Commissaire Ben Salem
______________________________________________
Résumé des faits :
1. La communication est présentée par l'Association pour la Défense des
Droits de l'Homme et
des Libertés, une ONG djiboutienne. Le requérant se plaint d'une série
d'abus de droits de
l'homme perpétrés à Djibouti au cours de la deuxième moitié de l’année
1993. Elle fait état
des abus dont auraient été victimes des membres du groupe ethnique Afar
de la part des
troupes gouvernementales dans les zones de combats avec le Front pour la
Restauration de
l’Unité et de la Démocratie (FRUD), soutenu en grande partie par les membres
de l’ethnie
Afar. Certains rapports font état de cas d'exécutions extrajudiciaires,
de tortures et de viols.
La communication cite 26 noms de personnes qui auraient été soit exécutées
soit
emprisonnées sans jugement ou torturées.
Dispositions de la Charte dont la violation est alléguée:
2. Le requérant allègue la violation, par le gouvernement djiboutien, des
articles 2, 3, 4, 5, 6, 7,
9, 10, 11, 12 et 13 de la Charte Africaine.
La procédure :
3. La communication date du 7 avril 1994 et a été reçue au Secrétariat
le 19 avril 1994.
4. La Commission en a été saisie au cours de sa 15ème session ordinaire,
et les Ministères des
Affaires étrangères et de la Justice de Djibouti notifiés le 29 juillet
1994. Le plaignant a
également été notifié de cette décision.
5. Le 26 août 1994, le Secrétariat a invoqué l'article 109 du Règlement
intérieur de la
Commission pour inviter le gouvernement à n’entreprendre aucune action
pouvant résulter
en une situation irréparable pour le plaignant ou pour les victimes des
violations alléguées.
6. Le 21 octobre 1996, au cours de la 20ème session, la Commission a reçu
une lettre du
requérant demandant que l’examen de la communication soit reporté en attendant
le résultat
des négociations en cours avec le gouvernement. La Commission a accédé
à cette demande.
7. A la 22ème session, la communication a été déclarée recevable.
8. Le 11 février 1998, le Secrétariat a reçu par télécopie une note verbale
du Ministère des
Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, accompagnée d’une
déclaration de
l’Assemblée Générale de l’Association pour la Défense des Droits de l’Homme
datant du 25
mai 1996, se prononçant pour le retrait de la communication au motif qu’un
protocole avait
était signé avec le gouvernement destiné à régler durablement les revendications
des victimes
civiles, des réfugiés et des personnes déplacées. Le Secrétariat a accusé
réception de cette
note verbale le 20 février 1998.
9. Le Secrétariat a contacté le requérant pour s’assurer de l’effectivité
du compromis allégué et
du retrait de sa plainte. Cette démarche a été faite par lettre en date
du 1er juin 1998, restée
sans réponse.
10. Au cours de la 25ème session, la Commission, a mandaté le Commissaire
Rezag-Bara qui
devait se rendre en mission à Djibouti pour chercher une solution amiable
au différend. Elle
a par la même occasion, différé sa décision au fond jusqu’à la tenue de
la 26ème session, en
attendant de connaître le résultat des démarches du Commissaire Rezag-Bara.
11. Au cours de la mission qu'il a effectuée du 26 février au 5 mars 2000,
le Commissaire Rezag-
Bara a rencontré les autorités djiboutiennes et la partie requérante qui
lui a confirmé qu'un
arrangement amiable avait déjà été conclu.
12. Le 30 mars 2000, le Secrétariat a reçu une correspondance signée du
Président de
l'Association pour la Défense des Droits de l'Homme et des Libertés, M.
Mohamed Moumed
Soulleh indiquant que le litige faisant l'objet de la communication sous
examen avait trouvé
une solution dans le cadre d'un règlement amiable entre les parties. M.
Moumed Soulleh
demande en conclusion à la Commission de prendre acte dudit règlement.
Le Droit
La recevabilité :
13. L'article 56 alinéa 5 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme
et des Peuples requiert
avant tout recours adressé à la Commission que les communications soient "…postérieures
à
l'épuisement des recours internes s'ils existent, à moins qu'il ne soit
manifeste à la
Commission que la procédure de ces recours se prolonge d'une façon anormale".
14. Au cours de sa 20ème session, la Commission avait rendu une décision
de recevabilité de la
communication au motif entre autres que le contenu matériel et l'effectivité
des arrangements
intervenus entre les parties lui demeuraient inconnus, de même que les
résultats des enquêtes
et des procédures judiciaires dont faisait état le défendeur dans sa correspondance
du 8 mars
1995.
Le Fond :
15. La communication introduite par le requérant visait à amener la Commission
à dire et à
considérer que les faits ci-après imputés aux forces armées djiboutiennes
et à certains autres
services de l'Etat constituent une série de violations par l'Etat défendeur
de nombreuses
dispositions de la Charte. Les faits incriminés sont : la perpétration
des attaques contre des
civils non armés et donc ne participant pas aux combats opposant ces dernières
au
mouvement rebelle du Front pour la Restauration de l'Unité et de la Démocratie
(notamment
par les exécutions sommaires et arbitraires alléguées, les actes de viols
collectifs, des
déplacements et des regroupements forcés), la détention et le maintien
en garde à vue
prolongée au-delà des délais légaux…etc.
16. L'Etat défendeur avait quant à lui, fait parvenir à la Commission des
documents tendant à
établir que des arrangements visant à régler durablement les revendications
des victimes des
exactions imputées aux forces armées avaient été trouvés et demandait par
conséquent à la
Commission de déclarer irrecevable la communication dont elle était saisie.
17. La rencontre entre le demandeur et le Commissaire Rezag-Bara en mission
à Djibouti, ainsi
que la lettre du requérant reçue au Secrétariat le 30 mars 2000, ont clarifié
la situation et
confirmé la matérialité de l'arrangement qui a été trouvé entre les parties.
Par Ces Motifs :
La Commission décide de clore la procédure sur la base du règlement amiable
intervenu
entre les parties.
Fait à Alger, le 11 mai 2000.