239/2001 – Interights (pour le compte de Jose Domingos Sikunda) / Namibie
Rapporteur :
29ème Session : Commissaire Andrew R. CHIGOVERA
30ème Session : Commissaire Andrew R. CHIGOVERA
31ème Session : Commissaire Andrew R. CHIGOVERA
Résumé des faits
1. La communication est soumise par Interights, ONG des droits de l’homme
basée au Royaume-
Uni, pour le compte de Jose Domingis Sikunda.
2. M. Sikuda est de descendance angolaise, mais il vit en Namibie depuis
25 ans.
3. Le plaignant allègue qu’en 2000, M. Sikunda a été arrêté et détenu par
les autorités namibiennes.
Aucune raison n’a été donnée sur son arrestation et sa détention.
4. Il est allégué que le 24 octobre 2000, la Haute Cour de Justice de la
Namibie a ordonné la
libération de M. Sikunda, mais que le gouvernement de la Namibie n’a pas
respecté la décision
de justice.
5. Il est également allégué que les avocats de M. Sikunda ont alors cherché
à faire exécuter la
décision et le 31 octobre, le juge a rendu un nisi ordonnant au Ministre
d’expliquer pourquoi il
ne devrait pas être cité à comparaître pour refus de s’incliner devant
une décision judiciaire.
L’affaire a été renvoyée deux fois et le 12 janvier 2001, le Juge Teek
a rendu son jugement en se
récusant sans que l’une des deux parties l’ait demandé.
6. Le plaignant déclare qu’il existe une décision judiciaire pendante de
non expulsion de M.
Sikunda qui expire le 1er février 2001 et que les autorités namibiennes
ont fait savoir qu’elles
étaient prêtes à expulser M. Sikunda vers l’Angola dont le gouvernement
accuse M. Sikunda
d’être un rebelle de l’UNITA. Le plaignant allègue qu’une telle action
équivaudrait à une menace
de torture et de mort extrajudiciaire de M. Sikunda.
Plainte
7. Le plaignant allègue la violation des articles 4, 5 et 12(4) de la Charte
Africaine des Droits de
l’Homme et des Peuples.
Procédure
8. La communication a été reçue au Secrétariat de la Commission le 31 janvier
2001 par fax dont
une copie a été transmise au Président de la Commission Africaine, lui
demandant de faire appel
(conformément à l’Article 111 du Règlement intérieur de la Commission)
au gouvernement
namibien pour qu’il s’abstienne de prendre des mesures qui pourraient mettre
en danger la vie
de M. Sikunda.
9. Le Secrétariat a accusé réception de la communication le 2 février 2001
et a demandé au
plaignant de lui fournir de plus amples informations.
10. Le 19 février 2001, le Président de la Commission Africaine a écrit
au Ministre des Affaires
étrangères de la République de Namibie pour lui exprimer sa préoccupation
quant à la
prétendue expulsion de M. Sikunda.
11. Le 22 février 2001, le gouvernement namibien a répondu au Président
de la Commission en
rejetant la demande et en déclarant que les actions du gouvernement namibien
étaient légales et
visaient à garantir la sécurité du pays et de ses citoyens.
12. Le 12 mars 2001, une copie de la réponse écrite susmentionnée a été
transmise au Plaignant à
qui il a été rappelé de fournir à la Commission de plus amples informations.
13. Le 21 mars 2001, le Plaignant a répondu à la demande de fournir de
plus amples informations
en déclarant qu’il procurera à la Commission des preuves supplémentaires
et des pièces à
conviction.
14. A sa 29ème session ordinaire, la Commission a décidé d’être saisie
de la communication.
15. Le 23 mai 2001, le Secrétariat a transmis la décision susvisée aux
parties et leur a demandé de lui
fournir de plus amples informations sur la recevabilité, conformément à
l’article 56 de la Charte
Africaine. Il a également transmis une copie du texte de la communication
à l’Etat défendeur. Il
a été demandé aux parties de soumettre leurs observations écrites au Secrétariat
dans les trois
mois qui suivent la notification de la décision.
16. Au cours de sa visite de promotion en Namibie, effectuée du 2 au 7
juillet 2001, le Commissaire
Chigovera a soulevé la question de cette communication avec les autorités
des ministères de la
Justice et des Affaires étrangères à qui il a demandé instamment de soumettre
leurs observations
écrites au Secrétariat, le plus tôt possible.
17. Le 17 août 2001, il a été rappelé aux Parties de faire parvenir leurs
observations écrites au
Secrétariat au plus tard le 23 août 2001.
18. Les 18 et 21 septembre 2001, le Secrétariat a écrit respectivement
à l’Etat défendeur et au
Plaignant, les rappelant de lui faire parvenir leurs observations sur la
recevabilité.
19. Le 24 septembre 2001, le Secrétariat a reçu une lettre de Interights
disant qu’il ne pourrait pas
transmettre ses observations pour examen à la 30ème session, dans la mesure
où il lui manque des
éléments qui n’ont pas été transmis par les avocats des victimes.
20. A sa 30ème session ordinaire tenue à Banjul, Gambie, la Commission
a examiné la
communication et décidé de reporter son examen approfondi à sa 31ème session
ordinaire, en
vue de permettre aux plaignants de faire parvenir leurs observations sur
la recevabilité.
21. Le 9 novembre 2001, les Parties ont été informées de la décision de
la Commission.
22. Le 2 janvier 2002, il a été rappelé aux plaignants de soumettre leurs
observations écrites sur la
recevabilité.
23. Par un e-mail du 7 janvier 2002, les plaignants ont informé le Secrétariat
qu’ils avaient envoyé
une demande d’informations supplémentaires à leurs collègues en Namibie
mais n’avaient pas
encore reçu de réponse et que dans ce cas, ils examineront sérieusement
la possibilité d’envoyer
une notification d’abandon de l’affaire.
24. Le 19 mars 2002, le Secrétariat a écrit aux plaignants pour leur demander
s’ils souhaitaient
toujours donner suite à la communication et, dans ce cas, de bien vouloir
transmettre leurs
observations écrites sur la recevabilité.
25. Le 20 mars 2002, les plaignants ont écrit au Secrétariat l’informant
qu’en dépit de tentatives
répétées, ils ne sont pas parvenus à obtenir une réponse de leurs collègues
de l’Association
nationale des Droits de l’Homme. Les plaignants ont assuré le Secrétariat
que si la situation ne
change pas avant la prochaine session, ils demanderaient à la Commission
de leur permettre de
retirer la communication.
DU DROIT
Recevabilité
26. L’article 56 de la Commission Africaine traite de la recevabilité.
Les dispositions les plus
pertinentes de cet article prévoient:
Les communications visées à l’article 55 reçues à la Commission et relatives
aux droits de
l’homme et des peuples doivent nécessairement, pour être examinées, remplir
les conditions ciaprès:
Etre postérieures à l’épuisement des recours internes s’ils existent, à
moins qu’il ne soit manifesté à la
Commission que la procédure de ces recours se prolonge d’une façon anormale.
27. L’Etat défendeur soutient que, suite au refus du Ministre de l’Intérieur
de se conformer à la
décision de la Haute Cour du 24 octobre 2000 ordonnant la libération de
Sikunda, les avocats
de ce dernier ont cherché à appliquer la décision de la Cour par une réquisition
en renvoi du
Ministre de l’Intérieur pour outrage à magistrat.
28. L’Etat défendeur déclare que Interights a soumis la présente communication
à la Commission
Africaine le 31 janvier 2001, alors que la question de l’audition de la
requête d’un rule nisi
exposant les raisons pour lesquelles le Ministre de l’Intérieur ne devrait
pas être arrêté pour
outrage à magistrat, pendant que l’affaire était pendante auprès de la
Haute Cour. En effet, la
Haute Cour a connu de l’affaire le 1er février 2001 et a rendu un jugement
le 9 février 2001,
déclarant le Ministre de l’Intérieur coupable d’outrage à magistrat. En
conséquence, l’Etat
défendeur soutient qu’Interights, en introduisant une plainte le 31 janvier
2001, n’a pas satisfait
aux exigences de l’article 56(5) de la Charte Africaine.
29. D’autre part, la Commission a demandé à plusieurs reprises aux plaignants
de fournir leurs
observations sur la recevabilité, en particulier concernant la question
de l’épuisement des voies
de recours internes, mais elle n’a reçu aucune réponse à ce jour.
30. Aussi, en se basant sur les informations à sa disposition et essentiellement
sur la copie du
jugement de la Haute Cour de la Namibie rendu le 9 février 2001, la Commission
constate que
le Plaignant a porté l’affaire devant elle avant d’avoir épuisé toutes
les voies de recours internes,
alors que l’affaire était pendante devant la Haute Cour de la Namibie.
PAR CES MOTIFS et conformément à l’article 56(5) de la Charte Africaine,
la Commission déclare
cette communication irrecevable pour non-épuisement des voies de recours
internes.