La Situation Actuelle des Organisations des Droits de l'Homme en Afrique Sub-Saharienne

Les besoins de formation des organisations non-gouvernementales des droits de l'homme en Afrique sub-saharienne


Pour les jeunes groupes des droits de l'homme, il y a évidemment plusieurs domaines où la formation est nécessaire. La section suivante vise à identifier certaines catégories générales de besoins quant à la formation, à la base des commentaires des groupes eux-mêmes ou des observations relevées au cours de cette étude. La liste présente certaines des priorités qui ont fait surface dans l'étude de chaque pays; les chapitres sur chaque pays font un examen plus détaillé de ces besoins.

Les enquêtes, l'investigation et le contrôle: C'est curieux, un des aspects le plus fondamentaux de la lutte pour les droits de l'homme--à savoir les enquêtes sur les abus et le reportage--est rarement identifié comme un domaine qui exige une formation et attire rarement le financement. La raison la plus probable est que les donateurs préfèrent opérer dans des domaines moins controversés, tels que l'éducation sur les droits de l'homme. Les groupes des droits de l'homme eux-mêmes peuvent choisir de commencer à travailler dans des domaines tels que l'éducation ou la défense des droits dans les tribunaux où il y a moins de possibilité de venir en conflit direct avec les autorités locales. Néanmoins, une des conclusions de cette étude est que la formation dans la réalisation des enquêtes et les techniques de recherche est une priorité importante, puisque c'est un élément si important dans le travail pour les droits de l'homme et un domaine où les capacités de la plupart des organisations africaines restent sous-développées.

Les besoins précis varient d'organisation en organisation. Un grand nombre des groupes pourrait bénéficier d'une formation dans l'investigation des abus des droit sociaux et économiques. Quelques groupes ont besoins d'une formation avancée dans les techniques de la médecine légale, tandis que d'autres pourraient bénéficier d'une formation fondamentale dans la réalisation des enquêtes et la vérification des faits. En particulier, le phénomène de la répression officieuse exige la mise en oeuvre de techniques avancées de recherche. Certains groupes ont déjà mis au point des approches sophistiquées et ont élaboré du matériel didactique sur la réalisation des enquêtes et d'autres domaines. D'autres groupes ailleurs pourraient profiter de cette expertise.

La vérification exige des techniques et des capacités différentes. Cette catégorie comprend l'observations des manifestations, des élections, des procès et des reportages aux médias.

Les normes régionales et internationales et les mécanismes: L'emploi éventuel de normes internationales sur les droits de l'homme et des mécanismes internationaux dans le travail d'une organisation dépend de la susceptibilité du gouvernement à la pression internationale et du statut du droit international dans le système judiciaires du pays. Toutefois ce genre de formation a une certaine valeur partout. Une formation sur l'application de normes internationales aux droits sociaux et économiques pourrait être particulièrement utile. Cependant, dans beaucoup de pays, on comprend si peu les emplois potentiels des mécanismes et des normes internationales que les groupes n'ont même pas conscience de la valeur d'une telle formation. Dans beaucoup des pays francophones, par exemple, la constitution permet l'application du droit international dans les tribunaux locaux, mais on ne le fait que rarement. Pourtant, au Nigéria, où la Charte Africaine est applicable au même titre que la loi locale, les groupes des droits de l'homme ont réussi à s'instruire eux-mêmes et à informer le judiciaire sur ses applications. En Afrique du Sud on songe maintenant à l'emploi possible des instruments et des procédures des Nations Unies mais pas encore de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. En général, les groupes des femmes en Afrique se sont montrés plus sophistiqués quant à l'emploi de mécanismes internationaux.

Les voies de droit: Il y a un grand potentiel largement inutilisé pour communiquer les stratégies ainsi que la jurisprudence sur les voies de droit pour les droits de l'homme à travers le continent. Ce genre d'échange est développé plus facile et mieux parmi les régions anglophones avec une tradition commune basée sur le droit coutumier. Par contre, les régions francophones offrent un grand potentiel, surtout là où la constitution permet l'application du droit international par traité par les tribunaux nationaux. Généralement, les groupes ne sont pas suffisamment informés sur les expériences des autres, la jurisprudence existante et les stratégies potentielles pour articuler les besoins. Encore une fois, les groupes des femmes constituent une exception limitée, puisqu'ils ont initié des échanges d'idées sur la jurisprudence même à travers les frontières nationales et linguistiques.

Services juridiques: Bien qu'un grand nombre d'organisations en Afrique sub-saharienne offre des consultations juridiques gratuites, la demande dépasse de loin la capacité existante, surtout dans les régions rurales. Un des problèmes majeurs qui se posent à ceux qui se sont engagés pour mettre la consultation juridique à la portée de tous est la pénurie d'avocats prêts à offrir des consultations juridiques gratuites. Dans ce contexte, certaines organisations ont fait appel à des parajuristes--non-avocats formés à fournir une variété de conseils sur les problèmes juridiques--et ceci est devenu un instrument qui permet aux organisations de répondre à la demande que la population leur adresse.

Les besoins de formation dans ce domaine comprennent les techniques nécessaires à la mise en place et à l'administration d'une organisation et à l'emploi d'avocats bénévoles. Il faut apprendre des techniques pour assurer que les services juridiques soient mis à la disposition des populations rurales. Il faut aussi apprendre comment former des individus pour offrir des services efficaces en tant que parajuristes.

La gestion, l'administration et le développement des organisations: En général, il faut renforcer les techniques de gestion et développer et contrôler les structures administratives. Il faut étayer ce développement moyennant la formation de travailleurs spécialisés dans le domaine des droits de l'homme, parce que l'engagement n'est pas suffisant pour la mise en place d'une organisation efficace. Cette rubrique regroupe toute une série de domaines où les organisations africaines des droits de l'homme ont de grands besoins de formation. Les domaines où une telle formation s'impose sont: la formulation d'une mission et d'une stratégie faisable pour développer l'organisation; la mise au point de modèles de gestion qui assurent la responsabilité financière et un esprit démocratique dans la prise des décisions; la sensibilisation sur le rôle des femmes, tant au sein de l'organisation que dans l'exécution de la mission et de la stratégie; la collecte des fonds, à l'échelle nationale et internationale, et la comptabilité et la rédaction de rapports financiers; le développement des communications peu coûteuses, le courrier électronique, par exemple; la connaissance des procédures administratives fondamentales appropriées aux petites organisations non-gouvernementales; des connaissances d'informatique. Cette liste est loin d'être complète, mais ces compétences fondamentales et ces techniques administratives sont généralement indispensables pour le développement des organisations à longue échéance.

Les campagnes publiques et la pression politique: L'efficacité des efforts organisés pour influencer la législation ou l'emploi de campagnes publiques dépend des conditions particulières dans le pays et les groupes des droits de l'homme. Les communiqués de presse, les panneaux et les lobbys qui pourraient être des instruments utiles dans un pays avec un gouvernement relativement stable et une population engagée seraient peu efficaces dans un pays, comme le Za‹re, où ces conditions n'existent pas. La planification ainsi stratégique est donc cruciale, et il est surtout important d'identifier comment les informations peuvent être utilisées avec la plus grande efficacité. Ceci fait, une formation dans les techniques spécifiques applicables aux campagnes pourrait être utile.

La documentation: La documentation, dans une forme ou une autre, est une nécessité pour tous les groupes, qu'il s'agisse de documenter les enquêtes menées par le groupe ou de créer un centre de documentation au service de la communauté. Dans certains pays un groupe déterminé a acquis la capacité d'agir comme centre de documentation pour l'ensemble du mouvement des droits de l'homme. La formation devrait comprendre les techniques de documentation aussi bien que les applications de la documentation.

L'éducation populaire: C'est peut-être le domaine où les groupes africains des droits de l'homme ont la plus grande expérience et expertise, puisque presque tous les groupes sont engagés dans l'éducation sur les droits de l'homme à un niveau ou un autre. Les insuffisances de la formation sont ainsi moindres dans ce domaine, bien que la nécessité de l'éducation populaire sur les droits de l'homme reste énorme. Un échange d'information parmi les groupes africains des droits de l'homme sur les stratégies et les techniques, ainsi qu'un échange de matériel didactique serait très utiles.


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