Dans le préambule de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples adoptée par la 18ème Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement en juin 1981 à Nairobi, les Etats membres de l’Organisation de l’Unité Africaine ont réaffirmé :
leur attachement aux libertés et aux droits de l’homme et des peuples contenus dans les déclarations, conventions, et autres instruments adoptés dans le cadre de l’Organisation de l’Unité Africaine, du mouvement des pays non alignés et de l’Organisation des Nations Unies.”
Dans le même préambule, les Etats africains se sont également engagés “… à coordonner et intensifier leur coopération et leurs efforts pour offrir de meilleures conditions d’existence aux peuples d’Afrique, de favoriser la coopération internationale en tenant compte de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme”.
Afin d’honorer cet engagement, l’article 26 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples stipule que:
“Les Etats parties à la présente Charte ont le devoir de garantir l’indépendance des tribunaux et de permettre l’établissement et le perfectionnement d’institutions nationales appropriées chargées de la promotion et de la protection des droits et libertés garantis par la présente Charte.”
L’utilisation du terme ‘‘permettre’’ suggère non seulement l’encouragement et la promotion de la création d’institutions nationales mais aussi le développement d’une coopération mutuelle afin de promouvoir et d’assurer par l’enseignement, l’éducation et la diffusion, le respect des droits et libertés contenus dans la présente Charte… (article 25).
Les institutions nationales constituent par conséquent un partenaire indispensable dans la mise en œuvre de la Charte au niveau national. Il est à noter que le Plan d’action de Maurice (1996-2001) prévoit, parmi ses activités de promotion, l’organisation d’ateliers sur les institutions nationales. Il envisage également la coopération avec les institutions nationales dans la réalisation de sa mission de promotion et de protection des droits de l’homme et des peuples.
Enfin, le Second Séminaire des Ambassadeurs africains auprès de l’OUA tenu à Addis Abeba, Ethiopie, du 8 au 9 septembre 1998, a reconnu l’importance des institutions nationales et exhorté les gouvernements à leur accorder le soutien nécessaire.
Les Etats africains en général, et la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples en particulier, ont participé activement aux travaux de la Conférence Mondiale sur les Droits de l’Homme tenue à Vienne en juin 1993. La Déclaration et le programme d’action de Vienne ont réaffirmé:
“… le rôle important et constructif joué par les institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme, particulièrement dans leur rôle consultatif auprès des autorités compétentes, ainsi que dans la protection des droits de l’homme et dans la diffusion d’informations et l’éducation sur les droits de l’homme.”
La Conférence mondiale sur les droits de l’homme a également encouragé :
“… la création et le renforcement d’institutions nationales…” et reconnu “… qu’il appartient à chaque Etat de choisir le cadre le mieux adapté à ses besoins particuliers au niveau national…”
Lors de cette Conférence, un statut officiel a été accordé au Comité international de coordination des institutions nationales en tant qu’instrument statutaire de liaison avec le système des Nations Unies. Ce comité organise la rencontre mondiale biennale des institutions nationales.
Au plan international, la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies a approuvé dans sa résolution 1992/54 du 3 mars 1992 sous le titre: “Principes relatifs au statut des institutions nationales”, également appelés principes de Paris, les règles fixant le mandat de ces institutions. L’Assemblée Générale des Nations Unies a approuvé ces principes par sa résolution 48/134 du 20 décembre 1993.
Ces principes visent à garantir l’indépendance dans le fonctionnement de ces institutions et le pluralisme de leur composition. Leur mission principale est de fournir, à titre consultatif, au gouvernement, au parlement et aux autres organes et autorités concernées des avis et recommandations sur toutes questions relatives à la promotion et la protection des droits de l’homme.
Au niveau africain, des institutions nationales ont continué d’être créées, surtout après 1991. L’Afrique compte actuellement plus d’une vingtaine d’institutions nationales des droits de l’homme qui sont représentées au sein du Comité international de Coordination par le Cameroun, le Maroc, l’Afrique du Sud et le Togo.
Lors de la première conférence des institutions nationales africaines des droits de l’homme tenue à Yaoundé, Cameroun, du 5 au 7 février 1996, les participants ont adopté la Déclaration dite de Yaoundé dans laquelle ils se félicitaient de “ la mise en place de nouvelles institutions nationales en Afrique… ” et exprimaient l’espoir “ qu’un statut représentatif approprié auprès de la Commission Africaine leur sera accordé ”. Lors de la Seconde Conférence des Institutions nationales africaines tenue à Durban du 1er au 3 juillet 1998, il a été réitéré la nécessité d’établir des relations claires et d’avoir un statut unique auprès de la Commission Africaine.
Depuis la session de Maurice, la question des institutions nationales africaines des droits de l’homme a été régulièrement inscrite à l’ordre du jour des sessions de la Commission. Une communication à ce sujet a été présentée par le Commissaire K. Rezag Bara lors de la 21ème Session ordinaire (Nouakchott, avril 1997). Il a été décidé, lors de la 22ème Session tenue à Banjul, Gambie, en novembre 1997, de confier aux commissaires K. Rezag Bara et N. Barney Pityana le soin d’élaborer un projet de résolution sur le statut consultatif des institutions nationales au sein de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. L’examen de la question a été renvoyé pour finalisation à la présente session.
En conséquence,
La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples réunie en sa 24eme Session ordinaire à Banjul, Gambie, du 22 au 31 octobre 1998:
Considérant le préambule de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qui réaffirme l’attachement des Etats d’Afrique “ aux libertés et aux droits de l’homme et des peuples contenus dans les déclarations, conventions et autres instruments adoptés dans le cadre de l’Organisation de l’Unité Africaine, du Mouvement des Pays non alignés et de l’Organisation des Nations Unies ” ;
Considérant l’article 26 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qui dispose que : “ les Etats parties à la présente Charte ont le devoir... de permettre l’établissement et le perfectionnement d’institutions nationales appropriées chargées de la promotion et la protection des droits de l’homme ” ;
Considérant les recommandations adoptées dans le Programme d’Action de la Conférence Mondiale sur les Droits de l’Homme à Vienne en juin 1993 ainsi que les résolutions pertinentes des Nations Unies et notamment la résolution 1992/54 du 3 mars 1992 de la Commission des droits de l’homme et la résolution 48/134 du 20 décembre 1993 de l’Assemblée Générale des Nations Unies ;
Considérant les décisions, résolutions et recommandations ainsi que la Déclaration finale adoptées par la première Conférence des institutions nationales africaines des droits de l’homme tenue à Yaoundé (Cameroun) du 5 au 7 février 1996 ; et la seconde Conférence tenue à Durban, Afrique du sud, du 1er au 3 juillet 1998 ;
Convaincue de l’importance du rôle des institutions nationales dans la protection et la promotion des droits de l’homme, ainsi que dans la sensibilisation du public africain à la défense institutionnelle des droits humains ;
1. SE FELICITE de l’intérêt de plus en plus manifesté par les Etats africains pour l’établissement et le renforcement des institutions nationales de protection et de promotion des droits de l’homme, fondées sur le principe de l’indépendance et du pluralisme;
2. RECONNAIT qu’il appartient à chaque Etat d’établir, selon ses prérogatives souveraines et dans un cadre législatif approprié, une institution nationale chargée de la protection et de la promotion des droits de l’homme en application des normes internationales reconnues;
3. NOTE AVEC SATISFACTION la participation significative des institutions nationales africaines aux sessions de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et prend bonne note du souhait exprimé par nombre d’institutions nationales de se voir accorder le statut d’observateur auprès de la Commission;
4. DECIDE d’accorder un statut spécial d’affiliée à toute institution nationale africaine établie en Afrique et fonctionnant suivant les règles internationales reconnues et que;
(a) les critères ci-après déterminent l’octroi du statut d’institutions affiliées :
• l’institution nationale doit être dûment instituée par la loi, la constitution ou par décret;
• elle doit être une institution nationale d’un Etat partie à la Charte Africaine ;
• l’institution nationale doit se conformer aux principes relatifs au statut d’institution nationale également connus sous le nom de Principes de Paris adoptés par l’Assemblée générale des Nations Unies aux termes de la Résolution 48/144 du 20 décembre 1993 ;
• l’institution nationale doit demander officiellement ce statut à la Commission Africaine.
(b) Les droits et obligations ci-après s’attachent au statut d’institution affiliée:
• invitation aux sessions de la Commission Africaine conformément à l’article 6 du Règlement intérieur ;
• participation aux séances publiques de la Commission et de ses organes subsidiaires ;
• participation, sans droit de vote, aux délibérations sur des questions présentant un intérêt pour elles mais avec droit de propositions susceptibles de passer au vote à la demande d’un membre de la Commission.
( c) L’Institution Affiliée doit présenter des rapports à la Commission tous les deux ans sur ses activités de promotion et de protection des droits stipulés dans la Charte ;
(d) L’Institution Affiliée s’engage à assister la Commission dans la promotion et la protection des droits de l’homme au niveau national.