A.G. (nom supprimé) c. Suède, Communication No. 140/1999, U.N. Doc. CAT/C/24/D/140/1999 (2000).
Présentée par : A. G. (nom supprimé)
Au nom de : L'auteur
État partie : Suède
Date de la communication : 14
avril 1999
Le Comité contre la torture ,
institué conformément à l'article 17 de la Convention contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
Réuni le 2 mai 2000,
Adopte la décision suivante :
Décision concernant la recevabilité
1.L'auteur de la communication est
M. A. G., demandeur d'asile d'origine moldove né le 21 mars 1967, qui habite
actuellement en Suède. Il fait valoir que s'il est renvoyé au Moldova il risque
d'être soumis à des tortures et que son retour forcé constituerait une violation
par la Suède de l'article 3 de la Convention. L'auteur n'est pas représenté
par un conseil.
Rappel des faits présentés
par l'auteur
2.1L'auteur explique qu'en décembre 1991,
à la suite du démantèlement de l'Union soviétique et de l'indé pendance de la
République de Moldova, il est devenu militant actif de l'Union des Moldoves
de Transdniestrie. Il a rejoint les rangs de l'armé e d'indépendance de Transdniestrie
en mai 1992 et a reçu une instruction militaire d'abord à Tiraspol puis à Bender
où il a pris part, dans les mois qui ont suivi, à des affrontements armés contre
l'armée moldove. L'auteur aurait été arrêté le 20 juin 1992 par la police moldove,
apparemment pour avoir opposé une résistance armée. L'auteur dit qu'il a réussi
à s'enfuir au bout de quelques jours, profitant de ce que l'armée d'indépendance
de Transdniestrie avait ouvert le feu sur le commissariat.
2.2En août 1992, l'auteur et un grand
nombre de ses compagnons ont déserté l'unité de Bender qui, de l'avis de l'auteur,
était devenue par trop indépendante et provoquait continuellement des affrontements
avec l'armée moldove alors que des pourparlers de paix étaient en cours avec
l'armée d'indépendance de Transdniestrie. L'auteur indique qu'il a été hébergé
; par un de ses amis à Tiraspol pour se cacher, la police moldove et la police
locale de Transdniestrie collaborant aux opérations de recherche des membres
de l'unité des gardes de Bender.
2.3En novembre 1992, l'auteur a de nouveau
été arrê té et conduit à la prison Osjtj 2911 de Balti, dans le nord du pays.
Quelqu'un aurait dit officieusement à l'auteur qu'il avait été arrêté parce
qu'il avait appartenu à l'unité des gardes de Bender, mais il serait resté en
détention pendant près de trois ans sans avoir été jugé. L'auteur affirme que
pendant son incarcération il a subi à maintes reprises des sévices et des traitements
dé gradants. Il dit avoir été frappé par d'autres prisonniers 40 à 50 fois,
au point de perdre connaissance plusieurs fois. Les gardiens de prison non seulement
n'ont rien fait pour empêcher les autres prisonniers de lui infliger ces traitements
mais ils les y poussaient et même l'idée venait d'eux; de temps en temps ils
le plaçaient dans une cell
2.4En août 1993, l'auteur a été condamné
à 13 ans d'emprisonnement, pour trahison, détention illégale d'armes et résistance
à l'arrestation. Deux ans plus tard, en aoû t 1995, il a de nouveau été déféré
devant un tribunal, cette fois en tant que témoin dans une autre affaire et
a réussi à échapper à la vigilance des trois gardiens de prison qui l'accompagnaient
et à prendre la fuite. L'auteur est arrivé en Suède, via l'Ukraine, la Russie
et la Finlande, le 15 décembre 1995, et a demandé l'asile le lendemain.
2.5Le 21 octobre 1996, l'Office de l'immigration
a rejeté la demande de l'auteur. Celuici a fait recours auprès de l'Office
de recours des étrangers, qui l'a débouté le 18 mars 1999 après l'avoir entendu
en audience le 5 fé ;vrier 1999.
Teneur de la plainte
3.Étant donné les faits qu'il a relatés,
l'auteur craint d'être soumis de nouveau à la torture s'il est renvoyé dans
la République de Moldova et affirme que son retour forcé constituerait une violation
par la Suède de l'article 3 de la Convention.
Observations de l'État partie
concernant la recevabilité
4.1Le 22 juin 1999, le Comité a transmis
la communication à l'État partie en le priant de faire part de ses observations.
Dans une réponse datée du 16 août 1999, l'État partie a contesté la recevabilité
de la communication au regard du paragraphe 5 a) de l'article 22 de la Convention.
4.2L'État partie a informé le Comité
que l'auteur s'était adressé le 21 mars 1999 à la Cour européenne des droits
de l'homme au sujet de son expulsion en dé posant une requête qui a été enregistrée
le 3 mai 1999 et sur laquelle la Cour ne s'est pas encore prononcé ;e. L'État
partie estime que le Comité devrait déclarer la communication irrecevable en
application du paragraphe 5 a) de l'article 22 de la Convention, en vertu duquel
le Comité n'examinera aucune communication d'un particulier si la même question
a été examinée ou est en cours d'examen devant une autre instance internationale
d'enquête ou de règlement.
Commentaires de l'auteur concernant
la recevabilité
5.Le 6 septembre 1999, le Comité a transmis
les observations de l'État partie au sujet de la recevabilité pour qu'il fasse
part de ses commentaires. L'auteur n'a fait parvenir aucun renseignement complémentaire
contestant ou confirmant l'objection de l'État partie.
Délibérations du Comité
6.1Avant d'examiner une plainte soumise
dans une communication, le Comité ; contre la torture doit déterminer si la
communication est recevable en vertu de l'article 22 de la Convention.
6.2Étant donné les observations de l'État
partie et vu que l'auteur n'a y pas répondu, le Comité contre la torture a vérifié
luimême qu'une requête avait bien été adressée par l'auteur à la Cour europé
enne des droits de l'homme et avait été enregistrée le 3 mai 1999. Le Comité
relève que la communication que l'auteur lui a adressée a été enregistrée le
22 juin 1999, c'està dire qu'elle était déjà en cours d'examen devant une
autre instance internationale d'enquête ou de règlement.
7.En conséquence, le Comité contre la
torture décide :
a)Que la communication est irrecevable
en vertu du paragraphe 5 a) de l'article 22 de la Convention;
b)Que la présente décision pourra être
reconsidé rée en vertu de l'article 109 du règlement intérieur, si le Comité
est saisi par l'auteur ou en son nom d'une demande é ;crite contenant des renseignements
d'où il ressort que les motifs d'irrecevabilité ne sont plus applicables;
c)Que la présente décision sera communiquée
à l'État partie et à l'auteur.
[Fait en anglais (version originale) et traduit en espagnol, en français et en russe.]