COMITÉ CONTRE LA TORTURE
EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION
Observations du Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne concernant
les conclusions et recommandations du Comité contre la torture
[4 août 2005]
1. Le Comité contre la torture a examiné le troisième rapport périodique de l’Allemagne (CAT/C/49/Add.4) à ses 600 e et 603 e séances (CAT/C/SR.600 et 603), tenues les 7 et 10 mai 2004, et a adopté ses conclusions et recommandations (CAT/C/CR/32/7) le 11 juin 2004. Dans ce document (par. 6), il a demandé à la République fédérale d’Allemagne de lui présenter, dans un délai d’un an, des informations sur la suite donnée à ses recommandations figurant aux alinéas a, b, e et f du paragraphe 5. Les renseignements pertinents sont fournis ci-après.
2. Les conclusions et recommandations du Comité ont été distribuées aux ministères fédéraux compétents et aux Länder fédéraux en anglais ainsi que dans leur traduction allemande. Tout comme le troisième rapport périodique de l’Allemagne, elles sont accessibles sur le site Internet du Ministère fédéral de la justice (www.bmj.bund.de).
3. Le 1 er novembre 2004, l’Institut allemand des droits de l’homme a organisé une réunion de suivi sur les conclusions et recommandations du Comité. Outre des représentants des ministères fédéraux compétents, des collaborateurs de la Commissaire fédérale pour les migrations, les réfugiés et l’intégration (Beauftragte der Bundesregierung für Migration, Flüchtlinge und Integration), des fonctionnaires du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et des représentants d’organisations non gouvernementales telles qu’Amnesty International, PRO ASYL et l’antenne allemande de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) ont également participé à cette réunion.
4. Ces conclusions et recommandations ainsi que les recommandations d’autres comités de l’ONU ont également été examinées par la Commission des droits de l’homme et de l’aide humanitaire du Bundestag (Parlement) lors d’une réunion organisée le 10 novembre 2004.
Recommandation formulée à l’alinéa a du paragraphe 5 (sect. D)
5. Le Comité recommande que la République fédérale d’Allemagne
«a) … prenne toutes les mesures voulues pour faire en sorte que les plaintes pénales déposées contre les autorités chargées d’appliquer la loi soient traitées diligemment pour qu’il soit possible de se prononcer rapidement sur les allégations formulées et éviter toute inférence d’impunité, y compris dans les cas où des contre-accusations ont été portées;».
6. Dans ses réponses aux questions posées par le Comité sur le troisième rapport périodique, le Gouvernement allemand a indiqué que, parfois, les lenteurs de l’enquête et des poursuites contre des agents de l’État n’étaient pas dues à des insuffisances fondamentales dans la façon dont sont menées les poursuites pénales en Allemagne, mais plutôt à l’accumulation de problèmes particuliers à chaque cas d’espèce.
7. Sur la centaine d’affaires de mauvais traitements recensées par les organisations non gouvernementales (voir Amnesty International: «Back in the spotlight – Allegations of police ill‑treatment and excessive use of force in Germany» (La police une fois de plus sous les feux des projecteurs: allégations de mauvais traitements et d’abus de pouvoir en Allemagne), article publié en janvier 2004 qui portait sur la période 1998-2003, et AKTION COURAGE: «Police Attacks on Foreigners in Germany 2000-2003» (Brutalités policières contre les étrangers en Allemagne pendant la période 2000-2003)), 69 affaires ont été jugées en première instance en mai 2004, dont 15 ont débouché sur des condamnations pénales au paiement de dommages‑intérêts ou à des peines d’emprisonnement.
8. Cependant, le Gouvernement fédéral est conscient qu’à part les cas nombreux dans lesquels les activités des organes chargés de l’application des lois sont au-dessus de tout reproche, il arrive que l’enquête et les poursuites pénales ne soient menées à terme qu’après un laps de temps considérable, sans qu’on puisse trouver la cause de ces lenteurs dans les étapes de la procédure. Souvent, les difficultés liées à l’établissement des preuves ralentissent le déroulement de la procédure mais il n’en reste pas moins que les organes chargés des poursuites et les tribunaux devraient avoir davantage conscience du fait que les autorités responsables doivent répondre de leurs actes dans les meilleurs délais s’agissant de ce type d’infractions.
9. Les ministères fédéraux compétents et les Länder fédéraux (qui sont responsables de l’organisation de la police, des parquets et des tribunaux) ont donc été informés de la recommandation à l’examen et priés de faire en sorte que le ministère public agisse avec fermeté lorsque des informations faisant état de mauvais traitements ou de violences commises par des agents de l’État parviennent à sa connaissance.
10. Dans ce but, le Gouvernement fédéral a mis l’accent en particulier sur les aspects suivants:
a) Le fait de traduire en justice ces agents de l’État pour qu’ils répondent de leurs actes ou omissions fait passer un message indiquant sans équivoque que leur comportement n’est pas toléré. Ce type de message a un impact dissuasif considérable et permet en outre de montrer au public que nul ne saurait être au-dessus des lois, pas même ceux qui sont chargés de la faire respecter;
b) Les infractions disciplinaires commises par des fonctionnaires devraient être régulièrement examinées;
c) La lutte contre les mauvais traitements doit commencer au sein des départements concernés. Pour ce faire, des mesures positives doivent être prises en dispensant une formation au personnel et en l’encourageant à adopter un comportement exemplaire afin de promouvoir un état d’esprit selon lequel les mauvais traitements et les violences ne sauraient être tolérés et sont considérés comme inadmissibles;
d) Comme les tribunaux sont indépendants, ils sont libres de décider de la peine à appliquer selon le cas d’espèce, compte tenu des critères fixés dans la loi. Cependant, le meilleur examen de la législation pénale n’a que peu d’utilité si la peine prononcée n’est pas assez sévère par rapport aux mauvais traitements qu’elle sanctionne. Si l’existence de mauvais traitements est avérée, une peine adéquate doit être imposée. De même, une fois que le tribunal a établi qu’une infraction disciplinaire a été commise, il devrait prononcer une peine proportionnelle à la gravité des actes;
e) Enfin, le quatorzième rapport du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), qui date du 21 septembre 2004, a été distribué aux ministères fédéraux compétents et aux Länder. Dans le chapitre de ce document consacré à la lutte contre l’impunité, le CPT examine de manière approfondie les problèmes soulevés par le Comité contre la torture dans la recommandation à l’examen. Les départements et Länder fédéraux en ont reçu une traduction allemande.
11. Le Comité recommande que la République fédérale allemande
«b) … crée un centre de regroupement à l’échelle nationale des données et informations statistiques sur les domaines visés par la Convention, demande de telles données et informations aux autorités des Länder ou prenne toute autre mesure nécessaire pour assurer que les autorités ainsi que le Comité disposent de toutes ces données et informations lorsqu’ils examinent la manière dont l’État partie s’est acquitté de ses obligations au titre de la Convention;».
12. Le Gouvernement fédéral s’emploie à donner suite à cette recommandation en amplifiant le système existant de collecte de données afin, en particulier, de disposer de données utiles sur la question des plaintes pour mauvais traitements déposées contre des agents de l’État.
13. Il existe de nombreuses statistiques en Allemagne sur les activités des parquets et des tribunaux ainsi que sur les procédures pendantes ou menées à terme, notamment les suivantes:
a) Statistiques de la criminalité établies par la police. Ces statistiques, qui sont publiées pour l’ensemble du pays par le Bureau fédéral de la police criminelle, portent sur les infractions qui sont du ressort de la police, y compris les tentatives d’infractions engageant la responsabilité pénale de leur auteur. Les infractions administratives, les atteintes à la sécurité et les infractions routières n’y figurent pas. Les données sont classées par affaires, suspects et, pour certaines infractions, victimes. Ces statistiques ne sont toutefois pas ventilées par catégories de délinquants (par exemple, aucune distinction n’est faite entre les membres de la police et les enseignants s’agissant des lésions corporelles infligées par un employé de l’État dans l’exercice de ses fonctions, telles que définies au paragraphe 340 du Code pénal (Strafgesetzbuch));
b) Statistiques des parquets. Ces statistiques sont établies par les différents parquets et sont publiées chaque année par l’Office fédéral de la statistique pour l’ensemble du pays et pour chacun des Länder. Elles contiennent des données sur les affaires traitées par les parquets et sont ventilées selon divers critères, notamment la façon dont les poursuites ont été ouvertes, leur issue et leur durée. Les résultats de l’instruction sont évalués au regard de la procédure, d’une part, et des personnes, à savoir les suspects, d’autre part. Depuis 2004, les procédures intentées contre le personnel des organes judiciaires, les juges, les notaires et d’autres fonctionnaires et contre les avocats ayant commis des infractions pénales dans l’exercice de leur profession (à l’exception des délits de corruption) sont incluses dans la liste des codes correspondant à des domaines d’étude et prises en compte dans les statistiques;
c) Statistiques des activités judiciaires. Les statistiques des activités des juridictions pénales sont établies par les diverses instances judiciaires et sont publiées chaque année par l’Office fédéral de la statistique pour l’ensemble du pays et pour chacun des Länder. Elles contiennent des données sur le nombre et l’issue des procédures pénales et des actions tendant à obtenir l’imposition d’une amende. En ce qui concerne les procédures menées à terme, la manière dont la procédure a été engagée et son issue ainsi que le nombre et la durée des principales audiences et de l’ensemble de la procédure sont consignés. Depuis 2004, les éléments constitutifs de l’infraction sont inclus dans les fiches utilisées pour la collecte de données grâce à un code de domaine prévoyant 30 possibilités de classement thématique de la procédure. Cependant, ni les suspects, ni les plaignants ne sont rangés dans des catégories spécifiques. Depuis 2004, les procédures intentées contre les employés des organes judiciaires, les juges, les notaires et d’autres fonctionnaires et contre les avocats ayant commis des infractions dans l’exercice de leur profession (à l’exception des délits de corruption) sont incluses dans la liste des codes correspondant à des domaines d’étude et prises en compte dans les statistiques;
d) Statistiques des poursuites pénales. Les statistiques des poursuites pénales publiées par l’Office fédéral de la statistique portent sur tous les accusés contre lesquels une condamnation définitive à une peine légère a été prononcée ou dont l’affaire a été close après l’ouverture de la procédure principale, en vertu respectivement d’un jugement ou d’une décision suspendant la procédure. Les infractions administratives, les décisions antérieures à l’ouverture de la procédure principale et les décisions rendues après que la décision définitive a été prononcée ne figurent pas dans ces statistiques. Les informations destinées aux statistiques des poursuites pénales sont vérifiées par les services de statistique des Länder et sont compilées par l’Office fédéral de la statistique en vue de l’établissement des statistiques nationales.
14. Le Gouvernement fédéral a pris en compte la recommandation du Comité tout d’abord dans le cadre d’une initiative visant à établir de nouvelles statistiques de la police sur la criminalité, qui ne pourra toutefois pas être lancée avant le 1 er janvier 2006. Contrairement au système actuel, davantage de codes seront utilisés pour saisir les infractions pénales. Par exemple, s’agissant des éléments constitutifs de l’infraction en cas de lésions corporelles infligées par un agent de l’État dans l’exercice de ses fonctions (art. 340 du Code pénal), il est prévu de préciser le lieu où se sont produits les faits. En spécifiant le lieu de l’infraction («bâtiment public/locaux de la police» ou «bâtiment public/prison»), il sera possible de récolter davantage de renseignements à partir des statistiques se rapportant à l’article 340 du Code pénal qui concernent les catégories d’auteurs d’infractions.
15. Quant à la modification ou à l’expansion des statistiques sur les poursuites pénales et les activités judiciaires, le Gouvernement fédéral compte sur la participation des Länder. Le Comité des statistiques judiciaires des services judiciaires des Länder, qui relève de la conférence des ministres de la justice, décide des modifications à apporter. Le Ministère fédéral de la justice participe aux réunions annuelles de ce comité et peut formuler des recommandations mais n’a toutefois pas le droit de vote. Dans la mesure où le comité approuve l’une de ces recommandations, des modifications ne sont apportées aux instructions figurant sur les fiches de collecte de données que deux ans au plus tôt à compter du jour où elles ont été approuvées.
16. Le Comité recommande que la République fédérale d’Allemagne
«e) … indique au Comité combien de cas d’extradition ou de renvoi subordonné à l’obtention d’assurances ou de garanties diplomatiques ont été recensés depuis le 11 septembre 2001, quelles sont les exigences minimales de l’État partie en ce qui concerne l’étendue de ces assurances ou garanties et quelles sont les mesures de suivi qu’il a prises dans de tels cas;».
a) Remarques préliminaires. Il est impossible de revenir sur toutes les affaires d’extradition survenues depuis le 11 septembre 2001 dans lesquelles des assurances ou des garanties diplomatiques ont été demandées étant donné leur nombre considérable. En effet, le Ministère fédéral de la justice en traite des centaines par année, si l’on ne compte que les demandes émanant d’États non membres de l’Union européenne. Sur ce total, entre 80 et 90 extraditions ont été approuvées en 2002 et 2003. Cependant, aucune variation notable des statistiques n’a été constatée par rapport aux années antérieures aux événements du 11 septembre 2001. Afin de donner au Comité une idée de l’approche actuelle de l’Allemagne s’agissant des conditions minimales prévues dans les assurances ou les garanties diplomatiques demandées en cas d’extradition, la pratique adoptée en la matière en avril et mai 2005 est décrite ci-après à l’alinéa c à titre d’exemple;
b) Distinction entre les États membres de l’Union européenne (UE) et les États non membres. En principe, l’Allemagne distingue les extraditions vers les États membres de celles vers les États non membres. Dans le premier cas, aucune garantie particulière n’est demandée. Lorsqu’il existe un traité spécial d’extradition avec un État non membre, certaines garanties sont généralement déjà fixées, de sorte que des assurances supplémentaires ne sont demandées ou des conditions appliquées que dans des cas exceptionnels. L’Allemagne a conclu des traités spéciaux d’extradition avec quatre États non membres de l’Union européenne. S’agissant des autres États, la Convention européenne d’extradition de 1957 ou le Traité d’extradition conclu par l’Allemagne et le Royaume-Uni en 1872 s’appliquent. Quant aux États non membres avec lesquels l’Allemagne n’a pas conclu de traité d’extradition, les autorités allemandes demandent des assurances concrètes lorsque les circonstances de l’affaire l’exigent;
c) Conditions minimales prévues dans les assurances ou les garanties diplomatiques demandées aux États non membres de l’Union européenne. L’approche adoptée par la République fédérale d’Allemagne s’agissant des conditions minimales requises prévues dans les assurances ou les garanties diplomatiques demandées en cas d’extradition est décrite ci-après sur la base des affaires traitées en avril et mai 2005. Pendant cette période, 18 autorisations d’extradition ont été accordées à des États non membres de l’UE, et pour 10 d’entre elles des assurances concernant les conditions de détention ont été obtenues. Le contenu des assurances n’est pas le même selon que l’État requérant a adhéré ou non à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Si l’État requérant y est partie, il est prié de placer la personne qui lui a été remise dans un centre de détention conforme aux dispositions de ladite Convention et aux Règles pénitentiaires européennes concernant le traitement des détenus adoptées le 12 février 1987. Si tel n’est pas le cas, l’Allemagne lui demande de lui fournir l’assurance qu’après son transfert, l’individu sera placé dans un établissement pénitentiaire où les conditions de détention sont conformes à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus voire à des normes plus strictes encore. Si nécessaire, l’État requérant est prié de fournir l’assurance que des fonctionnaires du consulat allemand pourront rendre visite à l’individu extradé dans l’établissement où il sera détenu. Quant aux questions d’extradition qui ne sont pas réglées par un traité, la République fédérale d’Allemagne exige les garanties suivantes:
i) Seules les mesures qui ne pouvaient être exécutées que lorsque l’individu réclamé se trouverait dans le pays, raison pour laquelle la demande d’extradition a été acceptée, seront appliquées pour punir l’intéressé, restreindre sa liberté individuelle ou le poursuivre;
ii) L’individu réclamé ne pourra être extradé, transféré ou expulsé vers un État tiers qu’avec l’accord des autorités allemandes;
iii) Tout procès intenté contre l’intéressé devra se dérouler dans le respect des normes internationales et des principes fondamentaux relatifs aux droits de l’homme;
iv) La peine qu’encourt l’intéressé ne devra pas être alourdie pour des raisons d’ordre politique, militaire ou religieux;
v) Enfin, la période pendant laquelle l’individu aura été détenu en Allemagne avant son extradition sera déduite de la durée de la peine.
Le cas échéant, la République fédérale d’Allemagne demande avec insistance à l’État requérant de lui garantir que la peine capitale ne sera pas prononcée contre l’individu après son extradition ou, sinon, qu’elle ne sera pas appliquée et de lui fournir ces assurances par écrit, sous forme de déclaration officielle du Gouvernement. Elle est en mesure de vérifier si ces engagements sont respectés grâce au personnel de ses ambassades et de ses consulats qui, par exemple, peuvent participer aux audiences des tribunaux en tant qu’observateurs et se rendre dans les centres de détention;
d) Assurances ou garanties diplomatiques en cas d’expulsion du territoire. Les assurances et garanties que les personnes expulsées seront traitées dans le respect des droits de l’homme n’entrent en ligne de compte que dans le cadre de la levée des obstacles à l’expulsion et seulement en combinaison avec d’autres critères. Les conditions fixées dans les assurances diplomatiques demandées en cas d’expulsion ne sont pas établies abstraitement mais plutôt en fonction des circonstances particulières de l’affaire. À une exception près, depuis le 11 septembre 2001, il ne s’est produit aucun cas d’expulsion dans lequel des assurances diplomatiques aient été demandées.
17. Le Comité a recommandé que la République fédérale d’Allemagne
«f) … explique au Comité i) si tous les moyens de porter plainte et les voies de recours judiciaire (y compris par le biais de la reconnaissance par l’État de sa responsabilité pour les actes de ses agents) dont il est possible de se prévaloir contre les autorités chargées d’appliquer la loi concernent aussi les employés des sociétés privées engagées par l’État pour maintenir la sécurité; et ii) quel type de formation est fourni à ces employés sur les questions visées par la Convention;».
18. Dans la question n o 7 de la liste des points à traiter soumise avant la présentation du troisième rapport périodique de l’Allemagne et dans ses questions complémentaires posées lors de la 600 e séance du Comité, le 7 mai 2004, le Comité a demandé des renseignements sur le centre de rétention des demandeurs d’asile de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main. À ce sujet, à l’alinéa e du paragraphe 4 (sect. C) de ses conclusions et recommandations, le Comité s’est dit préoccupé par le contrôle juridique des sociétés privées utilisées pour assurer la sécurité dans certains locaux de détention à l’aéroport international de Francfort-sur-le-Main et la formation dispensée à leur personnel. La recommandation correspondante est formulée à l’alinéa f du paragraphe 5 (sect. D).
19. Les explications ci-après portent uniquement sur le centre de rétention des demandeurs d’asile (le «centre de rétention de la Hesse») de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main, étant donné que le Gouvernement fédéral n’a pas connaissance que d’autres institutions publiques aient fait une telle démarche.
Tâches et activités de la société privée de sécurité
20. La société privée de sécurité qui travaille au centre de rétention de la Hesse de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main a été engagée par le Land fédéral de Hesse, qui a pris cette initiative de son propre chef, sans que le Gouvernement fédéral ait exercé une influence sur sa décision. Le Land de Hesse a été circonspect dans le choix de la société privée de sécurité qu’il a engagée et lui a imposé d’emblée des conditions et des obligations à respecter pour être autorisée à exercer ses activités. Il lui a clairement fait comprendre que le centre de rétention de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main était un établissement sensible dont le statut était particulier et que le personnel devait agir de manière adaptée. La société qui a été retenue a respecté ces exigences. Par choix délibéré, les membres de son personnel sont de diverses nationalités. Leurs pouvoirs et responsabilités sont définis dans des instructions écrites, qui prévoient que les employés ne peuvent avoir que des fonctions générales de surveillance (par exemple, contrôle et accompagnement des visiteurs, services téléphoniques, rondes d’inspection dans les locaux d’hébergement). Ils ne portent pas d’arme et ont un uniforme ordinaire.
21. Leurs tâches sont réparties entre une équipe de jour composée de trois gardes, dont une femme, qui travaille de 7 heures à 19 heures, et une équipe de nuit, composée de deux gardes et d’une employée chargée de dispenser des soins aux demandeurs d’asile hébergés dans le centre de rétention, ce qui permet d’assurer la prise en compte des besoins spécifiques des femmes qui s’y trouvent.
22. En outre, le personnel de l’administration du Land de Hesse est représenté au centre de rétention de l’aéroport grâce à la présence de quatre travailleurs sociaux qualifiés, qui assurent un suivi continu des personnes qui y sont logées. En outre, les demandeurs d’asile bénéficient de soins médicaux et d’un soutien spirituel.
23. Pendant la journée, la société chargée de la sécurité est supervisée par les travailleurs sociaux présents. En outre, des inspections non annoncées sont effectuées à des intervalles irréguliers aussi bien par les supérieurs des employés que par le directeur du centre (qui est un fonctionnaire de l’administration du Land).
24. Pour ce qui est des questions techniques et disciplinaires, le personnel de la société privée de sécurité est placé sous l’autorité du directeur du centre de rétention de l’aéroport de Francfort, ce qui permet donc de garantir constamment que les services de sécurité exécutent correctement les tâches qui leur incombent.
25. L’accord entre le Land fédéral de Hesse et la société privée de sécurité prévoit en outre des critères qualitatifs que le personnel de la sécurité doit remplir. En particulier, les employés sont spécifiquement formés à accomplir leur travail dans le contexte difficile du centre de rétention.
Possibilités d’intenter une action en réparation contre un employé de la société privée de sécurité
26. En cas de faute professionnelle ou de violences commises par un membre du personnel de la société chargée de la sécurité, la responsabilité pénale de l’employé concerné est engagée. Les victimes peuvent se prévaloir des dispositions prévues dans la législation pénale générale, ce qui est également valable dans d’autres cas. Dans l’éventualité où des employés de la société privée de sécurité commettraient des infractions pénales, notamment s’ils infligent des lésions corporelles ou des violences à des personnes hébergées au centre de rétention de l’aéroport de Francfort, les victimes auraient la possibilité de demander au ministère public d’ouvrir des poursuites en portant plainte. Dans les cas où, en vertu du Code pénal, il n’est pas nécessaire de déposer une plainte, des poursuites pénales sont ouvertes d’office par le parquet.
27. Selon le Gouvernement fédéral, les membres du personnel de la société privée chargée de la sécurité au centre de rétention de l’aéroport de Francfort ne sont pas des agents de l’État au sens de l’alinéa 1 de l’article 11 du Code pénal, ce qui a pour seule conséquence que les articles 331 et suivants du Code pénal traitant des infractions particulières commises par un agent de l’État dans l’exercice de ses fonctions ne sont pas applicables. Toutefois, étant donné que, comme indiqué précédemment, les autres dispositions du Code pénal sont applicables sans restriction, la législation n’est pas lacunaire pour ce qui est des poursuites pénales.