Observations finales du Comité contre la Torture, Guatemala, U.N. Doc. A/51/44, paras. 42-57 (1996).
Convention Abbreviation: CAT
COMITÉ CONTRE LA TORTURE
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 19 DE LA CONVENTION
Conclusions et recommandations du Comité contre la torture
Guatemala
42. Le Comité a examiné le rapport initial du Guatemala (CAT/C/12/Add.5 et 6)
à ses 232e et 233e séances, le 16 novembre 1995 (voir CAT/C/SR.232 et 233/Add.1
et 3) et a adopté les conclusions et recommandations suivantes.
1. Introduction
43. Le Comité remercie le Gouvernement guatémaltèque de son rapport. Il a écouté
par ailleurs avec intérêt l'exposé oral instructif fait par la délégation guatémaltèque.
Il tient à la remercier de ses réponses et de l'esprit d'ouverture et de coopération
dont elle a fait preuve dans le cadre du dialogue avec le Comité.
2. Aspects positifs
44. Le Comité se félicite de l'honnêteté et de la franchise avec laquelle le
Gouvernement reconnaît dans le rapport que des cas de torture se produisent
au Guatemala.
45. Le Comité estime que le processus de paix engagé par le Gouvernement guatémaltèque
et la coopération de ce dernier avec l'Organisation des Nations Unies sont des
signes de progrès.
46. Le Comité accueille avec satisfaction les réformes juridiques entreprises
par l'État partie, notamment l'incorporation de la définition de la torture
et des peines associées à ce délit dans le droit pénal. Le Comité note également
avec plaisir que le Gouvernement guatémaltèque a modifié le Code de procédure
pénale de façon à y introduire la question des violations des droits de l'homme
et qu'il a aboli les auxiliaires militaires.
47. Le Comité se félicite aussi de la création de divers organes ayant pour
fonction de renforcer le respect des droits de l'homme, notamment le Bureau
du Procureur des droits de l'homme, la Commission présidentielle de coordination
de la politique du pouvoir exécutif en matière de droits de l'homme et les commissions
nationales des droits de l'homme.
48. Le Comité prend note avec satisfaction de l'attachement du Guatemala à l'éducation
dans le domaine des droits de l'homme.
49. Le Comité est heureux d'apprendre que le Guatemala a entamé la procédure
en vue de faire la déclaration prévue à l'article 22 de la Convention et que
ses représentants ne voient aucun obstacle qui puisse l'empêcher de faire cette
déclaration.
3. Facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention
50. Le Comité reconnaît que le Guatemala est dans une situation difficile dans
la mesure où il est gêné dans son action par une culture profondément enracinée
dans les traditions militaires et policières.
51. Le Comité relève également que la distribution très inégale des richesses
économiques dans le pays peut être une source d'affrontement entre les organes
chargés de l'application des lois et les couches de la population qui se trouvent
tout au bas de l'échelle économique et sociale. Il rappelle à cet égard que
la procédure de recours individuel prévue à l'article 22 de la Convention constituerait
une mesure utile de prévention une fois que le Gouvernement l'aura acceptée.
52. Le Comité est d'avis que le droit qu'ont les citoyens de porter des armes
à feu, qui est consacré par la Constitution, peut être considéré comme un obstacle
potentiel à la pleine application de la Convention.
4. Sujets de préoccupation
53. Le Comité constate avec une vive inquiétude que la torture et d'autres traitements
cruels, inhumains et dégradants semblent être un phénomène endémique au Guatemala
et que de nombreux enfants font partie des victimes.
54. Le Comité est également préoccupé par le fait que le Gouvernement n'a toujours
pas fait le nécessaire pour que ces actes de torture et ces mauvais traitements
fassent l'objet d'une enquête rapide et impartiale et pour que les responsables
soient punis.
55. L'impunité de fait des auteurs d'actes de torture qui résulte de cette inaction
et la faiblesse dont font preuve les autorités judiciaires, administratives
et policières dans l'application de la loi sont de même jugées très préoccupantes
par le Comité.
56. Le Comité s'inquiète aussi du fait qu'il existe toujours au Guatemala des
groupes paramilitaires et des patrouilles de défense privées.
5. Recommandations
57. Le Comité recommande au Gouvernement guatémaltèque de prendre les mesures
suivantes :
a) Renforcer, de manière plus sensible, les activités du Bureau du Procureur
des droits de l'homme;
b) Mettre sur pied des programmes intensifs de formation technique à l'intention
des policiers, des membres du ministère public et des juges;
c) Fournir aux responsables de l'application des lois les moyens et les ressources
matérielles dont ils ont besoin pour remplir leurs fonctions;
d) Adopter des mesures permettant une coordination efficace entre la police
et le ministère public;
e) Protéger les témoins, les juges et les membres du ministère public qui ont
fait l'objet de menaces et d'actes d'intimidation;
f) Prendre des sanctions sévères à l'encontre des agents publics qui n'appliquent
pas la loi comme ils sont tenus de le faire;
g) Abolir les comités volontaires de défense civique;
h) Modifier les dispositions juridiques concernant les juridictions militaires
afin de limiter la compétence des juges militaires aux seules infractions militaires;
i) Réduire les permis de port d'armes au strict minimum.