COMITÉ CONTRE LA TORTURE
Trente-cinquième session
7-25 novembre 2005
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION
Conclusions et recommandations du Comité contre la torture
Népal
1. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Népal (CAT/C/33/Add.6) à ses 669 e et 672 e séances (CAT/C/SR.669 et 672), les 9 et 10 novembre 2005 et a adopté, à sa 687 e séance, le 22 novembre 2005, les conclusions et recommandations ci‑après.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Népal et se félicite de l’occasion qui lui est ainsi offerte de reprendre ses échanges avec l’État partie. Tout en appréciant le dialogue constructif instauré avec la délégation de l’État partie, le Comité note que le rapport n’est pas totalement conforme aux Directives pour l’élaboration des rapports périodiques et qu’il y manque des informations sur les aspects pratiques de l’application de la Convention.
3. Le Comité prend connaissance avec intérêt des renseignements complémentaires fournis par l’État partie par écrit en réponse à la liste des points à traiter (CAT/C/35/NPL) et par la délégation dans ses observations préliminaires et dans ses réponses aux questions soulevées.
B. Aspects positifs
4. Le Comité se félicite de l’adoption de la loi de 1996 sur l’indemnisation en cas de torture et de la loi de 1997 portant création d’une commission des droits de l’homme, qui visent à favoriser la mise en œuvre de la Convention.
5. Le Comité prend note de la mise en place d’un certain nombre de mécanismes de coordination et de surveillance en matière de droits de l’homme, comme la Commission nationale des droits de l’homme, la Commission nationale pour les femmes et la Commission nationale dalit, le Comité de la protection des droits de l’homme et le Comité national de coordination, ainsi que de cellules des droits de l’homme au sein de la police, de la Force de police armée et de l’Armée royale népalaise.
6. Le Comité accueille également avec satisfaction l’accord passé entre l’État partie et le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) le 11 avril 2005, portant sur la création d’un bureau du HCDH au Népal. Il se félicite de la coopération suivie de l’État partie avec le bureau du HCDH au Népal.
7. Le Comité note que l’État partie a reçu la visite de membres des procédures spéciales ci‑après de la Commission des droits de l’homme:
a) Groupe de travail sur la détention arbitraire, en 1996;
b) Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, en 2000;
c) Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, en 2004;
d) Représentant du Secrétaire général pour les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, en 2005; et
e) Rapporteur spécial sur la question de la torture, en 2005.
8. Le Comité salue la générosité dont a fait preuve l’État partie en accueillant plus de 100 000 réfugiés bhoutanais et de 20 000 réfugiés tibétains.
9. Le Comité se réjouit également de la signature par l’État partie, le 8 septembre 2000, du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.
C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention
10. Le Comité est conscient de la situation difficile que connaît l’État partie du fait du conflit armé interne et s’alarme du grand nombre d’atrocités commises par le Parti communiste népalais (CPN) maoïste. Il fait observer toutefois qu’aucune circonstance exceptionnelle quelle qu’elle soit ne peut être invoquée pour justifier la torture.
11. Le Comité déplore que l’absence de parlement, depuis mai 2002, nuise à la capacité de l’État partie de mettre en œuvre la Convention, et en particulier d’adopter ou de modifier des lois, ainsi que de ratifier des instruments internationaux.
D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Définition
12. Le Comité constate avec préoccupation que la définition de la torture figurant à l’alinéa a du paragraphe 2 de la loi de 1996 sur l’indemnisation en cas de torture, l’absence de disposition légale dans le droit interne en vigueur visant à ériger la torture en infraction pénale et le projet de code pénal ne sont pas en accord avec la définition de l’article premier de la Convention contre la torture (art. 1 et 4 de la Convention).
L’État partie devrait adopter une législation interne qui garantisse que les actes de torture, y compris les tentatives, la complicité et la participation à de tels actes, soient érigés en infractions pénales sanctionnées par des peines proportionnées à la gravité des infractions commises, et envisager de prendre des mesures pour modifier la loi de 1996 sur l’indemnisation en cas de torture afin de la rendre conforme à tous les éléments de la définition de la torture figurant dans la Convention. L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements sur la jurisprudence nationale relative à la définition de la torture selon l’article premier de la Convention.
Pratique généralisée de la torture
13. Le Comité est vivement préoccupé par le nombre anormalement élevé de rapports concordants et fiables faisant état d’une pratique généralisée de la torture et de mauvais traitements par les agents des forces de l’ordre, et en particulier par l’Armée royale népalaise, la Force de police armée et la police, et par l’absence de mesures visant à garantir une protection réelle à tous les membres de la société (art. 2 et 11).
L’État partie devrait condamner publiquement la pratique de la torture et prendre des mesures concrètes pour empêcher les actes de torture sur tout territoire dépendant de sa juridiction. Il devrait également prendre toutes les mesures nécessaires, selon qu’il conviendra, pour protéger tous les membres de la société des actes de torture.
Détention
14. Le Comité s’inquiète également:
a) Du nombre de détenus en détention prolongée sans jugement au titre de la loi sur la sécurité publique et de l’ordonnance sur la prévention et la répression des actes terroristes et subversifs de 2004;
b) Du recours généralisé à la détention avant jugement, pour une durée pouvant aller jusqu’à quinze mois, et de l’absence, au titre de l’ordonnance sur la prévention et la répression des actes terroristes et subversifs de 2005, de garanties fondamentales concernant le respect des droits des personnes privées de liberté, y compris du droit de contester l’arrestation, qui se traduit par de nombreux cas présumés de détention au secret.
L’État partie devrait rendre la pratique de la détention avant jugement conforme aux normes internationales en matière de droits de l’homme et veiller à ce que les droits fondamentaux des personnes privées de liberté soient garantis, y compris le droit à l’habeas corpus, le droit d’informer un proche et le droit de consulter un avocat et un médecin de leur choix. Il devrait veiller à ce que toute mesure prise pour lutter contre le terrorisme soit conforme aux dispositions des résolutions 1373 (2001) et 1566 (2004) du Conseil de sécurité, qui exigent que les mesures antiterroristes soient appliquées dans le respect total, entre autres, du droit international relatif aux droits de l’homme, y compris la Convention. L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements sur le nombre de personnes encore en détention avant jugement.
Commission nationale des droits de l’homme
15. Tout en reconnaissant le rôle important joué par la Commission nationale des droits de l’homme dans la promotion et la protection des droits de l’homme au Népal, le Comité est préoccupé par la fréquente inapplication par l’État partie des recommandations de la Commission.
L’État partie devrait prendre les mesures nécessaires pour soutenir la Commission nationale des droits de l’homme dans ses activités, en veillant à ce que ses recommandations soient pleinement mises en œuvre.
Indépendance de l’appareil judiciaire
16. Le Comité se déclare préoccupé par la perte d’indépendance et d’efficacité marquée de l’appareil judiciaire dans l’État partie et par le non‑respect flagrant des décisions judiciaires par les membres des forces de sécurité qui, semble‑t‑il, arrêtent à nouveau les mêmes personnes, et ce y compris dans les locaux de la Cour suprême.
L’État partie devrait tout mettre en œuvre pour garantir l’indépendance de son appareil judiciaire, notamment en veillant à ce que les forces de sécurité respectent les décisions judiciaires. Il devrait fournir au Comité des renseignements sur la composition, le mandat, les méthodes de travail et les enquêtes de la Commission royale de lutte contre la corruption, et indiquer notamment si celle‑ci est compétente pour les questions constitutionnelles en totale conformité avec les dispositions de la Convention et si ses décisions peuvent faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Les mêmes informations sont demandées à l’État partie en ce qui concerne les comités de coordination du secteur de la justice.
Non‑refoulement
17. Le Comité déplore l’absence de législation nationale énonçant les droits des réfugiés et des demandeurs d’asile, et note avec préoccupation que l’État partie n’a pas adhéré à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés ni aux instruments juridiques internationaux connexes. Le Comité est également préoccupé par des allégations concernant le refoulement de demandeurs d’asile tibétains, étant donné le caractère absolu de l’interdiction de refoulement au titre de l’article 3 de la Convention (art. 3).
Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’adhérer à la Convention relative au statut des réfugiés et aux instruments juridiques internationaux connexes. Il recommande également à l’État partie de se doter d’une législation visant à interdire le refoulement de personnes sans procédure légale appropriée. L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements sur le nombre de cas d’extradition, de déplacement, de reconduite à la frontière, de retour forcé et d’expulsion qui ont eu lieu depuis 1994, ainsi que des renseignements sur le nombre de cas où la reconduite à la frontière n’a pas été effectuée par crainte de torture.
Compétence universelle
18. Le Comité déplore l’absence de compétence universelle dans la législation interne en ce qui concerne les actes de torture, ainsi que le fait que certaines dispositions du projet de Code pénal ne soient pas conformes aux articles 5 à 9 de la Convention.
L’État partie devrait prendre les mesures nécessaires pour garantir que les actes de torture relèvent de la compétence universelle au titre du projet de Code pénal, conformément à l’article 5 de la Convention. Il devrait également tout mettre en œuvre pour veiller au respect des articles 6 à 9 de la Convention.
Formation sur l’interdiction de la torture
19. Tout en reconnaissant les efforts faits par l’État partie pour former et informer les agents de l’État en matière d’interdiction de la torture, le Comité regrette l’absence d’informations sur les effets de tels efforts d’éducation et de formation. Le Comité est également préoccupé par des rapports faisant état d’un raccourcissement de la formation des officiers et des nouvelles recrues de l’Armée royale népalaise (art. 10).
L’État partie devrait intensifier ses efforts d’éducation et de formation relatives à l’interdiction de la torture et mettre en place des mécanismes d’évaluation et de surveillance pour en mesurer les effets.
Interrogatoires et détention
20. Le Comité est profondément troublé par les allégations fiables et persistantes selon lesquelles les forces de sécurité auraient souvent recours à des méthodes d’interrogatoire interdites par la Convention (art. 11).
L’État partie doit garantir que les agents des forces de l’ordre ne recourent en aucune circonstance à des méthodes d’interrogatoire interdites par la Convention. De plus, l’État partie devrait communiquer au Comité des renseignements sur les mesures adoptées pour revoir les règles, les instructions, les méthodes et les pratiques en matière d’interrogatoire applicables par les agents des forces de l’ordre et lui en fournir des exemples.
21. Le Comité est préoccupé par:
a) Le nombre de prisonniers en détention provisoire dans les lieux d’incarcération;
b) Le recours systématique aux casernes pour les détenus en attente de jugement ou en détention provisoire;
c) L’absence d’enregistrement systématique et officiel des arrestations et des détentions;
d) Une disposition de la loi de 1996 sur l’indemnisation en cas de torture qui donne pouvoir à l’officier concerné, dans un lieu de détention, de procéder à l’examen médical d’un détenu lors de son arrestation et de sa libération, lorsqu’il n’y a pas de médecin. En particulier, le Comité s’inquiète de rapports selon lesquels les examens médicaux effectués au moment de l’arrestation et de la libération ne seraient pas faits dans les règles;
e) De graves allégations faisant état d’un recours persistant à la détention au secret et le manque d’informations sur le nombre exact de lieux et d’établissements de détention;
f) Des allégations de non‑respect des ordonnances d’habeas corpus délivrées par les tribunaux;
g) L’absence de système judiciaire pour mineurs opérationnel, les enfants étant souvent soumis aux mêmes procédures, lois et violations que les adultes. En particulier, le Comité est préoccupé par des allégations selon lesquelles des enfants sont détenus au titre de l’ordonnance sur la prévention et la répression des actes terroristes et subversifs pendant de longues périodes.
En conséquence, l’État partie devrait:
a) Prendre les mesures nécessaires pour réduire la détention avant jugement chaque fois que c’est possible;
b) Transférer immédiatement tous les détenus vers des lieux de détention légaux et conformes aux normes internationales minimales;
c) Prendre immédiatement des mesures pour veiller à ce que toutes les arrestations et les détentions soient systématiquement enregistrées, en particulier s’agissant de mineurs. L’État partie devrait envisager de créer un registre central des personnes privées de liberté auquel les inspecteurs nationaux et internationaux auraient accès;
d) Envisager de modifier la section pertinente de la loi de 1996 sur l’indemnisation en cas de torture, afin de garantir que tous les détenus subissent un examen médical adéquat au moment de leur arrestation et de leur libération;
e) Interdire le recours à la détention au secret. Le Comité recommande que les personnes détenues au secret soient libérées, ou inculpées et jugées dans le cadre d’une procédure régulière. L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements sur le nombre exact et la localisation des lieux et des établissements de détention utilisés par l’Armée royale népalaise, la Force de police armée et la police, ainsi que sur le nombre de personnes privées de liberté;
f) Prendre des mesures pour garantir le respect par les forces de sécurité de toutes les décisions judiciaires des tribunaux, y compris celles d’habeas corpus;
g) Prendre les mesures nécessaires pour protéger les mineurs de violations de la Convention et garantir le bon fonctionnement d’un système judiciaire pour mineurs conforme aux normes internationales, leur accordant un traitement en rapport avec leur âge.
Surveillance systématique de tous les lieux de détention
22. Le Comité est préoccupé par l’absence de surveillance systématique efficace de tous les lieux de détention, notamment de visites régulières inopinées de ces lieux par des inspecteurs nationaux et internationaux.
L’État partie devrait envisager d’instaurer un système national visant à surveiller tous les lieux de détention et à donner suite aux résultats de cette surveillance systématique.
23. Le Comité est également préoccupé par le fait qu’à plusieurs reprises, des inspecteurs nationaux et internationaux se sont vu refuser l’accès à des lieux de détention ou n’ont pas bénéficié d’une coopération suffisante lors de leurs missions d’information. Le Comité s’inquiète en outre de l’adoption du nouveau Code de conduite des organisations non gouvernementales qui, entre autres dispositions, limitera considérablement les possibilités de surveillance par les ONG.
Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de modifier le Code de conduite des organisations non gouvernementales afin qu’il corresponde aux normes internationales en matière de droits de l’homme en ce qui concerne la protection des défenseurs des droits de l’homme. L’État partie devrait veiller à ce que les inspecteurs nationaux et internationaux soient autorisés à effectuer des visites régulières, indépendantes, inopinées et non soumises à restriction dans tous lieux de détention. L’État partie devrait faciliter les visites, par exemple, du Comité international de la Croix-Rouge, du HCDH, de la Commission nationale des droits de l’homme et des ONG nationales et internationales.
Impunité
24. Le Comité est préoccupé par le climat d’impunité qui règne en ce qui concerne les actes de torture et les mauvais traitements et par les allégations persistantes d’arrestations sans mandat, d’exécutions extrajudiciaires, de décès en détention et de disparitions (art. 12).
L’État partie devrait faire savoir clairement et sans ambiguïté à toutes les personnes et à tous les groupes sous sa juridiction qu’il condamne la torture et les mauvais traitements. Il devrait prendre des mesures législatives, administratives et judiciaires efficaces pour veiller à ce que toutes les allégations d’arrestations sans mandat, d’exécutions extrajudiciaires, de décès en détention et de disparitions donnent rapidement lieu à des enquêtes, des poursuites et des sanctions. En ce qui concerne les présomptions de cas de torture, les suspects devraient être suspendus de leurs fonctions ou mutés pendant la durée des investigations.
25. Tout en prenant acte de la création de cellules des droits de l’homme au sein des forces de sécurité, le Comité s’inquiète de l’absence d’organisme indépendant susceptible d’enquêter sur les actes de torture et les mauvais traitements commis par des agents des forces de l’ordre.
L’État partie devrait créer un organisme indépendant chargé d’enquêter sur les actes de torture et les mauvais traitements commis par des agents des forces de l’ordre. Il devrait fournir au Comité des renseignements sur le mandat, le rôle, la composition et la jurisprudence des tribunaux spéciaux de police.
Groupes ou castes marginalisés et défavorisés
26. Malgré la reconnaissance par l’État partie de l’existence d’une discrimination de caste dans le pays et la création de la Commission nationale dalit, le Comité est profondément préoccupé par la persistance de pratiques discriminatoires profondément ancrées et commises à large échelle à l’égard de groupes ou de castes marginalisés et défavorisés, comme les Dalits. Le Comité s’inquiète également du fait que la pratique de discrimination de caste, qui est très ancienne, soit renforcée par le conflit que connaît actuellement le pays.
Le Comité réaffirme qu’il est du devoir de l’État partie de protéger tous les membres de la société, en particulier les citoyens appartenant aux groupes ou aux castes marginalisés et défavorisés, comme les Dalits. L’État partie devrait prendre des mesures spécifiques pour préserver leur intégrité physique, veiller à ce que des mécanismes de responsabilité soient mis en place pour garantir que l’appartenance à une caste n’ouvre pas la porte à des violences, à des détentions illégales et à la torture, et prendre des mesures pour assurer une représentation plus diversifiée des castes et des ethnies dans ses forces de police et de sécurité. L’État partie devrait donner des informations sur la discrimination de caste dans son prochain rapport périodique.
Violence fondée sur le sexe
27. Le Comité est préoccupé de la persistance des allégations de violences fondées sur le sexe et d’atteintes sexuelles sur des femmes et des enfants en détention, notamment d’actes de violence sexuelle commis par des agents des forces de l’ordre.
L’État partie devrait veiller à mettre en place des procédures pour surveiller le comportement des agents des forces de l’ordre et ouvrir sans délai des enquêtes impartiales sur tous les cas de torture et de mauvais traitements, y compris de violences sexuelles, en vue de traduire les responsables en justice. L’État partie devrait fournir au Comité une liste des cas de violence fondée sur le sexe et d’atteintes sexuelles sur des femmes et des enfants en détention qui ont été instruits et jugés et dont les auteurs ont été punis.
Droit de porter plainte
28. Le Comité est préoccupé par:
a) Le fait que la charge de la preuve incombe aux victimes d’actes de torture selon les dispositions de la loi de 1996 sur l’indemnisation en cas de torture et que le délai pour déposer plainte pour acte de torture et engager une procédure d’indemnisation en vertu de la loi sur la sécurité publique et de l’ordonnance sur la prévention et la répression des actes terroristes et subversifs est de 35 jours;
b) Des allégations de représailles et d’intimidation à l’égard de personnes dénonçant des actes de tortures, sous forme de nouvelles arrestations et de menaces, et de l’absence de législation et de mécanismes portant sur la protection des témoins.
En conséquence, l’État partie devrait:
a) Tenir à la disposition des victimes de torture les conclusions de toute enquête indépendante afin de les aider à introduire une demande d’indemnisation. L’État partie devrait modifier sa législation actuelle et à venir de façon à ce qu’il n’y ait plus de délai pour l’enregistrement de plaintes pour acte de torture et que les actions en indemnisation puissent être engagées dans les deux ans à compter de la parution des conclusions de l’enquête;
b) Envisager d’adopter des mesures législatives et administratives pour la protection des témoins, garantissant que toutes les personnes dénonçant des actes de torture ou des mauvais traitements soient protégées comme il convient.
Indemnisation des victimes de torture
29. Tout en reconnaissant que le système judiciaire a rendu un certain nombre de décisions d’indemnisation, le Comité regrette que jusqu’à présent, des indemnités n’aient été versées que dans une seule affaire. En outre, le Comité est préoccupé par les retards injustifiés dans le versement des indemnités octroyées par les tribunaux ou la Commission nationale des droits de l’homme (art. 14).
L’État partie devrait veiller à ce que les indemnités accordées par les tribunaux ou décidées par la Commission nationale des droits de l’homme soient versées en temps opportun. Il devrait fournir au Comité des renseignements sur le montant total des indemnités versées aux victimes de torture.
Utilisation de déclarations obtenues par la torture
30. Le Comité s’inquiète d’allégations selon lesquelles des déclarations obtenues par la torture seraient utilisées comme preuves dans des procédures judiciaires (art. 15).
L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements à la fois sur la législation et sur la jurisprudence qui interdisent que les déclarations obtenues par la torture soient admises comme preuves.
Mauvais traitements
31. Le Comité est préoccupé par des allégations de mauvaises conditions de détention, en particulier de surpeuplement et de manque d’hygiène, de personnel et de soins médicaux pour les détenus (art. 16).
Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour améliorer les conditions de détention.
Traite d’êtres humains
32. Le Comité est préoccupé par des rapports persistants faisant état de traite de femmes et d’enfants et de l’implication présumée d’agents de l’État dans ces actes.
L’État partie devrait renforcer les mécanismes internationaux de coopération en vue de lutter contre la traite d’êtres humains, poursuivre les auteurs de tels actes et offrir protection et réparation à toutes les victimes.
Enfants soldats
33. Le Comité est préoccupé par des allégations selon lesquelles des enfants seraient utilisés par les forces de sécurité comme espions et messagers. Le Comité est également préoccupé par les informations selon lesquelles des enfants seraient recrutés et enlevés par le CPN-maoïste (art. 16).
L’État partie devrait prendre des mesures efficaces pour empêcher les forces de sécurité d’utiliser des enfants comme espions et messagers. Il devrait également prendre toutes les mesures nécessaires, de toute urgence et de façon complète, pour empêcher l’enlèvement d’enfants par le CPN-maoïste et pour faciliter la réinsertion des anciens enfants soldats dans la société. L’État partie devrait également envisager de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.
34. Le Comité recommande également à l’État partie d’étudier la possibilité:
a) De faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention;
b) De devenir partie au Protocole facultatif se rapportant à la Convention;
c) De devenir partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale;
d) De devenir partie au Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole III).
35. L’État partie devrait fournir au Comité des renseignements sur la composition, le mandat, les méthodes de travail du Comité de la protection des droits de l’homme, du Comité national de coordination pour la protection et la promotion des droits de l’homme, des cellules des droits de l’homme instaurées au sein de la Police, de l’Armée royale népalaise et de la Force de police armée, ainsi que sur leurs enquêtes et les résultats qu’ils ont obtenus.
36. Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données statistiques détaillées sur les cas de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants signalés aux autorités administratives et sur les enquêtes, poursuites et sanctions pénales et disciplinaires, y compris avec des précisions sur les procès en cour martiale, ces données étant ventilées notamment par sexe, origine ethnique, caste, région géographique et par type et situation géographique des établissements de privation de liberté le cas échéant, et mettant particulièrement l’accent sur les mineurs en détention. Des renseignements sont également demandés sur les mesures d’indemnisation et les services de réadaptation offerts aux victimes.
37. L’État partie est encouragé à diffuser largement son deuxième rapport périodique ainsi que les conclusions et recommandations du Comité, dans les langues voulues, en recourant aux sites Web officiels et aux médias et aux organisations non gouvernementales.
38. Le Comité demande à l’État partie de lui adresser, dans le délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations contenues dans les paragraphes 13, 14, 21 b), 21 c), 21 e), 25, 27 et 29 ci-dessus.
39. L’État partie est invité à soumettre son prochain rapport périodique, qui sera considéré comme un rapport unique valant troisième à cinquième rapports, avant le 12 juin 2008, date d’échéance du cinquième rapport périodique.
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