Observations finales du Comité contre la Torture, Pologne, U.N. Doc. A/52/44, paras. 95-110 (1996).
Convention Abbreviation: CAT
COMITÉ CONTRE LA TORTURE
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 19 DE LA CONVENTION
Conclusions et recommandations du Comité contre la torture
E. Pologne
95. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de la Pologne (CAT/C/25/Add.9)
à ses 276e, 277e et 279e séances, tenues les 20 et 21 novembre 1996 (voir CAT/C/SR.276,
277 et 279), et a adopté les conclusions et recommandations suivantes :
1. Introduction
96. Le Comité remercie l'État polonais de son rapport et lui est reconnaissant
d'avoir une fois encore engagé un dialogue fructueux et constructif avec le
Comité. Malgré le retard pris par l'État pour la présentation de son deuxième
rapport périodique, celui-ci correspond aux exigences de la Convention et aux
directives générales arrêtées par le Comité concernant la forme et le contenu
des rapports.
2. Aspects positifs
97. La Pologne est l'un des premiers pays de l'Est qui a amorcé très tôt de
profondes mutations et réformes dans tous les domaines : économique, politique,
social et législatif; elle a ratifié la Convention de sauvegarde des droits
de l'homme et des libertés fondamentales, la Convention contre la torture et
autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que d'autres
instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le Comité note avec
satisfaction les progrès accomplis dans le combat contre les différentes formes
de torture.
3. Facteurs et difficultés entravant la mise en oeuvre de la Convention
98. Le Comité constate que la plupart des réformes évoquées, tant dans le rapport
écrit que dans la présentation orale, restent encore à l'état de
projet.
4. Principaux sujets de préoccupations
99. Le Comité s'inquiète de certaines insuffisances liées aux textes en vigueur
pour combattre la torture. En effet, la législation interne ne comporte pas
de définition de la torture, telle que l'exigent les articles 1er et 4 de la
Convention. Par ailleurs, rien ne permet au Comité, en l'état des textes, de
dire si l'obéissance à une autorité hiérarchique légitime est considérée comme
un fait susceptible d'être invoqué pour justifier la commission d'un acte de
torture.
100. Le Comité s'inquiète également que la législation polonaise permette des
durées de détention préventive qui pourraient se révéler excessives.
101. Le Comité déplore l'existence, dans la législation polonaise, de textes
qui permettent l'utilisation de la force physique, notamment sur les mineurs.
102. Enfin, le Comité déplore le fait qu'un rapport supplémentaire, qui contient
pourtant des renseignements intéressants, n'ait été porté à la connaissance
de ses membres qu'au cours de la séance de présentation du rapport périodique.
5. Recommandations
103. Le Comité réitère au Gouvernement polonais la recommandation faite en novembre
1993 à l'issue de l'examen de son rapport initial, à savoir, l'incorporation
dans la législation interne de la définition de la torture, de manière à couvrir
intégralement tous les éléments de la définition prévue à l'article premier
de la Convention.
104. Le Comité recommande également au gouvernement de poursuivre ses efforts
pour entreprendre d'autres réformes législatives et il recommande que les nombreux
projets de textes dont la délégation a fait état soient adoptés et promulgués.
105. Dans cette perspective, le Comité recommande que les réformes juridiques
introduisent la possibilité d'un contrôle judiciaire formel, effectif et concret
de la constitutionnalité, de la garde à vue et de la détention préventive, en
vue de mettre en oeuvre les dispositions de la Convention.
106. Le Comité recommande également au Gouvernement d'intensifier son programme
de formation de tous les personnels chargés de l'application des lois, y compris
les médecins.
107. Le Comité recommande d'entreprendre et de faire diligenter des enquêtes
objectives sur les agissements des forces de maintien de l'ordre, pour établir
la véracité des allégations d'actes de torture et, dans les cas où les résultats
sont positifs, de faire traduire les auteurs devant les tribunaux.
108. Le Comité recommande que la période de détention préventive soit raccourcie
et que la possibilité de la prolonger pendant deux ans soit abolie.
109. Le Comité recommande que les déclarations obtenues directement ou indirectement
sous la torture ne soient pas invoquées comme éléments de preuve devant les
juridictions. Il recommande d'envisager l'abolition dès que possible des normes
qui permettent l'usage de la force physique, quel que soit le motif.
110. Le Comité estime enfin que la probabilité de la commission d'actes de torture
et d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, serait limitée si,
pendant les 48 heures de garde à vue, les suspects avaient facilement accès
à un avocat, un médecin ou un membre de la famille.