228. Le Comité a examiné le rapport initial et les deuxième et troisième rapports périodiques combinés d'Antigua-et-Barbuda (CEDAW/C/ANT/1-3) à ses 340e, 341e et 348e séances les 10 et 16 juillet 1997 (voir CEDAW/C/SR.340, 341 et 348).
229. Dans sa déclaration liminaire, la représentante de l'État partie a indiqué qu'Antigua-et-Barbuda était devenu partie à la Convention le 31 août 1989, et avait alors pleinement intégré cette dernière dans sa législation nationale. Elle a noté que le rapport dont était saisi le Comité avait été présenté en 1994 et que d'importants progrès concernant la mise en oeuvre de la Convention avaient été réalisés depuis lors. Un additif avait par conséquent été présenté au Comité pour actualiser le rapport.
230. La représentante a indiqué que le Bureau de la condition féminine était devenu en 1985 une Direction des affaires féminines chargée de promouvoir les intérêts sociaux, politiques et économiques des femmes et leur développement. S'inspirant du Programme d'action de Beijing, la Direction était convenue d'axer en priorité ses efforts sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes, l'éducation et la formation, l'élimination de la pauvreté, la participation de davantage de femmes au processus de prise de décisions et le développement de programmes de santé en général et de santé en matière de reproduction en particulier destinés tout particulièrement aux jeunes femmes. Afin de s'acquitter des engagements pris tant sur le plan international que régional, la Direction prévoyait notamment afin qu'il soit tenu compte des questions relatives aux femmes dans l'ensemble des départements/divisions du Gouvernement, d'organiser un atelier de formation auquel participeraient des responsables ministériels, agents de collectivités locales, des ONG et des chefs de départements. Elle avait également revu son plan d'action national pour les affaires féminines. La Direction avait récemment organisé un forum visant à mieux faire connaître la Convention et se proposait d'offrir des cours destinés aux femmes en vue de les encourager à jouer un rôle dans la vie politique et la prise de décisions.
231. La représentante a noté que plusieurs grandes réformes juridiques avaient été adoptées, étaient en train de l'être, ou étaient prévues. La loi sur les atteintes aux moeurs de 1995 et la loi sur les pensions alimentaires étaient maintenant en vigueur. Le projet de loi sur la famille (Protection contre la violence au sein de la famille) qui prévoyait des mesures de protection ainsi que d'autres mesures concernant l'occupation du domicile conjugal, serait examiné en 1997 et la loi sur l'égalité des chances serait présentée dans un avenir proche.
232. La représentante a informé le Comité que les stéréotypes sexuels demeuraient un problème à Antigua-et-Barbuda. On reconnaissait dans l'enseignement qu'il était nécessaire de lutter contre les stéréotypes et c'était la raison pour laquelle les établissements scolaires offraient les mêmes disciplines et la même formation à leurs élèves des deux sexes. On était toutefois conscient que la socialisation au sein du foyer et de la société dans son ensemble poussaient les garçons et les filles à choisir des formations traditionnelles même lorsqu'ils disposaient de toute une gamme d'options. Les garçons étaient davantage dirigés vers des filières techniques et les filles vers l'enseignement ménager. Les ministères de l'éducation, de la santé et du travail offraient des programmes d'éducation à la vie familiale afin de promouvoir un partage égal des responsabilités entre les hommes et les femmes pour ce qui est de la socialisation des enfants et des soins à leur apporter. La violence dans la famille, le harcèlement sexuel, les violences sexuelles, les voies de fait et le viol étaient fréquents et ne faisaient guère l'objet de plaintes, de nombreux hommes estimant que ce type de conduite était acceptable. La représentante a noté qu'une ligne téléphonique concernant la violence au sein de la famille fonctionnant 24 heures sur 24 devait être mise en place en août 1997 par la Direction, en collaboration avec un certain nombre d'organisations non gouvernementales et le secteur privé.
233. La représentante a informé le Comité qu'un certain nombre de mesures avaient été prises pour permettre aux adolescentes enceintes de poursuivre leur éducation : entretiens avec les pères, selon que de besoin, programmes d'alphabétisation fonctionnelle, formation professionnelle, classes destinées aux jeunes parents, éducation à la vie familiale, notamment à la planification de la famille et concernant le VIH/sida.
234. La représentante a indiqué que bien que les femmes constituent la majorité des électeurs à Antigua-et-Barbuda, leur participation politique restait faible et que des stratégies et plans d'action seraient mis au point pour renverser cette tendance.
235. La représentante a informé le Comité que le taux de mortalité périnatale était élevé chez les femmes d'Antigua-et-Barbuda. Elle a noté que l'avortement était illégal dans le pays, même s'il était permis de mettre un terme à une grossesse pour des raisons médicales.
236. Le Comité a été informé que les femmes constituaient une partie importante de la population agricole d'Antigua-et-Barbuda. Bien qu'elles ne fassent pas l'objet d'une discrimination directe, les exploitantes agricoles étaient en général à la tête d'exploitations dont la superficie était plus de deux fois inférieure à celles de leurs collègues masculins et elles assumaient souvent de multiples responsabilités. La Direction des affaires féminines fournissait formation et appui aux exploitantes agricoles.
237. La représentante a indiqué que la loi sur le divorce de 1997 disposait que l'altération profonde du lien conjugal constituait le seul motif de divorce et permettait de divorcer après un an de mariage. Dans certains cas, les hommes pouvaient être condamnés pour violences sexuelles contre leur femme. La représentante a toutefois noté que les femmes non mariées étaient désavantagées sur le plan juridique.
238. La représentante a réaffirmé la ferme volonté d'Antigua-et-Barbuda d'éliminer la discrimination à l'égard des femmes et de mettre en oeuvre la Convention et le Programme d'action de Beijing. Elle a indiqué que cette volonté s'était manifestée à l'occasion des préparatifs de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes et de la participation du pays à la Conférence et se reflétait dans le rapport d'Antigua-et-Barbuda dont était saisi le Comité.
Conclusions du Comité
Introduction
239. Le Comité a constaté avec satisfaction qu'Antigua-et-Barbuda avait ratifié la Convention sans exprimer de réserves. Il a félicité l'État partie de son rapport, considérant que c'était un petit État insulaire aux ressources limitées.
240. Par ailleurs, le Comité a félicité l'État partie de son exposé honnête et approfondi et de la communication de son additif qui, même si elle est intervenue tardivement, au moment où la représentante a pris la parole, présentait un tableau complet de l'application de la Convention à Antigua-et-Barbuda. Le Comité a constaté avec plaisir qu'il existait dans le pays une volonté politique manifeste d'améliorer la condition de la femme.
241. Le Comité s'est toutefois déclaré déçu que le rapport ne contienne aucune information sur la mise en oeuvre de la Plate-forme d'action et des mesures prises par l'État partie pour donner suite aux recommandations générales qu'il avait formulées.
Aspects positifs
242. Le Comité a félicité Antigua-et-Barbuda d'avoir créé le Bureau de la condition féminine peu après avoir acquis son indépendance et l'avoir transformé par la suite en une Direction des affaires féminines. Il a également félicité le Gouvernement de son intention de rehausser encore le statut de cette direction en l'élevant au rang de ministère, lorsqu'une femme serait élue à ce poste.
243. Le Comité s'est félicité de l'entrée en vigueur de lois importantes, notamment la loi sur l'égalité des chances, la loi sur le divorce et la loi sur les atteintes aux moeurs. Il attendait avec intérêt les résultats de la mise en application des projets de lois sur l'égalité de rémunération et la violence au sein de la famille, et a noté avec satisfaction qu'Antigua-et-Barbuda s'était inspiré du modèle de législation élaboré par la Communauté des Caraïbes (CARICOM).
244. Le Comité a félicité l'État partie des mesures qu'il avaient prises avec succès pour réduire la natalité.
245. Le Comité a noté avec satisfaction la mise en place de systèmes de gestion des problèmes spécifiques des hommes et des femmes.
246. Le Comité a approuvé les assurances données par le Président qui a annoncé qu'il redresserait les inégalités en ce qui concerne le partage du pouvoir aux niveaux de décision les plus élevés.
247. Le Comité s'est déclaré satisfait de la mise en place d'un numéro d'appel d'urgence en cas de violence au sein de la famille et de services d'appui connexes.
248. Le Comité s'est félicité des mesures prises pour s'attaquer au problème des grossesses précoces et de la place privilégiée faite à la situation de la petite fille.
Facteurs et difficultés affectant l'application de la Convention
249. Le Comité a noté qu'Antigua-et-Barbuda, qui est un petit État insulaire, se trouvait, semblait-il, handicapé par un manque de ressources financières et humaines pour rassembler les données statistiques, ce qui pourrait faire obstacle à la mise en oeuvre complète de la Convention.
Principaux sujets de préoccupation
250. Le Comité a noté avec préoccupation que peu de dispositions avaient été prises pour accroître la participation des femmes à la vie politique. Il a constaté qu'il n'y avait pas de femmes au Parlement et qu'il n'existait aucune mesure visant à accroître la participation des femmes à la vie publique en général.
251. Le Comité s'est déclaré préoccupé par l'absence de mesures concertées pour lutter contre la violence à l'égard des femmes.
252. Le Comité a noté l'absence de pouvoir de décision de la Direction des affaires féminines.
253. Le Comité a constaté avec préoccupation l'absence d'informations, dans le rapport, sur la prostitution et la traite des femmes.
254. Le Comité a également noté avec préoccupation que les étudiantes continuaient de choisir des sujets stéréotypés. Il s'est aussi inquiété du fait que le système scolaire dirigeait davantage les filles vers un enseignement ménager et les garçons vers les filières techniques.
255. Le Comité s'est déclaré préoccupé par la faible représentation des femmes instruites et la domination des hommes dans les domaines techniques et professionnels, d'une part, et par la concentration des femmes dans le secteur des services où les salaires sont relativement bas, notamment dans l'industrie du tourisme, d'autre part.
256. Le Comité a noté que les problèmes spécifiques aux femmes n'avaient pas encore été pris en compte dans le plan quinquennal national.
257. Le Comité s'est également inquiété de la situation des femmes des campagnes et leurs possibilités d'accès au crédit.
258. Le Comité a par ailleurs noté avec préoccupation que l'avortement était toujours illégal, ce qui conduit à des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité. Il s'est également déclaré préoccupé par le fait qu'il n'existait pas de programmes d'éducation en matière de planification familiale et que les contraceptifs n'étaient pas pris en charge dans les régimes d'assurance médicale.
259. Le Comité s'est déclaré profondément préoccupé par la forte proportion de grossesses chez les adolescentes.
260. Le Comité s'est inquiété de la forte mortalité périnatale.
261. Le Comité a noté qu'il n'y avait aucune mesure particulière en faveur des femmes atteintes du VIH/sida ni aucune mesure de lutte contre la toxicomanie dans la population féminine. Il a exprimé l'espoir que le prochain rapport apporterait plus d'informations à ce sujet.
262. Le Comité s'est déclaré préoccupé par la situation des femmes au regard du droit coutumier.
Suggestions et recommandations
263. Le Comité a recommandé que la Direction des affaires féminines soit élevée à un rang supérieur et renforcée.
264. Le Comité a suggéré d'intégrer les questions liées aux distinctions fondées sur le sexe dans le plan quinquennal.
265. Le Comité a suggéré que le Gouvernement d'Antigua-et-Barbuda ait recours à l'article 4 de la Convention pour accélérer l'égalité de fait des femmes.
266. Le Comité a recommandé que le Gouvernement d'Antigua-et-Barbuda encourage une plus grande participation des femmes à la vie politique en adaptant à titre temporaire des mesures spéciales.
267. Le Comité a suggéré qu'Antigua-et-Barbuda mette en place des politiques et programmes appropriés d'éducation sexuelle et d'éducation en matière de planification familiale.
268. Le Comité a recommandé qu'Antigua-et-Barbuda ratifie la Convention No 100 de l'Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur égale et prenne les mesures nécessaires pour l'appliquer.
269. Le Comité a recommandé la mise en place des programmes visant à encourager les hommes à tenir compte de leurs responsabilités familiales.
270. Le Comité a considéré que la culture était un bon support de promotion de la femme. Il a suggéré à cet égard d'utiliser des formes d'art culturelles comme moyen de préconiser le respect à l'égard des femmes. Il a également suggéré de faire appel aux médias pour favoriser un état d'esprit positif à l'égard de la femme.
271. Le Comité a engagé le Gouvernement d'Antigua-et-Barbuda à inclure dans son prochain rapport des informations plus détaillées aux obstacles qui continuent d'empêcher les femmes à exercer pleinement leurs droits fondamentaux, en particulier en ce qui concerne l'article 6 de la Convention et la situation juridique et économique des femmes en cas de mariage coutumier.
272. Le Comité a demandé que les présentes conclusions fassent l'objet d'une large diffusion à Antigua-et-Barbuda afin que chacun sache bien quelles sont les mesures qui ont été prises pour assurer une égalité de fait entre les hommes et les femmes, et soit conscient de toute autre mesure nécessaire à cet égard.