CEDAW/C/BLR/CO/7
Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes
Distr. générale
6 avril 2011
Français
Original: anglais
Comité pour l’élimination de la discrimination
à l’égard des femmes
Quarante-huitième session
17 janvier-4 février 2011
Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination à l’égard des femmes
Bélarus
1.Le Comité a examiné le septième rapport périodique du Bélarus (CEDAW/C/BLR/7) à ses 973e et 974e séances, le 27 janvier 2011 (CEDAW/C/SR.973 et 974). La liste des questions et points correspondante a été publiée sous la cote CEDAW/C/BLR/Q/7, et les réponses du Gouvernement bélarussien à ces questions sous la cote CEDAW/C/BLR/Q/7/Add.1.
A.Introduction
2.Le Comité félicite l’État partie pour la présentation de son septième rapport périodique, qui est détaillé et conforme dans l’ensemble aux directives du Comité relatives à l’établissement des rapports et qui comprend une section contenant des informations sur la mise en œuvre des recommandations figurant dans les précédentes observations finales du Comité (CEDAW/C/BLR/4-6). Le rapport, cependant, fournit peu de statistiques ventilées par sexe et de données qualitatives sur la situation des femmes dans plusieurs domaines couverts par la Convention, en particulier sur la situation des femmes appartenant à des groupes défavorisés. Le Comité exprime ses remerciements à l’État partie pour son exposé oral, pour les réponses écrites à la liste des questions et des points soulevés par le Groupe de travail d’avant-session du Comité et pour les explications complémentaires données en réponse aux questions posées oralement par le Comité.
3.Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, conduite par la Ministre du travail et de la protection sociale et composée de représentants de divers ministères et services gouvernementaux. Le Comité se félicite du dialogue constructif qui s’est tenu entre la délégation et les membres du Comité, tout en notant que certaines questions sont restées sans réponse.
B.Aspects positifs
4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié le 3 février 2004 le Protocole facultatif se rapportant à la Convention et a adhéré en 2006 au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.
5.Le Comité se félicite de l’adoption et de la mise en œuvre, depuis l’examen du précédent rapport, de plusieurs mesures législatives visant à réaliser l’égalité de droit et de fait entre les sexes, à savoir:
a)Les amendements apportés au Code du mariage et de la famille, en vertu de la loi no 164-3 du 20 juin 2006, concernant l’égalité des époux dans les relations familiales;
b)Les amendements apportés au Code du travail, en vertu de la loi no 272-Z du 20 juillet 2007, prévoyant un congé parental payé et d’autres moyens devant permettre aux pères de participer à l’éducation des enfants;
c)L’instauration de prestations familiales supplémentaires, en vertu notamment du décret présidentiel du 14 février 2006 et de la décision no 271 du Conseil des ministres du 1er mars 2007.
6.Le Comité prend note avec satisfaction des mesures adoptées par l’État partie pour prévenir et combattre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des filles, à savoir:
a)Les décrets présidentiels no 3 du 9 mars 2005 sur les mesures propres à lutter contre la traite des êtres humains et no 352 du 8 août 2005 sur la prévention des conséquences de la traite des êtres humains;
b)L’introduction dans le Code pénal et le Code des infractions administratives de peines plus sévères pour les actes de traite et les infractions connexes, en vertu de la loi no 15-3 du 4 mai 2005;
c)L’adoption, en application du décret présidentiel no 624 du 6 décembre 2007, du Programme national de lutte contre la traite des êtres humains, les migrations illégales et les actes illégaux connexes pour 2008-2010, qui vise à réduire les délits liés à la traite, à protéger et réadapter les victimes et à renforcer la coopération internationale dans le domaine de la lutte contre la traite des êtres humains.
7.Le Comité se félicite de constater que le pourcentage des femmes à la Chambre des représentants atteint 31,8 % depuis les élections législatives de 2008, et que le pourcentage des femmes élues aux conseils d’administration locale atteint 45 %.
8.Le Comité constate avec satisfaction que les services de santé maternelle et infantile, notamment les services pré et postnatals, sont de bonne qualité dans l’État partie, où les naissances sont dans la grande majorité des cas assistées par un personnel médical qualifié, ce qui a contribué à une nouvelle diminution du taux de mortalité infantile.
C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations
9. Le Comité rappelle que l’État partie est tenu de mettre en œuvre de manière systématique et continuelle l’ensemble des dispositions de la Convention et considère que les sujets de préoccupation et les recommandations exposés dans les présentes observations finales requièrent de la part de l’État partie une attention prioritaire d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Le Comité prie donc instamment l’État partie de privilégier les domaines correspondants dans ses activités de mise en œuvre et de rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises et des résultats qu’il aura obtenus. Il demande à l’État partie de transmettre les présentes observations finales à tous les ministères et autres services gouvernementaux concernés, à la Chambre des représentants et au Conseil de la République de l’Assemblée nationale, ainsi qu’à l’appareil judiciaire, afin qu’elles soient intégralement mises en œuvre.
Parlement
10. Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef d’assurer intégralement l’exécution des obligations que la Convention impose à l’État partie, et tout particulièrement d’en répondre, le Comité souligne que la Convention est juridiquement contraignante pour toutes les branches du pouvoir. Il invite l’État partie à inciter les deux chambres de l’Assemblée nationale, selon qu’il conviendra et conformément à leurs procédures, à prendre les dispositions nécessaires à la mise en œuvre des présentes observations finales et à l’établissement du prochain rapport que l’État partie présentera en application de la Convention.
Définition de l’égalité et de la non-discrimination
11.Tout en notant que les principes généraux de l’égalité et de la non-discrimination sont énoncés à l’article 22 de la Constitution et inscrits dans la législation nationale, le Comité demeure préoccupé par le fait que celle-ci n’interdit pas expressément la discrimination à l’égard des femmes dans tous les domaines, comme le prévoient les articles 1er et 2 de la Convention. Il constate également que l’État partie n’a pas de loi sur l’égalité des sexes ni de législation générale contre la discrimination couvrant la discrimination sexuelle et sexiste.
12. Le Comité invite l’État partie à envisager d’adopter une loi sur l’égalité des sexes ou une législation générale contre la discrimination, qui donne une définition précise de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, couvrant aussi bien la discrimination directe que la discrimination indirecte, et interdise clairement les formes convergentes de discrimination à l’égard des femmes, conformément aux articles 1 er et 2 de la Convention.
Visibilité de la Convention, du Protocole facultatif et des recommandations générales du Comité
13.Le Comité constate avec préoccupation que si la Convention fait partie intégrante de la législation nationale de l’État partie, elle n’a pas bénéficié, dans la pratique, d’une visibilité suffisante comme base juridique fondamentale pour les diverses mesures, y compris d’ordre législatif et stratégique, destinées à éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité des sexes dans l’État partie. Le Comité constate l’absence d’information concernant les procédures judiciaires dans lesquelles des dispositions de la Convention ont été directement invoquées ou appliquées, ce qui témoigne d’une connaissance insuffisante chez les femmes elles-mêmes et dans les professions judiciaires et juridiques des droits garantis aux femmes par la Convention et son Protocole facultatif ainsi que des recommandations générales du Comité.
14. Le Comité réitère sa recommandation précédente (CEDAW/C/BLR/4-6, par. 342) et prie instamment l’État partie d’intensifier ses efforts pour faire en sorte que la Convention et son Protocole facultatif, ainsi que les recommandations générales du Comité et les opinions adoptées sur les communications individuelles, fassent partie intégrante de la formation des juges, des avocats, des procureurs, des policiers et des autres agents de la force publique, afin de leur permettre d’appliquer et d’interpréter directement les dispositions juridiques nationales à la lumière de la Convention. Il renouvelle en outre sa demande tendant à ce que l’État partie prenne des mesures pour permettre aux femmes de mieux connaître leurs droits au titre de la Convention ainsi que les procédures de communication et d’enquête prévues par le Protocole facultatif.
Mécanisme national de promotion des femmes
15.Le Comité constate avec préoccupation que le Conseil national chargé de la politique en matière d’égalité des sexes, organe de consultation et de coordination interinstitutions composé des chefs des organes de l’administration centrale et des organes exécutifs et administratifs locaux, de députés de l’Assemblée nationale, de membres de la Cour suprême et de représentants d’organisations publiques et internationales, est demeuré inactif entre 2005 et 2008, et que le mécanisme national de promotion des femmes reste limité faute d’organisme expressément chargé de promouvoir les droits des femmes et l’égalité des sexes. Le Comité est également préoccupé par le fait qu’il n’existe pas dans l’État partie d’institution nationale indépendante des droits de l’homme.
16. Le Comité, rappel ant sa R ecommandation générale n o 6 (1988) et les orientations données par le Programme d’action de Beijing en ce qui concerne, en particulier, les conditions nécessaires au fonctionnement effectif des mécanismes nationaux, recommande à l’État partie:
a) D e renforcer les capacités et les ressources financières et humaines du Conseil national chargé de la politique en matière d’égalité des sexes et du Département de la population, des femmes et de la politique familiale du Ministère du travail et de la protection sociale, pour les aider à élaborer et appliquer des mesures législatives et stratégiques dans le domaine de l’égalité des sexes, à fournir des conseils à ce sujet et à coordonner et superviser le processus;
b) D ’accorder une attention prioritaire aux droits des femmes, à la non-discrimination et à l’égalité entre les sexes, notamment en tenant compte des recommandations figurant dans les présentes observations finales lors de la mise au point du quatrième plan national d’action pour l’égalité des sexes, en accélérant l’adoption de ce plan et en assurant son financement au moyen du budget de l’État;
c) D ’envisager d’établir une institution nationale indépendante des droits de l’homme conformément aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale du 20 décembre 1993, annexe), ainsi qu’un médiateur pour les femmes ou tout autre organisme qui serait spécialement chargé d’examiner les plaintes des femmes dont les droits auraient été violés et de donner des avis et de faire des recommandations à ce sujet.
Stéréotypes et pratiques discriminatoires
17.Le Comité exprime de nouveau sa préoccupation face à la persistance de stéréotypes concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, qui mettent trop l’accent sur les rôles traditionnels des femmes en tant que mères et épouses, affaiblissent le statut social des femmes et les empêchent de participer sur un pied d’égalité à la vie politique et économique. Il prend note également avec préoccupation des informations selon lesquelles la femme est de plus en plus présentée dans les médias comme un objet sexuel et commercial.
18. Le Comité prie l’État partie:
a) D ’intensifier encore ses efforts pour mettre en place une politique générale prévoyant des mesures volontaristes et soutenues en direction des femmes et des hommes, des filles et des garçons, afin de venir à bout des attitudes stéréotypées concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, en particulier dans les domaines où les femmes sont les plus désavantagées;
b) D ’intensifier sa coopération avec la société civile et les organisations de femmes, les parlementaires, les professionnels de l’éducation, le secteur privé et les médias, de façon à diffuser des informations ciblées en direction du grand public et de certains acteurs, tels que les décideurs, les employeurs, les journalistes, les groupes de femmes défavorisés et les jeunes, et à élaborer une stratégie intersectorielle plus globale propre à éliminer les stéréotypes sexospécifiques, notamment les images de la femme trop axées sur les qualités maternelles, à promouvoir l’image de femmes économiquement et socialement actives et à mettre en avant les responsabilités égales des femmes et des hommes dans les sphères privée et publique.
Violence à l’égard des femmes
19.Tout en notant les efforts déployés par l’État partie pour sensibiliser la police et les agents de la force publique à la violence faite aux femmes, le Comité se dit de nouveau profondément préoccupé par la persistance d’une telle violence, notamment de la violence familiale et sexuelle; par le fait qu’elle n’est pas suffisamment signalée; par le grand nombre de femmes qui meurent des suites de violences conjugales; par l’absence de répression de la violence familiale; par le fait que le viol donne lieu à une procédure de citation directe et non à des poursuites d’office; par l’absence de dispositions de droit pénal portant spécifiquement sur la violence familiale et le viol conjugal; et par l’absence de centres d’accueil pour les victimes de violence familiale.
20. En application de sa R ecommandation générale n° 19 (1992) concernant la violence à l’égard des femmes et des recommandations qu’il a formulées dans ses observations finales antérieures, le Comité demande instamment à l’État partie:
a) D ’intensifier ses efforts pour prévenir et réprimer les actes de violence familiale et sexuelle à l’égard des femmes et infliger aux auteurs de tels actes des peines appropriées proportionnées à la gravité de l’infraction commise et non des amendes administratives qui peuvent avoir un effet négatif sur la situation financière des victimes elles-mêmes;
b) D ’accélérer l’adoption du projet de loi sur la prévention de la violence familiale, prévoyant des droits spécifiques pour les victimes en matière d’assistance, de protection et de réparation;
c) D e modifier le Code pénal et le Code de procédure pénale afin d’ériger expressément en infractions pénales la violence familiale et le viol conjugal, d’introduire des poursuites d’office en cas de viol et d’assurer que la définition du viol s’applique à tout acte sexuel imposé;
d) D e dispenser une formation obligatoire aux juges, aux procureurs et aux policiers concernant la stricte application des dispositions législatives relatives à la violence contre les femmes et de former les policiers aux procédures normalisées relatives au traitement des femmes victimes de violence;
e) D ’encourager les femmes à signaler les actes de violence familiale et sexuelle, en mettant fin à la déconsidération des victimes et en faisant bien comprendre que de tels actes sont des actes criminels;
f) D e fournir une assistance et une protection suffisantes aux femmes victimes de violence, en renforçant la capacité des cellules de crise des centres territoriaux d’assistance sociale, en augmentant le nombre des centres publics d’hébergement pour les femmes et les filles battues, en développant la coopération avec les ONG qui proposent des abris et des mesures de réinsertion aux victimes et en accroissant les subventions versées à ces ONG, et en renforçant les programmes de réadaptation pour alcooliques;
g) D e collecter des statistiques sur la violence familiale et sexuelle ventilées par sexe, âge et relations entre la victime et le coupable.
Traite et exploitation de la prostitution
21.Tout en notant que l’État partie accorde une attention prioritaire à la lutte contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, le Comité demeure préoccupé par l’absence de mesures préventives destinées à s’attaquer aux causes profondes de la traite, notamment à ses liens étroits avec la prostitution et l’exploitation sexuelle des femmes et des filles, par l’absence de mesures d’assistance, de réadaptation et de protection ainsi que de centres d’hébergement temporaire, en particulier pour les victimes de la traite qui ne peuvent pas ou ne veulent pas coopérer avec les autorités judiciaires, et par l’insuffisance des financements accordés aux ONG qui fournissent une assistance et un hébergement temporaire aux victimes de la traite ainsi que le manque de coopération avec ces ONG.
22. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D e redoubler d’efforts pour faire adopter le projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains;
b) D e prendre des mesures préventives qui s’attaquent aux causes profondes de la traite des femmes et des filles, en particulier à ses liens étroits avec la prostitution, l’exploitation sexuelle et la violence familiale, dans le cadre notamment de programmes de réadaptation et de réinsertion, et d’informer le Comité à ce sujet dans son prochain rapport;
c) D e fournir une assistance et une protection suffisantes à toutes les victimes de la traite, ainsi que des permis de séjour temporaires aux victimes de pays tiers, quelles que soient leur capacité ou leur volonté de coopérer dans les procédures judiciaires visant les trafiquants;
d) D ’accroître le nombre des centres publics d’hébergement temporaire destinés aux victimes de la traite et de renforcer les moyens dont disposent les centres territoriaux pour répondre aux besoins des victimes;
e) D e renforcer sa coopération avec les ONG qui fournissent un hébergement temporaire et des services de réadaptation et de réinsertion aux victimes de traite, et d’accroître ses subventions à ces ONG.
Participation à la vie politique et publique
23.Tout en reconnaissant que la représentation des femmes à l’Assemblée nationale et dans les conseils des administrations locales a encore progressé, le Comité exprime de nouveau sa préoccupation devant le fait que les femmes restent sous-représentées aux postes de responsabilité au Gouvernement, dans l’appareil judiciaire et dans le corps diplomatique. À cet égard, le Comité note que le gouvernement actuel ne compte qu’une femme parmi les 24 ministres et qu’il n’y a aucune femme parmi les gouverneurs régionaux. Il craint que des obstacles systématiques, tels que le manque de temps et d’argent, les préjugés visant les femmes qui font de la politique, l’absence de représentation dans les médias et l’exclusion des réseaux politiques masculins, empêchent les femmes de participer à la vie politique dans des conditions d’égalité avec les hommes. Le Comité prend note en outre avec préoccupation des informations selon lesquelles aucune candidate indépendante ou d’opposition n’a été élue à la Chambre des représentants en 2008 et du fait que la question de l’égalité des sexes n’a guère été abordée dans les programmes électoraux des candidates.
24. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D ’adopter, conformément au paragraphe 1 de l’arti cle 4 de la Convention et à la R ecommandation générale n o 25 (2004) du Comité, des mesures temporaires spéciales telles que l’établissement de quotas électoraux réglementaires pour le nombre des candidates devant être désignées par les partis politiques, les collectifs de travailleurs et les groupes d’initiative ainsi que l’instauration d’un système de parité entre les sexes pour les nominations politiques, en vue d’assurer une représentation égale des femmes et des hommes au sein des organes politiques élus et constitués, notamment aux postes de décision;
b) D e dispenser une formation en matière d’égalité des sexes aux responsables politiques, journalistes et décideurs, notamment masculins, pour leur faire mieux comprendre qu’une participation véritable, égale, libre et démocratique des femmes et des hommes à la vie politique et publique est indispensable à l’application intégrale de la Convention;
c) D e créer des conditions favorables à l’instauration d’une concurrence démocratique libre qui permette aux hommes et aux femmes, notamment aux candidates indépendantes et aux candidates d’opposition, de se présenter aux élections dans des conditions d’égalité.
25.Le Comité est profondément préoccupé par les arrestations massives de manifestants, parmi lesquels de nombreuses femmes, opérées lors des manifestations qui ont suivi les élections présidentielles de décembre 2010, ainsi que par les informations selon lesquelles certaines militantes auraient subi des traitements inhumains et dégradants pendant leur détention. Il est particulièrement inquiet du sort d’Irina Khalip et de Natalia Radzina, toutes deux journalistes travaillant pour des médias indépendants, ainsi que du sort d’Anastasia Palazhanko, Présidente adjointe de l’organisation de jeunesse «Jeune front», qui se trouvent détenues à Minsk dans le centre de détention avant-jugement du KGB, apparemment sans pouvoir consulter un avocat en privé ni recevoir de soins médicaux adéquats, au motif qu’elles auraient organisé des émeutes (art. 293 du Code pénal).
26. Le Comité prie instamment l’État partie:
a) D e veiller à ce que les plaintes faisant état d’arrestations et de détentions arbitraires ainsi que de traitements cruels, inhumains ou dégradants déposées par des femmes dans le contexte des élections présidentielles du 19 décembre 2010 fassent rapidement l’objet d’une enquête effective, à ce que les agents de la force publique responsables de tels actes soient traduits en justice et dûment punis, et à ce que les victimes obtiennent une réparation suffisante pour toute violation de leurs droits;
b) D e garantir qu’Irina Khalip, Natalia Radzina et Anastasia Palazhanko aient accès à un médecin indépendant; disposent du temps et des moyens nécessaires pour préparer leur défense et pour communiquer en privé avec l’avocat de leur choix; et soient jugées dans un délai raisonnable au cours d’un procès équitable et public par un tribunal indépendant et impartial, conformément aux normes internationales relatives aux droits de l’homme, ou bien libérées;
c) D e s’abstenir de s’immiscer dans la vie privée et l’intimité familiale d’Irina Khalip, en assurant que la garde de son fils de 3 ans reste confiée aux grands-parents de l’enfant en attendant sa libération ou celle de son mari et qu’elle puisse avoir des contacts réguliers avec son fils et d’autres membres de sa famille pendant sa privation de liberté.
27.Le Comité est préoccupé par le fait que l’interdiction des activités d’associations non enregistrées (art. 7, partie 2, de la loi sur les associations), la criminalisation de la participation à de telles activités (art. 193 et 193.1 du Code pénal) et des procédures d’enregistrement excessives ont apparemment considérablement gêné l’activité des ONG de femmes indépendantes et réduit le nombre de ces ONG dans l’État partie. Il est particulièrement préoccupé de constater que le seul parti de femmes «Nadzeja» a été dissous par une décision de la Cour suprême d’octobre 2007, pour absence d’adresse légale et autres manquements de forme.
28. Le Comité prie l’État partie:
a) D e dépénaliser la participation aux activités d’associations non enregistrées, notamment d’associations de femmes;
b) D e revoir et de modifier les procédures d’enregistrement des associations, notamment des associations de femmes, en supprimant en particulier l’obligation faite aux associations de disposer d’une adresse légale, ainsi que l’a recommandé le Comité de la liberté syndicale de l’OIT;
c) D e créer des conditions favorables et d’assurer des possibilités de financement adéquates pour les associations de femmes, notamment celles qui défendent l’égalité des sexes et œuvrent en faveur de la protection des droits des femmes.
Éducation
29.Tout en notant le niveau élevé d’éducation des femmes, le Comité demeure préoccupé de constater que les femmes et les filles continuent de choisir des filières d’enseignement traditionnellement réservées aux femmes, comme les sciences sociales et humaines, et qu’elles sont sous-représentées au niveau de la formation professionnelle. Il constate également avec préoccupation que la féminisation du secteur de l’enseignement − les femmes représentent 80 % des étudiants qui suivent une formation pour devenir enseignants − risque de renforcer les stéréotypes sexospécifiques traditionnels concernant la participation inégale des femmes et des hommes à l’éducation des enfants.
30. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts visant à diversifier les choix d’études et les choix professionnels des femmes et des hommes et de prendre des mesures supplémentaires pour inciter les femmes et les hommes à choisir des filières d’enseignement et des carrières non traditionnelles, par exemple en encourageant les hommes à participer plus nombreux à l’éducation formelle des enfants.
Emploi
31.Le Comité exprime de nouveau sa préoccupation devant le fait que les femmes, malgré un niveau d’éducation élevé, continuent de faire l’objet d’une ségrégation horizontale et verticale sur le marché du travail, de travailler principalement dans le secteur public moins bien payé, de pâtir d’écarts salariaux qui les obligent souvent à faire des heures supplémentaires, et d’être peu nombreuses dans le secteur des affaires et des entreprises, tandis que l’on manque d’informations sur la situation de celles qui travaillent dans les secteurs privé et informel. Le Comité note avec préoccupation que le chômage touche davantage les femmes que les hommes, que les femmes restent au chômage plus longtemps et qu’elles sont moins nombreuses à s’inscrire au chômage en raison de la faiblesse des allocations-chômage et du travail obligatoire dans le secteur public. Il se dit également préoccupé par le fait que l’article 170 du Code pénal ne semble pas prévoir de protection adéquate contre le harcèlement sexuel au travail, la charge de la preuve étant très élevée dans les affaires pénales et certaines pratiques discriminatoires sous forme de harcèlement sexuel ne semblant pas constituer des comportements répréhensibles selon l’article en question.
32. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D ’adopter des politiques et des mesures supplémentaires, notamment des mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’artic le 4 de la Convention et de la R ecommandation générale n o 25 du Comité, assorties de délais et d’indicateurs, pour assurer l’égalité effective des hommes et des femmes sur le marché du travail, promouvoir l’emploi des femmes, éliminer la ségrégation professionnelle et réduire les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes;
b) D e revoir périodiquement les niveaux des salaires dans les secteurs d’emploi à dominance féminine;
c) D ’éliminer les préjugés sexi stes chez les employeurs privés pour faire en sorte que les primes salariales octroyées aux femmes et aux hommes ne soient pas déterminées sur la base de stéréotypes traditionnels présentant les hommes comme les soutiens de famille;
d) D e redoubler d’efforts pour promouvoir l’esprit d’entreprise chez les femmes au moyen de programmes spéciaux, d’une formation, de prêts et de conseils;
e) D e collecter des données ventilées par sexe sur la situation des femmes et des hommes dans les secteurs privé et informel et de prendre des mesures efficaces pour contrôler et améliorer les conditions de travail des femmes dans ces secteurs;
f) D ’envisager d’adopter des dispositions de droit civil définissant, interdisant et empêchant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et inversant la charge de la preuve en faveur de la victime.
33.Tout en notant que l’État partie a intensifié ses efforts pour promouvoir la participation des hommes à l’éducation des enfants et d’autres tâches domestiques, le Comité demeure préoccupé par le fait que les femmes continuent d’assumer une part des tâches domestiques beaucoup plus lourde que les hommes, ce qui montre l’impact limité des mesures prises pour promouvoir la participation des pères à ces tâches.
34. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D e continuer d’intensifier ses efforts de sensibilisation à la notion de paternité responsable;
b) D e prévoir de nouvelles incitations pour encourager les hommes à participer plus activement à l’éducation des enfants et à assumer leur part des autres tâches domestiques;
c) D e sensibiliser les employeurs et les employés à la question des formules de travail flexibles pour les femmes et les hommes et d’encourager les hommes à recourir davantage à de telles formules;
d) D ’envisager de ratifier la Convention n o 156 (1981) de l’OIT sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales.
Santé
35.Tout en notant que le taux d’avortement a diminué, le Comité constate de nouveau avec préoccupation que l’avortement reste la principale méthode de régulation des naissances, que les contraceptifs sont peu utilisés et que les maladies sexuellement transmissibles, notamment le VIH/sida, se propagent rapidement parmi les femmes et les jeunes filles, en particulier les travailleuses du sexe. Il note également avec préoccupation que le programme scolaire ordinaire ne prévoit pas d’éducation à la santé en matière de sexualité et de reproduction ni d’éducation aux droits, et que la qualité des services de santé sexuelle et procréative demeure apparemment médiocre, surtout en milieu rural.
36. Conformément à ses observations finales antérieures (CEDAW/C /BLR/CO/4-6, par. 356) et à sa R ecommandation générale n o 24 (1999), le Comité prie l’État partie:
a) D e faire mieux comprendre, au moyen de consultations spéciales et à travers les médias, l’impact de l’avortement sur l’état de santé physique et psychologique des femmes ainsi que ses implications éthiques et son caractère exceptionnel;
b) D ’intégrer dans le programme scolaire ordinaire une éducation à la santé en matière de sexualité et de reproduction et une éducation aux droits;
c) D e veiller à ce que toutes les femmes, notamment les femmes handicapées, les femmes vivant avec le VIH/sida et les femmes migrantes et réfugiées, ainsi que les jeunes filles, aient un accès gratuit et suffisant aux contraceptifs et aux services de santé en matière de sexualité et de reproduction, notamment dans les zones rurales, ainsi qu’à des informations sous une forme accessible;
d) D’intégrer une perspective sexo spécifique dans ses politiques et programmes nationaux relatifs au VIH/sida.
37.Le Comité note avec préoccupation l’augmentation des cas de cancer du sein, qui représentent plus de 50 % des cancers de l’appareil reproducteur féminin, la diminution de l’âge moyen des femmes souffrant d’un cancer du sein, qui est passé de 56-60 ans à 42-46 ans, et la forte incidence du cancer du sein dans les régions de l’État partie contaminées par l’accident nucléaire de Tchernobyl et chez les femmes nées en 1986. Le Comité est également préoccupé par le fait que les possibilités de mammographie sont limitées, en particulier dans les zones rurales.
38. Le Comité recommande à l’État partie:
a ) D e prendre des mesures propres à assurer un examen mammographique universel pour le dépistage précoce des cancers du sein en prévoyant un nombre suffisant d’appareils stationnaires et ambulatoires et en formant des radiologues qualifiés, et de solliciter le cas échéant une assistance internationale à cette fin;
b) D e proposer aux femmes souffrant d’un cancer du sein une assistance psychologique et des mesures de réadaptation, ainsi que des moyens de chirurgie reconstructive;
c) D e mener des recherches plus poussées sur le lien entre l’augmentation des cas de cancer, comme le cancer du sein, et le niveau de radioactivité dans les régions contaminées par l’accident nucléaire de Tchernobyl.
Les femmes et la pauvreté
39.Le Comité exprime de nouveau sa préoccupation face à la progression de la pauvreté parmi les femmes, en particulier parmi les femmes ayant plus de deux enfants, les femmes chefs de famille, les femmes s’occupant de membres handicapés ou âgés de la famille, et les femmes rurales et âgées. Il est également préoccupé de constater que les prestations familiales et sociales octroyées aux femmes touchées par la pauvreté sont trop faibles pour assurer un niveau de vie suffisant pour elles et leur famille.
40. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D e recourir davantage à des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa recommandation générale n o 25, en vue d’améliorer la situation économique des femmes touchées par la pauvreté;
b) D e revoir et d’ajuster régulièrement les niveaux des prestations sociales afin d’assurer un niveau de vie suffisant aux femmes et à leur famille;
c) D e veiller à ce que tous les programmes d’activités rémunératrices et de lutte contre la pauvreté bénéficient véritablement aux femmes, compte tenu de leurs besoins.
Groupes de femmes défavorisés
41.Le Comité est préoccupé par l’absence de données ventilées sur la situation des femmes qui font généralement face à des formes de discrimination multiples − femmes âgées, femmes handicapées, femmes appartenant à des minorités, notamment à la minorité rom, et lesbiennes − qui sont particulièrement vulnérables à la violence et aux abus.
42. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D e collecter des données ventilées sur la situation des femmes qui font face à des formes de discrimination multiples, telles que les femmes âgées, les femmes handicapées, les femmes appartenant à des minorités, notamment les femmes roms, et les lesbiennes, et d’inclure ces informations dans son prochain rapport périodique;
b) D ’adopter des mesures préventives, y compris des mesures temporaires spéciales, pour éliminer toute discrimination de ce type, notamment dans la vie politique et publique et dans les secteurs de l’éducation, de l’emploi et de la santé, et de protéger ces femmes de la violence et des abus.
Mariage et relations familiales
43.Le Comité note que le décret présidentiel no18 du 24 novembre 2006, qui permet de retirer aux familles défaillantes la garde des enfants et exige que les parents remboursent à l’État les dépenses qui en découlent, risque de pénaliser une seconde fois les femmes avec enfants vivant dans une relation marquée par la violence. Il note également l’absence d’informations concernant la situation économique des femmes divorcées.
44. Le Comité recommande à l’État partie:
a) D e recourir à d’autres solutions que celle qui consiste à retirer à la mère la garde des enfants lorsque la famille est défaillante à cause du comportement socialement irresponsable du père, et d’aider, au lieu de pénaliser, les femmes avec enfants vivant dans une relation violente;
b) C ompte tenu du taux élevé de divorce, d’entreprendre des recherches sur les conséquences économiques du divorce pour les deux conjoints, ainsi que sur les disparités économiques fondées sur le sexe existant entre les conjoints, et de rendre compte des résultats de ces recherches dans son prochain rapport périodique.
Amendement du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention
45. Le Comité encourage l’État partie à accepter dès que possible l’amendement du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant la périodicité des réunions du Comité, à propos duquel l’État partie a indiqué qu’il était disposé à reconsidérer sa position.
Déclaration et Programme d’action de Beijing
46. Le Comité exhorte l’État partie à tenir pleinement compte, dans le cadre de ses obligations au titre de la Convention, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie d’inclure des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.
Objectifs du Millénaire pour le développement
47. Le Comité souligne que la mise en œuvre intégrale et effective de la Convention est une condition indispensable à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Il demande que soit prise en compte la problématique hommes-femmes et qu’il soit fait expressément référence aux dispositions de la Convention dans toute action visant la réalisation de ces objectifs, et il prie l’État partie d’inclure des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.
Diffusion des observations finales
48. Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées au Bélarus afin que la population du pays, et en particulier les agents de l’État, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, soient informés des mesures prises en vue de garantir l’égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il recommande que ces observations soient également diffusées au niveau local et invite l’État partie à organiser une série de réunions pour débattre des progrès accomplis dans leur mise en œuvre. Il prie en outre celui-ci de continuer à diffuser largement, notamment auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, le texte de ses propres recommandations générales et de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, intitulée «Les femmes en l’an 2000: égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle».
Ratification d’autres traités
49. Le Comité souligne que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribuerait à promouvoir l’exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Il invite donc l’État partie à envisager de ratifier les instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention relative aux droits des personnes handicapées, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
Suite donnée aux observations finales
50. Le Comité prie l’État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations énon cées au paragraphe 20 ci-dessus et, dans un délai d’un an, des informations sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées au paragraphe 26 ci-dessus.
Établissement du prochain rapport
51. Le Comité prie l’État partie de veiller à ce que l’ensemble des ministères et des organes de l’État participent largement à l’établissement du prochain rapport périodique, et de consulter à cette occasion diverses organisations de femmes et de défense des droits de l’homme.
52. Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il établira en application de l’article 18 de la Convention. Il invite l’État partie à présenter ce rapport en février 2015.
53. Le Comité invite l’État partie à suivre les «Directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument», approuvées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, qui s’est tenue en juin 2006 (voir HRI/MC/2006/3 et Corr.1). Les directives concernant l’établissement de documents propres à chaque instrument, adoptées par le Comité à sa quarantième session, en janvier 2008 (A/63/38, annexe I ), doivent être mises en œuvre concurremment avec les directives harmonisées concernant l’établissement de documents de base communs. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages et le do cument de base commun actualisé 80 pages.