88. Le Comité a examiné le rapport initial du Guyana (CEDAW/C/5/Add.63) à ses 235e et 239e séances, tenues les 18 et 20 janvier 1994 (voir CEDAW/C/SR.235 et 239).
89. En présentant son rapport, la représentante du Guyana a souligné que la crise économique mondiale des années 80 et la récession qui l'a accompagnée avaient affecté son pays, qui est l'un des plus vulnérables. Quarante pour cent des habitants des pays d'Amérique latine et des Caraïbes vivent en dessous du seuil de pauvreté et ne sont pas en mesure de satisfaire leurs besoins élémentaires. En raison de leur position vulnérable au sein de la société, les femmes sont les plus durement touchées par la crise socio-économique. La pauvreté chez les femmes est un phénomène courant dans la région.
90. En raison des problèmes économiques qui ont commencé avec la crise du pétrole dans les années 70, le "socialisme coopératif", politique officielle du Guyana, a connu une période très difficile qui a conduit à une dégradation continue des équipements. L'augmentation du chômage et la faiblesse des salaires se sont traduites par une augmentation de l'exode rural et de l'émigration des hommes. La proportion de ménages dirigés par des femmes est ainsi passée de 24,4 % en 1980 à 29,5 % en 1992. Le pourcentage de femmes émigrantes a également augmenté au cours des dernières années, d'où une augmentation du nombre de ménages monoparentaux dirigés par des hommes. En outre, l'afflux de main-d'oeuvre féminine a complètement bouleversé le marché du travail.
91. Le Guyana est l'un des pays les plus pauvres de l'hémisphère occidental. L'appauvrissement de la majorité des Guyanais est dû à une baisse continue de la production par habitant et des salaires en termes réels et l'augmentation des prix des produits de base s'accompagne d'une baisse dramatique de la qualité de l'enseignement, de la faim et de la malnutrition, de l'augmentation du nombre des sans-abri et des enfants des rues, de l'insuffisance des logements et de la détérioration des services de santé publique. L'absence de mise en valeur des ressources humaines a conduit en quelques années à une réduction très nette de l'espérance de vie et à une forte augmentation de la mortalité infantile.
92. Les programmes d'ajustement structurel mis en oeuvre pour remédier aux problèmes économiques ont provoqué de nouvelles tensions qui sont venues s'ajouter à la crise provoquée par la mauvaise gestion antérieure. Les femmes souffrent particulièrement des graves pénuries de produits alimentaires de première nécessité, car elles sont obligées de faire la queue pendant de longues heures pour s'en procurer. La réduction des dépenses publiques s'est traduite par une détérioration des services sociaux, en particulier la santé et l'éducation, mais aussi les transports, l'alimentation en eau et l'électricité. En tant que responsables du ménage et soutien de famille, les femmes ont été particulièrement touchées.
Observations générales
93. Les membres du Comité se sont félicités du rapport qu'ils ont considéré comme très honnête et qui a été présenté avec franchise par une responsable politique de haut niveau. Ils ont rappelé que le Guyana avait depuis longtemps fait la preuve de son engagement à l'égard de la Convention et a été parmi les premiers États Membres à la signer et la ratifier sans réserve. C'est également le premier pays de la région à avoir présenté une candidature à un siège du Comité.
94. Les membres du Comité se sont également félicités de la volonté politique d'appliquer la Convention tout en étant bien conscients des facteurs culturels, sociaux et économiques qui limitent sa mise en oeuvre. À la question de savoir si toutes les dispositions de la Convention étaient intégralement appliquées dans la législation du pays, la représentante a répondu que certains articles de la Convention avaient force de loi. Le Gouvernement n'a pas tardé à prendre des mesures pour réduire la discrimination à l'égard des femmes, comme le prouvent les dispositions concernant l'égalité des femmes contenues dans la Constitution de 1980. Le Children Born out of Wedlock Act (loi sur les enfants nés hors mariage), adopté en 1983, supprime toute forme de discrimination à l'égard de ces enfants. Le Parlement a adopté en 1990 le Equal Rights Act (loi sur l'égalité des droits), qui autorise les femmes à demander réparation pour toute pratique discriminatoire fondée sur le sexe. L'application de la Convention a amélioré la condition féminine, sensibilisé les organisations féminines ainsi que les institutions à dominante masculine sur cette question et attiré l'attention sur les obstacles qui subsistent encore.
95. Des membres ont cherché à savoir si la Convention pouvait être invoquée en cas de violation des droits des femmes et quelle était la relation entre la législation nationale et la Convention. La représentante a répondu que les dispositions légales accordent une grande protection aux femmes guyanaises. L'accès des femmes aux tribunaux est garanti par les dispositions de la Constitutional and Municipal Law.
96. En ce qui concerne les questions relatives au calendrier du programme pour la promotion de la femme, la représentante a répondu qu'il existait une déclaration de principe concernant les femmes mais que plusieurs programmes en cours sur l'intégration des femmes au développement n'avaient pas été pleinement appliqués en raison des difficultés économiques.
97. Les membres ont noté que le rapport mettait l'accent sur l'élimination de la discrimination de jure et ont demandé davantage de précisions sur la condition réelle des femmes. Tout en soulignant que davantage de données statistiques étaient nécessaires, ils ont invité le Gouvernement à se référer dans ses prochains rapports aux normes et faits existants et à proposer une interprétation des changements intervenus. Cela permettrait d'éviter les contradictions que pourrait contenir le présent rapport. La représentante a déclaré que son gouvernement était pleinement conscient des lacunes des données et statistiques et qu'il cherchait à obtenir une assistance technique dans ce domaine de la part des organisations internationales.
98. Interrogée sur la question de savoir si les organisations non gouvernementales avaient été consultées lors de l'établissement du rapport, la représentante a souligné qu'un service central, le Bureau des questions féminines, était en relation directe avec les organisations non gouvernementales féminines et avait participé pour une grande part à l'établissement du rapport.
99. Les membres du Comité se sont félicités de la clarté de la description des effets négatifs des programmes d'ajustement structurel sur les femmes, qui prouvent que les transformations politiques et économiques risquent d'avoir des effets négatifs sur les femmes si la mise en valeur des ressources humaines n'est pas prise en compte. Les membres ont demandé des éclaircissements sur les mesures prises par le Gouvernement pour atténuer les effets négatifs des programmes d'ajustement structurel sur les femmes et les enfants. La représentante a signalé que dans le cadre du Social Impact Amelioration Programme (programme d'aide sociale), des allocations étaient régulièrement versées aux femmes âgées, aux femmes enceintes et aux mères allaitantes pendant une période limitée pour amortir les effets de la suppression des subventions de l'État sur les articles de première nécessité. Le Guyana a bénéficié de l'assistance de plusieurs programmes et institutions spécialisées des Nations Unies ainsi que d'autres donateurs. Dix-sept projets de prestation de soins de santé ont été réalisés. Toutefois, des retards importants ont été enregistrés dans la mise en oeuvre des projets, le Gouvernement n'étant pas en mesure de mettre à profit toute l'assistance extérieure qu'il reçoit et dont il a un très réel besoin car il ne peut fournir la contrepartie administrative et financière de ces projets.
100. Les membres ont fait l'éloge du rôle actif joué par les femmes guyanaises dans la lutte pour l'indépendance, rôle qui devrait leur garantir la possibilité d'exercer inconditionnellement leurs droits fondamentaux. Interrogée sur la question de savoir pourquoi les droits fondamentaux prévus par la Constitution n'étaient pas seulement liés au respect des droits et libertés d'autrui mais aussi au respect de l'intérêt général, la représentante a répondu que cela ne donnait pas lieu à des abus ou à des injustices car les tribunaux, qui sont les garants des droits des individus, conformément à la Constitution, peuvent être saisis par quiconque s'estime lésé.
Questions relatives à des articles déterminés
Article 2
101. Compte tenu du fait que plusieurs groupes ethniques et autochtones coexistaient au Guyana, les membres du Comité ont souhaité savoir si les racines culturelles de ces groupes étaient sauvegardées, la culture pouvant être considérée comme un facteur de cohésion sociale favorable au développement. Des renseignements supplémentaires ont été demandés sur les pratiques coutumières et les traditions religieuses, dans la mesure où elles affectent les femmes et sont contraires aux dispositions de la Convention. La représentante a répondu que les principales communautés ethniques étaient de souche indienne (49,5 %) et africaine (35,6 %), tandis que les Amérindiens représentaient 6,8 % de la population. Conséquence de la politique du "Diviser pour régner" pratiquée par la puissance coloniale, les deux principaux groupes de la population s'étaient répartis de part et d'autre d'une ligne de fracture raciale à la fin des années 50, puis dans les années 60. À l'origine, les Amérindiens avaient leur propre culture, mais leur intégration dans la société avait profondément transformé certaines fractions de la population autochtone entrées dans la vie nationale par le biais de l'enseignement, des services de santé et de la formation professionnelle. La Constitution garantissait le droit de tous les citoyens de pratiquer leurs coutumes et leur religion. Sans doute, certains principes religieux étaient-ils invoqués pour maintenir les femmes dans un statut d'infériorité, en leur déniant le droit de choisir leur mari et en les excluant d'une hiérarchie dominée par les hommes. Il n'en restait pas moins que la domination des hommes sur les femmes était un problème inhérent à tous les groupes raciaux.
Article 3
102. Les membres du Comité se sont félicités de la nomination d'une ministre déléguée à la promotion de la femme et ont posé des questions sur son mandat, sur les restrictions imposées à ses activités et sur la coordination de l'action en faveur des femmes au sein des autres ministères. La représentante a répondu que le Ministère du travail, des services sociaux, de la sécurité sociale et du logement était dirigé par un Ministre d'État chargé du travail et du logement et par un Secrétaire d'État responsable des services humains et de la sécurité sociale, qui comptait les questions féminines parmi ses 11 domaines de compétence. Aucune restriction n'était imposée aux activités de cette haute responsable. En ce qui concerne les mécanismes nationaux de promotion des femmes, la Ministre organisait des séances de travail hebdomadaires avec les fonctionnaires du Bureau des questions féminines.
Article 4
103. On a demandé quelles mesures temporaires avaient été prises pour accélérer l'avènement d'une égalité concrète entre les hommes et les femmes. Le Comité a aussi demandé s'il existait des programmes visant à accroître le nombre des femmes occupant des postes de responsabilité à tous les échelons.
104. La représentante a répondu que le Bureau des questions féminines s'occupait de la mise en oeuvre et du suivi de projets conçus expressément en faveur des femmes, en particulier dans le domaine de l'enseignement et de la formation professionnelle et de la formation à la gestion des petites entreprises et aux professions de santé.
Article 5
105. Partant du principe que la violence faite aux femmes atteint un degré élevé dans toute société, les membres du Comité ont posé des questions sur l'étendue de la violence sous toutes ses formes, les mesures prises par le Gouvernement pour l'éliminer, le rôle de la police et les procédures judiciaires. La représentante a expliqué que la violence concernait toutes les couches de la société et qu'environ 48 % des femmes avaient subi une agression physique en 1993. Cela faisait peu de temps que des femmes s'étaient mises à porter plainte en cas d'agression de la part de leur mari ou de leur conjoint de fait. Mais lorsqu'ils appréhendaient les coupables, les policiers — des hommes — hésitaient souvent à les inculper, ayant tendance à considérer ces agressions comme des querelles purement domestiques. C'est pourquoi les organisations féminines avaient demandé que l'on fasse appel à des inspectrices plutôt qu'à des inspecteurs. On avait ouvert des refuges et des abris à l'intention des femmes maltraitées, ainsi qu'une ligne téléphonique d'urgence. Un projet de loi sur la violence domestique inspiré de textes sur le même sujet adoptés par divers pays des Caraïbes allait être soumis au Parlement. Le Gouvernement et diverses organisations non gouvernementales préparaient un programme éducatif visant à faire connaître aux jeunes d'autres formes de règlement des conflits, et à renforcer en eux le sens de leur propre dignité et le respect de la femme.
Article 6
106. Les membres du Comité ont demandé un complément d'information sur la prostitution et les activités qui s'y rattachent, et ont cherché à savoir si les lois et certains programmes spécialisés dans ce domaine avaient réussi à réduire le nombre des prostituées. La représentante a répondu que la loi prévoyait des peines pour tout homme vivant sciemment, que ce soit entièrement ou partiellement, de la prostitution ou incitant autrui à la débauche. Afin de prévenir une extension de la prostitution de jeunes femmes liée à l'exode rural, on s'efforçait d'augmenter le niveau de vie dans les campagnes et on encourageait les femmes à exercer des activités rémunératrices.
Article 7
107. Ayant pris note de ce que le rapport citait des chiffres sur la proportion de femmes occupant certains postes de haut niveau, les membres du Comité ont demandé des informations supplémentaires sur la proportion de femmes parmi les cadres moyens et sur leur participation aux activités des organisations non gouvernementales, des partis politiques et des syndicats. La représentante a répondu que les femmes occupaient une place modeste mais de plus en plus importante dans les rangs inférieurs et intermédiaires de la hiérarchie de ces organismes, avec 25,4 % des postes en 1993 contre 14,9 % en 1985. Cependant, la représentation des femmes dans les postes de direction s'était considérablement amenuisée au cours de la même période, passant de 25,5 % à 12,4 %. Il n'y avait que dans le secteur des services, mal rémunéré, et dans l'enseignement que les femmes jouaient un rôle appréciable au niveau de la prise de décisions. Les femmes étaient actives dans les syndicats, tant du secteur public que du secteur privé, où elles occupaient quelques postes de responsabilité au niveau de l'administration et des instances dirigeantes. Il n'y avait pas de syndicat exclusivement féminin.
108. La représentante a souligné que les femmes sont manifestement en minorité dans les hautes sphères de la vie publique et politique et sont sous-représentées de manière flagrante aux postes les plus élevés. La proportion de femmes siégeant au Parlement a sensiblement augmenté entre 1980 et 1985, passant de 14 à 22 %, avant de redescendre à 15,7 % en 1993 à la suite du changement de gouvernement. Ce déséquilibre entre la représentation des femmes et des hommes au Parlement se retrouve au sein du Gouvernement, où seules deux femmes se sont vu confier des portefeuilles ministériels, l'une à la santé et l'autre au travail, aux services sociaux et à la sécurité sociale. Toutefois, la situation s'est améliorée dans la haute administration, le nombre de femmes occupant des postes de secrétaire général de ministère et d'autres postes élevés étant passé de 21,4 % en 1987 à 33,3 % en 1993. Au niveau régional, le pourcentage de femmes élues maires a diminué, passant de 40 % en 1980 à 20 % en 1986 et 16,7 % en 1993.
109. En ce qui concerne la participation des femmes aux partis politiques, la représentante a rappelé le rôle historique que celles-ci ont joué dans la vie politique, notamment dans les travaux des partis et pendant les élections. Le principal problème réside dans le fait que les femmes susceptibles de conquérir des postes de direction dans leur parti sont peu nombreuses en raison de la concurrence masculine, de leur manque d'assurance et du poids de leurs responsabilités pour ce qui est de l'éducation des enfants.
Article 8
110. Après avoir salué la franchise des vues exprimées dans la partie du rapport consacrée à l'article 8, les membres du Comité ont demandé davantage d'explications sur les obstacles qui entravent la participation des femmes au processus de prise de décision. Ils ont également souhaité savoir si les femmes bénéficient de l'égalité des chances concernant l'accès à des postes de responsabilité dans la vie publique. La représentante a répondu que l'accès des femmes aux postes de décision est entravé par les stéréotypes ancrés dans la mentalité des deux sexes. Il faut espérer que cette tendance changera à mesure que davantage de femmes exerceront un métier.
Article 10
111. En réponse à des demandes de complément d'information sur le taux d'abandon scolaire des filles, la représentante a précisé que seules 18,9 % des femmes abandonnent leurs études au stade de l'enseignement supérieur contre 81,2 % des hommes. Elle a dit ne pas disposer de données sur les taux d'abandon scolaire au niveau de l'enseignement primaire et secondaire. Ces informations seront fournies lors du prochain rapport. Les adultes qui ont abandonné leurs études se voient offrir une seconde chance de les poursuivre. Interrogée sur la question de savoir si les programmes mentionnés dans le rapport visent à éliminer les stéréotypes fondés sur le sexe en matière d'enseignement professionnel, la représentante a répondu que lesdits programmes sont ouverts aux adultes des deux sexes, mais que les femmes choisissent les programmes d'étude à vocation traditionnellement féminine.
Article 11
112. De plus amples informations ont été demandées concernant l'égalité des chances entre hommes et femmes en matière de formation, la ségrégation sexuelle dans le domaine de l'emploi et le travail des femmes dans la santé, l'éducation et l'industrie, ainsi que leur contribution à l'agriculture.
113. La représentante a indiqué que les femmes bénéficient de l'égalité des chances en matière d'éducation et de formation. La formation constitue un élément clef de la participation des femmes au marché du travail. La division du travail est fondée sur des critères de sexe liés à la définition traditionnelle du rôle économique des femmes, la majorité d'entre elles occupant des postes d'employé de bureau ou exerçant une profession dans le commerce de détail et dans le secteur des services. Une faible proportion de femmes sont employées dans le secteur agricole, où la contribution qu'elles apportent au revenu familial en pratiquant l'agriculture de subsistance et l'élevage de volailles n'est pas prise en compte.
114. La proportion de femmes économiquement inactives qui se consacrent exclusivement à des tâches domestiques est élevée mais elle a diminué en raison de l'évolution du rôle des femmes, qui est liée au fait qu'elles ont besoin d'apporter un complément de revenu familial.
115. Les membres du Comité ont souhaité savoir si les femmes bénéficient de l'égalité des chances pour les emplois à plein temps. La représentante a indiqué que si les femmes jouissent de chances égales à celles des hommes, elles souffrent de la contrainte que représente l'éducation des enfants, activité dont la responsabilité leur est traditionnellement attribuée. L'absence de crèches entrave la participation des femmes à la vie active, en particulier lorsqu'elles ne peuvent confier leurs enfants aux grands-parents ou à des personnes âgées de leur connaissance. Des organismes publics et des associations offrent des services d'accueil d'enfants pendant la journée.
116. Interrogée sur la question de l'égalité des rémunérations entre femmes et hommes, la représentante a cité la loi de 1990 intitulée Equal Rights Act qui dispose, entre autres, que femmes et hommes doivent recevoir une rémunération égale à travail égal ou de nature identique. Bien que les femmes reçoivent généralement une rémunération égale à celle des hommes, des femmes ayant les mêmes qualifications et exerçant des fonctions identiques reçoivent encore des rémunérations inférieures à celles des hommes dans certaines entreprises du secteur privé.
Article 12
117. Les membres du Comité ont demandé de plus amples informations concernant les programmes de lutte contre la pandémie de sida et les services actuellement offerts aux femmes contaminées par le virus du sida. La représentante a souligné que le nombre de femmes contaminées par le VIH augmente beaucoup plus rapidement que celui des hommes, bien que ces derniers soient plus nombreux à être porteurs du virus. Le Gouvernement a lancé des programmes éducatifs visant à lutter contre la propagation du sida chez les jeunes et à favoriser l'utilisation des préservatifs. Des débats visant à lever les tabous liés au sexe et à la vie sexuelle ont été organisés. La représentante a également indiqué que des efforts sont déployés en vue de faire en sorte que les victimes du sida ne soient plus socialement stigmatisées.
118. Touchant le grave problème de l'anémie, maladie très débilitante pour les femmes, les membres du Comité ont demandé si la malnutrition des femmes était due aux régimes alimentaires traditionnels, à un manque de diversité dans leur alimentation ou à la pauvreté. Etant donné la diminution de l'espérance de vie, ils ont voulu savoir quelles étaient les principales causes de mortalité féminine. La représentante a répondu qu'il fallait ranger au nombre des facteurs de mortalité les grossesses difficiles, le manque de personnel médical qualifié, la malnutrition et l'avortement. La réduction de moitié des dépenses publiques consacrées à la santé avait eu un effet défavorable sur les 86 % de la population dont on estimait qu'ils vivaient en dessous du seuil de pauvreté, en particulier les femmes.
119. En ce qui concerne la planification de la famille, les membres du Comité ont demandé s'il existait un programme national en la matière, si les femmes disposaient de services de maternité spécialisés et s'il était facile de se procurer des contraceptifs : étaient-ils communément utilisés et bien acceptés? La représentante a indiqué que, sur l'ensemble du pays, 166 dispensaires assuraient des services de planification de la famille : aide, conseils, distribution de contraceptifs divers, vaccinations, frottis vaginaux, soins prénatals et postnatals, tests de grossesse, consultations et traitement en matière de fécondité et de stérilité. En règle générale, les femmes acceptaient très bien la planification de la famille. Une organisation qui s'intéressait à la procréation responsable exécutait des programmes d'information à l'intention des jeunes. La représentante a également déclaré qu'étant donné les taux élevés de mortalité et d'émigration qui caractérisaient la population guyanienne, il n'existait aucun programme gouvernemental de planification de la famille.
120. Au sujet des avortements, la représentante a déclaré que le nombre d'avortements illégaux était élevé car les femmes qui n'avaient pas accès à d'autres méthodes de planification de la famille y voyaient souvent une forme de contraception. Y avaient surtout recours les femmes de 24 à 29 ans, les plus nombreux étant, par ordre décroissant, les Indiennes et les Noires. Il était question de décriminaliser l'avortement, comme le proposait un projet de loi dont était saisi le Parlement.
Article 14
121. Les membres du Comité se sont félicités de la politique de décentralisation menée par le Gouvernement et ont demandé davantage de précisions sur la participation des femmes à la vie publique locale. La représentante a répondu qu'en règle générale, les femmes jouaient un rôle actif dans tous les secteurs de la vie rurale. Après les élections de 1992, on avait assisté à une résurgence des groupes de développement communautaire qui leur faisaient une large place.
Article 16
122. S'agissant de la réforme du droit de la famille, les membres du Comité ont dit qu'il serait préférable d'adopter une démarche globale plutôt que de procéder par amendements successifs et qu'il faudrait harmoniser la législation nationale avec celle des autres pays des Caraïbes. La représentante s'est rangée à cet avis et a ajouté que depuis une dizaine d'années, les organisations féminines avaient réclamé énergiquement la création d'un tribunal de la famille. Elle a également donné des détails sur le Married Persons Property Amendment Act (loi portant modification de la loi relative aux biens des personnes mariées) et le Family Dependants Provision Act (loi relative aux personnes à charge), lois adoptées en 1990 qui avaient changé les dispositions applicables à la division des biens entre époux en cas de divorce ou de dissolution du couple. En réponse à la question relative à la division équitable des biens du ménage en cas de divorce, la représentante a déclaré que la nouvelle loi relative aux biens des personnes mariées prévoyait que l'on tienne compte du travail effectué au foyer par l'épouse pour évaluer sa contribution à l'acquisition desdits biens.
123. Des précisions supplémentaires ont été demandées sur les ménages dirigés par des femmes : quelle était la fréquence de cette situation dans les différents groupes ethniques? Comment ces ménages s'intégraient-ils à la culture du pays? De quels programmes d'assistance bénéficiaient-ils de la part du Gouvernement? La représentante a exprimé son regret de n'être pas à même de fournir les détails demandés et elle a promis que cette information figurerait dans le deuxième rapport périodique. Ce type de famille se rencontrait partout, mais surtout dans la population africano-guyanienne.
124. Les membres du Comité ont demandé si le Equal Rights Act (loi sur l'égalité des droits) permettait aux tribunaux de définir la discrimination et s'il existait une jurisprudence en la matière. La représentante a répondu que la loi en question ne donnait pas de définition de la discrimination et n'avait encore jamais été invoquée devant les tribunaux puisqu'elle n'avait été adoptée que relativement récemment. Les tribunaux n'avaient encore été saisis d'aucun cas de discrimination.
125. Le Comité a décidé de reporter la formulation de ses conclusions sur le rapport du Guyana à sa quatorzième session.