University of Minnesota



Observations finales du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Lesotho, U.N. Doc. CEDAW/C/LSO/CO/1-4 (2012).


 

CEDAW/C/LSO/CO/1-4

Convention sur l’éliminationde toutes les formesde discriminationà l’égarddes femmes

Distr. générale

8 novembre 2011

Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Cinquantième session

Genève, 3-21 octobre 2011

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Lesotho

1.Le Comité a examiné le rapport unique du Lesotho valant rapport initial et deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques (CEDAW/C/LSO/1-4), à ses 1007e et 1008e séances, tenues le 11 octobre 2011 (voir CEDAW/C/SR.1007 et 1008). La liste des points et questions à traiter a été publiée sous la cote CEDAW/C/LSO/Q/1-4 et les réponses du Gouvernement lesothan sous la cote CEDAW/C/LSO/Q/1-4/Add.1.

A.Introduction

2.Le Comité félicite l’État partie pour la présentation de son rapport unique valant rapport initial et deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques, qui, dans l’ensemble, est conforme aux directives du Comité sur l’établissement de rapports, et a été élaboré dans le cadre d’un processus consultatif avec la participation d’organismes publics et de la société civile. Il regrette cependant que ce rapport ait été attendu depuis 1996. Il félicite également l’État partie pour son exposé oral, ses réponses écrites à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail de présession et les éclaircissements qu’il a apportés aux questions posées par les membres du Comité.

3.Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, conduite par le Ministre du genre, des sports, de la jeunesse et des loisirs et composée également du Ministre de la justice, des droits de l’homme et de l’administration pénitentiaire, et de plusieurs représentants de différents ministères compétents dans les domaines visés par la Convention. Il se félicite du dialogue ouvert et constructif qui s’est tenu entre la délégation et les membres du Comité.

B.Aspects positifs

4.Le Comité se réjouit des progrès accomplis depuis la ratification de la Convention par l’État partie en 1995, notamment des réformes législatives qui ont été entreprises et de l’adoption d’un vaste ensemble de mesures législatives. Il est fait spécifiquement référence à:

a)La loi relative aux infractions sexuelles (2003), qui incrimine le viol conjugal;

b)La loi relative à la capacité juridique des personnes mariées (2006);

c)La loi portant modification de la loi sur les salaires inscrits dans le Code du travail (2009);

d)La loi relative à l’éducation (2010), qui prévoit un enseignement gratuit et obligatoire;

e)La loi contre la traite des personnes (2011), qui incrimine toutes les formes d’esclavage et prévoit des peines sévères pour les auteurs; et

f)La loi sur la protection et le bien-être des enfants (2011).

5.Le Comité prend note avec satisfaction des initiatives prises par l’État partie pour promouvoir l’égalité des sexes et protéger les droits des femmes, telles que la création d’une Commission de réforme du droit chargée de réviser les lois discriminatoires. Il félicite également l’État partie d’avoir ratifié le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le 24 septembre 2004.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Le Comité rappelle à l’État partie qu’il est tenu de mettre en œuvre, de manière systématique et constante, toutes les dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et qu’il doit accorder une attention prioritaire aux préoccupations et recommandations formulées dans les présentes observations finales à compter de maintenant et jusqu’à la présentation du prochain rapport périodique. Il lui demande donc de privilégier ces domaines dans ses activités de mise en œuvre et de rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises et des résultats qu’il aura obtenus. Il lui demande également de soumettre les présentes observations finales à tous les ministères concernés, au Parlement et aux instances judiciaires, de manière à en assurer l’application intégrale.

Parlement

Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef de pleinement s’acquitter des obligations que la Convention met à la charge de l’État partie, le Comité souligne que la Convention a force obligatoire pour toutes les branches de l’appareil d’État, et invite l’État partie à encourager le Parlement, conformément à ses procédures, selon qu’il convient, à prendre les mesures nécessaires pour ce qui est de la mise en œuvre des présentes observations finales et de l’établissement du prochain rapport national en application de la Convention.

Diffusion de la Convention et de son Protocole facultatif

8.Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie du Protocole facultatif à la Convention, le 24 septembre 2004. Il est cependant préoccupé par le manque général de sensibilisation aux dispositions de la Convention et de son Protocole facultatif dans l’État partie, en particulier parmi les magistrats et autres responsables de l’application des lois. Il est en outre préoccupé par le fait que les femmes elles-mêmes, surtout dans les régions rurales et reculées, méconnaissent les droits consacrés par la Convention ou la procédure de plainte en vertu du Protocole facultatif, et n’ont donc pas les informations nécessaires pour faire valoir leurs droits.

Le Comité invite l’État partie à:

a)Prendre les mesures requises pour assurer la diffusion voulue de la Convention, de son Protocole facultatif et des recommandations générales du Comité auprès de toutes les parties prenantes, y compris les ministères, les parlementaires, l’appareil judiciaire, les responsables de l’application des lois et les responsables religieux et communautaires, de façon à faire prendre conscience des droits fondamentaux de la femme et à établir solidement dans le pays une culture juridique en faveur de l’égalité des femmes et de la non-discrimination;

b)Prendre toutes les mesures qui s’imposent pour que les femmes connaissent mieux leurs droits et les moyens de les faire respecter, notamment en leur donnant des informations sur la Convention et sur le Protocole facultatif.

Statut juridique de la Convention

10.Le Comité note que l’État partie a fait part au cours du dialogue de son attachement aux principes de l’égalité des sexes et de la non-discrimination énoncés dans la Convention. Il note cependant avec préoccupation que si la Convention a été ratifiée en 1995, elle n’a pas encore été incorporée dans la législation nationale de l’État partie, et qu’en conséquence, elle n’est pas d’application directe dans l’ordre juridique interne.

11.Le Comité prie instamment l’État partie d’accorder un degré élevé de priorité au processus d’incorporation de la Convention dans son système juridique interne afin de lui donner une importance centrale en tant que base pour éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Définition de l’égalité et de la non-discrimination

12.Le Comité note que l’article 18 de la Constitution de l’État partie interdit toute forme de discrimination ainsi que le traitement inéquitable mais reste préoccupé par l’absence d’interdiction spécifique de la discrimination à l’égard des femmes telle que définie à l’article premier de la Convention. Il constate avec inquiétude que la Constitution de l’État partie comporte des exceptions au principe de la non-discrimination, en ce qui concerne l’adoption, le mariage, le divorce, les funérailles, la transmission des biens, le décès et d’autres questions qui relèvent du statut personnel, y compris lorsque le droit coutumier est applicable, ce qui est contraire aux articles 2 et 16 de la Convention.

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a)D’accélérer l’examen de sa Constitution et d’en supprimer d’urgence les articles qui permettent la discrimination fondée sur le sexe ou sur le genre dans des questions telles que l’adoption, le mariage, le divorce, les funérailles, la transmission des biens, le décès ou d’autres questions qui relèvent du statut personnel;

b)D’inclure dans sa Constitution et dans toute autre loi pertinente une interdiction de la discrimination à l’égard des femmes englobant la discrimination directe et indirecte, dans la vie publique et le domaine privé, conformément aux dispositions de l’article premier de la Convention, et d’y inclure aussi des dispositions portant interdiction de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dans tous les domaines, dont l’adoption, le mariage, le divorce, les funérailles, la transmission des biens, le décès ou toute autre question relevant du statut personnel, y compris lorsque le droit coutumier est applicable.

Réserves

14.Le Comité relève avec préoccupation que l’État partie a fait une réserve à l’article 2 concernant la succession au trône et la succession à la dignité de chef et note que selon les renseignements fournis par l’État partie dans sa réponse à la liste des points et lors du dialogue avec le Comité, le Gouvernement envisage de revoir sa position à ce sujet.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’envisager de retirer sa réserve à l’article 2, qui est contraire à l’objet et au but de la Convention.

Mécanisme national de promotion de la condition de la femme

16.Tout en prenant note de la création en 2002 du Ministère du genre et de la jeunesse, des sports et des loisirs, remplaçant le Ministère de l’environnement, du genre et de la jeunesse qui avait été créé en 1998, le Comité est préoccupé par l’absence d’informations sur les mandats de ce ministère, ses ressources humaines et financières et les moyens dont il dispose pour que des politiques d’égalité des sexes soient dûment mises au point et pleinement appliquées par tous les ministères et services de l’État. Il note également avec préoccupation que 20 % seulement du budget global du Ministère est alloué aux questions de genre.

Le Comité engage l’État partie:

a)À renforcer promptement son mécanisme national, à savoir le Ministère du genre et de la jeunesse, des sports et des loisirs, en le dotant des ressources humaines, financières et techniques nécessaires pour qu’il puisse coordonner les actions et œuvrer efficacement en faveur de la promotion de l’égalité des sexes et de la prise en compte du genre;

b)À renforcer l’évaluation de l’incidence des mesures prises pour garantir que ces mesures atteignent les buts et objectifs visés.

Mesures temporaires spéciales

18.Tout en saluant et en notant avec satisfaction l’action menée par l’État partie pour appliquer des mesures temporaires spéciales dans le domaine de la participation des femmes à la vie politique, telles que la prévision dans la loi de 2004 relative aux collectivités locales d’un système de quota réservant 30 % des sièges des collectivités locales aux femmes qui, de ce fait, en détiennent aujourd’hui 58 %, le Comité note avec préoccupation que les mesures temporaires spéciales définies dans sa Recommandation générale no 25 ne sont pas mises en œuvre systématiquement, alors qu’il s’agit là d’une stratégie à appliquer pour accélérer la réalisation de l’égalité effective des femmes et des hommes dans d’autres domaines visés par la Convention, en particulier l’emploi et l’éducation.

Le Comité engage l’État partie à recourir davantage aux mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, tel qu’il est interprété dans la Recommandation générale no 25 du Comité, dans tous les domaines visés par la Convention, lorsque les femmes sont sous-représentées ou désavantagées. À cette fin, il recommande à l’État partie:

a)D’établir des objectifs assortis d’échéances et de consacrer les ressources voulues à la mise en œuvre de stratégies, notamment de programmes d’appui et de sensibilisation, l’instauration de quotas et d’autres mesures volontaristes visant l’égalité réelle des hommes et des femmes dans tous les domaines, en particulier l’emploi et l’éducation;

b)De sensibiliser les parlementaires, les représentants de l’État, les employeurs et la population en général au fait qu’il faut recourir à des mesures temporaires spéciales, et de donner dans son prochain rapport périodique des informations exhaustives sur l’utilisation de telles mesures ainsi que sur leurs résultats.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

20.Le Comité reconnaît la richesse de la culture et des traditions de l’État partie ainsi que leur importance dans la vie quotidienne des citoyens. Néanmoins, il exprime sa vive préoccupation face à la persistance de normes, de pratiques et de traditions préjudiciables, ainsi que de comportements patriarcaux et de stéréotypes fortement enracinés concernant les rôles, les responsabilités et l’identité des femmes et des hommes dans tous les domaines de la vie; il constate également avec inquiétude que l’État partie ne s’emploie guère à lutter directement contre ces pratiques discriminatoires. Au nombre de celles-ci figurent la polygamie et la pratique du versement de dots (Bohali). Le Comité constate avec préoccupation que ces coutumes et pratiques perpétuent la discrimination à l’égard des femmes et des filles, qu’elles se manifestent dans le statut défavorable et inégal de la femme dans bien des domaines, dont l’éducation, la vie publique et la prise des décisions, et la persistance de la violence à leur égard, et que, jusqu’à présent, l’État partie n’a pas pris de mesures durables pour modifier ou éliminer les stéréotypes et les valeurs ou pratiques traditionnelles préjudiciables.

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a)De mettre en place, sans tarder, une stratégie globale visant à modifier ou à éliminer les attitudes patriarcales et les stéréotypes sexistes, conformément aux dispositions de la Convention, et notamment d’adopter des mesures d’éducation et de sensibilisation en collaboration avec la société civile ainsi qu’avec les autorités locales et religieuses, visant les hommes et les femmes à tous les niveaux de la société;

b)De prendre des mesures novatrices visant les professionnels des médias, afin de mieux faire comprendre que l’homme et la femme sont égaux, ainsi que le système éducatif, afin de donner une image plus positive et non stéréotypée de la femme;

c)De contrôler et d’analyser les mesures prises afin d’en évaluer l’effet et de prendre les décisions qui s’imposent.

Violence à l’égard des femmes

22.Le Comité se dit préoccupé par l’incidence élevée de la violence à l’égard des femmes dans l’État partie, en particulier la violence sexuelle et familiale, qui est encore trop peu souvent signalée, et par l’absence de volonté politique d’accorder un rang de priorité élevé à l’élimination de ce phénomène. Il note avec satisfaction la promulgation de la loi de 2003 sur les infractions sexuelles, qui incrimine le viol conjugal, mais il est vivement préoccupé par l’absence de législation spécifique relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, y compris la violence dans la famille, et par le recours à la médiation en cas de violence, qui peut entraîner une revictimisation des femmes qui ont subi des actes de violence. Il prend note de la création de centres d’aide juridictionnelle itinérants et du lancement du Projet pilote au centre de soins de Lapeng mais il trouve préoccupant que ce centre soit le seul, au niveau national, qui fournisse des services aux victimes de la violence, qu’il ne propose que des services de jour et qu’il ne soit pas exclusivement réservé aux femmes victimes de violence familiale.

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a)De s’employer en priorité à adopter le projet de loi relatif à la violence dans la famille et de mettre en place des mesures globales pour prévenir et sanctionner la violence dont les femmes et les filles sont victimes, en reconnaissant que cette violence est une forme de discrimination à l’égard des femmes et qu’elle constitue à la fois une violation de leurs droits fondamentaux consacrés par la Convention et une infraction pénale, et en veillant à ce que les femmes et les filles qui sont victimes de violences aient immédiatement accès à des voies de recours et à ce que les auteurs soient poursuivis et punis, conformément à sa Recommandation générale no 19;

b)De dispenser une formation obligatoire aux juges, aux procureurs et aux policiers, en particulier à ceux qui s’occupent de médiation dans les affaires de violence familiale, concernant la stricte application des dispositions législatives relatives à la violence contre les femmes, et de former les policiers aux procédures qu’ils doivent suivre lorsqu’ils s’occupent de femmes victimes de violences;

c)D’encourager les femmes à signaler les actes de violence sexuelle ou familiale, en mettant fin à la déconsidération des victimes et en faisant bien comprendre que de tels actes sont punis par la loi;

d)De fournir une assistance et une protection suffisantes aux femmes victimes de violences, en renforçant la capacité des centres d’hébergement et des centres de crise, en particulier dans les zones rurales et reculées, et en développant la coopération avec les ONG qui proposent des centres d’hébergement et des mesures de réinsertion aux victimes;

e)De collecter des statistiques sur la violence familiale et sexuelle ventilées par sexe, âge et relation entre la victime et l’auteur.

Traite des personnes et exploitation de la prostitution

24.Le Comité salue la promulgation, en 2011, de la loi contre la traite des personnes, qui met en œuvre le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ainsi que la loi de 2011 sur la protection et le bien-être des enfants et le mémorandum d’accord établi avec la police sud-africaine, mais il demeure préoccupé par l’ampleur de la traite des femmes et des filles dans le pays et par le faible pourcentage de cas signalés. Il est également préoccupé par l’insuffisance des centres d’accueil et des services de conseil pour les victimes de la traite et de la prostitution dans l’État partie.

Le Comité engage l’État partie à mettre pleinement en œuvre l’article 6 de la Convention, notamment:

a)En appliquant de manière efficace la nouvelle législation sur la traite, afin que les auteurs soient poursuivis et punis et que les victimes soient dûment protégées et secourues;

b)En s’attaquant aux causes profondes de la traite et de la prostitution, dont la pauvreté, afin de mettre fin à la vulnérabilité des filles et des femmes face à l’exploitation sexuelle et à la traite et de prendre des mesures en vue de la réadaptation et de la réinsertion sociale des victimes;

c)En dispensant une formation aux magistrats, aux membres des forces de l’ordre, aux gardes frontière et aux travailleurs sociaux dans l’ensemble du pays, en particulier dans les zones rurales et reculées, sur les méthodes à suivre pour repérer les victimes de la traite et les aider;

d)En procédant à un contrôle systématique et à une évaluation périodique, y compris en collectant et en analysant des données sur la traite et l’exploitation des femmes par la prostitution, et en faisant figurer ce type de données dans son prochain rapport périodique;

e)En renforçant encore la coopération internationale, régionale et bilatérale avec les pays d’origine, de transit et de destination, afin d’empêcher la traite grâce aux échanges d’informations et d’harmoniser les procédures de poursuite des trafiquants;

f)En prenant les mesures nécessaires pour que les femmes et les filles victimes de la traite puissent bénéficier de soins médicaux de qualité, de conseils, d’un appui financier, d’un logement approprié, de possibilités de formation et de l’accès à des services juridiques gratuits.

Nationalité

26.Le Comité est préoccupé de constater que l’ordonnance de 1971 relative à la nationalité ne confère pas aux femmes mosothos les mêmes droits qu’aux hommes en ce qui concerne l’acquisition ou la transmission de la nationalité. Il est préoccupé notamment par le fait que, contrairement aux hommes, les femmes mosothos ne peuvent transmettre leur nationalité à leur conjoint étranger. Il regrette que l’État partie n’ait pas la volonté politique de changer la situation. Il note en outre avec préoccupation que la population de l’État partie, en particulier dans les régions rurales et reculées, a du mal à obtenir un passeport.

Le Comité invite instamment l’État partie à:

a)Modifier sa législation relative à la nationalité de manière qu’elle soit pleinement conforme avec l’article 9 de la Convention;

b)Garantir à toute la population, y compris celle des régions rurales et reculées, la possibilité d’obtenir un passeport.

Éducation

28.Le Comité félicite l’État partie des progrès accomplis dans le domaine de l’éducation des filles et des femmes, dont témoigne le taux d’alphabétisation élevé (72 %), et de la promulgation en 2010 de la loi relative à l’éducation qui rend l’enseignement gratuit et obligatoire. Il est toutefois préoccupé par la forte baisse du taux de scolarisation dans l’enseignement primaire et secondaire ainsi que par la ségrégation sexuée des filières d’études au niveau postsecondaire, les filles étant concentrées dans les domaines d’études traditionnellement féminins tandis qu’elles sont sous-représentées dans l’enseignement professionnel et technique, avec pour conséquence une sous-représentation des femmes dans la main-d’œuvre rémunérée. Le Comité est en outre préoccupé par le nombre élevé de filles victimes de sévices et de harcèlement sexuels à l’école de la part tant des enseignants que des élèves et du nombre élevé de celles qui sont victimes d’agressions sexuelles sur le chemin de l’école.

Le Comité prie instamment l’État partie de se conformer plus strictement aux dispositions de l’article 10 de la Convention et de favoriser la prise de conscience de l’importance de l’éducation en tant que droit fondamental et en tant que base de l’autonomisation des femmes. À cette fin, il l’invite instamment à:

a)Assurer l’égalité d’accès des filles et des femmes à tous les niveaux et à tous les domaines de l’éducation, prendre des mesures pour accroître le nombre de filles dans l’enseignement secondaire et combattre les attitudes traditionnelles qui, dans certains domaines, peuvent faire obstacle à l’instruction des filles et des femmes;

b)Appliquer des mesures visant à éliminer les stéréotypes traditionnels et les obstacles d’ordre structurel susceptibles de dissuader les filles de faire des études de sciences ou de mathématiques au niveau secondaire ou supérieur du système éducatif;

c)Redoubler d’efforts en matière d’orientation professionnelle pour informer les filles des perspectives de carrière non traditionnelles dans des professions scientifiques;

d)Créer un environnement éducatif sûr et exempt de discrimination et de violence et garantir la sécurité des moyens de transport utilisés par les élèves entre leur domicile et l’école;

e)Renforcer les activités de sensibilisation et de formation des responsables d’établissements scolaires et des élèves ainsi que les campagnes de sensibilisation des enfants dans les médias; et établir des mécanismes permettant de signaler les cas de violence sexuelle et d’établir les responsabilités afin de garantir que les auteurs de sévices et de harcèlement sexuels fassent l’objet de poursuites et de sanctions.

Emploi

30.Le Comité prend note de la révision en 2011 des conditions de base en matière d’emploi des agents publics, en vertu de laquelle le congé de maternité payé a été porté de soixante à quatre-vingt-dix jours. Il est toutefois préoccupé par la persistance de la discrimination professionnelle, verticale et horizontale, et des écarts de salaire entre les femmes et les hommes (d’après l’enquête sur l’emploi et les rémunérations, effectuée par l’OIT en 2008, le salaire des femmes ne correspond qu’à 45 % du salaire mensuel moyen des hommes dans le secteur privé et à 83 % dans le secteur public). Il est également préoccupé par la concentration des femmes dans le secteur informel, où elles n’ont ni sécurité sociale ni prestations autres.

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a)De faire en sorte que toutes les femmes exerçant un emploi, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, aient droit à un congé de maternité payé;

b)D’adopter des lois qui garantissent l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale afin de réduire et de supprimer l’écart de salaire entre les femmes et les hommes, conformément à la Convention no 100 de l’OIT sur l’égalité de rémunération (1951);

c)De réglementer le secteur informel, afin que les femmes qui y travaillent aient accès aux prestations de sécurité sociale et autres;

d)D’adopter des mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la Recommandation générale no 25 du Comité, visant à atteindre l’égalité des chances de fait pour les hommes et les femmes sur le marché du travail.

Santé

32.Le Comité prend note des activités mises en place par l’État partie dans le domaine de la santé, telles que les campagnes visant à accélérer la réduction de la mortalité maternelle et les programmes pour une maternité sans risques mais il est préoccupé par le taux élevé de mortalité maternelle (970 pour 100 000 naissances vivantes). Il juge en outre préoccupant que l’avortement soit interdit, ce qui conduit des femmes à recourir à l’avortement clandestin et non médicalisé. Il est également préoccupé par l’accès limité des femmes à des services de santé sexuelle et génésique de qualité, en particulier dans les régions rurales et reculées.

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a)De prendre toutes les mesures qui s’imposent pour améliorer l’accès des femmes aux soins de santé et services connexes, conformément à la Recommandation générale no 24 du Comité;

b)D’intensifier ses efforts pour réduire la mortalité maternelle et infantile, améliorer l’information sur les structures sanitaires et les services médicaux dispensés par du personnel formé, en particulier dans les régions rurales et reculées, et améliorer l’accès des femmes à ces structures et services;

c)D’intensifier et de multiplier ses efforts pour faire mieux connaître et rendre plus accessibles des méthodes contraceptives peu coûteuses dans l’ensemble du pays et faire en sorte que les femmes des régions rurales et reculées ne rencontrent pas d’obstacles en ce qui concerne l’accès à une information et à des services dans le domaine de la planification familiale;

d)De promouvoir largement l’éducation dans le domaine de la santé sexuelle et génésique à l’intention des adolescents, filles et garçons, une attention particulière étant accordée à la question des grossesses précoces et de la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles, y compris le VIH/sida.

VIH/sida

34.Tout en prenant note des diverses initiatives prises par l’État partie pour prévenir et combattre le VIH/sida, y compris l’adoption en 2011 du Plan stratégique national de lutte contre le VIH/sida et du Plan d’action national relatif aux femmes, aux filles et au VIH/sida pour la période 2011-2016, le Comité est vivement préoccupé de constater que l’État partie fait face à une grave épidémie et que les femmes et les filles sont particulièrement touchées par le VIH. À ce sujet, il craint que les femmes et les filles ne soient particulièrement exposées à l’infection en raison des normes sexospécifiques qui prévalent et que la persistance de relations de pouvoirs inégales entre hommes et femmes et le statut inférieur des femmes et des filles n’entravent leur aptitude à négocier des pratiques sexuelles sûres et n’accroissent leur vulnérabilité à l’infection.

Le Comité demande instamment à l’État partie:

a)De s’employer systématiquement à limiter les effets du VIH/sida sur les femmes et les filles ainsi que ses conséquences sur la famille et la société;

b)De mettre davantage l’accent sur l’autonomisation des femmes, notamment en incluant, clairement et visiblement, une perspective sexospécifique dans ses politiques et programmes sur le VIH/sida et en renforçant le rôle des hommes dans toutes les mesures à prendre dans ce domaine;

c)De mener des campagnes de sensibilisation dans l’ensemble du pays, en particulier dans les régions rurales et reculées, et auprès des responsables des administrations en matière de prévention, de protection et de respect de la confidentialité afin de systématiser et d’intégrer les approches pour de multiples secteurs de l’administration.

Femmes vivant dans les zones rurales

36.Le Comité regrette que le rapport de l’État partie ne contienne pas de données sur la situation des femmes vivant dans les zones rurales et que selon l’État partie, il n’est pas nécessaire de protéger les droits de ces femmes par des dispositions spécifiques. Il est préoccupé par la situation défavorisée des femmes vivant dans les zones rurales et reculées, c’est-à-dire la majorité des femmes de l’État partie, qui se caractérise par la pauvreté, la difficulté d’accès aux services sanitaires et sociaux et l’absence de participation à la prise de décisions au plan local. Il est préoccupé en outre par les coutumes et les pratiques traditionnelles largement répandues qui empêchent tout particulièrement les femmes vivant dans les zones rurales d’hériter ou d’acquérir des biens fonciers ou autres.

Le Comité demande à l’État partie:

a)D’accorder une attention particulière aux besoins des femmes vivant dans les zones rurales pour garantir qu’elles aient accès aux services en matière de santé, d’éducation, d’eau potable et d’assainissement, à des terres fertiles et à des projets générateurs de revenus;

b)D’adopter des mesuresde lutte contre les coutumes et pratiques traditionnelles préjudiciables, en particulier dans les régions rurales, qui empêchent les femmes de jouir pleinement du droit à la propriété.

Mariage et relations familiales

38.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption, en 2011, de la loi sur la protection et le bien-être des enfants, qui a porté à 18 ans l’âge minimum du mariage, tant pour les mariages civils que pour les mariages coutumiers, mais il demeure préoccupé par les informations faisant état de la persistance du phénomène des mariages forcés et précoces. Il prend également note avec satisfaction de l’adoption de la loi de 2006 sur la capacité juridique des personnes mariées mais constate avec préoccupation que cette loi ne s’applique qu’aux personnes mariées selon les règles du droit romano-hollandais (common law) et non aux personnes mariées selon les règles du droit coutumier basotho. Il est en outre préoccupé par la persistance de lois et pratiques coutumières discriminatoires, en particulier dans les régions rurales et les communautés des zones reculées, concernant notamment le mariage et sa dissolution et les droits en matière d’héritage et de propriété.

Le Comité demande à l’État partie:

a)D’établir un code de la famille unifié, compatible avec la Convention, traitant les problèmes que posent l’inégalité en matière de droits successoraux, de propriété et de droits fonciers et la polygamie;

b)D’assurer l’égalité entre les femmes et les hommes dans le mariage et les relations familiales, de modifier sans délai toutes les dispositions et les réglementations administratives qui sont encore discriminatoires, y compris celles ayant trait à la famille, au mariage et au divorce, et de prendre toutes les mesures législatives nécessaires pour garantir que les femmes aient une part égale de l’ensemble des biens matrimoniaux, quelle qu’ait été leur contribution monétaire ou non monétaire, à ceux-ci;

c)D’interdire la polygamie conformément à la Recommandation générale no21 du Comité.

Institutions nationales de défense des droits de l’homme

40.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore pris de mesures pour créer une institution nationale de défense des droits de l’homme indépendante ayant pour large mandat de protéger et de promouvoir les droits des femmes, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris).

Le Comité recommande à l’État partie d’établir dans un délai précis une institution nationale de défense des droits de l’homme indépendante conforme aux Principes de Paris, qui devrait être chargée notamment des questions liées à l’égalité des femmes et des hommes.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite instamment l’État partie à s’appuyer pleinement, aux fins de l’exécution des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention, sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie de faire figurer des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne que l’application intégrale et effective de la Convention est indispensable à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Il prie l’État partie de tenir compte du genre et de prendre expressément en considération les dispositions de la Convention dans toute action visant la réalisation de ces objectifs, et le prie de lui communiquer des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Diffusion des observations finales

44.Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées au Lesotho pour que la population, en particulier les agents de l’État, les hommes politiques, les parlementaires, les organisations de femmes et les organisations de défense des droits de l’homme, prennent conscience des mesures prises pour assurer l’égalité dejure et de facto entre les sexes et de ce qui reste à faire dans ce domaine. Il recommande à l’État partie de diffuser ces observations également au niveau local et l’encourage à organiser une série de réunions afin d’examiner les progrès accomplis dans leur mise en œuvre. Il le prie de continuer de diffuser largement, notamment auprès des organisations de femmes et des organisations de défense des droits de l’homme, le texte de ses propres recommandations générales, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, ainsi que les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale intitulée: «Femmes en l’an 2000: égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIe siècle».

Ratification d’autres traités

Le Comité souligne que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribuerait à promouvoir la jouissance par les femmes des droits individuels et des libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc l’État partie à envisager de ratifier les instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de recourir à l’assistance technique pour l’élaboration et l’exécution de programmes complets visant à donner suite aux recommandations ci-dessus et à appliquer la Convention dans son ensemble. Il se dit prêt à poursuivre le dialogue avec l’État partie, notamment en organisant une visite de certains de ses membres dans le pays afin de fournir des directives complémentaires concernant l’application des recommandations ci-dessus et les obligations incombant à l’État partie en vertu de la Convention. Il invite également l’État partie à renforcer encore sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes des Nations Unies, notamment le Programme des Nations Unies pour le développement, l’ONU-Femmes, le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, l’Organisation mondiale de la santé, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et la Division de statistique et la Division de la promotion de la femme au sein du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat.

Suivi des observations finales

Le Comité prie l’État partie de lui communiquer, dans un délai de deux ans, des informations par écrit sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations figurant aux paragraphes 13 et 39 ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité prie l’État partie d’associer tous les ministères et organismes publics à l’établissement de son prochain rapport et de consulter diverses organisations de femmes et organisations de défense des droits de l’homme à cette occasion.

Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il établira en application de l’article 18 de la Convention. Il l’invite à présenter son prochain rapport en octobre 2015.

Le Comité invite l’État partie à suivre les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, approuvées lors de la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en juin 2006 (HRI/MC/2006/3 et Corr.1). Les directives sur l’établissement de rapports propres à un instrument international, que le Comité a adoptées à sa quarantième session en janvier 2008 (A/63/38, première partie, annexe I), doivent être appliquées concurremment avec les directives harmonisées relatives au document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages, et le document de base commun actualisé 80 pages.



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