Observations finales sur le cinquième rapport périodique de la Lituanie *
1.Le Comité a examiné le cinquième rapport périodique de la Lituanie (CEDAW/C/LTU/5) à ses 1229e et 1230e séances, le 9 juillet 2014 (voir CEDAW/C/SR.1229 ainsi et 1230). On trouvera la liste des points et des questions soulevés dans le document CEDAW/C/LTU/Q/5 et les réponses de la Lituanie dans le document CEDAW/C/LTU/Q/5/Add.1.
A.Introduction
2.Le Comité se félicite de la présentation par l’État partie de son cinquième rapport périodique, qui suit en général les directives du Comité concernant l’établissement de rapports périodiques. Il accueille également avec satisfaction les réponses écrites de l’État partie à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travailprésession et se félicite de la présentation orale faite par la délégation et des éclaircissements qu’elle a fournis, notamment par écrit, en réponse aux questions orales du Comité lors du dialogue.
3.Le Comité note que la délégation de l’État partie, qui était dirigée par le Vice-Ministre de la sécurité sociale et du travail, M. Gintaras Klimavičius, comprend des représentants de différents ministères et organismes étatiques et de la Mission permanente de la Lituanie auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève. Il apprécie le dialogue constructif qui s’est instauré entre la délégation et le Comité.
B Aspects positifs
4.Le Comité se félicite des progrès réalisés depuis l’examen des troisième et quatrième rapports périodiques de l’État partie (CEDAW/C/LTU/3 et CEDAW/C/LTU/4) en 2008 dans la mise en œuvre de réformes législatives, notamment :
a)Les modifications apportées en 2013 et 2014 au Code pénal et au Code de procédure pénale visant à améliorer l’efficacité des enquêtes et des sanctions prévues en matière d’exploitation sexuelle d’enfants et de violence à l’égard des femmes et le soutien immédiat à accorder aux victimes de cette délinquance;
b)La loi relative à l’assistance judiciaire adoptée en 2013;
c)les modifications apportées à la loi relative à l’égalité des chances des femmes et des hommes en 2012 et 2013, qui fait obligation aux institutions publiques et aux municipalités d’élaborer des programmes et des mesures visant à garantir l’égalité de traitement des hommes et des femmes et la prise en compte de telles mesures dans les plans stratégiques;
d)La loi relative à la protection contre la violence dans la famille de 2011.
5.Le Comité accueille avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, notamment par l’adoption des programmes nationaux suivants :
a)Programme national de prévention de la violence dans la famille et d’aide aux victimes pour la période 2014-2020;
b)Programme national de prévention des mauvais traitements infligés aux enfants pour la période 2011-2015;
c)Programme national pour l’égalité de chances des femmes et des hommes et son Plan d’action pour la période 2010-2014.
6.Le Comité se félicite du fait que, l’État partie a, au cours de la période qui s’est écoulée depuis l’examen du précédent rapport, ratifié les instruments internationaux suivants ou y a adhéré :
a) Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2014;
b) Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2013;
c) Convention relative aux droits des personnes handicapées et Protocole facultatif s’y rapportant, en 2010;
d) Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, en mai 2013.
C. Principaux domaines de préoccupation et recommandations
Parlement
7. Le Comité souligne le rôle crucial du pouvoir législatif dans l’application intégrale de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses relations avec les parlementaires adoptée à sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Parlement, conformément à son mandat, à prendre les mesures nécessaires en ce qui concerne la mise en œuvre des présentes observations finales d’ici à la présentation du prochain rapport périodique au titre de la Convention.
Visibilité de la Convention, du Protocole facultatif et des recommandations générales du Comité
8.Le Comité se réjouit des informations selon lesquelles la Cour suprême de Lituanie a, le 11 avril 2014, invoqué la Convention, en particulier son article 2, dans l’affaire civile n° 3K-3-199/2014. Le Comité note également que la Convention et son Protocole facultatif sont disponibles sur le site Web du Ministère des affaires étrangères et que les observations finales du Comité sont distribuées aux ministères, aux autorités et aux organisations non gouvernementales concernés. Il est néanmoins préoccupé par la méconnaissance de la Convention en général, des procédures prévues par le Protocole facultatif, qui permettent aux femmes de demander réparation en cas de violation de leurs droits, des recommandations générales et des vues du Comité, ainsi que des recommandations concernant les communications individuelles et les enquêtes.
9. Le Comité invite l’État partie à :
a) D iffuser et promouvoir la Convention, le Protocole facultatif, les recommandations générales du Comité auprès de toutes les couches de la société, et faciliter l’accès à l’information sur les vues et recommandations du Comité concernant les communications individuelles et les enquêtes, notamment à travers des programmes de renforcement des capacités à l’intention des avocats, des juges, des procureurs, des agents de police et des autres responsables de l’application des lois;
b) S ensibiliser les femmes aux droits que leur confère la Convention et aux voies de recours juridiques dont elles disposent aux niveaux national et local, notamment à travers des campagnes d’information et les médias.
Définition de l’égalité et de la non-discrimination
10.Le Comité note l’existence d’un solide cadre juridique et institutionnel permettant de garantir l’égalité et la protection contre la discrimination fondée sur divers motifs, notamment sur le sexe. Toutefois, le Comité est préoccupé par le fait que ni la loi sur l’égalité de traitement, ni celle sur l’égalité des chances entre femmes et hommes ne protègent suffisamment les femmes contre des formes multiples et conjuguées de discrimination fondées sur l’appartenance ethnique, l’âge, le handicap ou d’autres raisons. Il est particulièrement préoccupé par l’absence d’affaires concernant des formes multiples et conjuguées de discrimination devant les tribunaux.
11. Le Comité incite vivement l’État partie à modifier sa législation relative à la lutte contre la discrimination et à l’égalité des chances, afin de veiller à ce qu’elle protège explicitement les femmes contre des formes multiples ou conjuguées de discrimination.
Accès à la justice et voies de recours
12.Le Comité est préoccupé par le manque d’efficacité et de visibilité du Bureau du médiateur pour l’égalité de chances, le nombre réduit de plaintes traitées pour discrimination fondée sur le sexe (14 % seulement de l’ensemble des plaintes), ainsi quepar l’absence de données ventilées par sexe sur la répartition régionalede telles plaintes et sur le sort qui leur a été réservé. Il est également préoccupé par le retard accusé dans la nomination du nouveau médiateur de l’égalité des chances, ce poste étant resté vacant pendant plus de six mois, l’absence d’antennes régionales et locales du Bureau du médiateur, l’application limitée de sanctions administratives par le médiateur dans les affaires discrimination fondée sur le sexe et le manque de ressources financières et humaines du Bureau du médiateur.
13. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie :
a) N ommer sans tarder un médiateur de l’égalité des chances;
b) S ensibiliser les femmes aux voies de recours dont elles disposent pour faire valoir leurs droits en vertu de la Convention ;
c) C ollecter des données ventilées sur la répartition géographique des plaintes pour discrimination fondée sur le sexe et sur le sort qui leur a été réservé;
d) M ettre en place des cellules régionales et locales du Bureau du médiateur afin de faciliter l’accès des femmes sur tout le territoire de l’État partie et le doter de ressources financières et humaines suffisantes pour qu’elle puisse s’acquitter pleinement de sa mission de protection des droits de la femme et de promotion de l’égalité des sexes;
e) P rendre dûment en considération les vues et les recommandations du médiateur lors de l’adoption d’une législation ou la définition de politiques et programmes, en particulier en ce qui concerne l’égalité des sexes et les droits des femmes.
Mécanismes nationaux de promotion de la femme
14.Le Comité note avec préoccupation le mandat, l’autorité et le niveau de représentation restreints des différents ministères d’exécution au sein de la Commission de l’égalité des chances entre femmes et hommes, qui assure le suivi et la coordination de la mise en œuvre du Programme national pour l’égalité des chances entre femmes et hommes. Le Comité est également préoccupé par l’insuffisance des effectifs (trois salariés) du Service de l’égalité des sexes du Ministère de la sécurité sociale et du travail et des fonds qui lui sont consacrés (ce service joue le rôle de secrétariat de la Commission et met en œuvre des programmes en faveur de l’égalité des sexes), ainsi que par l’absence de mécanismes de coordination garantissant la prise en compte systématique de l’équité entre les sexes à l’échelon municipal. Le Comité est également préoccupé par le fait que le Programme national ne fait pas de différence entre les sexes et que l’évaluation des résultats obtenus dans sa mise en œuvre est insuffisante. Le Comité note l’insuffisance du financement des ONG de défense des droits des femmes et leur faible participation à la mise en œuvre du programme national.
15. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie :
a) renforcer le mandat et l’autorité de la Commission pour l’égalité des chances entre femmes et hommes et le niveau de représentation des ministères d’exécution, dans la Commission pour lui permettre de surveiller efficacement et de coordonner la mise en œuvre du programme national;
b) accroître les ressources financières et humaines du Service de l’égalité entre les sexes;
c) s’assurer que chaque ministère alloue un budget spécial à la mise en œuvre efficace du Programme national;
d) évaluer l’impact et les effets discriminatoires que les aspects non sexistes du Programme national pourraient avoir, dans la pratique, sur les femmes, dans la pratique, sur les femmes, du fait que les inégalités préexistantes entre les sexes n’ont pas été corrigées (Recommandation générale n° 28, par. 16);
e) surveiller l’efficacité du Programme national dans toutes les régions de l’État partie, en se fondant sur des objectifs et indicateurs assortis de délais et poursuivre son application au-delà de 2014;
f) accorder un financement suffisant aux organisations non-gouvernementales de défense des droits des femmes et à accroître leur participation à la mise en œuvre du Programme national.
Institutions nationales de défense des droits de l’homme:
16.Tout en notant que l’État partie a nommé un médiateur du Seimas (Parlement), un médiateur de l’égalité des chances et un médiateur des enfants, le Comité est préoccupé par l’absence d’une institution nationale pour les droits de l’homme en conformité avec les Principes qui régissent le statut reconnu aux institutions nationales de promotion et de protection des droits de l’homme (Principes de Paris).
17. Le Comité recommande à l’État partie d’établir, dans un délai clairement défini, une institution nationale pour les droits de l’homme indépendante, conformément aux Principes de Paris, dont les compétences incluraient les questions relatives à l’égalité des femmes et des hommes.
Mesures temporaires spéciales
18.Le Comité constate une fois de plus avec inquiétude qu’aucune mesure temporaire spéciale n’a été adoptée par l’État partie afin d’accélérer l’égalité des femmes et des hommes, malgré le fait que la loi sur l’égalité des chances entre femmes et hommes (art. 2) et le Plan d’action du Programme national prévoient l’adoption de telles mesures si une législation spécifique est adoptée par le Parlement.
19. À la lumière de ses observations finales précédentes ( CEDAW/C/LTU/CO/4 , par. 13), le Comité recommande à l’État partie d’’adopter des mesures temporaires spéciales pour promouvoir l’égalité des femmes et des hommes dans des domaines tels que l’éducation, l’emploi et la participation à la vie politique et publique, ainsi que pour faire face à la situation des femmes défavorisées dans tous les domaines couverts par la Convention. Le Comité recommande de modifier la loi sur l’égalité des chances entre femmes et hommes, afin de simplifier la procédure prévue pour l’adoption et l’application de telles mesures. Le Comité invite l’État partie à veiller à ce que tous les fonctionnaires concernés soient familiarisés avec la notion de mesures temporaires spéciales, et à encourager leur application conformément à l’article 4 (1) de la Convention et la Recommandation générale n°25 sur la question.
Les stéréotypes
20.Le Comité réaffirme sa préoccupation face à la persistance d’attitudes patriarcales et de stéréotypes profondément enracinés concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, qui continuent de transparaître dans les médias, les matériels éducatifs, les choix traditionnels des femmes en matière d’éducation et la position défavorisée qu’elles occupent sur le marché du travail, ainsi que dans la généralisation de la violence à l’égard des femmes. Le Comité est également préoccupé par le fait que les médias véhiculent constamment des stéréotypes et parfois des images dégradantes de la femme, et que la surveillance et le contrôle de telles représentations laissent à désirer.
21. Le Comité recommande à l’État partie d’inclure l’élimination des stéréotypes sexistes comme domaine prioritaire lors de l’élaboration d’un nouveau Programme national pour l’égalité des femmes et des hommes et son Plan d’action. Le Comité recommande également à l’État partie d’examiner en priorité les manuels scolaires et matériels pédagogiques à tous les niveaux d’éducation, afin d’éliminer les stéréotypes sexistes et d’inciter les médias à projeter une image positive des femmes et de l’égalité de condition des femmes et des hommes dans la vie privée et la vie publique.
La violence à l’égard des femmes, notamment la violence dans la famille
22.Tout en se félicitant de la signature de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique en juin 2013, le Comité se dit préoccupé par le nombre élevé de cas de violence à l’égard des femmes dans l’État partie et regrette que l’État partie n’ait pas adopté une stratégie globale visant à éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes, tant dans la vie publique et que dans la vie privée. Le Comité est également préoccupé par le manque d’informations sur l’évaluation de la mise en œuvre de la Stratégie nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes pour la période 2010-2012, ce qui souligne l’absence d’un suivi approprié de la mise en œuvre des politiques et mesures et de l’évaluation des résultats obtenus. Le Comité est en outre préoccupé par l’insuffisance des données sur les actes de violence à l’égard des femmes signalés, ayant fait l’objet d’enquêtes ou de poursuites et par l’insuffisance de l’aide aux femmes victimes de violence et des refuges qui leur sont offerts.
23. Rappelant sa Recommandation générale n°19 (1994) sur la violence à l’égard des femmes, le Comité invite instamment l’État partie à :
a) A ccélérer l’harmonisation de la législation avec la Convention et ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique et l’harmonisation;
b) A dopter une stratégie globale, qui viendrait compléter le Programme pour la prévention de la violence familiale et l’assistance aux victimes pour 2014-2020, qui vise à éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes, tant dans la vie publique que dans la vie privée, et mettre en place un mécanisme approprié de coordination et de suivi, ou en confier la mission à une structure existante, afin de prévenir et d’éliminer efficacement toutes les formes de violence à l’égard des femmes;
c) R ecueillir, analyser et publier régulièrement des données sur les actes de violence à l’égard des femmes et des filles signalés, ayant fait l’objet d’enquêtes ou de poursuites;
d) C réer des centres de crise ouverts en permanence, qui offrent protection et assistance à toutes les femmes victimes de violence;
c) V eiller à une répartition géographique correcte des refuges et à leur nombre, et fournir une gamme de services aux victimes.
24.Le Comité note avec satisfaction l’adoption de la loi sur la protection contre la violence domestique, qui porte sur la violence à l’égard des femmes dans le cadre de relations intimes. Le Comité note également l’adoption du Programme national pour la prévention de la violence domestique et la fourniture d’une assistance aux victimes pour la période 2014-2020, le fait que le Plan d’action pour 2014-2016 est actuellement en préparation, ainsi que la création du groupe de travail interinstitutions de coordination de la protection contre la violence domestique. Il est toutefois préoccupé par les lois et politiques ne faisant pas de différence entre les sexes, ce qui a des répercussions sur leur application effective, par l’insuffisance des services offerts, le caractère limité de la surveillance et de l’exécution des ordonnances de protection imposées aux auteurs d’actes de violence et le faible nombre de poursuites et de condamnations dans les affaires de violence familiale. Le Comité est également préoccupé par l’usage excessif de la médiation conciliatrice avec les victimes de la violence domestique et la possibilité d’introduire la possibilité d’une action conciliatrice dans la procédure pénale. Il est en outre préoccupé par le fait que le viol conjugal n’est pas explicitement érigé en infraction pénale.
25. Le Comité engage vivement l’État partie à :
a) V eiller à ce que la loi sur la protection contre la violence domestique et les politiques y relatives soient mises en œuvre dans un souci de parité;
b) A ppliquer résolument les ordonnances de protection imposées aux auteurs de violence domestique et en garantir le respect;
c) P oursuivre en justice et punir les auteurs d’actes de violence domestique avec détermination;
d) M ettre fin au recours à la médiation conciliatrice pour les victimes de la violence domestique et s’abstenir de l’introduire dans les procédures pénales, dans la mesure où de telles procédures sont susceptibles d’accroître la vulnérabilité des femmes victimes de violence;
e) M odifier son Code pénal afin de criminaliser explicitement le viol conjugal.
La traite de femmes et l’exploitation de la prostitution
26.Le Comité est préoccupé par l’absence d’une législation globale et de stratégies de lutte contre la traite de personnes, en particulier de femmes et d’enfants, et le fait que l’État partie demeure une pays d’origine, de transit et de destination de femmes et de filles victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle. Il est également préoccupé par la diminution du nombre de poursuites et de condamnations d’auteurs de traite d’êtres humains, les possibilités limitées de formation des agents chargés de l’application des lois sur la prise en compte de la problématique hommes-femmes dans les enquêtes en matière de traite et l’absence de mise à jour des données ventilées par sexe sur la traite d’êtres humains. Le Comité regrette le manque d’informations et de données sur l’ampleur du phénomène de la prostitution et le nombre limité de mesures prises par l’État partie pour réduire la demande de prostitution et offrir d’autres possibilités d’activités génératrices de revenus aux femmes qui veulent sortir de la prostitution.
27. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie:
a) A dopter une législation globale et des politiques de lutte contre la traite d’êtres humains, en particulier de femmes et d’enfants, et veiller à ce que les victimes soient dûment identifiées et bénéficient d’une protection et d’une assistance appropriées;
b) G arantir l’efficacité des poursuites et des sanctions infligées en cas de traite;
c) R enforcer les capacités des agents chargés de l’application des lois, notamment les agents de police, les procureurs et les magistrats, les fonctionnaires de l’immigration ainsi que les travailleurs sociaux en matière d’intégration des questions d’égalité des sexes dans la prise en charge des victimes de la traite;
d) V eiller à ce que les femmes et les filles victimes de la traite aient accès à des soins médicaux, à l’assistance judiciaire, à un soutien psychosocial et à des programmes de réadaptation et de réinsertion, indépendamment de leur capacité ou de leur volonté de témoigner contre les trafiquants;
e) I mposer des sanctions appropriées aux agents chargés de l’application des lois jugées coupables dans des affaires de traite;
f) S ’attaquer aux causes profondes de la traite et de la prostitution et redoubler d’efforts afin d’offrir aux femmes et aux filles des chances d’éducation et des possibilités de mener des activités génératrices de revenus, ce qui permettra ainsi de réduire, autant que possible, leur vulnérabilité à l’exploitation;
g) P rendre des mesures appropriées pour lutter contre l’exploitation de la prostitution des femmes, notamment en criminalisant la demande de prostitution.
Participation à la vie politique et publique
28.Le Comité se félicite que l’État partie ait permis le recrutement d’un nombre élevé de femmes dans sa fonction publique et la nomination de femmes à deux des trois fonctions les plus hautes de l’État. Le Comité est néanmoins préoccupé par le fait qu’aucune mesure particulière n’ait été appliquée dans le cadre d’une stratégie globale en vue d’accélérer la réalisation de l’égalité réelle entre femmes et hommes dans la vie politique et publique et que la promotion de la participation des femmes issues de groupes défavorisés, notamment celles qui vivent dans les zones rurales, qui appartiennent à des minorités ethniques ou qui sont handicapées, à la vie politique et publique. Il est également préoccupé par la discrimination à l’égard des femmes politiques fondée sur les stéréotypes qui ont actuellement cours.
29. Conformément à sa Recommandation générale n°19 sur les femmes dans la vie politique et publique, le Comité invite instamment l’État partie à :
a) A dopter des mesures temporaires spéciales, conformément à l’article 4 (1) de la Convention et à la Recommandation générale n° 25 sur la question, notamment les quotas, afin d’accroître la participation des femmes, en particulier celles qui vivent dans les zones rurales, qui appartiennent à des minorités ethniques ou qui sont handicapées dans la vie politique et publique;
b) D e prendre des mesures visant à éliminer les stéréotypes à l’égard des femmes politiques.
Nationalité
30.Le Comité note avec préoccupation les effets néfastes de la législation nationale régissant la citoyenneté sur les femmes et les filles, dans la mesure où elle n’accorde pas automatiquement la nationalité aux enfants nés sur le territoire de l’État partie de parents apatrides qui ne sont pas résidents permanents en Lituanie. Le Comité est préoccupé par la situation des enfants roms au regard de la nationalité.
31. Le Comité encourage l’État partie à mettre la législation nationale régissant la nationalité, conformément à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, notamment en prévoyant l’octroi automatique de la nationalité à tous les enfants nés en Lituanie, en particulier des enfants roms, qui, autrement, seraient apatrides.
Éducation
32.Le Comité reconnaît les réformes des programmes nationaux concernant l’éducation de base obligatoire, qui englobent des mesures visant à promouvoir l’égalité des sexes. Il demeure préoccupé par les stéréotypes et les obstacles structurels qui ont des répercussions négatives sur le taux de scolarisation des filles dans les secteurs d’éducation et les domaines professionnels non traditionnels, par les stéréotypes sexistes que véhiculent les manuels scolaires, par l’absence d’une éducation adéquate sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, et par le faible nombre de femmes occupant des postes de direction ou de professeur dans les établissements d’enseignement. Le Comité est également préoccupé par le placement des jeunes filles roms dans des écoles ou des classes spéciales, les taux élevés d’abandon scolaire de celles-ci dans l’éducation primaire et leur faible taux de fréquentation scolaire.
33. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie :
a) É liminer les stéréotypes et les obstacles structurels susceptibles de décourager la scolarisation des filles dans les secteurs d’éducation et les domaines professionnels non traditionnels, à tous les niveaux;
b) E nvisager l’adoption de mesures temporaires spéciales afin d’accélérer la nomination de femmes dans des établissements d’enseignement, notamment par la définition d’objectifs et de délais clairs visant à favoriser le recrutement de femmes à des postes de direction dans les établissements d’enseignement;
c) R evoir tous les manuels scolaires afin d’éliminer les stéréotypes sexistes;
d) O ffrir aux filles et aux garçons une éducation adaptée à leur âge sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, notamment sur les comportements sexuels responsables, afin de prévenir les grossesses précoces et les maladies sexuellement transmissibles;
e) P oursuivre les réformes juridiques et politiques à fin de permettre à toutes les filles de jouir du droit à l’éducation et, à cette fin, assurer la scolarisation des filles et des garçons roms dans les classes ordinaires des écoles primaires, plutôt que dans des écoles ou classes pour enfants ayant des besoins spéciaux;
f) R éduire les taux élevés d’abandon scolaire des filles roms dans l’enseignement primaire et prendre des mesures efficaces pour qu’elles continuent d’aller à l’école et accroître leurs effectifs dans l’enseignement secondaire grâce à des mesures telles que l’octroi de bourses et la fourniture gratuite de manuels scolaires.
Emploi
34.Le Comité note que l’écart de rémunération entre les sexes a diminué, passant de 22,6 % en 2007 à 11,9 % en 2011. Il est néanmoins préoccupé par la forte ségrégation horizontale et verticale entre hommes et femmes sur le marché du travail, le faible taux d’activité des femmes (62 %), le manque de service de conseils à l’intention des filles et des femmes sur les choix en matière d’éducation et de formation professionnelle dans des domaines non traditionnels et les possibilités de carrière, et la non-application du principe « à travail égal, salaire égal ». Le Comité est également préoccupé par le taux élevé de chômage chez les migrantes et les femmes roms, les mères célibataires, les femmes âgées et les femmes handicapées. Il regrette que le pourcentage d’hommes qui prennent un congé parental reste faible. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que sa précédente recommandation en faveur d’une modification de la loi sur l’égalité des chances des femmes et des hommes dans le souci d’inclure des plans en faveur de l’égalité contraignants pour les employeurs publics et privés n’a pas été mis en œuvre.
35. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie :
a) P rendre des mesures spécifiques pour éliminer la ségrégation horizontale et verticale entre femmes et hommes sur le marché du travail, notamment des mesures temporaires spéciales destinées à promouvoir l’accès des femmes, en particulier des jeunes femmes, à toutes les formes d’emploi et de profession, et mettre à jour sa législation et ses politiques nationales, afin de promouvoir l’égalité des chances et l’égalité de traitement des femmes en matière d’emploi et de profession.
b) M ettre au point des programmes de soutien visant à fournir des conseils aux filles et aux femmes sur les choix en matière d’éducation et de formation professionnelle dans des domaines non traditionnels et les possibilités de carrière, par exemple en science et technologie;
c) V eiller à l’application effective des dispositions du Code du travail concernant l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, notamment par le biais des inspections du travail et l’imposition de sanctions, et améliorer l’efficacité des dispositions relatives à la rémunération, en particulier à travers des campagnes d’information et de sensibilisation menées par des associations d’employeurs et des syndicats de l’État partie;
d) P rendre les dispositions nécessaires en vue de l’insertion et de la participation effective des femmes appartenant à des groupes défavorisés, notamment les femmes migrantes, les femmes roms, les mères célibataires, les femmes âgées, les femmes handicapées, au marché du travail.
e) P oursuivre ses efforts en vue d’assurer la compatibilité entre responsabilités professionnelles et familiales, favoriser le partage égal des tâches domestiques et familiales entre hommes et femmes, notamment par des mesures incitant les hommes à prendre un congé parental, et garantir la mise en place de services et d’installations de garderie d’enfants abordables et accessibles;
f) M odifier la loi sur l’égalité des chances entre femmes et hommes à fin d’inclure des plans en faveur de l’égalité contraignants pour les employeurs publics et privés, tout en traitant de la question de la rémunération et en adoptant des politiques favorables à la famille.
Santé
36.Le Comité est préoccupé par le projet de loi de 2013 visant à introduire des restrictions à l’avortement médicalisé et licite et par l’accès limité à des contraceptifs Il est vivement préoccupé par les dispositions qui permettent l’avortement et la stérilisation forcés de femmes ayant une déficience intellectuelle sans l’autorisation d’un tribunal. Le Comité regrette que le projet de loi régissant la santé en matière de procréation n’ait pas encore été adopté et que la procréation assistée ne soit pas subventionnée, en dépit du faible taux de fécondité.
37. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie :
a) S ’abstenir d’adopter des lois ou d’apporter des modifications législatives qui restreindraient le droit des femmes à un avortement licite et médicalisé et adopter plutôt les projets actuels de lois relatives à la santé et à l’assis tance en matière de procréation;
b) V eiller à ce que les femmes et les filles, notamment celles qui vivent en milieu rural, puissent bénéficier de mét hodes modernes de contraception;
c) M ener des enquêtes sur les allégations d’avortement et de stérilisation forcés de femmes ayant une déficience intellectuelle dans des établissements de soins, mettre en place des protocoles garantissant le respect de l’exigence légale d’une autorisation d’un tribunal dans les cas d’avortement et de stérilisation, et veiller à ce que les contrevenants à la loi soient punis .
Femmes vivant en milieu rural, femmes âgées et femmes handicapées
38.Le Comité note que le Ministère de la sécurité sociale et du travail a mené une étude sur la condition des femmes vivant en milieu rural, des femmes âgées, des femmes handicapées et d’autres groupes défavorisés de femmes, à la lumière des recommandations du Comité (CEDAW/C/LTU/CO/4, par. 29). Le Comité est préoccupé par les risques d’extrême pauvreté auxquelles les femmes vivant en milieu rural sont confrontées, par leur faible représentation dans les instances de décision et leur accès limité aux services, notamment à des refuges destinés aux victimes de la violence domestique. Il est préoccupé par le « féminisation du troisième âge », les femmes seules constituant la majorité de cette classe d’âge, et par le manque de centres de soins pour personnes âgées permettant de faire face aux besoins des femmes âgées, en particulier celles qui vivent seules et celles qui ne bénéficient aucun soutien familial Le Comité se dit également préoccupé par le fait que les femmes handicapées souffrent de formes multiples de discrimination, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et la participation à la vie politique, le niveau de la violence à leur égard et le manque de services spécialisés pour prendre en charge les victimes. CEDAW/C/LTU/CO/5 CEDAW/C/LTU/CO/5 CEDAW/C/LTU/CO/5
39. Le Comité recommande ce qui suit à l’État partie :
a) É laborer des politiques et programmes d’ensemble visant l’autonomisation économique et politique des femmes vivant en milieu rural et garantir à celles-ci l’accès à la santé, à l’éducation et aux services, notamment à des refuges destinés aux victimes de la violence domestique;
b) C onformément à la Recommandation générale n° 27 sur les femmes âgées et la protection de leurs droits fondamentaux, accorder une attention particulière à la situation précaire des femmes âgées, notamment les plus âgées d’entre elles, élaborer des mesures permettant de faire face correctement à leur situation sanitaire, économique et émotionnelle, afin d’éviter la pauvreté et l’isolement, et de garantir la mise en place de centres de soins pour faire face aux besoins des femmes âgées et de celles qui ne bénéficient pas d’un soutien familial.
c) R evoir la législation contre la discrimination, afin de l’interdire à l’égard des personnes handicapées dans les sphères publique et privée et mettre en place des voies de recours, des sanctions et des mécanismes de plainte en faveur des femmes handicapées, s’agissant notamment des cas où les formes de discrimination qu’elles subissent sont multiples et conjuguées.
d) M ener des actions spécifiques pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes handicapées, grâce à la mise en place de refuges accessibles et à des permanences téléphoniques fonctionnant 24 heures sur 24 pour le soutien aux victimes, assurer la formation des agents de police et la sensibilisation à cette violence.
Mariage et relations familiales
40.Le Comité est préoccupé par le projet de révision constitutionnelle qui vise à limiter la définition de la famille aux couples mariés ayant au moins un enfant Il constate avec inquiétude la modification du Code civil adoptée en juin 2010 concernant l’âge légal du consentement au mariage, qui autorise les tribunaux à réduire cet âge d’une durée n’excédant pas deux ans pour les personnes ayant l’intention de se marier avant l’âge de 18 ans, pendant que les tribunaux peuvent autoriser le mariage avant l’âge de 16 ans en cas de grossesse.
41. Le Comité encourage l’État partie à :
a) S ’abstenir d’adopter une définition restrictive de la famille et assurer effectivement le suivi de l’impact de la modification proposée sur les différentes formes de famille, comme le rappelle la Recommandation générale n° 21 sur l’égalité dans les relations conjugales et familiales;
b ) A broger sans tarder les dispositions discriminatoires induites par la modification du Code civil, qui abaisse l’âge légal du consentement au mariage.
Déclaration et Programme d’action de Beijing
42. Le Comité invite instamment l’État partie à mettre à profit la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, dans le cadre de l’application des dispositions de la Convention.
Objectifs du Millénaire pour le développement et programme de développement pour l’après-2015
43. Le Comité recommande la prise en compte de la problématique hommes-femmes, conformément aux dispositions de la Convention, dans toutes les initiatives visant la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015.
Diffusion
44. Le Comité rappelle l’obligation de l’État partie de mettre en œuvre systématiquement et sans relâche les dispositions de la Convention. Il invite instamment l’État partie à accorder une attention prioritaire à la mise en œuvre des présentes observations finales et recommandations d’ici à la présentation de son prochain rapport .périodique Le Comité préconise, par conséquent, la diffusion en temps opportun des observations finales dans la(les) langue(s) officielle(s) de l’État partie auprès des institutions étatiques concernées à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier le Gouvernement, les ministères, le Parlement et le secteur judiciaire, afin de faciliter leur mise en œuvre intégrale Il encourage l’État partie à collaborer avec toutes les parties concernées, notamment les associations d’employeurs, les syndicats, les organisations des droits de l’homme et les organisations féminines, les universités et les institutions de recherche, les médias. Le Comité recommande également la diffusion de ses observations finales sous une forme adaptée aux communautés locales, afin d’en faciliter la mise en œuvre En outre, le Comité invite l’État partie à diffuser la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, son Protocole facultatif et sa jurisprudence y relatives, ainsi que les recommandations générales du Comité, auprès de toutes les parties intéressées.
Ratification des autres traités
45. Le Comité note que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme permettrait aux femmes de jouir de leurs droits fondamentaux dans tous les aspects de la vie. Par conséquent, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, à laquelle il n’est pas partie.
Suivi des observations finales
46. Le Comité invite l’État partie à fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures prises pour mettre en œuvre le recommandations contenues aux points a), b), c), et e) du paragraphe 15 et b), c) et d) du paragraphe 23
Préparation du prochain rapport
47. Le Comité invite l’État partie à soumettre son sixième rapport périodique en juillet 2018.
48. Le Comité invite l’État partie à assurer le suivi des directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument ( HRI/MC/2006/3 ).