245. Le Comité a examiné le rapport initial des Pays-Bas (CEDAW/C/NET/1 et Add.1 à 3) à ses 234e et 239e séances, les 17 et 20 janvier 1994 (voir CEDAW/C/SR.234 et 239).
246. En présentant le rapport des Pays-Bas — qui est divisé en trois parties, l'une concernant la métropole, les deux autres ses territoires insulaires autonomes des Antilles néerlandaises et d'Aruba — la représentante de ce pays a rappelé que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes était au nombre des instruments internationaux de protection des droits fondamentaux qui étaient intégrés dans la législation et les schémas d'orientation de l'État néerlandais. Le Gouvernement se basait sur elle pour réviser le droit interne et pour établir les grandes orientations et les programmes qui devaient permettre aux femmes d'accéder à l'égalité. La représentante des Pays-Bas a indiqué d'importantes révisions et additions qui avaient été apportées à la législation nationale à la suite de la ratification de la Convention.
247. Il n'était pas toujours facile d'imposer le principe de l'égalité des sexes dans toutes les divisions de l'administration néerlandaise ni de coordonner les mesures en ce sens, du fait de la dispersion des structures responsables des décisions administratives et politiques, qui nuisait à l'efficacité du dispositif national. Pour remédier à ce problème, on avait notamment fait de la division de l'administration chargée de coordonner la politique d'émancipation un organe particulièrement compétent pour tout ce qui concerne l'action visant à instaurer l'égalité des sexes. Cette action consistait en partie à aider au financement des activités entreprises par les organisations non gouvernementales dans ce domaine.
248. La représentante des Pays-Bas a rappelé que lorsque son pays signait un instrument, celui-ci était automatiquement intégré dans le droit interne et les lois et règlements qui étaient incompatibles avec lui perdaient leur effet. En expliquant la procédure de ratification, elle a annoncé qu'une loi générale sur l'égalité de traitement serait très bientôt adoptée. Le Gouvernement devait rendre compte au Parlement de l'application de la Convention quatre ans après l'entrée en vigueur de celle-ci, puis tous les quatre ans. On avait une illustration concrète du soutien gouvernemental à l'émancipation des femmes avec le rapport "parallèle" établi par les organisations non gouvernementales à l'intention du Comité et qui était à considérer en regard du rapport officiel car il donnait une idée juste des relations que le Gouvernement entretenait avec les organisations bénévoles privées, et avec le rapport supplémentaire établi par l'organe consultatif indépendant qui faisait partie du dispositif national.
249. La représentante des Antilles néerlandaises a déclaré que l'examen des rapports sur la suite donnée à la Convention permettait non seulement de mesurer plus concrètement certaines des failles de l'infrastructure censée aider à l'application de cet instrument, mais mettait aussi en évidence les lacunes générales des rapports eux-mêmes, par exemple en ce qui concerne les données statistiques. Cette représentante a souligné la corrélation existant entre les activités économiques et la condition des femmes et a affirmé que le Gouvernement des Antilles néerlandaises ne prendrait jamais prétexte de l'état de l'économie de ce territoire pour s'abstenir d'appliquer la Convention. Cette application, cependant, pouvait être retardée par différents facteurs locaux.
250. Le chômage des femmes avait diminué depuis quelques années dans les îles. Il venait d'être décidé d'appliquer à tous les fonctionnaires, hommes et femmes, le principe de l'égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. Des programmes de sensibilisation à la question de l'égalité avaient été réalisés. Le Bureau de la femme jouait un rôle important, coordonnant les actions nationales visant à associer les femmes au développement; l'une des priorités de son action était de protéger les femmes contre la violence.
251. La représentante d'Aruba a dit que l'entrée en vigueur de la Convention avait rehaussé les droits des femmes de l'île. La rapide expansion économique des cinq années précédentes avait entraîné une très forte augmentation de la proportion de femmes sur le marché du travail, proportion qui avait dépassé 50 % en 1993. Mais les conditions de travail et les services sociaux n'avaient pas évolué au même rythme et restaient à aménager pour permettre aux femmes de mieux concilier vie professionnelle et tâches familiales. Le Gouvernement étudiait donc s'il serait possible d'instituer le travail à mi-temps et d'augmenter le nombre de garderies d'enfants.
252. Selon la représentante d'Aruba, si les femmes se mobilisaient assez peu pour défendre leurs droits, cela était dû au poids des facteurs économiques dans certains domaines importants de la vie de la société. Mais ce groupe était à l'avant-garde lorsqu'il s'agissait d'informer sur le sida et la séropositivité, ou de protéger les enfants contre les mauvais traitements en menant des actions de sensibilisation et de prévention. Un Comité des droits de l'homme créé à Aruba en 1993 et chargé d'établir les rapports prévus par la Convention était habilité à conseiller le Gouvernement et à faire campagne pour sensibiliser à la notion de droits de l'homme une société où n'existait pas de réseau d'organisations non gouvernementales. Le Comité avait introduit l'éducation aux droits fondamentaux dans les programmes scolaires. La Convention avait été traduite en papiamento et une version simplifiée en avait été présentée au public.
Observations générales
253. Le Comité a fait l'éloge du rapport des Pays-Bas, qui suivait les directives générales, apportait beaucoup de renseignements et de précisions et contenait un grand nombre de statistiques et de diagrammes, et a aussi loué la manière dont ce document avait été présenté. Il a noté avec satisfaction que l'État partie avait ratifié la Convention sans réserve et avait révisé et étoffé son droit interne conformément à cet instrument. Le Comité a également noté que l'éducation aux droits fondamentaux faisait maintenant partie des programmes scolaires d'Aruba et que la Convention avait été traduite dans la langue autochtone de cette île. Il était bien que le Gouvernement rende compte de la situation au Parlement un an avant de présenter son prochain rapport au Comité. Il fallait se féliciter de l'attitude positive adoptée à l'égard de la question de la préférence sexuelle. Le Comité a noté que le Gouvernement soutenait les groupes féminins. Certains de ses membres ayant demandé pourquoi les organisations non gouvernementales n'avaient pas été consultées lors de l'établissement du rapport, la représentante de l'État partie a souligné que son pays prenait grand soin de répartir également les pouvoirs et responsabilités et a expliqué que les organisations non gouvernementales, qui étaient indépendantes, n'avaient à répondre de leur action que devant les groupes auxquels elles s'adressaient; elles pouvaient critiquer, contester ou juger la politique du Gouvernement mais n'en portaient jamais la responsabilité. Leurs demandes présentaient parfois un défi au Gouvernement, mais il ne faisait jamais intervenir ces organisations dans sa politique car elles devaient conserver toute leur indépendance.
254. Des membres du Comité s'étant enquis de la réaction du Gouvernement néerlandais sur certains points du rapport parallèle des organisations non gouvernementales, la représentante de l'État partie a jugé qu'il n'était pas nécessaire de s'arrêter sur les questions abordées dans ce rapport puisque bon nombre d'entre elles seraient traitées dans le cadre des différents articles de la Convention.
255. La représentante de l'État partie a expliqué que si le rapport ne renseignait pas davantage sur les résultats obtenus et n'analysait pas plus en détail la situation des femmes et la politique adoptée par le Gouvernement, comme on l'avait fait observer, cela tenait en partie à ce que les éléments utilisés pour établir ce document provenaient de différents services de l'administration et qu'il avait été difficile de suivre les directives du Comité tout en faisant ressortir les priorités de l'action nationale. Il semblait aux membres du Comité que les résultats n'étaient pas à la mesure de tous les efforts qui avaient été faits.
256. Tandis que certains membres du Comité retenaient surtout la dispersion des structures, d'autres ont vu dans le dispositif national la manifestation de la volonté qu'avait le Gouvernement d'intégrer la protection des droits des femmes dans le cours normal de son action. La représentante de l'État partie a fait valoir que ce que l'on entendait par dispositif national dans son pays était un ensemble d'organismes qui s'appliquaient chacun à améliorer la situation des femmes dans un domaine différent. La politique d'émancipation relevait dans son principe du Secrétariat d'État aux affaires sociales et à l'emploi et son application était assurée essentiellement par la division de l'administration chargée de la coordination. Le dispositif comprenait aussi le Conseil de l'émancipation et la Commission de l'égalité des chances; enfin, divers services et divisions de l'administration, les pouvoirs publics locaux et régionaux, les syndicats et les organisations non gouvernementales jouaient également un rôle. Dans leurs remarques sur ce point, les membres ont demandé si le transfert de responsabilité en ce qui concerne les questions intéressant les femmes aux pouvoirs publics locaux et régionaux ne comportait pas des dangers, et ont demandé que des informations à ce sujet soient fournies dans les prochains rapports.
257. Des membres du Comité ayant dit que les questions concernant les femmes devaient être intégrées dans le cours normal des actions de toutes les divisions de l'administration des Antilles néerlandaises, la représentante de ces îles a rappelé que le dispositif à cette fin avait commencé à fonctionner en 1989 et qu'il relevait du Ministre des affaires générales, qui était actuellement le Premier Ministre. La Convention figurait parmi les sujets des journées d'étude consacrées aux droits de l'homme et aux méthodes d'établissement des rapports organisées par le Gouvernement en 1992 à l'intention de participants appartenant à différentes couches sociales. Il fallait que les services intéressés reçoivent de toutes parts des informations sur la situation des femmes afin de pouvoir affronter les problèmes de façon organisée. Actuellement, la collecte des données n'était pas suffisamment uniforme et les études sur la situation dans les cinq îles se heurtaient à des difficultés pratiques, en raison de la décentralisation dans plusieurs domaines et de la spécificité des besoins et des caractères des différentes îles. Le Bureau de la femme avait compris la nécessité d'études démographiques et élaborait un projet général d'orientations visant à associer les femmes au développement.
258. La représentante d'Aruba a indiqué que le Gouvernement avait créé en 1986 à la Direction des affaires sociales un organe de coordination pour les questions se rapportant aux femmes. Mais malgré tous les efforts faits, cela ne s'était pas encore traduit par une politique interministérielle d'émancipation.
259. Les membres du Comité espéraient que les îles seraient informées de la présentation de leur rapport et des réactions qu'il avait suscitées.
Questions concernant l'application de certains articles
Article 2
260. Répondant aux questions sur le sens de l'énoncé "comment fonctionne la Constitution en ce qui concerne l'égalité de traitement dans les relations horizontales" relevé dans le rapport, la représentante des Pays-Bas a précisé que ces "relations horizontales" étaient les relations entre les citoyens, par opposition aux "relations verticales" entre les citoyens et l'État. L'une des principales fonctions des dispositions de loi contre la discrimination était de préciser dans quels cas les citoyens pouvaient agir selon leurs convictions propres et dans quels cas ils devaient faire primer les droits fondamentaux d'autrui.
261. Faisant l'éloge des mesures adoptées face au problème de la violence contre les femmes, des membres du Comité ont demandé lesquelles de ces mesures avaient donné les meilleurs résultats et quelle était l'importance des moyens financiers consacrés à cette action. La représentante de l'État partie a expliqué que les moyens adoptés avaient consisté en révisions de la législation, études, soins et assistance aux victimes et mesures de prévention, notamment la prévention de la violence sexuelle, qui était une priorité pour le Gouvernement. Un financement de l'ordre de 40 millions de dollars avait été consacré en 1993 à diverses initiatives — foyers-refuges, information, projets novateurs et leurs trames de soutien. Toutes ces actions relevaient de ministères divers.
262. À une question concernant le nombre de femmes qui avaient profité de la possibilité d'introduire un recours en discrimination, la représentante de l'État partie a indiqué que depuis sa révision en 1989, la loi sur l'égalité des chances avait été invoquée dans 40 ou 50 actions en justice et que la Commission de l'égalité des chances était saisie de plus de 500 affaires. Les nouvelles directives à l'usage de l'accusation dans les affaires de discrimination adoptées en septembre 1993 seraient réexaminées après l'entrée en vigueur de la loi générale sur l'égalité des chances.
263. On a demandé des précisions au sujet de l'exposé complémentaire sur la protection des femmes et des jeunes filles contre les violences sexuelles. Les membres du Comité ont jugé favorablement l'interprétation que donnait le Gouvernement de l'égalité d'accès aux emplois de l'armée.
Article 3
264. Des membres du Comité ayant souhaité obtenir des exemplaires de l'Atlas social de la femme, la représentante de l'État partie a indiqué que cet ouvrage n'existait qu'en néerlandais.
265. Interrogée sur l'origine du financement des centres d'appui nationaux, régionaux et provinciaux, la création éventuelle d'un organe de coordination de divers niveaux et les intentions du Gouvernement quant à la budgétisation du financement des centres pour les femmes, la représentante de l'État partie a expliqué que les modalités étaient chaque fois différentes : certains projets étaient subventionnés en permanence par des ministères, tandis que d'autres organismes ou centres d'appui nationaux n'étaient financés que pendant des durées limitées. Souvent, on procédait à une évaluation après la première phase d'opération et on décidait pour chaque cas particulier s'il convenait de maintenir la subvention et à qui devait incomber la responsabilité. C'était le Secrétariat d'État à l'émancipation qui dirigeait la politique d'appui à l'égalité des femmes.
266. L'exposé récapitulatif annoncé au paragraphe 323 du rapport, qui doit donner un aperçu de la situation des femmes néerlandaises telle qu'elle ressort des statistiques les plus récentes, n'était pas encore prêt, a dit la représentante de l'État partie; il serait envoyé aux membres du Comité dès sa publication.
267. Des membres du Comité ayant regretté l'abolition, en 1991, du Comité ministériel chargé de la politique d'émancipation, la représentante de l'État partie a expliqué que cette mesure s'inscrivait dans le cadre d'une refonte politique et administrative.
268. Des membres du Comité ont demandé comment la Reine pouvait être présidente du Conseil d'État, organe consultatif suprême aux Pays-Bas, qui précisément est chargé de la conseiller.
Article 4
269. Répondant à une demande de renseignements complémentaires sur les objectifs fixés et les calendriers prévus pour les mesures temporaires spéciales, la représentante a indiqué que la politique officielle se fondait sur l'idée que les mesures d'action positive ou de traitement préférentiel ne devraient être imposées par la loi qu'en dernier ressort. Bien que le Gouvernement ait fixé des objectifs chiffrés pour accroître le nombre de femmes dans presque tous les secteurs de la fonction publique, aucune sanction n'était appliquée lorsque ces objectifs n'étaient pas réalisés.
Article 5
270. Les membres du Comité ont accueilli favorablement les rapports présentés par les organisations non gouvernementales sur cet article et ont demandé des éclaircissements sur la politique d'égalité des droits pour les femmes lesbiennes. La représentante a répondu que la politique et les mesures adoptées à cet égard par le Gouvernement seraient présentées à une date ultérieure, dans le contexte du deuxième rapport périodique.
Article 6
271. On a demandé s'il existait, au sein du Bureau des affaires féminines, des services spécialisés pour les questions concernant les mauvais traitements infligés aux femmes et aux enfants. La représentante d'Aruba a dit que c'était un sujet de préoccupation très important. D'après les données communiquées par la préfecture de police, les délits concernant des sévices sexuels exercés sur des femmes et des enfants représentaient une part très importante de la charge de travail et les chiffres étaient en hausse. Un organisme privé avait été créé pour offrir une assistance aux enfants victimes de tels actes criminels et les adultes pouvaient intenter une action en justice ou s'adresser au Bureau d'assistance aux familles en difficulté.
272. Le fait de considérer la prostitution volontaire comme une question purement personnelle et comme une profession a suscité des réserves. Interrogée sur le problème de la prostitution forcée chez les immigrantes, la représentante du territoire européen des Pays-Bas a répondu que le trafic des femmes était assimilé à la prostitution forcée et que les personnes qui se trouvaient illégalement aux Pays-Bas et étaient contraintes de se livrer à la prostitution se verraient accorder un permis de séjour en attendant la conclusion d'une enquête et d'une procédure judiciaire éventuelles.
273. En ce qui concerne la situation à l'égard du VIH/sida aux Pays-Bas, il a été signalé que le Gouvernement avait élaboré une politique spécifique depuis le début de l'épidémie, politique qui était mise en oeuvre aux niveaux national, régional et municipal en coopération étroite avec le Ministère de la santé et les groupes intéressés. Ses principaux axes étaient la lutte contre la propagation du VIH, l'organisation des soins et la recherche, et la prévention de la discrimination à l'égard des personnes contaminées, y compris par le biais de campagnes d'information sur le sida destinées aux prostituées.
274. Répondant à une question sur les causes de la multiplication des violences sexuelles, la représentante a dit que cette tendance n'était pas liée au fait que la pornographie était autorisée. Il était même possible que le libre accès à la pornographie pour les adultes ait un effet modérateur sur la fréquence des actes de violence à l'encontre des femmes.
Article 7
275. Les membres du Comité ont félicité le Gouvernement pour la façon dont le rapport des Pays-Bas mentionne la date d'introduction du droit de vote pour les hommes et celle du suffrage universel, c'est-à-dire quand ce droit a été accordé aux femmes, mais ont noté avec surprise que les indications données dans le rapport sur les mesures prises par la Communauté européenne visant à encourager l'égalité de chances entre hommes et femmes étaient très succinctes. On a demandé comment le Gouvernement et les organisations non gouvernementales réagissaient à l'idée d'adopter des mesures positives, y compris des lois tendant à inclure un plus grand nombre de femmes sur les listes électorales et demandé également des précisions supplémentaires sur le système électoral et sur la possibilité de modifier les listes de candidats pour accroître la représentation féminine. La représentante a expliqué que l'un des principaux objectifs de la politique d'émancipation était d'essayer de renforcer la présence des femmes dans les instances politiques et dans l'administration publique. Comme c'étaient les partis politiques qui présentaient eux-mêmes les candidatures, le Gouvernement n'intervenant pas dans ce processus, il pouvait uniquement exercer une influence indirecte, par exemple en octroyant des subventions aux partis politiques pour des activités destinées à élargir la participation des femmes à la vie politique ou en créant des groupes de travail spécifiques pour ces questions. Les partis politiques déterminaient eux-mêmes le nom des candidats et leur ordre de succession sur la liste; la représentation féminine au sein d'un parti dépendait de l'importance qu'il accordait au rôle des femmes dans la vie politique.
276. En ce qui concerne le volume des subventions octroyées aux partis politiques, la représentante a indiqué que le Gouvernement allouait environ 2,7 millions de dollars chaque année aux partis pour des activités de formation et d'éducation et d'autres activités connexes, mais uniquement si elles concernaient des aspects importants du fonctionnement de la démocratie et si les partis considérés se trouvaient dans une situation financière difficile.
277. Pour ce qui était d'analyser les progrès accomplis et les obstacles rencontrés dans les efforts visant à instaurer une démocratie paritaire comme on l'avait suggéré, la représentante a dit que la parité entre hommes et femmes dans la composition des organes élus n'était pas un objectif à réaliser par l'intervention du Gouvernement et que cette notion était rejetée comme étant intrinsèquement incompatible avec les principes de base de la démocratie.
278. Répondant à une question sur l'objectif chiffré fixé pour les femmes nommées commissaires de la Reine, la représentante a précisé que les nouveaux commissaires étaient choisis par le cabinet, compte tenu de la répartition des sièges entre les partis politiques au sein de la deuxième Chambre du Parlement, parmi les "anciens" de l'administration publique, chez qui les femmes étaient peu nombreuses.
279. Pour ce qui est du nombre de femmes exerçant des responsabilités administratives et politiques dans les administrations provinciales et municipales, la représentante a annoncé que des chiffres détaillés seraient fournis au Comité dans une brochure.
280. On a demandé par ailleurs si la réduction très sensible du nombre des adhésions à la plupart des partis politiques était identique pour les femmes et pour les hommes et si le nombre des femmes affiliées à des organisations non gouvernementales avait augmenté. Étant donné que certains partis exigeaient l'appartenance à une Église particulière comme condition d'adhésion, on a demandé si cela ne risquait pas d'encourager le fanatisme religieux.
281. En ce qui concerne le nombre des femmes députés au Parlement des Antilles néerlandaises, leur représentante a indiqué qu'à l'heure actuelle, 13 % des membres du Parlement étaient de sexe féminin et que 30 % des postes ministériels et des postes de secrétaire d'État étaient occupés par des femmes.
Article 8
282. Interrogée sur la politique mise en oeuvre par le Gouvernement pour accroître le nombre de femmes dans le corps diplomatique, la représentante des Pays-Bas a expliqué que des mesures de politique générale étaient appliquées en vue d'encourager le recrutement et la promotion des femmes et qu'un traitement préférentiel était prévu lorsque les candidates avaient des qualifications équivalentes. Dans le cas des couples où les deux partenaires poursuivaient simultanément une carrière diplomatique, il existait des dispositions particulières donnant satisfaction à toutes les parties concernées.
Article 10
283. Des membres du Comité ont demandé s'il existait des programmes pour démontrer qu'un niveau d'éducation insuffisant faisait obstacle à l'égalité des sexes.
Article 11
284. En ce qui concerne la proportion de femmes occupant un emploi, qui, jusqu'à une date récente, était relativement faible aux Pays-Bas, il a été signalé que ce phénomène pouvait être expliqué par des facteurs historiques, économiques et sociaux mais que, pour le moment, les sociologues n'avaient pas encore pu fournir une réponse généralement satisfaisante.
285. À la question de savoir si l'augmentation du nombre des emplois temporaires chez les femmes traduisait une discrimination directe ou indirecte à leur égard, la représentante a répondu que ce n'était pas le cas. La plupart des femmes cherchaient délibérément des emplois à temps partiel pour pouvoir mieux concilier leurs différentes tâches professionnelles et familiales; d'ailleurs, les hommes eux aussi cherchaient des emplois à temps partiel.
286. En réponse aux questions concernant le nombre d'heures de travail spécifié dans la définition d'un emploi à temps partiel et le pourcentage de femmes occupant simultanément deux emplois à temps partiel, la représentante a indiqué qu'en général, cette définition s'appliquait aux emplois impliquant moins de 38 à 40 heures de travail par semaine et qu'il n'existait pas de statistiques sur le nombre de femmes cumulant deux emplois à temps partiel.
287. Du fait que les femmes étaient fortement concentrées dans un petit nombre de professions, bien qu'ayant le même niveau d'études que les hommes, diverses initiatives étaient prises à l'heure actuelle afin de remédier à cette situation : par exemple des campagnes de sensibilisation par le biais de supports pédagogiques et des médias.
288. La représentante a signalé que les informations supplémentaires demandées sur les différences de salaires entre hommes et femmes et les rémunérations accordées pour un travail de valeur égale seraient fournies et complétées par des statistiques, dans le deuxième rapport périodique. La possibilité d'une action collective n'était pas limitée aux inégalités de rémunération et c'était là l'une des principales raisons qui avaient motivé son introduction. Des données sur les femmes travaillant dans le secteur agricole seraient également incluses dans le rapport suivant.
289. Des membres du Comité ont demandé si des sanctions étaient prévues à l'encontre des services publics de l'emploi qui ne respectaient pas les objectifs fixés. Pour ce qui était des femmes employées dans le secteur privé, les organismes et les entreprises concernés prenaient des mesures palliatives pour lesquelles ils pouvaient obtenir des subventions de l'État.
290. Répondant à une question sur le volume de travail rémunéré accompli au foyer, la représentante a indiqué que les statistiques officielles étaient très discordantes et que l'on préparait en ce moment une législation pour améliorer la situation des femmes qui effectuaient un travail rémunéré au foyer.
291. En réponse aux questions qui avaient été posées sur le statut des femmes affiliées à des régimes privés de sécurité sociale, la représentante a signalé que tous les problèmes en suspens seraient bientôt réglés étant donné l'entrée en vigueur imminente d'une législation sur la question.
292. En réponse à des questions portant sur la situation antérieure et actuelle des femmes en matière de fiscalité et des observations formulées par des membres du Comité qui se demandaient si les "avantages" accordés au soutien de famille dans le régime d'imposition des revenus personnels ne risquaient pas d'avoir des effets indésirables sur l'intégration des femmes au marché de l'emploi, la représentante a indiqué que la grande réforme de la fiscalité introduite dans les années 80 avait éliminé, en droit, les différences de traitement entre hommes et femmes. Toute personne qui décidait de se présenter sur le marché du travail était motivée par plusieurs facteurs. Il n'était donc pas sûr que le régime fiscal soit réellement un facteur de dissuasion pour l'intégration des femmes au marché du travail, en général.
293. Des membres du Comité ont demandé si le Gouvernement mettait des garderies d'enfants à la disposition des mères célibataires et des mères non mariées, si l'on menait une action palliative pour promouvoir un plus grand nombre de femmes à des postes de direction et quelles étaient la situation des femmes en matière de sécurité sociale et leurs indemnités de chômage par rapport aux hommes. Des membres ont fait observer que les plans concernant le marché du travail et les prestations fixées pour les chômeuses n'avaient pas un caractère assez obligatoire pour les femmes fonctionnaires.
294. La représentante, à qui l'on avait demandé si les femmes victimes d'une discrimination sur leur lieu de travail pouvaient invoquer l'article 11 de la Convention devant les tribunaux, a répondu que cette possibilité existait dans les litiges où l'État était mis en cause, mais pas dans les procès intentés contre un employeur privé ou un particulier.
295. Lorsqu'on lui a demandé si le Gouvernement d'Aruba envisageait d'abroger la disposition légalisant les licenciements pour cause de grossesse, la représentante d'Aruba a répondu que, pour les femmes fonctionnaires, aucun cas de licenciement pour cause de grossesse ne s'était jamais produit. Dans le secteur privé, le licenciement nécessitait une autorisation préalable spéciale et la grossesse n'était pas considérée comme un motif valable. Comme le Code civile interdisait les licenciements en cas de maladie, on considérait que la grossesse était également régie par cette disposition.
Article 12
296. Répondant à une remarque faite par des membres du Comité, selon laquelle le rapport ne serait pas assez détaillé sur la question de la santé, la représentante des Pays-Bas a précisé qu'une étude serait réalisée en 1994 sur l'accès des femmes aux soins de santé.
297. En réponse à une question sur les programmes spéciaux éventuellement prévus pour les femmes qui étaient déjà contaminées par le VIH/sida, la représentante a dit que tous les programmes mis en place par le Gouvernement s'adressaient à la fois aux femmes et aux hommes, qu'il existait un bureau subventionné par l'État pour les "Femmes et le sida" et que des groupes d'entraide s'étaient créés pour aider les femmes à briser leur isolement. En dépit du fait que le tourisme figurait parmi les principales industries à Aruba, le nombre de ces contaminations était relativement faible. Le Comité national du sida assurait une prise en charge, fournissait des avis et organisait des mesures de lutte contre la maladie, y compris une éducation en matière de santé. Des informations et des consignes très précises étaient également fournies aux prostituées.
298. Répondant à une demande de renseignements complémentaires sur la toxicomanie chez les femmes et sur les programmes connexes, la représentante des Pays-Bas a expliqué que l'objectif central de la politique antidrogue était de limiter le plus possible les risques que l'abus des drogues impliquait pour les utilisateurs, leur environnement et la société. Une approche pragmatique donnait de meilleurs résultats et les statistiques montraient que la proportion de femmes toxicomanes était généralement de un à trois par rapport aux hommes.
299. Invitée à présenter la position de son gouvernement sur l'euthanasie, la représentante a indiqué qu'à son avis, il n'y avait pas lieu d'établir un lien entre l'euthanasie et les questions propres aux femmes.
300. À la question de savoir s'il existait une législation concernant l'insémination artificielle et si elle était alors fondée sur des principes éthiques ou scientifiques, la représentante a répondu que l'insémination artificielle n'était pas régie par la loi. Certains hôpitaux avaient toutefois leur propre code de déontologie et, en cas de désaccord, un médecin pouvait adresser une cliente à un confrère. Il était important de ne pas refuser l'accès à cette technique aux femmes qui souhaitaient en bénéficier pour des motifs liés à leur situation matrimoniale, à leurs préférences sexuelles ou à leur mode de vie. À l'heure actuelle, il n'existait pas de dispositions particulières sur les grossesses survenant à un âge avancé.
301. Des membres du Comité ont demandé des éclaircissements sur la politique suivie en matière d'avortement. On leur a expliqué qu'une période d'attente de cinq jours était imposée pour que la prise de décisions se fasse en pleine connaissance de cause et pour donner aux femmes la possibilité de reconsidérer leur choix. L'avortement ne pouvait être pratiqué que par un médecin dans un hôpital public ou une clinique privée agréée et n'était autorisé que pour des cas médicaux ou des cas sociaux dans lesquels il était jugé nécessaire.
Article 16
302. À la question de savoir si une réforme était en cours à propos de l'ordre des noms des couples mariés, la représentante a répondu que le Parlement examinait un projet de loi qui instituerait l'égalité de traitement entre hommes et femmes pour le choix des noms de famille.
303. Interrogée sur les cas de viols conjugaux qui auraient éventuellement été portés devant les tribunaux depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle législation en 1991, la représentante a signalé qu'il y avait eu quelques affaires de ce genre, et qu'elles concernaient pour la plupart des couples qui étaient séparés mais n'avaient pas divorcé légalement. Répondant à une question connexe, elle a également indiqué que, avant l'adoption de cette loi, on n'avait pas envisagé la possibilité de remplacer les mots "par la force" par "contre son gré" car cela aurait permis de mettre en cause le comportement de la victime.
304. S'agissant de la fréquence des divorces dans les Antilles néerlandaises, des facteurs sociaux, culturels, économiques et politiques qui expliquent ce phénomène et du rôle que pourrait également jouer l'âge minimum peu élevé autorisé pour le mariage des femmes, la représentante a indiqué que le Code civil faisait actuellement l'objet d'une révision complète. Malgré l'âge minimum autorisé, les femmes ne se mariaient généralement pas avant 18 ans. Les données empiriques révélaient plusieurs causes de divorce, notamment la faible durée des mariages, surtout si la femme était financièrement autonome, les actes de violence dont les femmes étaient victimes, l'infidélité du mari et l'émancipation des femmes d'une façon générale.
305. Répondant à une autre question concernant la coopération technique internationale, la représentante a indiqué que l'aide au développement offerte pour l'intégration des femmes au développement s'inscrivait dans le contexte de la politique de développement en général, ce qui pourrait obliger le Gouvernement à adopter une approche plus sélective.
Conclusions du Comité
Introduction
306. Le Comité a félicité l'État partie de n'avoir formulé aucune réserve et d'avoir fait preuve d'autant de détermination, d'abord avant d'avoir ratifié la Convention, en adoptant diverses lois et mesures et, une fois la Convention ratifiée, en s'employant à la faire appliquer.
307. Il a félicité également l'État partie d'avoir présenté un rapport aussi détaillé, qui comporte une description générale du pays et des statistiques relatives à la condition de la femme. Il souhaiterait toutefois que, dans ses rapports ultérieurs, l'État partie analyse les lois et mesures adoptées de façon plus approfondie et pragmatique, en fournissant davantage d'éléments de comparaison, ainsi que des informations sur le coût des projets décrits.
308. Il a noté avec satisfaction qu'en répondant à ses questions, l'État partie a comblé nombre des lacunes constatées, améliorant ainsi une présentation déjà excellente.
Aspects positifs
309. Le Comité a félicité l'État partie des efforts qu'il avait déployés pour mettre en place un vaste mécanisme national, ainsi que de l'obligation faite à son gouvernement de soumettre à l'avenir tous ses rapports au Parlement avant de les présenter au Comité.
310. Il a noté avec satisfaction que l'État partie s'était employé vigoureusement à rechercher les causes des diverses formes de violence à l'égard des femmes et à lutter contre cette violence dans ses politiques et dans son action.
311. Il a félicité également le Gouvernement d'avoir appuyé financièrement des initiatives lancées par des femmes et des organisations féminines, ainsi que d'avoir prêté une oreille attentive aux préoccupations et demandes des femmes. Le Comité était par ailleurs heureux de constater que l'État partie appliquait la Convention en élaborant des directives et d'autres mesures visant à éliminer toute discrimination fondée sur les préférences sexuelles.
312. Il a noté avec satisfaction qu'en dépit de difficultés économiques, les Antilles néerlandaises et Aruba s'employaient activement à faire appliquer la Convention, et notamment à en faire largement connaître les dispositions dans le grand public et dans les écoles.
Principaux sujets de préoccupation
313. Le Comité s'est demandé si, en intégrant le mécanisme national pour la promotion de la femme à l'ensemble de leurs domaines d'activité, les pouvoirs publics n'en avaient pas quelque peu compromis l'efficacité. De la même façon, il s'inquiétait de savoir si, en déléguant aux pouvoirs provinciaux et municipaux la responsabilité, qui appartenait jusque-là au pouvoir central, d'adopter des directives et mesures visant à promouvoir l'égalité, on ne risquait pas de voir s'éroder volonté politique et appui financier.
314. Il s'interrogeait également sur le bien-fondé d'une politique d'émancipation qui prévoyait d'apporter simplement un appui financier limité aux projets menés par des femmes, au lieu de les soutenir par le biais de mécanismes institutionnels.
315. Le Comité s'inquiétait par ailleurs de la brièveté du compte rendu de l'État partie sur l'application de l'article 11, brièveté qui tranchait avec la place accordée aux comptes rendus consacrés à d'autres articles, et se demandait si cela signifiait que le Gouvernement ne prêtait pas suffisamment attention aux problèmes que rencontraient les femmes en matière d'emploi.
Suggestions et recommandations
316. Le Comité a demandé à l'État partie de décrire plus en détail, dans son deuxième rapport, le mécanisme national mis en place aux Antilles néerlandaises et à Aruba, de donner davantage de précisions sur les lois et autres mesures adoptées pour éliminer toute discrimination à l'égard des femmes fondée sur les préférences sexuelles, et de l'éclairer, en lui fournissant les données nécessaires, sur les résultats des efforts déployés par les pouvoirs publics aux niveaux provincial et municipal en matière de politiques et mesures en faveur des femmes.
317. Il a demandé à l'État partie de mener des politiques plus pragmatiques dans le domaine de l'emploi des femmes, notamment touchant les actions les favorisant, les questions de rémunération et de garderie des enfants, et de lui faire rapport à ce sujet.