365. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de Sri Lanka (CEDAW/C/13/Add.18) à sa 202e séance, le 28 janvier 1992.
366. Le Comité a noté qu'on se convainquait aisément à la lecture tant du rapport initial que du deuxième rapport de Sri Lanka que le problème de la condition de la femme dans ce pays ne relevait pas du droit national. La législation interne sri-lankaise, fondée sur les dispositions de la Constitution de 1973, garantissait le droit fondamental à l'égalité entre les sexes. Une charte progressiste de la condition de la femme avait, en outre, été élaborée en 1991 (elle n'aurait cependant pas été adoptée officiellement), et plusieurs institutions de divers niveaux hiérarchiques avaient été mises en place dans le but de promouvoir une véritable égalité des femmes.
367. Le Comité a signalé que malgré un cadre constitutionnel et une tradition législative progressistes, la discrimination entre les sexes, ouverte ou voilée, était encore très fréquente dans le pays. Il était impératif d'identifier les facteurs qui faisaient obstacle à une égalité de fait et de s'y attaquer.
368. Il a été proposé d'examiner minutieusement cinq sources importantes de discrimination persistante à l'égard des femmes dont la violence (voir plus bas).
369. La représentante de Sri Lanka a signalé dans sa déclaration liminaire que la discrimination en tant que telle n'était pas très répandue à Sri Lanka. La situation résultant du conflit armé était considérée comme un problème national et ne permettait pas que l'on accorde une attention particulière à la condition féminine.
Effet des conflits armés internes
370. La représentante de Sri Lanka a commencé par répondre aux questions énoncées sous la rubrique "L'effet des conflits armés internes". Elle a déclaré à cet égard que les dépenses militaires étaient passées de 2,3 % à 10 % du budget. On avait néanmoins assisté au cours des trois dernières années à une reprise totale des programmes de développement, favorisée par une forte croissance économique. Sri Lanka avait obtenu une assistance privilégiée au développement et à la restructuration économique, centrée sur les sous-groupes marginalisés des zones rurales, dont les femmes ne pouvaient manquer de bénéficier. La représentante de Sri Lanka a souligné que, même aux heures les plus sombres, les femmes n'avaient pas eu à souffrir de pratiques discriminatoires. Les questions relatives aux personnes déplacées, aux réfugiés, à leur réinstallation et à leur réinsertion étaient traitées au plus haut niveau. Le nombre de personnes déplacées avait culminé à 1,2 million avant de retomber au chiffre actuel de 696 000 (163 500 familles). Dans ce domaine, on n'établissait pas de statistiques distinctes pour les femmes. Pour héberger les personnes déplacées, 529 centres sociaux avaient été mis en place. D'autres mesures d'assistance avaient été prises, toutes axées sur la cellule familiale; cette assistance était fournie au chef de famille, qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme. Il n'y avait pas de femmes en détention militaire ou exilées de force. Les femmes qui étaient arrêtées dans le contexte de l'insurrection étaient traitées conformément à la législation en vigueur et leur cas relevait des tribunaux civils. Il n'était pas établi de statistiques par sexe en ce qui concerne les personnes qui avaient fui Sri Lanka. Chaque citoyen, quel que soit son sexe, pouvait recourir aux tribunaux.
Efficacité des institutions créées par le Gouvernement (art. 1 à 4)
371. Le Comité a demandé quels effectifs le Ministère de la femme et de l'enseignement hospitalier (MWATH) et le Bureau des femmes consacraient respectivement aux questions concernant celles-ci; si les fonctions de directeur, d'adjoint et d'administrateur du Bureau des femmes étaient exercées exclusivement par des femmes, ou si des hommes en assumaient également; si les deux organes étaient dotés de budgets distincts et, dans l'affirmative, quels en étaient les montants.
372. Il a demandé quelle était la nature des liens existant entre le MWATH et la Commission pour l'élimination de la discrimination et le respect des droits fondamentaux.
373. Le Comité a sollicité un complément d'informations sur les objectifs du Bureau des femmes et demandé quel était le sens exact du membre de phrase : "Protéger la culture et les traditions sri-lankaises en renforçant les valeurs morales et éthiques qui influent sur le rôle des femmes dans le processus de modernisation".
374. Il a demandé quelles étaient la nature et le nombre des recommandations qui avaient été formulées en ce qui concerne l'égalité des femmes devant la loi; quelles propositions de loi le Bureau des femmes avaient présentées au Gouvernement et quelles étaient celles qui avaient été acceptées par celui-ci.
375. Il a souhaité savoir de combien de plaintes touchant la discrimination fondée sur le sexe la Commission pour l'élimination de la discrimination et le respect des droits fondamentaux avait été saisie depuis 1986 et de quels domaines elles relevaient; combien la Commission en avait examinées et quelle suite leur avait été donnée?
376. Le Comité a en outre demandé pourquoi la Cour suprême n'avait été saisie d'aucune plainte en matière de discrimination fondée sur le sexe; quel lien il existait dans ce domaine entre la Cour suprême et la Commission pour l'élimination de la discrimination; si les plaintes devaient être déposées par des particuliers, ou si elles pouvaient être déposées par des organisations féminines; pourquoi le Gouvernement ne recourait pas à des mesures spéciales temporaires pour lever les obstacles à l'égalité des femmes; si le Gouvernement se proposait d'étendre aux femmes le bénéfice des mesures spéciales qu'il avait élaborées pour améliorer la situation d'autres groupes défavorisés; ce qu'il en était de la Charte de la condition de la femme; si elle avait été officiellement adoptée en tant que mesure législative ou administrative; dans le cas contraire, pour quelle raison; si l'idée d'une charte avait été abandonnée et dans l'affirmative, pour quelle raison.
377. Le Comité a demandé si la Commission nationale de la condition de la femme, dont la création était proposée dans la Charte, avait été mise en place; dans l'affirmative, quels liens elle entretenait avec les autres organes s'occupant des droits des femmes; quel programme d'action elle avait établi pour réaliser les objectifs fixés; et, au cas où elle n'avait pas été créée, si le Gouvernement maintenait cette question à l'étude.
378. Le Comité a noté que Sri Lanka n'avait rien à envier à un grand nombre de pays en ce qui concerne la solidité des fondements juridiques établis pour faire respecter l'égalité des sexes. Elle avait mis en place un certain nombre d'organes chargés de conduire la politique gouvernementale dans ce domaine. Toutefois, de nombreux observateurs ont fait remarquer que si ces organes disposaient de mandats suffisamment larges, les efforts qu'ils faisaient pour promouvoir les droits de la femme n'avaient donné que peu de résultats concrets.
379. La représentante a répondu que l'appareil national s'articulait comme suit : au sommet, on trouvait le Ministère de la santé et de la condition féminine, avec à sa tête une femme. De ce ministère dépendait le Ministère d'Etat à la condition féminine, lui aussi dirigé par une femme, qui s'occupait exclusivement des questions relatives à la condition féminine. Le Bureau des femmes était l'organe chargé d'exécuter les projets. Le personnel chargé des questions intéressant les femmes se répartissait comme suit : trois personnes, au Ministère d'Etat (dont deux femmes, à savoir la Secrétaire d'Etat et la Ministre déléguée), 17, au Bureau des femmes (dont 13 étaient des femmes, y compris la Directrice, les deux Directrices adjointes et deux des trois Sous-Directeurs) et 98, dans les bureaux extérieurs. Le Ministère d'Etat et le Bureau des femmes étaient dotés de budgets distincts. A la question de savoir quels étaient les liens existant entre le Ministère de la santé et de la condition féminine et la Commission pour l'élimination de la discrimination et le respect des droits fondamentaux, créée en 1986, la représentante de Sri Lanka a répondu qu'il n'existait aucun lien administratif particulier. Le Ministère était chargé d'élaborer les politiques et de les mettre en oeuvre, et des principes directeurs très stricts régissaient l'action de la Commission. Celle-ci avait pour vocation de recevoir les plaintes relatives à la discrimination au sens large du terme. Au total, 39 plaintes concernant la discrimination fondée sur le sexe avaient été déposées auprès de la Commission. Celle-ci avait à connaître tous les cas de discrimination, dont la discrimination fondée sur le sexe. Vingt-deux plaintes avaient été déposées par des femmes et 17 par des hommes. S'agissant des 22 plaintes déposées par des femmes, dans 11 cas aucune discrimination n'avait pu être établie; 6 de ces plaintes avaient été réglées à l'amiable ou retirées et 5 affaires étaient pendantes. Dans la majorité des cas, la plaignante n'invoquait pas uniquement la discrimination fondée sur le sexe. L'action de la Commission reposait sur la conciliation et la médiation. Il n'était pas nécessaire d'être représenté par un avocat. En ce qui concerne les plaintes déposées devant la Cour suprême, il fallait se faire représenter par un avocat, ce qui pouvait s'avérer coûteux. Le fait que la Cour suprême n'avait été saisie d'aucune plainte en discrimination fondée sur le sexe tenait peut-être aussi à la difficulté d'apporter effectivement la preuve devant un tribunal qu'il y avait eu discrimination. La Cour suprême était la plus haute instance et la Commission pour l'élimination de la discrimination et le respect des droits fondamentaux était habilitée à tenter de régler par la conciliation toutes les affaires que pouvait lui renvoyer la Cour suprême. Seule la partie lésée avait le droit de porter plainte devant la Cour suprême. Les organisations féminines pouvaient porter plainte auprès de la Commission pour l'élimination de la discrimination et le respect des droits fondamentaux.
380. Pour l'instant, le Gouvernement n'avait pas encore eu recours à des mesures temporaires spéciales et ne prévoyait pas de le faire à ce stade. La Charte de la condition de la femme existait à l'état de projet et devait encore être approuvée par le Gouvernement. Le Ministère de la femme étudiait les moyens de surveiller l'application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et mettrait en place un mécanisme à cet effet, peut-être en créant une Commission nationale de la condition de la femme. Quant aux objectifs et fonctions du Bureau des femmes, la représentante a indiqué qu'ils étaient revus, le cas échéant, pour définir les priorités voulues. Ces derniers temps, le Bureau s'était attaché à encourager la participation des femmes à l'économie et il n'avait formulé aucune recommandation en ce qui concerne l'égalité des femmes devant la loi. Il n'avait pas été question de réforme législative. La représentante a ajouté qu'en cherchant la promotion et l'égalité, les Sri-Lankaises ne devaient pas rejeter les aspects positifs des valeurs morales et éthiques.
Discrimination due aux systèmes de statut personnel (art. 2, 3, 5 et 16)
381. Le Comité a déclaré que le fait le plus troublant exposé dans le rapport initial de Sri Lanka était l'existence ou l'application de plusieurs systèmes de "statut personnel" fondés sur les différentes pratiques sociales et culturelles de groupes ethniques ou religieux qui refusaient à la femme l'égalité de statut devant la loi. Le Gouvernement avait indiqué qu'une proposition tendant à éliminer les statuts personnels s'était heurtée à la résistance des parties intéressées. Il s'agissait non seulement de définir les problèmes particuliers que pose l'existence de conflits de lois, mais, plus encore, de tenter d'élaborer un cadre juridique conforme au principe constitutionnel de l'égalité des sexes dans le contexte d'une société multiculturelle et pluraliste.
382. Le Comité a demandé si l'Etat avait entrepris de définir et de codifier tous les statuts personnels discriminatoires à l'égard des femmes. Il s'agissait notamment des lois qui comprenaient les dispositions suivantes : préférence donnée aux hommes en ce qui concerne la succession ab intestat (droit musulman); absence d'obligation alimentaire du père envers un enfant illégitime (droit musulman); absence d'obligation de consentement de la femme comme condition préalable nécessaire à la validité du mariage (droit musulman); incapacité de disposer de biens immeubles sans le consentement du mari, etc.
383. Sri Lanka n'ayant pas émis de réserves au moment de la ratification de la Convention, le Comité a demandé ce que le Gouvernement entendait faire pour résoudre la contradiction entre, d'une part, les dispositions constitutionnelles et l'enseignement des droits de l'homme et, d'autre part, l'existence persistante de lois discriminatoires à l'égard des femmes.
384. Le Comité a demandé pour quelles raisons le droit relatif aux statuts personnels était le seul domaine dans lequel les lois religieuses et ethniques subsistaient alors que tous les autres domaines juridiques (pénal, contractuel, civil, etc.) étaient soumis à un régime général unique. Il a en outre demandé de quelles voies de recours disposaient les femmes soumises aux statuts personnels; si on avait effectivement demandé aux femmes de donner leur avis et de formuler des propositions en ce qui concerne l'abolition des statuts personnels; si des mesures provisoires particulières ne pourraient pas commencer à ébranler le système des statuts personnels; et quels étaient les autres moyens de droit permettant de remédier à cette situation.
385. La représentante a convenu qu'il s'agissait d'une question difficile. Sri Lanka était tout à fait consciente des différences de statut personnel entre l'homme et la femme; la proposition d'instaurer un statut unique au niveau national s'était toutefois heurtée à des résistances. Un comité de réforme du droit islamique, qui comptait des femmes parmi ses membres, avait été créé pour recommander l'adoption des réformes nécessaires. Il s'était notamment penché sur certaines dispositions qui paraissaient discriminatoires à l'égard des femmes. Ainsi, la préférence était donnée aux hommes en ce qui concerne la succession ab intestat, la justification donnée étant que le mari avait le devoir de subvenir aux besoins de sa femme. Par ailleurs, un musulman devait, lorsqu'il se mariait, donner à sa femme une sorte de dot (Mehr), que celle-ci pouvait revendiquer à tout moment pendant le mariage, faute de quoi elle avait un droit préférentiel sur la succession de son mari. L'absence d'obligation alimentaire du père envers un enfant illégitime constituait une autre discrimination évidente et il fallait espérer que le Comité proposerait un changement d'attitude en la matière. Pour ce qui est de dire que le consentement de la femme n'était pas une condition préalable nécessaire à la validité du mariage, il convenait de préciser qu'il s'agissait en fait d'une condition nécessaire qui, bien souvent, n'était pas respectée. Il fallait espérer que le Comité de réforme présenterait une proposition visant à garantir le respect de l'obligation de consentement. Enfin, celui-ci était saisi d'une proposition relative au droit à la polygamie qui permettrait à la femme de divorcer par décision unilatérale si son mari contractait un second mariage. Les dirigeants coloniaux avaient, dans toute la mesure du possible, maintenu le droit coutumier. Les musulmans avaient donc toujours recours aux tribunaux religieux pour les questions de mariage et de divorce et aux tribunaux séculiers pour les autres affaires. Les femmes semblaient plus soucieuses d'améliorer leur situation économique et d'acquérir des compétences que d'obtenir une réforme du statut personnel.
Conditionnement social des hommes et des femmes dans leurs rôles traditionnels (art. 5, 10 et 11)
386. D'après le deuxième rapport, la subordination et la marginalisation persistantes des femmes dans de nombreux domaines d'activité (par exemple dans la vie publique) sont principalement dues à leur propre choix, exprimé selon la conception qui leur a été inculquée du rôle et des responsabilités qu'elles sont censées assumer dans la société.
387. Le Comité a posé à ce sujet les questions ci-après : quels avaient été les résultats de l'enquête effectuée par le Bureau des femmes sur l'évolution des comportements et de la façon de voir les femmes? Une étude analogue avait-elle été faite en ce qui concerne les hommes? Le Gouvernement constatait-il des progrès sur la base de cette étude pour ce qui était de l'égalité des rôles et des tâches dans tous les domaines d'activité? Quelles mesures avaient été prises pour encourager les femmes à terminer leurs études? Par exemple, avait-on songé à relever l'âge du mariage? Quel avait été le rôle de l'éducation dans la perpétuation comme dans l'élimination des stéréotypes sexuels? Quels types de programme scolaire et quelles modifications de programme le Gouvernement avait-il adoptés depuis le projet "Connaissance de la vie"? Les jeunes hommes et jeunes femmes suivaient-ils un même nombre d'heures de cours de mathématiques et de matières scientifiques dans l'enseignement secondaire? Des efforts de développement avaient-ils été entrepris dans le secteur public ou privé pour offrir davantage d'options professionnelles aux femmes? Quelles mesures particulières le Gouvernement avait-il adoptées pour inciter les employeurs à confier à des femmes des emplois qualifiés ou des postes de responsabilité, tant dans le secteur privé que dans le secteur public? Le Gouvernement reconnaissant que les devoirs familiaux imposaient des restrictions au travail des femmes dans la vie publique, que faisait-il pour atténuer ces difficultés (par exemple crèches, horaires souples ou autres)?
388. La représentante a déclaré que l'enquête que le Bureau des femmes avait prévu d'effectuer sur l'évolution des comportements et de la façon de voir des femmes n'avait pas été achevée. Quant à l'âge moyen du mariage, il était de 26 ans pour les femmes, car de plus en plus, celles-ci poursuivaient des études et choisissaient une carrière. Elles étaient en effet très désireuses de faire des études. La nécessité de prévoir, dans les lois, un âge de mariage plus réaliste était reconnue. Une refonte des manuels scolaires et du matériel d'enseignement pour éliminer les stéréotypes sexuels avait commencé. A l'école primaire, les mêmes cours étaient dispensés à tous les enfants, quel que soit leur sexe. Le nombre d'heures de mathématiques et de disciplines scientifiques était le même pour les garçons et pour les filles. Un processus de diversification progressive des qualifications professionnelles avait été entamé. L'Etat n'était pas en mesure d'offrir des services de garde d'enfants, des horaires souples, etc.
Violence contre les femmes (art. 2, 5, 11, 12 et 16)
389. Le Comité a demandé si les femmes soumises aux statuts personnels subissaient davantage de mauvais traitements et de sévices sexuels, viols notamment, dans la famille, et si l'on dénombrait plus de cas de violence contre les femmes dans les régions ou les communautés où les statuts personnels étaient en vigueur.
390. La représentante a répondu que le fait que les femmes soient soumises au droit musulman ou bien au droit Thesawalamai ou Kandyan n'avait certainement aucune incidence sur le recours à la violence.
La place des femmes dans la vie économique (art. 6, 11 et 12)
391. Le Comité a noté que l'économie sri-lankaise était exsangue et que les femmes, qui s'efforçaient de maintenir leur famille au-dessus du seuil de survie, avaient dû accepter des emplois dans des secteurs exposés et non réglementés. Il y avait lieu d'élaborer des mesures à court comme à long terme pour remédier à cette situation. A cet égard, le Comité a posé plusieurs questions touchant certains secteurs où les femmes employées semblaient être particulièrement exposées.
392. En réponse à ces questions, la représentante de Sri Lanka a indiqué que la majorité des femmes qui travaillaient étaient employées à l'année dans des plantations de thé. D'après les enquêtes qui avaient été réalisées, la réglementation relative à l'égalité des salaires était appliquée et les femmes bénéficiaient des prestations de maternité. Il existait des infrastructures médicales. Les programmes destinés aux femmes travaillant dans les plantations portaient sur l'éducation des adultes, la santé, la nutrition, l'assainissement, la planification de la famille, etc. Les taux de mortalité infantile et de mortalité liée à la maternité avaient considérablement baissé, tandis que le taux d'alphabétisation et le niveau de vie avaient augmenté.
393.En ce qui concerne les femmes travaillant dans les zones franches (en particulier dans l'industrie du vêtement), le Comité a demandé si les salaires et les règlements sanitaires étaient protégés par des accords syndicaux et si les femmes pouvaient former des associations, se syndiquer, améliorer leurs conditions de travail et se protéger contre les avances sexuelles importunes et la violence.
394. La représentante a répondu que la question des femmes travaillant dans les zones franches devait faire l'objet d'un examen attentif. Il semblait que les conditions de travail et de vie de ces femmes étaient loin d'être satisfaisantes.
395. Le Comité a posé un certain nombre de questions sur les employées de maison travaillant à l'étranger et à Sri Lanka.
396. La représentante a répondu que le nombre d'employées de maison travaillant dans les pays du Moyen et d'Extrême-Orient était estimé à 250 000. Un très grand nombre d'ambassades de Sri Lanka se trouvaient dans les pays de ces régions. Afin de protéger les intérêts des femmes travaillant dans ces pays, certaines conditions étaient imposées aux employeurs, telles qu'un salaire minimum et un billet d'avion de retour. Selon les données disponibles, environ 65 000 femmes étaient rentrées à Sri Lanka pendant la guerre du Golfe. Plus de 30 000 d'entre elles étaient reparties à l'étranger. Les rapatriés bénéficiaient d'une indemnité. Les cas de viol, décès, etc., touchant les employés de maison à l'étranger, lorsqu'ils étaient connus, donnaient lieu à une intervention du Gouvernement. Les employés de maison n'étaient assujettis à aucune réglementation du travail à Sri Lanka, et aucune mesure n'était envisagée pour normaliser les salaires ou les horaires de travail. Il n'existait aucune voie de recours, en dehors de la démission.
397. A propos de la prostitution, le Comité a demandé si l'on disposait de statistiques sur le nombre des femmes concernées, et en particulier des jeunes filles, celui des descentes de police effectuées et celui des hommes et des femmes arrêtés. Le Comité a également demandé ce qu'il en était des modifications d'ordre juridique qui avaient été envisagées en ce qui concerne la prostitution; s'il existait des statistiques sur l'incidence du SIDA; et quelles étaient les mesures qui étaient prises pour lutter contre ce fléau.
398. Le Comité a demandé si le Bureau des femmes prévoyait de mener des études afin d'évaluer l'impact qu'avaient sur les femmes : les politiques d'ajustement structurel; la promotion du tourisme sexuel; l'exportation de la main-d'oeuvre féminine destinée à occuper à l'étranger un emploi chez des particuliers ou dans le secteur des loisirs; l'établissement de zones franches.
399. En réponse à ces questions, la représentante de Sri Lanka a déclaré qu'elle ne disposait pas de statistiques sur la prostitution. Elle a indiqué qu'il existait des mesures juridiques appropriées, mais qu'il fallait centrer les efforts sur leur application effective. Les cas recensés de SIDA étaient au nombre de 39 chez les hommes et de 10 chez les femmes. Des campagnes d'informations étaient menées à ce sujet. Une ONG, le Centre de recherche sur les femmes, était en train d'effectuer une étude sur l'incidence des programmes d'ajustement structurel. On étudierait la suggestion relative à l'étude du "tourisme sexuel", et on se proposait d'entreprendre une étude sur les femmes travaillant dans les zones franches.
400. Les membres du Comité ont remercié la représentante de Sri Lanka pour ses réponses et ont posé un certain nombre de questions supplémentaires.
401. Abordant la question des conflits armés, les membres du Comité ont demandé quelles étaient les principales conséquences de la violence contre les femmes imputable aux conflits, et quelles mesures avaient été prises par le Gouvernement pour résoudre le problème. On a également réclamé des éclaircissements sur la violence dans la famille et au foyer. Un membre du Comité a demandé s'il était possible d'obtenir une ordonnance judiciaire à l'encontre d'un mari infligeant des sévices à sa femme. Les membres du Comité ont souhaité avoir des éclaircissements et davantage d'informations sur la condition des femmes travaillant dans les zones franches, notamment sur l'existence de syndicats, le droit de former des associations, la protection des femmes jeunes et vulnérables, etc. Un membre du Comité s'est préoccupé de la situation des femmes rurales et des changements qui se produisaient dans leurs tâches productives, et a demandé si le Gouvernement aidait ces femmes, et de quelle façon. On a fait état d'un rapport qui avait été présenté au Gouvernement sur les personnes disparues, avec des données ventilées par sexe. L'expert a demandé si des mesures avaient été prises, compte tenu des données fournies dans le rapport. Plusieurs membres se sont enquis de l'application ou de la non-application des mesures temporaires spéciales visées à l'article 4 de la Convention ainsi que des mesures en faveur des groupes désavantagés. Les experts ont souligné combien ces mesures étaient utiles pour lutter contre la discrimination de fait et améliorer progressivement la condition de la femme. Ils se sont demandé pourquoi le Gouvernement n'avait pas recours à de telles mesures. Dans le domaine des lois relatives au statut personnel, le Comité a demandé si les femmes, en particulier les femmes jeunes, acceptaient l'application des systèmes de "statut personnel" ou si elles étaient favorables à une législation nationale. Des questions ont également été posées sur le sort des femmes après le divorce, à savoir s'il existait des dispositions précises dans le Code civil, et si des propositions avaient été faites pour réformer la législation relative au divorce. Le Comité a demandé si la nouvelle réglementation sur la prostitution avait contribué à effacer l'opprobre qui s'attachait à l'état de prostituée, et ce qui avait été fait en matière de réadaptation. Il a demandé s'il fallait toujours apporter la preuve d'avoir opposé une résistance physique pour porter une accusation de viol. En matière de pratiques relatives à la dot, un expert a demandé si ces pratiques pouvaient être compatibles avec le fait que le Gouvernement avait ratifié la Convention, et si le Gouvernement envisageait de les éliminer. Le Comité a demandé si le Gouvernement prenait des mesures pour arrêter l'émigration.
402. A propos du troisième rapport périodique, les membres du Comité ont fait savoir qu'ils attendaient avec intérêt des détails sur les activités de la nouvelle Commission nationale de la condition de la femme, et en particulier sur les mesures prises en application de l'article 4. Puisqu'il semblait y avoir un fondement juridique solide, ils espéraient obtenir des détails concernant les domaines dans lesquels il pouvait y avoir une discrimination voilée, en particulier les quatre domaines ci-après : a) l'assistance aux personnes déplacées et le fait que, dans de telles circonstances, les femmes pouvaient se trouver dans une situation encore plus précaire; b) l'opportunité
d'une étude détaillée des plaintes et recours devant la Commission pour l'élimination de la discrimination et le respect des droits fondamentaux et devant la Cour suprême; c) l'existence de systèmes d'appui pour faire face aux responsabilités familiales, car l'absence de tels systèmes jouait souvent au détriment des femmes; d) la question de savoir si le Gouvernement jugeait, étant donné la situation économique, le sort des femmes plus préoccupant que celui des hommes. En se penchant sur ces questions, on pourrait mettre au jour les conditions profondes, même en l'absence de discrimination apparente.
403. En réponse aux questions supplémentaires qui lui avaient été adressées, la représentante a déclaré que les femmes ne bénéficiaient pas d'un traitement spécial dans le conflit armé. S'agissant des femmes travaillant dans les zones franches, elle a admis qu'il s'agissait là d'un problème. Les lois existaient, mais il n'était pas toujours possible de les appliquer. La question était à l'étude. Aucune modification dans le rôle des femmes rurales n'avait pu être observée. Les femmes des zones rurales bénéficieraient grandement des programmes d'éradication de la pauvreté axés sur la cellule familiale. Elles choisissaient aussi de nouveaux emplois moins astreignants sans que cela n'ait apparemment eu un impact économique négatif. Des mesures temporaires spéciales et des programmes spéciaux en faveur des femmes risquaient de susciter des réactions antagonistes si celles-ci étaient perçues comme étant injustement avantagées. Elle a ajouté que de toute façon la condition des femmes s'améliorait considérablement, même en l'absence de tels programmes. Elle a indiqué que les femmes ne pouvaient opter pour un droit régissant le statut personnel autre que celui qui leur était applicable. Elle a ajouté que puisqu'il n'y avait pas d'agitation sérieuse pour réclamer des réformes, il fallait en conclure que les femmes soumises au droit musulman se trouvaient dans une meilleure situation. Les femmes faisaient valoir que ce droit leur garantissait un traitement équitable. Elles ne se sentaient pas victimes de discrimination. Sur la question du divorce, la loi prévoyait le versement, sur décision de justice, d'une pension alimentaire pour la femme et pour les enfants. Seuls les divorces pour faute étaient possibles (désertion du domicile conjugal, adultère et impuissance). Le Gouvernement envisageait actuellement une réforme en vue d'unifier le droit régissant la dissolution irréversible du mariage. Sur la question du viol, la représentante a expliqué que la résistance physique prouverait qu'il n'y avait pas eu consentement, mais qu'elle n'était en soi pas nécessaire pour engager des poursuites. La prostitution continuait d'être stigmatisée. L'idée d'utiliser la Convention pour prendre des mesures contre la pratique des dots était intéressante, mais la loi ne pouvait à elle seule éliminer les traditions. Elle a convenu qu'il était nécessaire de modifier la loi concernant l'âge du mariage. Empêcher les migrations serait, a-t-elle dit, très mal reçu, car celles-ci répondaient à des impératifs économiques. Au lieu d'interdire les migrations, le Gouvernement devait s'occuper des femmes avant, pendant et après.
404. En conclusion, le Comité a indiqué qu'il comprenait les difficultés auxquelles se heurtait le Gouvernement sri-lankais et appréciait les efforts que celui-ci déployait pour faire face à la situation. Il a déclaré que certaines mesures spéciales temporaires pourraient être souhaitables, mais que c'était au Gouvernement de décider quelles mesures seraient les plus utiles. Il a recommandé à la représentante d'envisager cette possibilité pour améliorer la situation et accélérer les progrès. Le rapport suivant devrait donner des informations sur les mesures juridiques, l'enseignement et la sensibilisation aux problèmes des femmes dans l'optique de la promotion de la femme. Quelles que soient les mesures que le Gouvernement déciderait de prendre, elles devraient avoir pour but de rendre la situation de jure et de facto dans le pays conforme aux dispositions de la Convention. Un équilibre devait être trouvé entre les réalités et la Convention. Des progrès devaient être accomplis le plus rapidement possible sans toutefois susciter de contrecoup.