CMW/C/MLI/CO/111 mai 2006
Original : FRANÇAIS
COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DE TOUS LES
TRAVAILLEURS MIGRANTS ET DES MEMBRES DE LEUR FAMILLE
Quatrième session
24 – 28 avril 2006
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION
Observations finales du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille
Mali
1. Le Comité a examiné le rapport initial du Mali (CMW/C/MLI/1) à ses 31e et 32e séances (voir CMW/C/SR/31 et CMW/C/SR/32), tenues le 25 avril 2006, et a adopté à sa 37e séance, tenue le 28 avril 2006, les observations finales ci-après.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction la présentation du rapport initial de l’État partie et se félicite de la volonté de coopération dont celui-ci a fait preuve au cours du dialogue constructif qui s’est engagé avec le Comité. Il constate cependant que le rapport ne contient pas suffisamment d’informations sur plusieurs questions importantes, tant juridiques que pratiques. Le Comité remercie l’État partie de ses réponses écrites à la liste des points à traiter, apportées dans les délais voulus. Toutefois, il regrette que plusieurs questions posées à la délégation n’aient reçu que des réponses générales, incomplètes ou vagues.
3. En ce qui concerne la protection des droits des travailleurs migrants, le Comité constate avec préoccupation que de nombreux pays d’emploi des travailleurs migrants maliens ne sont pas parties à la Convention, ce qui entrave la jouissance par les travailleurs migrants maliens des droits que la Convention leur reconnaît.
B. Aspect positifs
4. Le Comité apprécie le fait que le Mali ait été le premier pays à soumettre son rapport initial.
5. Le Comité note avec satisfaction qu’il existe un Ministère des Maliens de l’extérieur et de l’intégration africaine et qu’il veille à informer les Maliens sur les conditions d’entrée et de séjour dans plusieurs pays où réside une large communauté malienne. Toutefois, le Comité aurait apprécié que lui soient fournies des informations plus détaillées sur les compétences de ce ministère et sur ses activités.
6. Le Comité salue la promulgation de la loi nº 04-058 du 25 novembre 2004, relative aux conditions d’entrée, de séjour et d’établissement des étrangers en République du Mali, qui remplace la législation et la réglementation datant de la période coloniale.
7. Le Comité note avec satisfaction que nombre de Maliens résidant à l’étranger ont la possibilité de participer aux élections présidentielles, grâce à des mécanismes mis en place dans certains pays. Le Comité suggère que cette possibilité soit offerte à un plus grand nombre de travailleurs migrants maliens à l’étranger.
8. Le Comité note avec satisfaction que le Mali est partie au Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et au Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer.
C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention
9. Le Comité prend note des difficultés à contrôler les mouvements illégaux et clandestins de travailleurs migrants et des membres de leurs familles exprimées par l’État partie et, en particulier, de sa difficulté à contrôler les vastes frontières qu’il partage avec sept pays voisins.
D. Principaux sujets de préoccupation, suggestions et recommandations
1. Mesures générales d’application (art. 73 (par. 2) et 84)
Législation et mise en œuvre
10. Le Comité constate avec regret que le Mali n’a pas fait les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention par lesquelles il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir des communications d’États parties et de particuliers.
Le Comité encourage l’État partie à envisager de faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention.
11. Le Comité note avec regret que le Mali n’a pas encore adhéré à la Convention (nº 97) sur les travailleurs migrants de 1949 ni à la Convention (nº 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires) de 1975 de l’Organisation internationale du travail (OIT).
Le Comité invite l’État partie à envisager la possibilité d’adhérer aux Conventions nº 97 et nº 143 de l’OIT sur les travailleurs migrants, dans les meilleurs délais.
12. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni d’informations suffisantes sur les mesures spécifiques qu’il a prises pour mettre en œuvre la Convention.
Le Comité prie l’État partie d’inclure dans son deuxième rapport périodique des informations à jour, étayées par des statistiques et des exemples pratiques, sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour mettre en œuvre les droits des travailleurs migrants énoncés dans la Convention.
13. Le Comité se réjouit de constater que, en vertu de l’article 116 de la Constitution de l’État partie, les traités internationaux, dont la Convention, priment sur la législation nationale. Cependant, il demeure préoccupé du fait que, selon l’État partie, la Convention ne peut pas être appliquée par les tribunaux, car elle n’a pas encore été incorporée dans la législation nationale.
Le Comité prie instamment l’État partie de prendre les mesures législatives nécessaires pour que la Convention puisse être appliquée dans l’ordre juridique interne, y compris par les tribunaux au Mali.
Collecte de données
14. Le Comité note avec préoccupation le manque de statistiques concernant les flux migratoires qui touchent le Mali et d’autres domaines liés à la migration. Le Comité rappelle que ces données sont indispensables pour connaître la situation des travailleurs migrants dans l’État partie et évaluer la mise en œuvre de la Convention.
Le Comité encourage vivement l’État partie à solliciter l’assistance technique nécessaire en vue d’établir une solide base de données ventilées selon les sexes, qui lui permettra de connaître le contexte migratoire et la situation des travailleurs migrants au Mali, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, de surveiller la mise en œuvre de chacun des droits énoncés dans la Convention, et de rassembler les données à communiquer au Comité au sujet de l’exercice effectif de chacun de ces droits.
Formation/promotion de la Convention
15. Le Comité regrette que les fonctionnaires qui travaillent dans le domaine de la migration ne semblent guère recevoir de formation.
Le Comité invite l’Etat partie à dispenser des formations aux fonctionnaires qui travaillent dans le domaine de la migration.
16. Le Comité regrette l’absence d’informations concernant les mesures efficaces que l’État partie a prises pour informer les particuliers sur les droits que la Convention leur reconnaît.
Le Comité encourage l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour améliorer l’accès gratuit des migrants à l’information sur les droits que leur reconnaît la Convention.
Coopération avec les organisations non gouvernementales
17. Le Comité constate que, selon l’État partie, les organisations non gouvernementales ont été informées de la préparation du rapport initial du Mali. Toutefois, il s’inquiète de l’absence apparente de commentaires sur le rapport émanant des organisations non gouvernementales qui travaillent dans le domaine de la migration.
Le Comité encourage l’État partie à mettre en place une procédure participative qui permettrait d’associer les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile à l’élaboration de son deuxième rapport périodique.
2. Principes généraux (art. 7 et 83)
Non-discrimination
18. Le Comité constate avec intérêt que, d’après l’État partie, la législation malienne ne fait pas de distinction entre travailleurs nationaux et travailleurs migrants. Cependant, il regrette l’absence d’informations pratiques et d’exemples qui permettraient d’évaluer la mise en œuvre de ces dispositions.
Le Comité encourage l’État partie à veiller à l’application des dispositions du droit interne visant à protéger les droits des travailleurs migrants et à lui fournir des informations pratiques et des exemples à ce sujet dans son deuxième rapport périodique.
3. Droits de l’homme des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 8 à 63)
19. Le Comité prend note de l’affirmation de l’État partie selon laquelle la législation malienne garantit à tous les travailleurs migrants et aux membres de leur famille les droits de l’homme énoncés dans les parties III, IV et V de la Convention. Toutefois, il est préoccupé par l’absence d’informations précises et détaillées concernant la réalisation de ces droits.
Le Comité invite l’État partie à fournir dans son prochain rapport périodique des informations précises et détaillées concernant la réalisation des droits et libertés consacrés par la Convention.
4. Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne les migrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille.
(art. 64 à 71)
20. Le Comité s’inquiète de l’absence apparente de coordination entre les institutions et les services qui traitent les différents aspects de la migration.
Le Comité encourage l’État partie à créer un mécanisme de coordination afin d’améliorer les services accordés aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille, en garantissant l’uniformité et la conformité de ces services avec les traités régionaux et internationaux auxquels le Mali est partie. En outre, le Comité encourage l’État partie à veiller à ce qu’il soit tenu compte de la Convention lors de l’élaboration et de l’exécution de toutes les politiques concernant les droits des travailleurs migrants.
21. Le Comité prend note des programmes de coopération entre certains pays et le Mali pour le retour volontaire des travailleurs migrants maliens et des membres de leur famille, ainsi que de l’utilisation des contributions pour le développement en faveur des travailleurs migrants.
Le Comité prie l’État partie de lui communiquer, dans son prochain rapport, des informations plus détaillées sur la mise en œuvre effective de ces programmes et sur les résultats obtenus.
22. Le Comité note avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour combattre la traite d’enfants. Toutefois, il est inquiet de constater que, comme l’a reconnu l’État partie, la traite d’enfants reste un problème très sérieux au Mali. Le Comité est particulièrement préoccupé par le trafic d'enfants maliens vers les pays de la région et le fait qu’ils sont soumis à l'esclavage et au travail forcé. Il est également préoccupé par la situation des filles migrantes qui seraient exploitées.
Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour combattre la traite d’enfants en coopération avec les organisations gouvernementales et non-gouvernementales internationales et pour mettre en œuvre les recommandations formulées dans ce sens par le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits de l’enfant.
23. Le Comité regrette l’absence d’informations sur les mesures prises par l’État partie pour combattre la traite des femmes.
Le Comité encourage l’État partie à prendre des mesures effectives pour combattre la traite des femmes et à fournir des informations plus détaillées à ce sujet dans son prochain rapport.
7. Suivi et diffusion
Suivi
24. Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son deuxième rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations formulées dans les présentes observations finales. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour assurer la mise en œuvre des présentes recommandations, entre autres, en les transmettant aux membres du gouvernement et du parlement, ainsi qu’aux autorités locales, le cas échéant, pour examen et suite à donner.
Diffusion
25. Le Comité prie également l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organismes publics et du corps judicaire, des organisations non gouvernementales et des autres membres de la société civile, et d’informer les Maliens émigrant à l’étranger, ainsi que les travailleurs migrants étrangers en transit ou résidant au Mali, des droits que la Convention leur reconnaît ainsi qu’aux membres de leur famille.
8. Prochain rapport périodique
26. Le Comité prie l’État partie de soumettre son deuxième rapport périodique d’ici au 1er octobre 2009
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