Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Argentine, U.N.
Doc. CRC/C/15/Add.35 (1995).
COMITE DES DROITS DE L'ENFANT
Huitième session
EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION
Observations finales du Comité des droits de l'enfant : Argentine
1. Le Comité a examiné le rapport initial de l'Argentine (CRC/C/8/Add.2) à sa septième session, de ses 177ème à 179ème séances (CRC/C/SR.177, 178 et 179), les 10 et 11 octobre 1994. Etant donné que le rapport supplémentaire demandé au Gouvernement argentin pour compléter les informations contenues dans le rapport initial de l'Argentine a été reçu juste avant l'examen du rapport, le Comité a décidé de repousser l'adoption de ses observations finales à sa prochaine session. Il a donc adopté*/ à sa huitième session les observations finales ci-après :
A. Introduction
2. Le Comité remercie l'Etat partie d'avoir ouvert le dialogue avec lui. Il note avec regret que le rapport présenté par le Gouvernement argentin ne porte pas sur tous les droits énoncés dans la Convention et qu'il ne suit pas les directives du Comité concernant l'établissement des rapports initiaux. Il note que le rapport traite essentiellement du cadre juridique et ne contient pas suffisamment d'informations, analytiques ou statistiques, sur l'application effective des principes et des droits énoncés dans la Convention. Les renseignements supplémentaires détaillés fournis par le gouvernement ont été reçus trop tard pour que les membres du Comité aient le temps de les examiner avant d'en débattre avec la délégation de l'Etat partie.
B. Aspects positifs
3. Le Comité note avec satisfaction que, lorsqu'il a ratifié la Convention, l'Etat partie a déclaré au sujet de l'article 38 que la législation nationale interdisait l'utilisation d'enfants de moins de 18 ans dans les conflits armés.
4. Le Comité accueille également avec satisfaction la création du Conseil national de l'enfance et de la famille, l'élaboration d'un plan national d'action pour l'enfance ainsi que la signature d'un pacte fédéral pour les mères et les enfants.
5. Le Comité se félicite des efforts déployés par le gouvernement de l'Etat partie pour faire connaître la Convention relative aux droits de l'enfant.
6. Il accueille avec satisfaction l'incorporation dans le droit interne de la Convention relative aux droits de l'enfant et d'autres instruments relatifs aux droits de l'homme ratifiés par l'Argentine et se félicite de ce que, du fait de l'importance qui leur est accordé sur le plan juridique, ils l'emportent sur les lois nationales.
7. Le Comité note avec satisfaction l'excellente couverture du programme de vaccination (99 % de la population) et le taux élevé d'alphabétisation, qui était de 95 % en 1990.
C. Principaux sujets de préoccupation
8. Le Comité reste préoccupé par les réserves de vaste portée formulées par le Gouvernement argentin lors de la ratification de la Convention en ce qui concerne les alinéas b), c), d) et e) de l'article 21.
9. Le Comité se dit inquiet de ce que des mesures suffisantes, notamment au plan administratif, ne semblent pas avoir été prises pour faciliter la coordination effective de l'application de la Convention aux niveaux local, régional et national.
10. Le Comité note qu'en droit argentin l'âge du mariage n'est pas le même pour les garçons et pour les filles, ce qui semble contraire aux dispositions de l'article 2 de la Convention.
11. Le Comité note avec une préoccupation particulière la situation des enfants appartenant à des groupes vulnérables et défavorisés, tels que les enfants handicapés, abandonnés et qui vivent ou travaillent dans la rue ainsi que les enfants des familles vivant dans la misère.
12. Le Comité est également préoccupé par le nombre élevé de mères célibataires âgées de 12 à 18 ans et par les informations faisant état de cas de violence dans la famille et de violences sexuelles.
13. Le Comité note les problèmes associés à l'école - taux élevé de renouvellement des enseignants et d'abandons scolaires.
E. Suggestions et recommandations
14. Le Comité recommande au Gouvernement argentin de réexaminer la réserve qu'il a formulée en ratifiant la Convention, en vue de la retirer. A cet égard, il appelle l'attention de l'Etat partie sur la Déclaration et le Programme d'action de Vienne adoptés par la Conférence mondiale sur les droits de l'homme en juin 1993, lesquels encouragent les Etats à retirer les réserves qu'ils ont formulées à la Convention relative aux droits de l'enfant.
15. L'Argentine étant un Etat fédéral, le Comité recommande au gouvernement d'adopter une approche globale de l'application de la Convention, notamment en assurant une meilleure coordination entre les divers mécanismes et institutions qui s'occupent déjà de la promotion et de la protection des droits de l'enfant. Il serait important dans ce contexte de créer une infrastructure appropriée à tous les niveaux et de mieux coordonner les efforts entrepris aux niveaux local et provincial avec ceux qui sont faits au niveau national. En outre, l'accent devrait être mis sur l'aspect surveillance, notamment par l'intermédiaire d'un ombudsman, ainsi que sur la coopération avec les organisations non gouvernementales qui défendent les droits de l'enfant.
16. Le Comité suggère à l'Etat partie de revoir son budget afin d'allouer un maximum de ressources à la promotion et à la protection des droits de l'enfant aux niveaux fédéral, régional et local.
17. Le Comité recommande que de nouveaux efforts soient faits pour donner au personnel qui s'occupe des enfants une formation appropriée, eu égard notamment aux principes et aux normes énoncés dans la Convention relative aux droits de l'enfant.
18. Le Comité suggère que, dans l'éducation et la formation des membres des forces de l'ordre, des juges et autre personnel de l'administration de la justice, une plus large place soit faite à la compréhension des normes internationales relatives à la justice pour mineurs. Il recommande également que des tribunaux pour enfants soient créés dans toutes les provinces.
19. Le Comité suggère que l'Etat partie envisage d'intensifier ses efforts pour assurer une éducation familiale et sensibiliser l'opinion au principe de la responsabilité égale des parents. Des programmes d'éducation sanitaire devraient être élaborés pour lutter contre la forte incidence des grossesses chez les adolescentes.
20. Le Comité suggère à l'Etat partie d'envisager la possibilité d'introduire des lois et mécanismes de suivi plus efficaces pour lutter contre la violence dans la famille, dans l'esprit de l'article 19.
21. Le Comité recommande en outre que le gouvernement adopte de nouvelles mesures pour réduire le taux des abandons scolaires dans les écoles et veiller à ce que celles-ci disposent de personnel qualifié et suffisamment nombreux. Il recommande aussi que l'on prenne de nouvelles initiatives pour encourager la participation active des enfants aux activités scolaires et extrascolaires, dans l'esprit de l'article 12 de la Convention.
22. Enfin, le Comité recommande que le rapport et les renseignements supplémentaires fournis par l'Etat partie, le compte rendu analytique des séances au cours desquelles ils ont été examinés et ses observations finales soient diffusés aussi largement que possible dans le pays.
*/ A la 208ème séance, le 26 janvier 1995.