Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Chili, U.N. Doc.
CRC/C/15/Add.22 (1994).
COMITE DES DROITS DE L'ENFANT
Sixième session
EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION
Observations finales du Comité des droits de l'enfant : Chili
1. Le Comité a examiné le rapport initial du Chili (CRC/C/3/Add.18) à ses 146ème, 147ème et 148ème séances (CRC/C/SR.146 à 148), les 14 et 15 avril 1994, et a adopté*/ les observations finales ci-après :
A. Introduction
2. Le Comité félicite l'Etat partie de son rapport complet, établi selon ses directives, qui reflète une stratégie tournée vers l'avenir, et le remercie aussi des réponses écrites détaillées données à la liste des questions. Il note avec satisfaction que les renseignements complémentaires détaillés donnés par la délégation et le fait que celle-ci participe à la mise en oeuvre des politiques nationales concernant les enfants ont permis d'engager un dialogue ouvert et constructif avec l'Etat partie.
3. Le Comité note aussi avec satisfaction que le rapport de l'Etat partie est le fruit d'une vaste consultation engagée au niveau national entre les autorités publiques et les organisations non gouvernementales qui se consacrent à la cause des enfants.
B. Aspects positifs
4. Le Comité se félicite de ce que la Convention relative aux droits de l'enfant soit d'application automatique dans l'Etat partie et que ses dispositions puissent être invoquées devant les tribunaux, cas qui s'est présenté dans la pratique.
5. Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par le Gouvernement chilien pour promouvoir et protéger les droits de l'enfant conformément aux normes énoncées dans la Convention et salue l'esprit dynamique et critique dont le Gouvernement chilien fait preuve dans son application.
6. Le Comité note l'adoption par le Gouvernement chilien du Plan national en faveur de l'enfance et sa volonté de coopérer avec toutes les parties intéressées, à l'échelon national et international, pour en assurer la mise en oeuvre.
7. Le Comité note aussi qu'au cours de la période considérée, des mesures législatives importantes ont été prises afin d'harmoniser la législation nationale avec les dispositions de la Convention, et prend acte de la mise en place de mécanismes de surveillance tels que le Service national des mineurs (SENAME), organisme relevant du Ministère de la justice, chargé d'apporter assistance et protection aux enfants et aux adolescents en situation particulièrement difficile.
8. Le Comité relève également avec satisfaction les priorités que s'est fixées le gouvernement et les efforts sérieux qu'il déploie pour trouver une solution aux problèmes sociaux actuels, en particulier en matière de santé et d'enseignement, et pour assurer la protection des droits des enfants handicapés.
9. Le Comité a entendu avec satisfaction le représentant annoncer que le Gouvernement chilien envisageait de ratifier la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.
C. Facteurs et difficultés entravant la mise en oeuvre de la Convention
10. Le Comité relève que, malgré tous les efforts du Gouvernement chilien, la pauvreté touche un grand nombre d'enfants et a eu pour effet de faire obstacle à l'application des dispositions de la Convention.
11. Le Comité reconnaît de plus que le gouvernement démocratique a été contraint d'entreprendre de grandes réformes législatives et administratives après la période de régime non démocratique. Les besoins en matière de réadaptation et de réinsertion sociale ont été également considérables, aussi et surtout dans le cas des enfants.
D. Principaux sujets de préoccupation
12. Le Comité s'inquiète de ce que la décentralisation risque d'entraîner une dégradation de la qualité des services de santé et de l'enseignement et de compromettre leur accès effectif, en particulier pour les groupes d'enfants les plus vulnérables.
13. Le Comité se déclare préoccupé des inégalités géographiques et sociales constatées dans l'exercice des droits garantis par la Convention.
E. Suggestions et recommandations
14. Le Comité recommande au gouvernement de faire un effort particulier pour harmoniser pleinement la législation en vigueur avec les dispositions de la Convention et à la lumière de ses principes généraux, ainsi que pour veiller à ce que l'intérêt supérieur des enfants soit une considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants, y compris celles qui sont prises par le Parlement, comme il est stipulé à l'article 3 de la Convention.
15. Le Comité recommande la mise en place d'un mécanisme national général chargé de surveiller et d'évaluer en permanence l'application de la Convention dans tout le pays, mesure particulièrement importante dans le contexte du programme de décentralisation exécuté par le gouvernement.
16. Le Comité recommande au gouvernement de l'Etat partie d'envisager de poursuivre l'application des mesures adoptées pour lutter contre les cas de mauvais traitements d'enfants. Il insiste sur l'importance des programmes de formation à l'intention des groupes professionnels intéressés, ainsi que sur la nécessité de mettre au point des mesures de médiation.
17. Le Comité recommande aussi la création d'un système légal d'administration de la justice des mineurs, conformément à l'esprit et à la lettre de la Convention, en particulier aux articles 37 et 40, ainsi qu'à d'autres règles applicables des Nations Unies, notamment les Règles de Beijing, les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté et les Principes directeurs de Riyad. Un tel système devrait aussi s'occuper de l'importante question de l'âge de la responsabilité pénale, compte tenu en particulier de l'intérêt supérieur de l'enfant. A cet égard, le Comité appelle l'attention de l'Etat partie sur la possibilité de faire appel au Programme de services consultatifs et d'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme du Centre pour les droits de l'homme.
18. Enfin, le Comité recommande que la Convention soit largement portée à la connaissance de la population et plus spécialement des enseignants, des travailleurs sociaux, des responsables de l'application de la loi, du personnel des établissements de rééducation, des juges et des membres d'autres professions intéressées par l'application de la Convention. Il recommande en particulier que, conformément au paragraphe 6 de l'article 44 de la Convention, une large diffusion soit donnée au rapport du Gouvernement chilien, à ses réponses écrites aux questions du Comité ainsi qu'aux comptes rendus analytiques des séances consacrées à l'examen du rapport et aux observations finales du Comité. Dans le même esprit, le Comité exprime l'espoir que ses observations finales susciteront un débat ouvert à l'échelon national sur les politiques qui se rapportent aux droits de l'enfant, notamment au niveau du Parlement.
*/ A la 156ème séance, tenue le 22 avril 1994.