COMITE DES DROITS DE L'ENFANT
Quatrième session
EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION
Conclusions du Comité des droits de l'enfant : El Salvador
1. Le Comité a examiné le rapport initial d'El Salvador (CRC/C/3/Add.9) à ses
85ème, 86ème et 87ème séances (CRC/C/SR.85, 86 et 87), les 27 et 28 septembre
1993 et a adopté */ les conclusions suivantes :
Introduction
2. Le Comité note avec satisfaction que l'Etat partie a ratifié rapidement la Convention et qu'il a présenté son rapport initial en temps voulu. Il regrette cependant que des renseignements fondamentaux et concrets, en réponse notamment aux questions de la liste communiquée au Gouvernement salvadorien bien avant la session du Comité, n'aient pu être fournis à temps pour l'examen du rapport. En outre, le Comité note que la délégation salvadorienne ne compte pas parmi ses membres des personnes s'occupant directement de l'application de la Convention au niveau national. Par ailleurs, il prend note de ce que le représentant d'El Salvador s'est engagé, au nom du Gouvernement salvadorien, à fournir par écrit les renseignements précis demandés par le Comité, même pendant la session en cours.
Aspects positifs
3. Le Comité se félicite de l'approche franche et critique adoptée par l'Etat partie pour élaborer son rapport et du fait notamment qu'il ait mentionné les principales difficultés auxquelles il se heurte en ce qui concerne l'application de la Convention.
4. Le Comité note avec satisfaction que des organismes publics ont été créés récemment pour protéger les enfants et améliorer leurs conditions de vie. Les mesures juridiques adoptées ou envisagées pour mieux protéger les droits de l'enfant, telles que le nouveau Code de la famille qui se trouve maintenant devant le Parlement, constituent également des initiatives encourageantes. En outre, le Comité se félicite de ce que le gouvernement ait l'intention de ratifier la Convention 138 de l'Organisation internationale du Travail ainsi que d'autres instruments relatifs à l'âge minimum d'admission à l'emploi.
5. Le Comité se félicite des initiatives ci-dessus, compte tenu notamment du fait qu'il est nécessaire et urgent de prendre des mesures de protection de l'enfance après la longue période de violence et de conflit interne qui a porté gravement atteinte à l'économie du pays et profondément affecté la population salvadorienne. Il espère que les mesures envisagées par le gouvernement se concrétiseront.
Facteurs et difficultés entravant la mise en oeuvre de la Convention
6. Le Comité prend note de la situation économique et sociale difficile que connaît le pays, situation aggravée par une pauvreté persistante et 12 années de guerre et de violence. Le Gouvernement salvadorien est conscient de la nécessité de faire des efforts à l'échelon national pour résoudre un grand nombre des problèmes que la guerre a fait surgir et garantir le plein respect des dispositions de la Convention. Le Comité espère que les institutions démocratiques du pays ainsi que sa politique de réconciliation sociale seront bient_t consolidées.
Principaux sujets de préoccupation
7. Le Comité regrette que le Gouvernement salvadorien n'ait pas tenu dûment compte des dispositions de l'article 4 de la Convention et que la diminution de la part du budget national allouée aux programmes sociaux ait eu des répercussions négatives sur la protection des droits de l'enfant.
8. Le Comité note également qu'il y a un manque de coordination entre les organismes et organisations publics et privés qui s'occupent des droits de l'enfant.
9. Le Comité trouve que la notion d'enfant en "situation irrégulière" qui apparaît dans la législation salvadorienne est préoccupante également. Il demande des éclaircissements quant aux critères utilisés pour définir cette réalité et quant aux possibilités d'application du droit pénal à ces enfants.
10. Le Comité estime aussi qu'il importe de se pencher sérieusement sur des questions ayant trait à la définition juridique de l'enfant, notamment l'âge minimum pour le mariage, l'accès à l'emploi, le service militaire et la possibilité de témoigner. Il semble que ces dispositions ne prennent pas suffisamment en considération les principes de l'intérêt supérieur de l'enfant et de la non-discrimination.
11. Le Comité juge alarmant le grand nombre d'enfants qui ont été abandonnés, déplacés ou sont devenus orphelins à la suite du conflit armé, ou qui, pour survivre, sont obligés de vivre et de travailler dans la rue.
12. Le Comité est aussi préoccupé par le fait que les attitudes discriminatoires à l'égard des filles et des enfants handicapés sont très courantes et que de nombreux enfants sont victimes de sévices et de violences au sein de la famille.
13. Le Comité constate avec inquiétude que les groupes professionnels qui travaillent avec des enfants et pour des enfants n'ont pas une formation suffisante.
Suggestions et recommandations
14. Le Comité recommande que, conformément au paragraphe 4 de l'article 44 de la Convention et à l'article 69 de son règlement intérieur, le Gouvernement salvadorien lui fournisse des informations complémentaires, en réponse aux questions posées et aux préoccupations exprimées lors de l'examen du rapport initial. Il conviendrait que ces informations lui parviennent avant la fin de 1994. Le Comité suggère en outre à El Salvador de présenter son "document de base" (voir HRI/1991/1) conformément au paragraphe 5 des directives adoptées par le Comité concernant la partie initiale des rapports des Etats parties intéressant les divers organes internationaux créés en vertu d'instruments relatifs aux droits de l'homme (CRC/C/5).
15. Le Comité souhaiterait aussi recevoir des informations sur l'application effective de la législation et sur l'impact des mesures prévues par le gouvernement pour améliorer le respect des droits de l'enfant. Il conviendrait notamment que le gouvernement apporte des éclaircissements au sujet de la place de la Convention dans la législation salvadorienne et la possibilité d'invoquer directement les dispositions de la Convention devant les tribunaux.
16. En ce qui concerne les effets négatifs du conflit interne sur les enfants vivant dans des conditions exceptionnellement difficiles, le Comité souhaite recevoir des renseignements précis sur les programmes de réadaptation des enfants affectés par la guerre et sur l'état d'avancement de ces programmes ainsi que des statistiques précises concernant les enfants déplacés à l'intérieur du pays.
17. Le Comité voudrait aussi avoir des informations sur la répartition des services de protection de l'enfance entre zones rurales et zones urbaines et sur la formation du personnel adéquat.
*/ A la 103ème séance, tenue le 8 octobre 1993.