COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT
Trente‑deuxième session
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION
Observations finales: Italie
1. Le Comité a examiné le deuxième rapport
périodique de l’Italie (CRC/C/70/Add.13), qui avait été reçu le 21
mars 2000, à ses 840e et 841e séances (voir
CRC/C/SR.840 et 841), tenues le 16 janvier 2003, et a adopté à sa 862e séance
(voir CRC/C/SR.862), tenue le 31 janvier 2003,
les observations finales ci‑après.
A. Introduction
2. Le Comité se félicite de la présentation du deuxième rapport périodique et de ses annexes, qui ont été établis conformément aux directives du Comité. Le Comité se félicite du caractère autocritique du rapport ainsi que du processus participatif qui a permis son élaboration. Il prend également acte de la présentation dans les délais demandés des réponses écrites à la liste des points à traiter (CRC/C/Q/ITA/2), qui ont permis de mieux comprendre la situation des enfants dans l’État partie. Le Comité prend également acte du dialogue positif qu’il a pu avoir avec la délégation de l’État partie et constate que la présence d’une importante délégation de haut niveau en prise directe avec la mise en œuvre de la Convention a permis de mieux comprendre la situation en matière de droits de l’enfant dans l’État partie.
B.
Mesures de suivi mises en œuvre et progrès
accomplis par l’État partie
3. Le Comité accueille avec satisfaction:
a) La ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, et du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants;
b) La création d’une Commission parlementaire spéciale pour les enfants et d’un Observatoire national sur les enfants et adolescents (loi 451/97);
c) La création du Centre national de documentation et d’analyse pour les enfants et les adolescents, qui a rassemblé une quantité impressionnante de données et de travaux de recherche sur les enfants, qui peuvent être consultés sur son site Web;
d) L’adoption de la loi 285/97 contenant des dispositions sur la promotion des droits et des possibilités offertes aux enfants et aux adolescents et portant création d’un Fonds national pour les enfants et les adolescents;
e) L’adoption de la loi 269/98 contre l’exploitation de la prostitution, de la pornographie et du tourisme sexuel en rapport avec les mineurs;
f) La campagne contre la mutilation génitale féminine;
g) La généralisation de l’intégration des enfants handicapés dans les écoles ordinaires;
h) La ratification de la Convention no 182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination;
i) La ratification de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.
C.
Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Précédentes observations finales
4. Le Comité regrette qu’un certain nombre des préoccupations qu’il avait exprimées et des recommandations qu’il avait formulées (CRC/C/15/Add.41) à la suite de l’examen du rapport initial de l’État partie (CRC/C/8/Add.18) n’aient pas été suffisamment prises en considération, en particulier celles qui figurent aux paragraphes 13 et 15 à 22, concernant la coordination des actions engagées pour la mise en œuvre de la Convention, la non‑discrimination et la maltraitance à enfant. Ces préoccupations et recommandations sont réitérées dans le présent document.
5. Le Comité demande instamment à l’État
partie de n’épargner aucun effort pour donner suite aux précédentes
recommandations qui n’ont pas encore été appliquées et de répondre à la
liste des sujets de préoccupations contenue dans les présentes observations
finales.
1.
Mesures d’application générales
Législation
6. Le Comité note qu’un certain nombre de textes législatifs importants ont été adoptés et que certains font référence à la Convention. En outre, le Comité se félicite des renseignements apportés par l’État partie concernant les projets de loi à l’examen, en particulier ceux touchant à la justice pour mineurs et à l’éducation.
7. Le Comité recommande à l’État partie de
poursuivre son examen rigoureux de la législation et de veiller à ce que
les lois nationales et régionales soient axées sur les droits de l’enfant
et conformes aux normes internationales relatives aux droits de l’homme,
en particulier aux dispositions de la Convention, et soient appliquées
avec efficacité.
Ressources
8. Le Comité se félicite de l’adoption des Directives du Programme de coopération italien sur les questions intéressant les enfants et adolescents, qui conçoivent le développement des jeunes générations comme un domaine d’investissement. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par le fait que la Convention n’est pas appliquée «dans toutes les limites des ressources disponibles», comme demandé à l’article 4 de la Convention.
9. Le Comité recommande à l’État partie de
continuer d’accroître, dans la mesure du possible, les ressources allouées
aux enfants et à leurs familles, et d’engager une analyse de tous les budgets
sectoriels et globaux de l’État partie et des régions afin de déterminer
la part du budget consacrée aux enfants, de définir les priorités et
d’allouer les ressources «dans toutes les limites des ressources disponibles».
Le Comité recommande également à l’État partie d’appliquer ce principe aux
activités menées par le Ministère des affaires étrangères dans le cadre de
l’aide et de la coopération internationales au développement.
Coordination
10. Le Comité se félicite de la mise en place de l’Observatoire national sur les enfants et adolescents (loi 451/97), qui coordonne les politiques et programmes concernant les enfants aux niveaux national, régional et local. En outre, le Comité note avec satisfaction que l’Observatoire national est chargé d’élaborer tous les deux ans un plan d’action national en faveur de l’enfance afin de fixer les priorités et de coordonner toutes les mesures se rapportant aux enfants. Le Comité note en outre que la Conférence État‑Régions se réunit régulièrement dans le but de coordonner les activités entre l’État et les régions et de surveiller la mise en œuvre des politiques aux échelons national et régional. Le Comité craint que cette coordination ne soit pas suffisante et que certains points particuliers ne soient coordonnés en dehors de l’Observatoire national. Le Comité s’inquiète également de l’absence de coordination structurée avec les organisations non gouvernementales (ONG).
11. Le Comité recommande à
l’État partie:
a) De
renforcer la coordination, assurée en particulier par l’Observatoire national
et la Conférence État‑Régions, au sein des organismes gouvernementaux aux
niveaux national, régional et local et entre ces organismes, concernant la mise
en œuvre de politiques tendant à promouvoir et protéger les droits de
l’enfant, comme il l’a déjà recommandé (CRC/C/15/Add.41, par. 13);
b) D’assurer
une coopération plus étroite et plus active avec les ONG œuvrant en faveur
des droits de l’enfant, en particulier à l’échelon local;
c) D’encourager
la participation des enfants aux activités de l’Observatoire national.
Plan d’action national
12. Le Comité note que le nouveau plan d’action en faveur de l’enfance va être examiné par le Parlement et que l’État partie envisage de formuler un autre plan pour la mise en œuvre du document final adopté lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants, intitulé «Un monde digne des enfants». Le Comité s’inquiète d’éventuelles incohérences entre les deux plans susmentionnés.
13. Le Comité recommande à l’État
partie:
a) D’accélérer l’examen du
plan d’action national en faveur de l’enfance en
vue de son adoption;
b) D’assurer l’harmonisation
entre le plan d’action national et le plan pour la mise en œuvre du document
final adopté lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des
Nations Unies consacrée aux enfants;
c) De surveiller et évaluer
soigneusement les progrès réalisés et d’évaluer l’impact des politiques
adoptées sur les enfants.
Structures de surveillance indépendante
14. Le Comité prend acte de la création dans quatre régions de bureaux de défenseur public pour les enfants et des efforts visant à instituer au niveau national un défenseur des enfants (en particulier les projets de loi en instance devant le Parlement), mais reste préoccupé par le fait qu’il n’existe aucun mécanisme central indépendant chargé de surveiller la mise en œuvre de la Convention et habilité à recevoir les plaintes déposées par des enfants aux niveaux régional et national et à traiter ces plaintes.
15. Le Comité recommande à l’État partie de mener à leur terme ses efforts tendant à instituer un médiateur national indépendant pour les enfants, si possible, dans le cadre d’une institution nationale indépendante de protection des droits de l’homme (voir l’Observation générale no 2 du Comité concernant le rôle des institutions indépendantes de protection des droits de l’homme), et conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (les «Principes de Paris») (annexe de la résolution 48/134 de l’Assemblée générale) pour suivre et évaluer les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention. Le médiateur devrait être à la disposition des enfants, être habilité à recevoir et à examiner les plaintes concernant des violations des droits de l’enfant en étant attentif aux besoins des enfants, et être doté des moyens de leur donner suite de manière efficace. Le Comité recommande en outre que des liens appropriés soient établis entre les institutions nationales et régionales.
Collecte de données
16. Le Comité note avec satisfaction les efforts engagés pour améliorer la collecte de données, en particulier moyennant la création du Centre national de documentation et d’analyse pour les enfants et les adolescents. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par le manque de données dans certains domaines visés par la Convention. Le Comité constate également avec préoccupation que la collecte de données participe toujours d’une approche axée sur la famille plutôt qu’en considérant l’enfant comme un être humain autonome. Par ailleurs, le Comité s’inquiète du manque de cohérence entre les divers organes chargés de la collecte des données et entre les régions.
17. Conformément à ses
recommandations antérieures (ibid., par. 14), le Comité recommande de
nouveau à l’État partie:
a) De
renforcer son mécanisme de collecte et d’analyse de données ventilées
systématiquement sur toutes les personnes de moins de 18 ans dans tous les
domaines couverts par la Convention, en mettant particulièrement l’accent sur
les groupes les plus vulnérables, à savoir les enfants handicapés, les
enfants roms, les enfants appartenant à des familles migrantes, les enfants non
accompagnés, les enfants victimes de violence et les enfants de ménages
économiquement défavorisés;
b) De
se servir efficacement de ces indicateurs et données pour formuler
− et évaluer − des politiques et programmes pour
l’application de la Convention et la surveillance de cette application;
c) D’assurer la cohérence des activités de collecte de données menées par les diverses institutions, aux niveaux national et régional.
Formation/diffusion de la Convention
18. Le Comité prend acte avec satisfaction des efforts déployés pour diffuser la Convention, notamment par l’intermédiaire du Centre national de documentation et d’analyse pour les enfants et les adolescents, et en particulier l’inscription des droits de l’enfant au programme d’instruction civique. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par le fait que les activités de diffusion, sensibilisation et formation à l’intention des groupes professionnels concernés ne sont pas toujours entreprises de façon systématique et ciblée.
19. Le Comité recommande à
l’État partie:
a) De
renforcer et poursuivre son programme de diffusion d’informations sur
la Convention et l’application de la Convention auprès des enfants et des
parents, de la société civile et de tous les secteurs des pouvoirs
publics, à tous les niveaux, en essayant de toucher également les groupes vulnérables;
b) D’élaborer des programmes systématiques et permanents de formation aux droits de l’homme, dont les droits de l’enfant, à l’intention de tous les groupes professionnels qui travaillent pour et avec les enfants (par exemple, les juges, les avocats, les responsables de l’application des lois, les fonctionnaires, les agents des collectivités locales, le personnel des établissements accueillant des enfants et des centres de détention pour mineurs, les enseignants et le personnel de santé).
2. Principes généraux
Non‑discrimination
20. Le Comité prend acte de la création de plusieurs observatoires sur la discrimination dans l’État partie ainsi que des dispositions relatives à la discrimination contenues dans la loi 40/98 (Réglementation de l’immigration et règles concernant la situation de l’immigré). Néanmoins, le Comité est préoccupé par les incidents à motivation raciste à l’encontre des minorités, par le recours à une phraséologie haineuse dans les communications publiques, et par les disparités existant dans l’exercice des droits économiques et des droits sociaux, en particulier dans les domaines de la santé, la protection sociale, l’éducation et le logement, au détriment des enfants pauvres, des enfants roms, des enfants de parents étrangers, dont les mineurs non accompagnés, et des enfants handicapés.
21. Conformément à l’article 2 de la
Convention et autres articles connexes et dans le prolongement de ses
précédentes recommandations (ibid., par. 17 et 18), le Comité
recommande à l’État partie:
a) De
prendre toutes les mesures appropriées, telles que l’organisation
de campagnes à grande échelle d’éducation du public visant à prévenir et
combattre les attitudes sociales négatives, et de mettre en œuvre les
recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale
(A/56/18, par. 298 et 320);
b) De
renforcer ses efforts tendant à poursuivre et sanctionner pénalement
de manière appropriée les auteurs d’actes de racisme, de discrimination
raciale, de xénophobie et d’intolérance qui y est associée;
c) De
procéder à une évaluation soigneuse et régulière des disparités qui existent en
ce qui concerne l’exercice par les enfants de leurs droits, puis de prendre sur
cette base les dispositions qui s’imposent pour prévenir et éliminer la
discrimination moyennant des mesures proactives;
d) De
veiller à ce que le processus de décentralisation favorise l’élimination
des disparités entre enfants liées à la richesse de la région dans
laquelle ils vivent;
e) De
continuer à donner la priorité et à consacrer des ressources et des services
sociaux aux enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables;
f) D’étudier sans retard la situation des enfants étrangers en détention, de veiller à ce qu’ils jouissent de leurs droits pleinement et sans discrimination, en particulier le droit à l’éducation, et d’assurer leur droit à l’intégration dans la société.
22. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures et les programmes concernant la Convention qu’il aura mis en œuvre pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte de l’Observation générale no 1 du Comité relative au paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention (buts de l’éducation).
Intérêt supérieur de l’enfant
23. Le Comité note avec satisfaction que la Cour constitutionnelle a fait de l’intérêt supérieur de l’enfant un principe constitutionnel, mais demeure préoccupé de constater que le principe général qu’est l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3) n’est pas pleinement mis en œuvre ni dûment intégré dans l’exécution des politiques et programmes de l’État partie.
24. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour s’assurer que le principe général de l’intérêt supérieur de l’enfant soit incorporé de façon appropriée dans tous les textes de loi et les budgets, ainsi que dans les décisions judiciaires et administratives et dans les projets, programmes et services ayant des incidences sur les enfants.
Respect des opinions de l’enfant
25. Le Comité constate avec préoccupation que le respect des opinions de l’enfant, principe général énoncé à l’article 12 de la Convention, n’est pas pleinement appliqué. À cet égard, le Comité s’inquiète que le droit de l’enfant à être entendu ne soit pas suffisamment garanti dans les procédures susceptibles de l’affecter, en particulier dans les cas de séparation des parents, de divorce, d’adoption ou de placement familial, ou dans l’enseignement.
26. Le Comité recommande:
a) Que
la législation régissant les procédures judiciaires et les procédures
administratives garantisse à l’enfant capable de former sa propre opinion le
droit d’exprimer ses opinions, lesquelles devront être dûment prises en
considération;
b) Que
l’on mette tout particulièrement l’accent sur le droit de l’enfant
à participer aux activités au sein de la famille, à l’école, dans d’autres
institutions et organismes et au sein de la société en général, une
attention particulière étant accordée aux groupes vulnérables;
c) Que
l’on renforce les campagnes de sensibilisation du public, ainsi que l’éducation
et la formation des professionnels concernant l’application de ce principe.
3. Droits civils et politiques
Le droit à une identité
27. Le Comité note avec préoccupation que les enfants adoptés ne peuvent connaître l’identité de leurs parents naturels, même à leur majorité et même s’il s’avère que c’est dans leur intérêt supérieur. Par ailleurs, le Comité est préoccupé d’apprendre que les enfants nés hors mariage n’ont légalement ni mère ni père tant qu’ils ne sont pas reconnus par leur mère et/ou leur père.
28. Compte tenu de
l’article 7 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:
a) De
garantir autant que possible à l’enfant le respect de son droit de connaître
l’identité de ses parents s’il s’agit d’un enfant adopté ou d’un enfant né hors
mariage qui n’a été reconnu par aucun de ses parents;
b) De
réexaminer et modifier d’urgence les lois de façon à ce que les enfants
nés hors mariage aient légalement une mère dès leur naissance
(conformément à l’arrêt Marckx c. Belgique de la Cour européenne
des droits de l’homme et à la règle mater semper certa est) et
encourager la reconnaissance de ces enfants par leur père (comme moyen
d’empêcher l’abandon «facile» des enfants);
c) De ratifier la Convention européenne sur le statut juridique des enfants nés hors mariage.
Liberté de pensée
29. Le Comité note avec préoccupation que, comme mentionné dans le rapport de l’État partie (par. 147), les enfants, en particulier à l’école élémentaire, peuvent être marginalisés s’ils n’assistent pas au cours d’instruction religieuse, qui porte essentiellement sur la religion catholique. En outre, le Comité estime préoccupant que les parents, en particulier les parents d’origine étrangère, ne sachent pas toujours que l’instruction religieuse n’est pas obligatoire.
30. Compte tenu des articles 2, 14 et 29 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de s’assurer que les parents, en particulier ceux d’origine étrangère, savent, lorsqu’ils remplissent les formulaires pertinents, que l’instruction religieuse catholique n’est pas obligatoire.
Torture et mauvais traitements
31. Le Comité est profondément préoccupé d’apprendre que des enfants seraient maltraités par des agents de la force publique et que des sévices seraient commis, en particulier à l’encontre d’enfants étrangers et d’enfants roms.
32. Conformément à ses
précédentes recommandations (ibid., par. 20), le Comité recommande à
l’État partie:
a) D’ériger le crime de
torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en
infraction spécifique dans sa législation pénale;
b) De créer des mécanismes
adaptés aux enfants pour recevoir les plaintes dirigées contre des agents de la
force publique pour mauvais traitements au cours d’une arrestation, d’un
interrogatoire ou d’une garde, ou dans un lieu de détention;
c) De former systématiquement
aux droits fondamentaux des enfants les policiers et les carabinieri
(gendarmes), ainsi que les professionnels travaillant dans des lieux
de détention.
4.
Milieu familial et protection de remplacement
Enfants privés de leur milieu familial
33. Le Comité note avec préoccupation que la loi 184/83 (comme modifiée par la loi 149/2001) concernant l’adoption et le placement en famille d’accueil n’a pas été largement appliquée dans l’ensemble de l’État partie et qu’il y a toujours davantage d’enfants placés en institution qu’en famille d’accueil. Le Comité exprime également sa préoccupation face au grand nombre d’enfants placés en institution à des fins de protection sociale − parfois en cohabitation avec des délinquants mineurs. En outre, le Comité constate avec inquiétude qu’une étude réalisée en 1998 par le Centre national de documentation et d’analyse pour les enfants et les adolescents fait apparaître que la durée du séjour en institution peut être très longue, que le contact avec la famille n’est pas toujours garanti et que 19,5 % de ces institutions n’étaient pas dûment agréées.
34. Compte tenu de
l’article 20 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:
a) De prendre toutes les
mesures qui s’imposent pour assurer l’application de la loi 184/83;
b) À titre de mesure
préventive, d’améliorer la qualité de l’aide sociale et du soutien accordés aux
familles pour les aider à faire face à leurs responsabilités éducatives,
notamment grâce à des programmes d’éducation et d’orientation des parents à
l’échelon de la collectivité;
c) De s’employer
énergiquement à mettre en place des modalités de prise en charge autres
que le placement en institution, telles que le placement en famille d’accueil
ou en foyer de type familial et autres mesures de protection de remplacement
axées sur la famille, et à ne placer les enfants en institution qu’en dernier
recours;
d) D’assurer l’inspection
régulière des institutions par des organismes indépendants;
e) De mettre en place des
mécanismes habilités à recueillir et instruire les plaintes émanant d’enfants
placés, de contrôler la qualité des soins et, en application de
l’article 25 de la Convention, de mettre en place un système de
réexamen périodique de la décision de placement.
Adoption
35. Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, mais reste préoccupé par le fait que les procédures et les coûts de l’adoption interne varient en fonction des organismes agréés.
36. Compte tenu de
l’article 21 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de
prendre les mesures nécessaires:
a) Pour harmoniser sur tout
le territoire de l’État partie les procédures et coûts afférents à l’adoption
interne entre les divers organismes agréés;
b) Pour conclure des accords
bilatéraux avec les pays (d’origine) qui n’ont pas ratifié la Convention de
La Haye susmentionnée.
Violence, sévices et négligence
37. Le Comité se félicite de la mise en place d’une commission nationale pour la coordination de la lutte contre la violence faite aux enfants et leur exploitation sexuelle et de l’adoption d’une stratégie globale. En outre, le Comité se félicite de la promulgation de la loi 66/96 contre la violence sexuelle et la loi 154/2001 contre la violence dans la famille, mais reste préoccupé par le manque de données et de renseignements détaillés sur la maltraitance et la négligence à l’égard des enfants. En outre, le Comité est préoccupé par les seuils d’âge fixés dans la législation réprimant les actes de violence à l’encontre des enfants, dans la mesure où les enfants ne bénéficient pas de la même protection selon qu’ils ont plus de 14 ou plus de 16 ans (en fonction de leurs relations avec l’auteur de l’acte de violence).
38. Compte tenu de
l’article 19 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:
a) D’entreprendre des études
sur la violence, les mauvais traitements et les sévices, y compris les
sévices sexuels, subis par les enfants, notamment les enfants de groupes
vulnérables, en particulier les actes perpétrés au sein de la famille et dans
les écoles, de façon à pouvoir évaluer l’étendue, l’ampleur et la nature
de ces pratiques;
b) De mener des campagnes de
sensibilisation, avec la participation d’enfants, pour prévenir et combattre la
maltraitance à enfant;
c) De modifier sa
législation concernant la limite d’âge fixée actuellement pour assurer une
protection spéciale contre toutes les formes de violence à l’encontre des
enfants;
d) D’évaluer l’action des structures
existantes et de dispenser une formation aux membres des groupes
professionnels s’occupant de ces types d’affaires;
e) De traiter de façon
appropriée les cas de violences, de mauvais traitements et de sévices, en
particulier de sévices sexuels, infligés aux enfants au sein de la famille,
dans le cadre d’une enquête et d’une procédure judiciaire respectueuses
des enfants, afin de garantir une meilleure protection des victimes, y compris
de leur droit à l’intimité.
5.
Santé et bien‑être
Santé
39. Le Comité se félicite de l’adoption de la Charte des droits de l’enfant à l’hôpital et prend note de la forte baisse du nombre de décès d’enfants dus à des accidents de la circulation et du nombre d’enfants touchés par le VIH/sida. Néanmoins, le Comité exprime sa préoccupation face à la réticence des enfants appartenant à des groupes vulnérables à recourir aux services de santé.
40. Le Comité recommande à l’État partie de
prendre des mesures proactives en vue de faciliter l’accès aux services de
santé à tous les enfants et d’encourager les parents à faire appel aux services
de santé destinés à tous les enfants.
Santé des adolescents
41. Le Comité s’inquiète du grand nombre d’adolescents souffrant de troubles psychologiques (en particulier des troubles de l’alimentation) et du nombre relativement élevé d’avortements parmi les adolescentes, en particulier celles d’origine étrangère.
42. Le Comité recommande à
l’État partie:
a) De prendre toutes les
dispositions nécessaires pour renforcer ses services de santé mentale et
de conseil, en veillant à ce qu’ils soient accessibles et adaptés aux
adolescents, et d’entreprendre des études sur les causes et les circonstances
des troubles psychologiques parmi les adolescents;
b) De prendre les mesures
supplémentaires nécessaires pour réduire le taux de grossesse chez les
adolescentes, notamment en intégrant l’éducation sanitaire, y compris
l’éducation sexuelle, dans les programmes scolaires, et en renforçant la
campagne d’information sur l’utilisation de moyens de contraception.
6.
Éducation
43. Le Comité se félicite de l’adoption de la loi 9/99, qui prolonge la durée de la scolarité obligatoire (portée de 8 à 10 ans), et des divers programmes visant à améliorer la formation des professeurs. Il reste néanmoins préoccupé par le taux élevé d’abandon scolaire dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire; par les disparités que présentent les résultats scolaires en fonction du milieu culturel et socioéconomique des élèves et d’autres facteurs tels que le sexe (en fait, davantage de filles que de garçons obtiennent un diplôme d’enseignement secondaire), l’invalidité et l’origine ethnique. En outre, le Comité est préoccupé par le grand nombre d’affaires de brimades dans les écoles et par la non‑prise en considération de l’opinion des enfants dans l’enseignement.
44. Le Comité recommande à
l’État partie:
a) De
renforcer ses efforts tendant à réduire le taux d’abandon scolaire dans
le deuxième cycle de l’enseignement secondaire;
b) De
prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer les disparités dans
les résultats scolaires entre filles et garçons et entre enfants issus de
groupes sociaux, économiques ou culturels différents, et de garantir à tous une
éducation de qualité;
c) De
prendre des mesures en vue de mettre en place des mécanismes et structures
destinés, avec la participation des enfants, à prévenir les brimades et autres
formes de violence à l’école et d’associer les enfants à l’élaboration et
à la mise en œuvre des stratégies à cet effet;
d) De
veiller à ce que la loi, sur l’ensemble de son territoire, reflète
l’article 12 de la Convention et respecte les droits de l’enfant
d’exprimer son opinion, celle‑ci devant être dûment prise en
considération dans toutes les questions qui concernent son éducation,
y compris la discipline à l’école.
7.
Mesures spéciales de protection
Mineurs non accompagnés
45. Le Comité se félicite de la création d’une commission chargée du suivi de la situation des enfants étrangers et de la référence spécifique faite à la Convention dans la loi 40/98 sur l’immigration concernant l’accès aux soins de santé. Toutefois, le Comité reste préoccupé par: l’absence de structures appropriées pour recevoir les mineurs non accompagnés; le manque d’harmonisation des procédures applicables aux mineurs non accompagnés dans les différentes régions; la nouvelle disposition de la loi 189/2002 autorisant le placement en détention d’immigrants en situation irrégulière; l’application du décret 113/99 qui se traduit par une augmentation du nombre de rapatriements, sans suivi approprié; le changement intervenu en 2000 concernant le permis de résidence pour les mineurs.
46. Conformément aux principes et dispositions
de la Convention, notamment à ses articles 2, 3, 22 et 37, le Comité
recommande à l’État partie en ce qui concerne les enfants, qu’ils soient
demandeurs d’asile ou non:
a) De
renforcer les efforts visant à créer un nombre suffisant de centres spécialisés
dans l’accueil des mineurs non accompagnés, en accordant une attention
particulière aux enfants victimes de la traite ou d’une exploitation
sexuelle;
b) De
veiller à ce que le séjour dans les centres d’accueil soit le plus bref
possible et à ce que l’accès à l’éducation et à la santé soit garanti
pendant et après le séjour dans un tel centre;
c) D’adopter
dès que possible une procédure harmonisée dans l’intérêt supérieur de l’enfant
pour traiter le problème des mineurs non accompagnés sur tout le territoire
de l’État partie;
d) De
veiller à ce qu’une aide au rapatriement soit envisagée lorsque cela correspond
à l’intérêt supérieur de l’enfant et à ce qu’un suivi soit garanti pour ces
enfants.
Exploitation économique
47. Le Comité prend acte de l’étude publiée récemment par l’Institut de statistiques national concernant le travail des enfants en Italie et exprime son inquiétude devant l’ampleur de ce phénomène dans l’État partie.
48. Le Comité recommande à l’État partie
d’élaborer, sur la base de cette étude récente, une stratégie globale prévoyant
des actions spécifiques et bien ciblées de prévention et d’élimination du
travail des enfants, notamment par le canal d’activités de sensibilisation
et de la détermination des facteurs en cause.
Exploitation sexuelle et traite
49. Le Comité se félicite de l’adoption de la loi 269/98 contre l’exploitation de la prostitution, de la pornographie et du tourisme sexuel au détriment des mineurs, et de la mise sur pied d’un Comité interministériel pour la coordination de l’action des pouvoirs publics contre la maltraitance à enfant et la traite de mineurs et de femmes aux fins de leur exploitation sexuelle. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par le nombre d’enfants qui font l’objet de traite aux fins de leur exploitation sexuelle dans l’État partie.
50. Le Comité recommande à
l’État partie:
a) De
renforcer ses efforts pour prévenir et combattre la traite des enfants
à des fins d’exploitation sexuelle, conformément à la Déclaration, au
Programme d’action et à l’Engagement mondial adoptés lors des Congrès mondiaux
de 1996 et 2001 contre l’exploitation sexuelle des enfants;
b) De
surveiller l’application de la loi 269/68, en particulier de son volet
visant l’«aspect demande» de l’exploitation sexuelle;
c) De
veiller à ce que des ressources suffisantes, tant humaines que financières,
soient affectées aux politiques et programmes dans ce domaine.
Administration de la justice pour mineurs
51. Le Comité note qu’une réforme de la justice pour mineurs est en instance. Il est préoccupé par: la discrimination à l’égard des enfants d’origine étrangère et des enfants roms dans le système de justice pour mineurs; l’absence de structures indépendantes permettant de contrôler les conditions de détention des enfants; et par la formation insuffisante du personnel travaillant dans le système de justice pour mineurs.
52. Le Comité recommande à l’État partie, dans
le cadre de sa réforme du système de justice pour mineurs, de se conformer
entièrement aux dispositions et principes énoncés dans la Convention, en
particulier en ses articles 37, 40 et 39, ainsi qu’aux autres normes internationales
applicables en la matière, telles que l’Ensemble de règles minima des
Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs
(Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la
prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les
Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté
et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice
pénale.
53. En particulier, le Comité
recommande à l’État partie:
a) De
prendre toutes les mesures nécessaires, entre autres en menant des campagnes de
sensibilisation et en assurant une formation appropriée du personnel concerné,
pour prévenir et éliminer la discrimination à l’égard des enfants d’origine
étrangère et des enfants roms;
b) D’autoriser
des organismes impartiaux et indépendants à effectuer des visites périodiques
dans les centres d’accueil et les établissements pénitentiaires pour mineurs,
et de veiller à ce que chaque mineur privé de liberté ait accès aux services
d’un avocat indépendant et à un mécanisme de plainte indépendant et adapté aux
enfants;
c) De
dispenser une formation sur les droits de l’enfant aux responsables
du système de justice pour mineurs.
Enfants appartenant à des groupes minoritaires
54. Tout en notant les efforts déployés par l’État partie pour améliorer la situation des enfants roms, le Comité reste préoccupé par la situation sociale difficile de ces enfants et leur accès insuffisant à l’éducation et aux soins de santé. En outre, le Comité est vivement préoccupé par les affaires de discrimination à l’égard de ce groupe d’enfants, parfois même de la part de fonctionnaires de l’État partie.
55. Le Comité recommande à l’État partie de
formuler, en collaboration avec les ONG roms, des politiques et programmes
globaux proactifs tendant à prévenir l’exclusion sociale et la discrimination à
leur égard des enfants roms ainsi qu’à leur permettre de jouir pleinement de
leurs droits, notamment en matière d’accès à l’éducation et aux soins
de santé.
8.
Diffusion de la documentation
56. Enfin, le Comité recommande que,
conformément au paragraphe 6 de l’article 44 de la Convention,
l’État partie assure à son rapport périodique une large diffusion auprès du
public et envisage de publier ledit rapport, ainsi que les réponses écrites à
la liste de questions soulevées par le Comité, le compte rendu des séances
consacrées à son examen et les observations finales adoptées par le
Comité. Ce document devrait être largement diffusé de façon à susciter un débat
et à faire connaître la Convention, son application et sa surveillance au
Gouvernement, au Parlement et au grand public, y compris aux ONG concernées.
9.
Prochain rapport
57. À la lumière de la recommandation sur la soumission de rapports périodiques, qui a été adoptée par le Comité et est exposée dans son rapport sur sa vingt‑neuvième session (CRC/C/114), le Comité souligne l’importance qui s’attache au respect d’un calendrier qui soit pleinement conforme aux dispositions de l’article 44 de la Convention. L’un des aspects importants des responsabilités des États parties à l’égard des enfants en vertu de la Convention consiste à faire en sorte que le Comité puisse examiner régulièrement les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention. Il est donc très important que les États parties présentent leurs rapports régulièrement et dans les délais fixés. À titre exceptionnel, et afin d’aider l’État partie à s’acquitter pleinement des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention, le Comité invite ce dernier à présenter dans un seul document ses troisième et quatrième rapports périodiques avant le 4 octobre 2008, date à laquelle est attendu le quatrième rapport périodique. Le Comité attend de l’État partie qu’il soumette par la suite des rapports tous les cinq ans, comme le prévoit la Convention.
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