University of Minnesota



Comité relative aux droits de l'enfant, Observation générale No. 4, Mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant (art. 4, 42 et 44, par. 6)
, (Trente-quatrième session 2003), U.N. Doc. CRC/GC/2003/5 (2003), réimprimé en Récapitulation des observations générales ou recommendations générales adoptées par les organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.7 (2004).


AVANT‑PROPOS

Le Comité des droits de l’enfant a établi la présente Observation générale pour définir l’obligation qu’ont les États de concevoir ce qu’il a appelé «des mesures d’application générales». Les différents éléments du concept sont complexes et le Comité tient à souligner qu’il adoptera probablement en temps voulu, pour approfondir la présente définition, des observations générales plus détaillées sur chaque élément. Son Observation générale no 2 (2002) intitulée «Le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant» avait déjà approfondi le concept.

Article 4

«Les États s’engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la présente Convention. Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, ils prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale.».

I.  INTRODUCTION

1.       Lorsqu’un État ratifie la Convention relative aux droits de l’enfant, il s’engage en vertu du droit international à l’appliquer. L’application est le processus par lequel les États parties prennent des mesures pour assurer l’exercice de tous les droits consacrés par la Convention à tous les enfants relevant de leur juridiction[1]. L’article 4 fait obligation aux États parties de prendre «toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires» pour assurer l’application des droits contenus dans la Convention. C’est l’État qui assume des obligations en vertu de la Convention, mais sa tâche en matière d’application − de réalisation des droits fondamentaux de l’enfant − nécessite l’engagement de tous les secteurs de la société et, bien entendu, des enfants eux‑mêmes. Il est essentiel de faire en sorte que la législation nationale soit pleinement compatible avec la Convention et que les principes et les dispositions de cet instrument puissent être directement et correctement appliqués. Le Comité des droits de l’enfant a recensé un vaste éventail de mesures nécessaires pour assurer l’application effective de la Convention, notamment la mise en place de structures spéciales et de moyens de surveillance et le lancement d’activités de formation et autres à tous les niveaux dans l’administration, au parlement et dans l’appareil judiciaire[2].

2.       En examinant périodiquement les rapports présentés par les États parties en vertu de la Convention, le Comité accorde une attention particulière à ce qu’il a appelé les «mesures d’application générales». Dans les observations finales qu’il publie à l’issue de l’examen de chaque rapport, il formule des recommandations concrètes concernant ces mesures. Il attend des États parties qu’ils décrivent dans leurs rapports périodiques suivants les mesures qu’ils auront prises en application de ces recommandations. Les directives du Comité concernant l’établissement des rapports répartissent les articles de la Convention en plusieurs groupes[3], le premier étant intitulé «mesures d’application générales», et placent l’article 4 dans le même groupe que l’article 42 (obligation de faire largement connaître la Convention aux enfants et aux adultes; voir le paragraphe 66 ci‑dessous) et l’article 44, paragraphe 6 (obligation d’assurer aux rapports une large diffusion dans le pays; voir le paragraphe 71 ci‑dessous).

3.       En plus de celles qui sont énoncées dans ces dispositions, d’autres obligations au titre des mesures d’application générales figurent à l’article 2: «Les États parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune…».

4.       En outre, en vertu du paragraphe 2 de l’article 3 de la Convention, «Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien‑être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées.».

5.       Le droit international relatif aux droits de l’homme comporte des dispositions énonçant des obligations générales en matière d’application similaires à celles qui figurent à l’article 4 de la Convention; il s’agit notamment de l’article 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l’article 2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels ont adopté des observations générales au sujet de ces dispositions qui doivent être considérées comme un complément à la présente observation générale et auxquelles il est fait référence ci‑dessous[4].

6.       Tout en indiquant les obligations générales qui incombent aux États parties en matière d’application, l’article 4 fait apparaître, dans sa seconde phrase, une distinction entre les droits civils et politiques et les droits économiques, sociaux et culturels: «Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, ils [les États parties] prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale.». Il n’y a pas de division simple ou faisant autorité en ces deux catégories des droits de l’homme en général ou des droits énoncés dans la Convention. Les directives du Comité concernant l’établissement des rapports regroupent les articles 7, 8, 13 à 17 et 37 a), sous la rubrique «Libertés et droits civils», mais il ressort du contexte que ces dispositions ne renferment pas les seuls droits civils et politiques consacrés par la Convention. Il est clair, en effet, que de nombreux autres articles, notamment les articles 2, 3, 6 et 12 de la Convention, contiennent des éléments qui constituent des droits civils/politiques, ce qui met en évidence l’interdépendance et l’indivisibilité de tous les droits de l’homme. La jouissance des droits économiques, sociaux et culturels est intimement liée à la jouissance des droits civils et politiques. Comme cela est indiqué au paragraphe 25 ci-dessous, le Comité estime qu’aussi bien les droits civils et politiques que les droits économiques, sociaux et culturels doivent être considérés comme justiciables.

7.       La seconde phrase de l’article 4 traduit l’acceptation réaliste du fait que le manque de ressources – financières et autres – peut entraver la pleine application des droits économiques, sociaux et culturels dans certains États; d’où le concept de «réalisation progressive» de ces droits: les États doivent pouvoir prouver qu’ils appliquent ces droits «dans toutes les limites des ressources dont ils disposent» et qu’ils ont, s’il y a lieu, fait appel à la coopération internationale. Lorsque les États ratifient la Convention, ils assument non seulement l’obligation de la mettre en œuvre sur leur territoire, mais aussi celle de contribuer, par le biais de la coopération internationale, à son application à l’échelle mondiale (voir le paragraphe 60 ci-dessous).

8.       Le libellé de la seconde phrase de l’article 4 est similaire à celui figurant dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et le Comité s’accorde entièrement avec le Comité des droits économiques, sociaux et culturels pour affirmer que «même s’il est démontré que les ressources disponibles sont insuffisantes, l’obligation demeure, pour un État partie, de s’efforcer d’assurer la jouissance la plus large possible des droits pertinents dans les circonstances qui lui sont propres…»[5]. Quelle que soit leur situation économique, les États sont tenus de prendre toutes les mesures possibles en vue de mettre en œuvre les droits de l’enfant en accordant une attention particulière aux groupes les plus défavorisés.

9.       Les mesures d’application générales relevées par le Comité et décrites dans la présente observation générale visent à promouvoir la pleine jouissance par tous les enfants de tous les droits énoncés dans la Convention, au moyen de la législation, par la mise en place d’organes de coordination et de surveillance – gouvernementaux et indépendants –, la collecte de données dans tous les domaines, la sensibilisation et la formation, et la conception et la mise en œuvre des politiques, services et programmes requis. Une des conséquences positives de l’adoption et de la ratification quasi-universelle de la Convention est le lancement au niveau national d’un vaste éventail d’organes, de structures et d’activités axés sur les enfants et adaptés à leurs besoins − cellules de promotion de l’enfant au sein des plus hautes instances de l’État, ministères de l’enfance, comités interministériels chargés des enfants, comités parlementaires, mécanismes d’étude d’impact sur les enfants, budgets axés sur les enfants et rapports sur l’«état des droits de l’enfant», coalitions d’ONG en faveur des droits de l’enfant, médiateurs pour les enfants, commissaires aux droits de l’enfant, etc.

10.     Bien que l’on puisse penser qu’il s’agit là essentiellement de mesures cosmétiques, leur simple existence dénote un changement dans la perception de la place des enfants dans la société, une volonté d’accorder une plus grande priorité sur le plan politique à l’enfant et une prise de conscience croissante de l’impact de l’action des pouvoirs publics sur les enfants et leurs droits fondamentaux.

11.     Le Comité tient à souligner que, dans le contexte de la Convention, les États sont tenus de considérer leur rôle comme consistant à s’acquitter d’obligations juridiques claires envers chaque enfant. La mise en œuvre des droits fondamentaux des enfants ne doit pas être perçue comme un acte de charité envers eux.

12.     L’émergence d’une démarche fondée sur les droits de l’enfant dans toutes les instances gouvernementales, parlementaires et judiciaires est nécessaire si l’on veut appliquer d’une manière effective et intégralement la Convention, en particulier, dans l’optique des dispositions suivantes qui ont été mises en évidence par le Comité en tant que principes généraux:

Article 2: Obligation pour les États de respecter les droits qui sont énoncés dans la Convention et de les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans discrimination aucune. Ce principe de non-discrimination fait obligation aux États de s’efforcer d’identifier les enfants et les groupes d’enfants qui ont des droits dont la reconnaissance et la réalisation peuvent nécessiter des mesures spéciales. Par exemple, le Comité souligne, en particulier, la nécessité de recueillir des données ventilées afin que la discrimination ou la discrimination potentielle puissent être repérées. Pour faire face à la discrimination, il peut s’avérer nécessaire d’opérer des changements dans la législation, dans l’administration et dans la répartition des ressources, et de prendre des mesures éducatives pour changer les attitudes. Il convient de souligner que l’application du principe antidiscrimination qu’est l’accès aux droits sur un pied d’égalité ne signifie pas un traitement identique pour tous. À cet égard, le Comité des droits de l’homme a souligné, dans une observation générale, qu’il était important de prendre des mesures spéciales afin d’éliminer les conditions à l’origine de la discrimination ou d’en réduire l’ampleur[6].

Article 3 1): L’intérêt supérieur de l’enfant en tant que considération primordiale dans toutes les décisions concernant les enfants. Cet article vise les décisions prises par «les institutions publiques ou privées de protection sociale, les tribunaux, les autorités administratives ou les organes législatifs». Le principe énoncé requiert des mesures d’intervention de la part de toutes les instances gouvernementales, parlementaires et judiciaires. Chaque institution ou organe législatif, administratif ou judiciaire est tenu de se conformer au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant en se demandant systématiquement comment les droits et les intérêts de l’enfant seront affectés par ses décisions et ses actes − par exemple, par une loi ou une politique proposée ou déjà en vigueur, une mesure administrative ou une décision judiciaire, y compris celles qui n’intéressent pas directement les enfants mais peuvent avoir des répercussions sur eux.

Article 6: Droit inhérent de tout enfant à la vie et obligation pour les États parties d’assurer dans toute la mesure possible la survie et le développement de l’enfant. Le Comité attend des États qu’ils interprètent le terme «développement» au sens le plus large et en tant que concept global, embrassant le développement physique, mental, spirituel, moral, psychologique et social. Les mesures d’application devraient viser à assurer le développement optimal de tous les enfants.

Article 12: Droit de l’enfant d’exprimer librement son opinion sur «toute question l’intéressant» et à ce que ses opinions soient dûment prises en considération. Ce principe, qui met en exergue le rôle de l’enfant en tant que participant actif à la protection et à la surveillance de ses propres droits, s’applique également à toutes les mesures adoptées par l’État pour appliquer la Convention.

Associer les enfants au processus de prise de décisions par les pouvoirs publics est une tâche positive à laquelle, selon le Comité, les États s’attellent de plus en plus. Il y a d’autant plus lieu d’assurer le respect par les autorités et le Parlement des opinions de l’enfant non encore émancipé que rares sont les États qui ont ramené l’âge du vote au‑dessous de 18 ans. Si l’on veut que la consultation soit utile, il convient de rendre les documents et les procédures plus accessibles. S’il est facile de donner l’impression d’«écouter les enfants», accorder le poids voulu à leurs opinions nécessite en revanche un véritable changement. Le fait d’écouter les enfants ne doit pas être considéré comme un objectif en soi mais plutôt comme un moyen pour les États de faire en sorte que leur interaction avec les enfants et leur action en leur faveur soient davantage axées sur l’application des droits de l’enfant.

Des activités ponctuelles ou régulières telles que les parlements d’enfants peuvent être stimulantes et favoriser une prise de conscience générale. Cela dit, l’article 12 requiert des arrangements cohérents et permanents. En associant les enfants et en les consultant, il convient d’éviter que le processus soit purement symbolique et de veiller à repérer les opinions représentatives. L’accent mis au paragraphe 1 de l’article 12 sur le droit de l’enfant d’exprimer son opinion sur «toute question l’intéressant» implique qu’il faut s’assurer des opinions de groupes particuliers d’enfants sur certaines questions − par exemple de l’opinion des enfants qui ont une expérience du système de justice pour mineurs sur les projets de réforme de la législation dans ce domaine ou encore celle des enfants adoptés et des enfants appartenant à des familles adoptives sur la législation et la politique en matière d’adoption. Il importe que les pouvoirs publics établissent une relation directe avec les enfants et ne se contentent pas de contacts par le biais d’organisations non gouvernementales ou d’organismes de défense des droits de l’homme. Au cours des premières années de la Convention, ces organisations ont joué un rôle notable en prenant l’initiative d’une démarche associant l’enfant mais il est dans l’intérêt des gouvernements comme dans celui des enfants d’établir les liens directs voulus.

II.  RÉEXAMEN DES RÉSERVES

13.     Dans la section relative aux mesures d’application générales de ses directives concernant l’établissement des rapports, le Comité invite d’emblée les États parties à indiquer s’ils jugent nécessaire de maintenir les réserves qu’ils ont pu formuler ou s’ils ont l’intention de les retirer[7]. Les États parties à la Convention sont habilités à émettre des réserves au moment de la ratification ou de l’adhésion (art. 51). L’objectif du Comité consistant à assurer un respect total et absolu des droits fondamentaux de l’enfant ne peut être assuré que si les États retirent leurs réserves. Quand il examine les rapports des États parties, il recommande systématiquement que les réserves soient réexaminées et retirées. Lorsque, après examen, un État décide de maintenir une réserve, le Comité demande qu’une explication complète soit fournie dans le rapport périodique suivant. Le Comité signale à cet égard que la Conférence mondiale sur les droits de l’homme a encouragé les États à revoir et à retirer leurs réserves[8].

14.     L’article 2 de la Convention de Vienne sur le droit des traités définit le mot «réserve» comme «une déclaration unilatérale, quel que soit son libellé ou sa désignation, faite par un État quand il signe, ratifie, accepte ou approuve un traité ou y adhère, par laquelle il vise à exclure ou à modifier l’effet juridique de certaines dispositions du traité, dans leur application à cet État». Il est stipulé dans la Convention de Vienne que les États peuvent au moment de ratifier un traité ou d’y adhérer, formuler une réserve, à moins qu’elle «ne soit incompatible avec l’objet et le but du traité» (art. 19).

15.     Le paragraphe 2 de l’article 51 de la Convention relative aux droits de l’enfant reprend cette disposition en ces termes: «Aucune réserve incompatible avec l’objet et le but de la présente Convention n’est autorisée.». Le Comité est profondément préoccupé par le fait que certains États ont formulé des réserves qui vont manifestement à l’encontre du paragraphe 2 de l’article 51 en déclarant, par exemple, que le respect de la Convention était subordonné à la Constitution de l’État ou à la législation en vigueur, y compris dans certains cas au droit religieux. Or l’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités stipule ce qui suit: «Une partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non‑exécution d’un traité.».

16.     Le Comité note que, dans certains cas, des États parties ont officiellement émis des objections à des réserves de vaste portée de ce type formulées par d’autres États parties. Il se félicite de toute action susceptible de garantir le respect total de la Convention par tous les États parties.

III.  RATIFICATION DES AUTRES PRINCIPAUX INSTRUMENTS INTERNATIONAUX RELATIFS AUX DROITS DE L’HOMME

17.     Compte tenu des principes de l’indivisibilité et de l’interdépendance des droits de l’homme, le Comité exhorte constamment, pendant l’examen des mesures d’application générales, les États parties, qui ne l’ont pas encore fait, à ratifier les deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant (concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants) et les six autres principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Au cours de son dialogue avec les États parties, le Comité les encourage souvent à songer à ratifier d’autres instruments internationaux pertinents. Une liste non exhaustive de ces instruments, que le Comité mettra périodiquement à jour, est jointe en annexe à la présente Observation générale.

IV.  MESURES LÉGISLATIVES

18.     Le Comité estime qu’un examen complet au niveau national de toute la législation interne et des directives administratives connexes pour les rendre pleinement conformes à la Convention est une obligation. Il ressort de l’examen par le Comité non seulement des rapports initiaux mais aussi des deuxième et troisième rapports périodiques présentés par les États Parties que ce processus a, dans la plupart des cas, commencé mais doit devenir plus méthodique. Il est nécessaire d’examiner la Convention non seulement article par article mais aussi globalement pour tenir compte de l’interdépendance et de l’indivisibilité des droits de l’homme. L’examen doit être continu plutôt que ponctuel et porter à la fois sur les lois qui sont proposées et celles qui sont déjà en vigueur. S’il est important que ce processus d’examen devienne partie intégrante des activités de tous les ministères compétents, il serait également bon de prévoir dans le même temps un examen indépendant qui serait effectué, par exemple par le Parlement (commissions et auditions parlementaires), par des organismes de défense des droits de l’homme, par des ONG, des universitaires, des enfants et des jeunes concernés et d’autres parties.

19.     Les États parties doivent agir, par tous les moyens appropriés, pour faire en sorte que les dispositions de la Convention soient intégrées dans l’ordre juridique interne, objectif que de nombreux États n’ont pas encore atteint. Particulièrement importante est la nécessité de déterminer clairement le degré d’applicabilité de la Convention dans les États où le principe de «l’application directe» est en vigueur et dans ceux où il est affirmé que la Convention «a rang constitutionnel» ou a été incorporée à l’ordre juridique interne.

20.     Le Comité se félicite de l’incorporation de la Convention au droit interne qui constitue la méthode traditionnelle de mise en œuvre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme dans certains États mais pas dans tous. L’incorporation devrait signifier que les dispositions de la Convention peuvent être directement invoquées devant les tribunaux et appliquées par les autorités nationales et que c’est la Convention qui prime en cas de conflit avec la législation nationale ou la pratique courante. L’incorporation en elle‑même ne dispense pas de l’obligation de faire en sorte que toute la législation interne applicable, y compris le droit local ou coutumier le cas échéant, soit mise en conformité avec la Convention. En cas de conflit avec la législation la primauté doit toujours être accordée à la Convention conformément à l’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Lorsqu’un État délègue des pouvoirs législatifs à des autorités fédérées régionales ou territoriales, il doit exiger de ces autorités qu’elles légifèrent dans les limites de la Convention et qu’elles assurent l’application effective de cet instrument (voir aussi les paragraphes 40 et suivants ci‑dessous).

21.     Certains États ont fait valoir qu’il suffisait de garantir dans leur Constitution les droits de «chacun» pour assurer le respect de ces droits dans le cas des enfants. La question qui se pose alors est celle de savoir si les droits en question sont véritablement assurés aux enfants et peuvent être invoqués directement devant les tribunaux. Le Comité se félicite de l’incorporation dans les constitutions nationales de sections consacrées aux droits de l’enfant qui sont l’expression des principes clefs de la Convention, démarche qui contribue à faire ressortir le message principal de la Convention selon lequel les enfants sont, comme les adultes, détenteurs de droits fondamentaux. Or une telle mesure ne garantit pas automatiquement le respect des droits de l’enfant. Afin de promouvoir la pleine application de ces droits, y compris, le cas échéant, l’exercice des droits par les enfants eux‑mêmes, des mesures additionnelles législatives et autres peuvent s’avérer nécessaires.

22.     Le Comité tient à souligner en particulier qu’il est important de faire en sorte que le droit interne exprime les principes généraux énoncés dans la Convention (art. 2, 3, 6 et 12: voir le paragraphe 12 ci‑dessus). Il accueille avec satisfaction l’élaboration de codes relatifs aux droits de l’enfant qui peuvent mettre en évidence et souligner les principes énoncés dans la Convention. Il tient toutefois à affirmer qu’il est en outre capital que toutes les lois «sectorielles» (sur l’enseignement, la santé, la justice etc.) rendent compte d’une manière cohérente des principes et des normes consacrés par la Convention.

23.     Conformément à l’article 41 de la Convention, le Comité encourage tous les États parties à adopter et à appliquer sur leur territoire des dispositions législatives qui soient plus propices à la réalisation des droits de l’enfant que celles qui figurent dans la Convention. Il souligne à cet égard que les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme s’appliquent à toutes les personnes âgées de moins de 18 ans.

V.  JUSTICIABILITÉ DES DROITS

24.     Pour que les droits aient un sens il faut pouvoir disposer de moyens de recours utiles pour obtenir réparation en cas de violation. Cette condition, qui figure d’une manière implicite dans la Convention, est systématiquement mentionnée dans les six autres principaux instruments relatifs aux droits de l’homme. Le statut spécial des enfants et leur dépendance font qu’ils ont beaucoup de mal à se prévaloir des recours disponibles en cas de violation de leurs droits. En conséquence, les États doivent veiller tout particulièrement à ce que les enfants et leurs représentants disposent de mécanismes efficaces adaptés aux besoins de l’enfant. Il convient notamment de veiller à ce que les enfants obtiennent des informations et des conseils adaptés à leur situation, à ce que leur cause soit défendue ou à ce qu’ils soient aidés à la défendre eux‑mêmes et à ce qu’ils aient accès à des mécanismes indépendants d’examen de plaintes et aux tribunaux en bénéficiant de toute l’assistance dont ils ont besoin, notamment sur le plan juridique. Lorsqu’il est établi que des droits ont été violés une réparation appropriée doit être assurée, notamment sous forme d’indemnisation, et si nécessaire des mesures doivent être prises pour faciliter la réadaptation physique et psychologique de la victime et sa réinsertion, comme l’exige l’article 39.

25.     Le Comité tient à souligner, comme cela a été noté au paragraphe 6 ci‑dessus, qu’aussi bien les droits civils et politiques que les droits économiques sociaux et culturels doivent être considérés comme justiciables. Il est essentiel que la législation interne définisse les droits d’une manière suffisamment détaillée pour que les recours disponibles en cas de non‑respect soient efficaces.

VI.  MESURES ADMINISTRATIVES ET AUTRES

26.     Le Comité ne peut énoncer d’une façon détaillée les mesures que chaque État jugera appropriées pour assurer l’application effective de la Convention. Mais, grâce à l’expérience qu’il a acquise dans le cadre de l’examen des rapports des États parties au cours des 10 dernières années ainsi que de son dialogue continu avec les gouvernements, l’Organisation des Nations Unies, les organismes du système des Nations Unies, les ONG et d’autres organismes compétents, il est en mesure de prodiguer aux États parties quelques conseils clefs.

27.     Le Comité est d’avis qu’une application efficace de la Convention requiert une coordination intersectorielle tangible − en vue de la reconnaissance et de la mise en œuvre des droits de l’enfant dans tout l’appareil de l’État − entre les pouvoirs publics à tous les niveaux et entre ceux-ci et la société civile − en particulier, les enfants et les jeunes eux-mêmes. Invariablement, de nombreux ministères et autres organismes publics ou quasi-publics influent sur la vie des enfants et sur l’exercice de leurs droits. Rares, si tant est qu’il y en ait, sont les ministères qui n’ont aucune incidence directe ou indirecte sur la vie des enfants. Un contrôle rigoureux de l’application de la Convention est nécessaire; il doit à la fois faire partie de l’administration des affaires publiques à tous les niveaux et être exercé de manière indépendante par des institutions nationales de défense des droits de l’homme, des ONG et d’autres parties.

A.  Élaboration d’une stratégie nationale globale ancrée dans la Convention

28.     Si l’État pris globalement et ses instances à tous les niveaux entendent promouvoir et respecter les droits de l’enfant, ils doivent procéder dans leur action d’une stratégie nationale unificatrice, complète et axée sur les droits, qui soit ancrée dans la Convention.

29.     Le Comité préconise l’élaboration d’une stratégie nationale ou d’un plan d’action national de vaste portée en faveur des enfants. Il attend des États qu’ils tiennent compte, lorsqu’ils établissent et/ou revoient leurs stratégies nationales, des recommandations formulées dans les observations finales qu’il adopte à l’issue de l’examen de leurs rapports périodiques. Si l’on veut que de telles stratégies soient efficaces, il faut qu’elles soient en prise directe avec la situation de tous les enfants et avec tous les droits consacrés par la Convention. Elle devra être élaborée par le biais d’un processus de consultation associant les enfants et les jeunes ainsi que les personnes qui vivent et travaillent avec eux. Comme cela a déjà été noté ci-dessus (par. 12), une véritable consultation nécessite des matériels et des méthodes adaptés à la situation des enfants; il ne s’agit pas simplement de leur appliquer des méthodes conçues pour les adultes.

30.     Il faudra veiller particulièrement à repérer les groupes d’enfants marginalisés et défavorisés et à leur accorder la priorité. Le principe de non-discrimination de la Convention exige que tous les droits garantis par cet instrument soient reconnus à tous les enfants relevant de la juridiction de l’État partie. Comme cela a déjà été noté ci-dessus (par. 12), le principe de non‑discrimination n’empêche pas l’adoption de mesures spéciales pour combattre la discrimination.

31.     Pour que la stratégie ait le poids voulu, il est nécessaire de la faire approuver par les plus hautes autorités de l’État. Il convient également de la rattacher au processus national de planification du développement et de l’intégrer dans le budget de l’État; faute de cela, elle risque de rester en marge des principaux processus de prise de décisions.

32.     La stratégie ne doit pas se réduire à une liste de bonnes intentions; elle doit contenir les éléments d’une action durable pour la réalisation des droits des enfants sur tout le territoire de l’État partie; elle doit aller au-delà des déclarations de politique générale et de principe pour fixer des objectifs concrets et réalistes pour tout l’éventail des droits économiques, sociaux et culturels et les droits civils et politiques de tous les enfants. La stratégie nationale globale envisagée peut revêtir la forme d’une série de plans d’action nationaux sectoriels − par exemple, dans le domaine de l’enseignement et de la santé − et prévoir à cet effet des objectifs concrets, des mesures d’application ciblées et une répartition des ressources financières et humaines. Elle devra inévitablement fixer des priorités mais il ne faut pas qu’elle néglige ou érode de quelque manière que ce soit les obligations détaillées que les États parties ont assumées en vertu de la Convention. Il faudra en outre doter la stratégie des ressources humaines et financières voulues.

33.     L’élaboration d’une stratégie nationale n’est pas une tâche ponctuelle. Une fois établie, celle‑ci devra faire l’objet d’une large diffusion auprès de toutes les instances gouvernementales et du public, y compris des enfants (et être adaptée pour qu’elle soit accessible aux enfants et traduite dans les langues et les formes voulues). Il faudra également qu’elle soit assortie de mécanismes de suivi et d’examen continu de façon qu’elle soit régulièrement mise à jour et que des rapports périodiques soient présentés au Parlement et au public.

34.     Les «plans d’action nationaux» que les États ont été encouragés à élaborer à l’issue du premier Sommet mondial pour les enfants, tenu en 1990, avaient trait aux engagements particuliers définis par les nations qui avaient participé au Sommet[9]. En 1993, dans la Déclaration et le Programme d’action de Vienne, adoptés par la Conférence mondiale sur les droits de l’homme, les États ont été priés d’intégrer la Convention relative aux droits de l’enfant dans leurs plans d’action nationaux[10].

35.     D’autre part, le document final de la session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée aux enfants, tenue en 2002, fait obligation aux États d’établir ou de renforcer «à titre d’urgence, si possible d’ici à la fin de 2003, des plans d’action nationaux, et, lorsqu’il conviendra, régionaux comportant une série d’objectifs et de cibles spécifiques, assortis de délais, et mesurables, inspirés du présent plan d’action…»[11]. Le Comité se félicite des engagements pris par les États pour ce qui est de réaliser les objectifs fixés lors de la session extraordinaire consacrée aux enfants dans le document final intitulé Un monde digne des enfants. Il tient toutefois à souligner que le fait pour les États parties de prendre tel ou tel engagement dans le cadre de conférences mondiales ne réduit nullement les obligations juridiques qui leur incombent en vertu de la Convention. De même, l’élaboration de plans d’action concrets en application du document final de la session extraordinaire de l’Assemblée générale ne rend pas moins nécessaire l’établissement d’une stratégie d’application globale pour la Convention. Les États devraient donc intégrer les mesures qu’ils prennent comme suite à la session extraordinaire de 2002 et à d’autres conférences mondiales dans leur stratégie générale d’application de la Convention prise globalement.

36.     Le document final encourage en outre les États parties à «envisager d’inclure dans leurs rapports au Comité des droits de l’enfant, des informations sur les mesures prises et les résultats obtenus dans l’application du présent plan d’action»[12]. Le Comité approuve cette recommandation; il est attaché au principe de l’évaluation des progrès accomplis vers la réalisation des engagements pris lors de la session extraordinaire et fournira des conseils à ce sujet dans ses directives révisées pour l’établissement de rapports périodiques au titre de la Convention.

B.  Coordination des mesures d’application des droits de l’enfant

37.     En examinant les rapports des États parties, le Comité a presque toujours été amené à inciter les gouvernements à une meilleure coordination en vue de garantir l’application effective des politiques: coordination entre les ministères de l’administration centrale, entre les diverses provinces et régions, entre les autorités nationales et les autres niveaux d’administration et entre le gouvernement et la société civile. La coordination a pour but de garantir le respect de tous les principes et normes de la Convention pour tous les enfants relevant de la compétence de l’État et de garantir que les obligations découlant de l’adhésion à la Convention ou de la ratification de celle‑ci soient honorées non seulement par les grands ministères dont l’action a des effets importants sur les enfants (éducation, santé ou bien-être notamment) mais aussi par toutes les entités gouvernementales, y compris par exemple les ministères des finances, de la planification, de l’emploi et de la défense, à tous les niveaux.

38.     Le Comité estime qu’il ne lui appartient pas, en tant qu’organe conventionnel, de proposer des arrangements détaillés pour des systèmes de gouvernement très différents selon les États parties. Il existe de nombreux moyens, officiels ou autres, de parvenir à une coordination efficace, notamment en créant des comités interministériels pour l’enfance. Le Comité suggère aux États parties qui ne l’ont pas encore fait d’examiner leurs structures gouvernementales du point de vue de la mise en œuvre de la Convention et en particulier des quatre articles où sont énoncés les principes généraux (voir par. 12 ci‑dessus).

39.     De nombreux États parties ont créé, avec profit, un département ou un service spécifique, proche du cœur du gouvernement, dans certains cas dans les services de la présidence ou du Premier Ministre ou au sein du Cabinet, dans le but de coordonner la mise en œuvre des politiques relatives à l’enfance. Ainsi qu’il a été noté ci‑dessus, les politiques de la quasi‑totalité des ministères ont des effets sur la vie des enfants. De confier à un seul ministère la responsabilité de l’ensemble des services à l’enfance n’est pas réalisable et risquerait de toute façon de marginaliser davantage les enfants au sein du gouvernement. Mais un service spécial, ayant de l’influence et faisant directement rapport au Premier Ministre, au Président ou à un comité ministériel de l’enfance, par exemple, peut être à la fois un moyen permettant d’accroître, d’une manière générale, la visibilité des questions relatives à l’enfance au sein du gouvernement et un instrument de coordination veillant au respect des droits de l’enfant dans tous les secteurs et à tous les niveaux du gouvernement. Ce genre de service peut être chargé d’élaborer la stratégie globale pour les enfants, d’en surveiller l’application et de coordonner les activités d’établissement de rapports conformément à la Convention.

C.  Décentralisation, fédéralisation et délégation

40.     Le Comité a tenu à faire observer à de nombreux États que la décentralisation, par attribution de fonctions ou délégation de pouvoirs, ne déchargeait en rien le gouvernement de l’État partie de sa responsabilité directe quant à ses obligations envers tous les enfants relevant de sa juridiction, quelle que soit la structure de l’État.

41.     Le Comité réaffirme que l’État qui a ratifié la Convention ou y a adhéré est tenu, en toutes circonstances, de veiller à ce qu’elle soit pleinement appliquée dans les territoires relevant de sa juridiction. Lors de tout transfert de pouvoir, l’État partie doit s’assurer que les autorités concernées disposent des ressources financières, humaines et autres nécessaires pour s’acquitter effectivement des tâches que nécessite l’application de la Convention. Les gouvernements des États parties doivent conserver des moyens d’action pour faire pleinement appliquer la Convention par les administrations ou autorités locales concernées et créer des mécanismes de surveillance permanents chargés de veiller au respect et à l’application de la Convention pour tous les enfants relevant de la juridiction de l’État partie, sans discrimination. En outre, des dispositions doivent être prises pour garantir que la décentralisation ou le transfert de pouvoirs ne sera pas source de discrimination pour les enfants, en ce qui concerne la jouissance de leurs droits dans les différentes régions.

D.  Privatisation

42.     Le processus de privatisation des services peut avoir des répercussions importantes sur la reconnaissance et l’exercice des droits de l’enfant. Pour sa journée de débat général en 2002, le Comité a choisi le thème suivant: «Le secteur privé en tant que prestataire de services et son rôle dans la mise en œuvre des droits de l’enfant» en précisant que le secteur privé englobait les entreprises, les organisations non gouvernementales et autres associations privées à but lucratif et non lucratif. À l’issue de cette journée de débat général, le Comité a adopté des recommandations détaillées sur lesquelles il appelle l’attention des États parties[13].

43.     Le Comité souligne que les États parties à la Convention ont l’obligation légale de respecter et de garantir les droits de l’enfant, tels qu’ils sont énoncés dans la Convention, ce qui comprend l’obligation de veiller à ce que les prestataires de services non étatiques en respectent les dispositions, créant ainsi une obligation indirecte pour ces acteurs.

44.     Le Comité souligne que le fait de confier au secteur privé le soin de fournir des services, de diriger des établissements, etc., n’enlève rien à l’obligation qu’a l’État de veiller à ce que tous les enfants relevant de sa juridiction bénéficient de la pleine reconnaissance et du plein exercice de l’ensemble des droits reconnus dans la Convention (par. 1 de l’article 2 et par. 2 de l’article 3). Au paragraphe 1 de l’article 3, il est stipulé que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait d’institutions publiques ou privées. Le paragraphe 3 de l’article 3 exige que des normes appropriées soient fixées par les autorités compétentes (autorités ayant la compétence juridique voulue), en particulier dans le domaine de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel. Ceci entraîne la nécessité de procéder à des contrôles rigoureux pour garantir le respect de la Convention. Le Comité propose la mise en place d’un mécanisme ou d’un processus de surveillance permanent ayant pour objet de faire en sorte que tous les prestataires de services étatiques ou non étatiques respectent la Convention.

E.  Mise en œuvre d’un processus de surveillance − nécessité d’analyser
et d’évaluer les effets des décisions sur les enfants

45.     Pour garantir que l’intérêt supérieur de l’enfant est une considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants (par. 1 de l’article 3) et que toutes les dispositions de la Convention sont respectées dans la législation et au stade de l’élaboration et de l’exécution des politiques à tous les niveaux de gouvernement, il faut qu’existe un processus permanent d’analyse des effets des décisions sur les enfants (qui prévoie les effets de toute proposition de loi, de politique ou de crédits budgétaires touchant les enfants et l’exercice de leurs droits) et d’évaluation de ces effets (évaluation des effets concrets de l’application des décisions). Ce processus doit être intégré dans le gouvernement à tous les niveaux et le plus précocement possible dans les dispositifs d’élaboration des politiques.

46.     Les gouvernements doivent s’astreindre à une autosurveillance et à une auto‑évaluation. Mais le Comité juge également indispensable que soit mis en place un suivi indépendant des progrès réalisés sur la voie de la mise en œuvre de la Convention assuré, par exemple, par des comités parlementaires, des ONG, des établissements universitaires, des associations professionnelles, des groupes de jeunes et des institutions indépendantes de protection des droits de l’homme (voir par. 65 ci‑dessous).

47.     Le Comité félicite les États qui ont adopté des textes législatifs exigeant la réalisation et la présentation d’études d’impact officielles au Parlement et/ou au public. Chaque État devrait réfléchir à la façon dont il peut garantir l’application du paragraphe 1 de l’article 3 d’une manière qui favorise l’intégration visible des enfants dans l’élaboration des politiques et la prise en compte de leurs droits.

F.  Recueil et analyse de données et élaboration d’indicateurs

48.     Le recueil de données exhaustives et fiables sur les enfants, ventilées de manière à faire apparaître les discriminations et/ou disparités existantes concernant l’exercice de leurs droits, est un élément indispensable de la mise en œuvre de la Convention. Le Comité rappelle aux États parties que les données recueillies doivent porter sur toute la période de l’enfance, jusqu’à l’âge de 18 ans. Le recueil des données doit également faire l’objet d’une coordination à l’échelle du territoire pour permettre l’élaboration d’indicateurs applicables à l’échelon national. Les États devraient collaborer avec des instituts de recherche compétents et donner une image complète des progrès réalisés sur la voie de la mise en œuvre de la Convention, en élaborant des études qualitatives et quantitatives. Conformément aux directives concernant l’élaboration des rapports périodiques, des statistiques et autres informations détaillées et ventilées portant sur tous les domaines relevant de la Convention doivent être fournies. Il convient non seulement d’établir des systèmes efficaces de recueil de données, mais aussi de veiller à ce que les données recueillies soient évaluées et utilisées pour analyser les progrès réalisés dans le domaine de l’application de la Convention, pour identifier les problèmes et élaborer les politiques concernant les enfants. L’évaluation nécessite la mise au point d’indicateurs pour tous les droits garantis par la Convention.

49.     Le Comité félicite les États parties qui publient annuellement des rapports détaillés sur la situation des droits de l’enfant sur l’ensemble de leur territoire. La publication de ce type de rapports, leur diffusion à grande échelle et leur examen, notamment au Parlement, peut inciter le public à participer massivement à l’application de la Convention. La traduction des rapports et leur publication sous une forme accessible aux enfants sont indispensables si l’on veut que les enfants et les groupes minoritaires s’associent au processus.

50.     Le Comité souligne que, dans de nombreux cas, seuls les enfants eux‑mêmes peuvent dire si leurs droits sont pleinement reconnus et s’ils les exercent sans entrave. Pour savoir, par exemple, dans quelle mesure les droits civils des enfants, y compris le droit fondamental énoncé à l’article 12, c’est‑à‑dire le droit à exprimer leur opinion et à ce que celle‑ci soit dûment prise en considération, sont respectés au sein de la famille et à l’école entre autres, on pourra notamment interroger les enfants et les utiliser comme enquêteurs (avec les garanties qui s’imposent).

G.  Visibilité des ressources affectées aux politiques
relatives à l’enfance dans les budgets

51.     Dans ses directives sur l’établissement des rapports des États parties et lors de l’examen de ceux‑ci, le Comité a accordé une grande attention à l’identification et à l’analyse des ressources pour l’enfance dans les budgets nationaux et autres[14]. Aucun État ne peut dire si les besoins des enfants sont satisfaits sur les plans économique, social et culturel «dans toutes les limites des ressources dont il dispose», conformément à l’article 4 de la Convention, s’il ne peut identifier la part des ressources inscrites au budget national ou autre au titre du secteur social et, à l’intérieur de celui‑ci, des politiques relatives à l’enfance à la fois directement et indirectement. Certains États ont affirmé ne pas pouvoir analyser les budgets nationaux de cette manière. Mais d’autres l’ont fait et publient annuellement des budgets relatifs à l’enfance. Le Comité tient à être informé des mesures qui sont prises à tous les échelons du gouvernement pour garantir que la planification économique et sociale, la prise des décisions et les décisions budgétaires tiennent compte des intérêts supérieurs de l’enfant de manière primordiale et que les enfants, y compris notamment les groupes d’enfants marginalisés et défavorisés, sont préservés des effets négatifs de la politique économique ou des difficultés financières.

52.     Soulignant que les effets de la politique économique sur les droits de l’enfant ne sont jamais neutres, le Comité exprime les vives préoccupations que lui inspirent les effets souvent négatifs des programmes d’ajustement structurel et de la transition vers l’économie de marché sur les enfants. L’application des dispositions de l’article 4 de la Convention, entre autres, exige un suivi rigoureux des effets de ces changements et un ajustement des politiques afin de protéger les droits économiques, sociaux et culturels des enfants.

H.  Formation et renforcement des capacités

53.     Le Comité souligne que les États ont l’obligation d’intensifier leurs efforts dans le domaine de la formation et du renforcement des capacités de toutes les personnes impliquées dans le processus de mise en œuvre de la Convention, à savoir les fonctionnaires, les parlementaires et les membres du pouvoir judiciaire, ainsi que de toutes celles qui s’occupent d’enfants, et notamment les dirigeants des communautés, les chefs religieux, les enseignants, les travailleurs sociaux et d’autres professionnels, y compris ceux qui travaillent avec les enfants dans des établissements et centres de détention, la police et l’armée, y compris les forces de maintien de la paix, ceux qui travaillent dans les médias et beaucoup d’autres personnes. La formation (formation initiale et recyclage) doit être systématique et permanente. Son but est de mettre en lumière le statut de l’enfant en tant que détenteur de droits fondamentaux, de faire mieux connaître et mieux comprendre la Convention et de favoriser le respect effectif de toutes ses dispositions. Le Comité compte que la Convention sera prise en considération dans les programmes de formation professionnelle, les codes de conduite et les programmes d’études à tous les niveaux. Il convient, bien sûr, de faire en sorte que les enfants eux‑mêmes sachent et comprennent ce que sont les droits de l’homme et, notamment, d’inscrire la question dans les programmes scolaires (voir également le paragraphe 69 ci‑dessous ainsi que l’Observation générale no 1 (2001) du Comité sur les buts de l’éducation).

54.     Dans ses directives sur l’établissement des rapports périodiques, le Comité évoque de nombreux aspects de la formation, notamment la formation spécialisée, qui sont indispensables pour que tous les enfants jouissent de leurs droits. L’importance de la famille est soulignée dans le préambule et dans de nombreux articles de la Convention. Il est particulièrement important que la promotion des droits de l’enfant soit intégrée dans la préparation du rôle parental et du métier de parents.

55.     Il conviendrait d’évaluer périodiquement l’efficacité des formations en examinant non seulement les connaissances que les intéressés ont de la Convention et de ses dispositions mais aussi la mesure dans laquelle la Convention a contribué à l’adoption de comportements et de pratiques qui favorisent activement l’exercice par les enfants de leurs droits.

I.  Coopération avec la société civile

56.     La mise en œuvre de la Convention est une obligation pour les États parties mais elle doit concerner tous les secteurs de la société, y compris les enfants eux‑mêmes. Le Comité considère que les responsabilités, en ce qui concerne le respect et la réalisation des droits de l’enfant, incombent dans la pratique non seulement à l’État et aux services et institutions de l’État, mais aussi aux enfants, aux parents, à la famille élargie, à d’autres adultes et à des services et organisations non étatiques. Le Comité partage par exemple l’avis exprimé par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels au paragraphe 42 de son Observation générale no 14 (2000) sur le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint lorsqu’il dit: «Seuls des États peuvent être parties au Pacte et donc assumer en fin de compte la responsabilité de le respecter, mais tous les membres de la société − les particuliers (dont les professionnels de la santé), les familles, les communautés locales, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, les organisations représentatives de la société civile et le secteur des entreprises privées − ont une part de responsabilité dans la réalisation du droit à la santé. Les États parties devraient donc instaurer un environnement propre à faciliter l’exercice de ces responsabilités.».

57.     Ainsi qu’il a déjà été souligné (voir par. 12 ci-dessus), l’article 12 de la Convention stipule qu’il convient de prendre dûment en considération les opinions de l’enfant sur toute question l’intéressant, ce qui inclut évidemment la mise en œuvre de «sa» convention.

58.     L’État doit collaborer étroitement avec les ONG au sens le plus large, tout en respectant leur autonomie, et notamment les ONG qui s’occupent de la défense des droits de l’homme, les organisations dirigées par des enfants et des jeunes et les groupes de jeunes, les groupes de parents et de familles, les groupes confessionnels, les institutions universitaires et les associations professionnelles. Les ONG ont joué un rôle capital dans l’élaboration de la Convention et leur participation au processus de mise en œuvre de celle-ci est essentielle.

59.     Le Comité se félicite de la formation de coalitions et d’alliances d’ONG engagées dans la promotion, la protection et la surveillance des droits fondamentaux des enfants et invite instamment les gouvernements à leur apporter un soutien non directif et à établir avec elles des relations positives, officielles ou autres. La participation au processus d’élaboration des rapports d’ONG, répondant à la définition des «organismes compétents» mentionnés à l’article 45 a), a, dans de nombreux cas, imprimé un véritable élan au processus de mise en œuvre de la Convention et d’établissement des rapports. Le Groupe des ONG pour la Convention relative aux droits de l’enfant a une action puissante et efficace très appréciée sur l’établissement des rapports et d’autres aspects du travail du Comité. Le Comité souligne dans ses directives concernant les rapports que le processus d’établissement d’un rapport «devrait être de nature à encourager et à faciliter la participation populaire et l’examen public des politiques suivies par les gouvernements»[15]. Les médias peuvent être des partenaires précieux dans le processus de mise en œuvre de la Convention (voir également le paragraphe 70).

J.  Coopération internationale

60.     Il est stipulé à l’article 4 que la mise en œuvre de la Convention est un exercice de coopération entre tous les États du monde. Cet article et d’autres encore insistent sur la nécessité d’une coopération à l’échelon international[16]. La Charte des Nations Unies (art. 55 et 56) identifie les objectifs généraux de la coopération économique et sociale internationale et les membres se sont engagés, en vertu de la Charte, «à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l’Organisation» pour atteindre ces buts. Dans la Déclaration du Millénaire ainsi qu’à des réunions internationales, y compris lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants, les États se sont engagés à coopérer pour éliminer la pauvreté.

61.     Le Comité conseille aux États parties d’utiliser la Convention comme cadre pour définir l’aide internationale au développement liée directement ou indirectement aux enfants et les invite à faire en sorte que les programmes des pays donateurs soient fondés sur le respect des droits. Il invite instamment les États à réaliser les objectifs fixés au niveau international, y compris l’objectif en matière d’aide internationale au développement fixé par l’ONU à 0,7 % du produit intérieur brut. Cet objectif a été réaffirmé, ainsi que d’autres, dans le Consensus de Monterrey, issu de la Conférence internationale sur le financement du développement de 2002[17]. Le Comité encourage les États parties qui reçoivent une aide internationale à utiliser une part importante de celle‑ci pour les enfants. Le Comité attend des États parties qu’ils soient en mesure d’indiquer, sur une base annuelle, le montant et le pourcentage de l’aide internationale consacrée à l’application des droits de l’enfant.

62.     Le Comité approuve les objectifs de la formule 20/20 qui a pour but la mise à la disposition de tous des services sociaux de base de qualité, de manière durable, la responsabilité étant partagée par les pays en développement et les pays donateurs. Il fait observer que les réunions internationales organisées pour examiner les progrès réalisés dans ce domaine ont permis de constater que de nombreux États allaient avoir des difficultés à garantir l’exercice des droits économiques et sociaux fondamentaux si des ressources complémentaires n’étaient pas allouées et si les ressources n’étaient pas mieux réparties. Le Comité prend note des efforts déployés pour réduire la pauvreté dans les pays les plus lourdement endettés, efforts qui sont décrits dans le Document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP), et les encourage. En tant que stratégies centrales mises au point par les pays pour atteindre les objectifs de développement du Millénaire, les documents de stratégie de réduction de la pauvreté doivent mettre fortement l’accent sur les droits de l’enfant. Le Comité invite instamment les gouvernements, les donateurs et la société civile à veiller à ce que les enfants soient une priorité majeure dans l’élaboration des documents de stratégie de réduction de la pauvreté ainsi que dans les approches sectorielles en matière de développement. Il convient de faire en sorte que tant les documents de stratégie de réduction de la pauvreté que les approches sectorielles reposent sur les principes inhérents aux droits de l’enfant, reflètent une conception intégrée et centrée sur l’enfant, qui considère celui‑ci comme un titulaire de droits, et intègrent des objectifs de développement et des objectifs en rapport avec les enfants.

63.     Le Comité encourage les États à fournir et à utiliser, en tant que de besoin, une assistance technique pour mettre en œuvre la Convention. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) ainsi que d’autres institutions de l’ONU ou reliées à l’ONU peuvent fournir une assistance technique pour de nombreux aspects de la mise en œuvre de la Convention. Les États parties sont invités à faire part de leur intérêt en matière d’assistance technique dans les rapports établis conformément à la Convention.

64.     Pour ce qui concerne les questions relatives à la coopération internationale et à l’assistance technique, toutes les institutions de l’ONU et les organisations apparentées devraient s’inspirer des principes de la Convention et intégrer les droits de l’enfant dans leurs activités. Elles devraient s’efforcer de garantir dans leur sphère d’influence que la coopération internationale vise à aider les États à honorer les obligations qu’ils ont contractées en vertu de la Convention. De la même façon, le Groupe de la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et l’Organisation mondiale du commerce devraient faire en sorte que leurs activités en matière de coopération internationale et de développement économique fassent une place primordiale à l’intérêt supérieur de l’enfant et favorisent la pleine application de la Convention.

K.  Institutions indépendantes de défense des droits de l’homme

65.     Dans son observation générale no 2 (2002) intitulée «Le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant», le Comité déclare qu’il «considère que la mise en place de tels organes entre dans le champ de l’engagement pris par les États parties lors de la ratification de la Convention de s’attacher à la mettre en œuvre et d’œuvrer à la réalisation universelle des droits de l’enfant». Les institutions indépendantes de défense des droits de l’homme et les structures gouvernementales s’occupant des questions relatives à l’enfance sont complémentaires. La caractéristique essentielle de ces institutions est leur indépendance: «Le rôle des institutions nationales des droits de l’homme est de surveiller en toute indépendance à quel point l’État se conforme à la Convention et accomplit des progrès dans sa mise en œuvre et de faire leur possible pour assurer le plein respect des droits de l’enfant. Même si ces institutions peuvent être ainsi amenées à formuler des projets tendant à renforcer la promotion et la protection des droits de l’enfant, le Gouvernement ne saurait déléguer aux institutions nationales ses obligations en matière de surveillance. Il est essentiel que ces institutions conservent la totale liberté de fixer leurs plans de travail et de déterminer leurs propres activités»[18]. Dans l’Observation générale no 2, le Comité donne des directives détaillées concernant la création et les modalités de fonctionnement des institutions indépendantes de défense des droits fondamentaux des enfants.

Article 42: Faire connaître la Convention aux adultes et aux enfants

«Les États parties s’engagent à faire largement connaître les principes et les dispositions de la présente Convention, par des moyens actifs et appropriés, aux adultes comme aux enfants.».

66.     Les individus doivent savoir quels sont leurs droits. Dans la plupart des sociétés, sinon toutes, les enfants n’étaient pas jusqu’à présent considérés comme des titulaires de droits. Ainsi, l’article 42 revêt une importance particulière. Si les adultes qui entourent l’enfant, ses parents et d’autres membres de sa famille, ses enseignants et tous ceux qui s’occupent de lui ne comprennent pas quelles sont les implications de la Convention et, surtout, que celle‑ci confirme l’égalité de l’enfant en tant que sujet de droits, il est peu probable que les droits énoncés dans la Convention deviennent réalité pour bon nombre d’enfants.

67.     Le Comité propose aux États d’élaborer une stratégie globale visant à faire connaître la Convention dans l’ensemble de la société. Il importe aussi qu’ils donnent des informations sur les organismes, gouvernementaux et indépendants, qui interviennent dans l’application de la Convention et la surveillance de celle‑ci, ainsi que sur la façon de les contacter. Au niveau le plus élémentaire, le texte de la Convention doit être largement diffusé dans toutes les langues (à cet égard, le Comité se félicite de ce que le HCDH ait collecté les traductions officielles et non officielles de la Convention). Il conviendra d’établir une stratégie pour diffuser la Convention auprès des analphabètes. L’UNICEF et des ONG de nombreux États ont mis au point des versions de la Convention adaptées aux enfants d’âges divers, démarche que le Comité approuve et encourage; il conviendrait également d’informer les enfants des sources d’aide et de conseils existantes.

68.     Les enfants doivent savoir quels sont leurs droits et le Comité considère qu’il est tout particulièrement important d’intégrer l’enseignement de connaissances sur la Convention et les droits de l’homme en général dans les programmes d’études à tous les niveaux. L’Observation générale no 1 (2001) du Comité, intitulée «Les buts de l’éducation», concernant en particulier le sens du paragraphe 1 de l’article 29, doit être lue à la lumière de ceci. Il est stipulé au paragraphe 1 de l’article 29 que l’éducation de l’enfant doit viser à «… inculquer à l’enfant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales…». Le Comité souligne ce qui suit dans son Observation générale: «L’éducation dans le domaine des droits de l’homme devrait consister à faire connaître la teneur des instruments relatifs aux droits de l’homme. Néanmoins, les enfants devraient également faire l’apprentissage des droits de l’homme en constatant l’application dans la pratique des normes dans ce domaine, tant dans la famille qu’à l’école et au sein de la communauté. L’éducation dans le domaine des droits de l’homme devrait être un processus global s’étendant sur toute une vie et avoir pour point de départ la concrétisation des valeurs relatives aux droits de l’homme dans la vie quotidienne et l’apprentissage des enfants.»[19].

69.     De même, l’enseignement de connaissances au sujet de la Convention doit être intégré dans la formation initiale et dans la formation en cours d’emploi de toutes les personnes qui s’occupent d’enfants (voir par. 53 ci‑dessus). Le Comité rappelle aux États parties les recommandations qu’il a faites à l’issue de la réunion sur les mesures générales d’application, organisée pour célébrer le dixième anniversaire de l’adoption de la Convention, dans lesquelles il a rappelé que «les campagnes d’information et de sensibilisation concernant les droits de l’enfant sont plus efficaces si elles sont menées dans le cadre d’un processus d’évolution sociale, d’interaction et de dialogue, plutôt que par le biais d’exposés formels. La sensibilisation devrait se faire avec la participation de tous les secteurs de la société, y compris les enfants et les jeunes. Les enfants et les adolescents ont le droit de participer aux campagnes de sensibilisation concernant leurs droits, au maximum de leurs capacités selon leur niveau de maturité»[20].

«Le Comité recommande que toutes les mesures prises pour dispenser une formation relative aux droits de l’enfant soient concrètes, systématiques et intégrées aux programmes ordinaires de formation professionnelle, afin que cette formation ait un maximum d’effet et de durabilité. La formation dans le domaine des droits de l’homme devrait être inspirée des principes de la participation et les professionnels devraient pouvoir acquérir les compétences et les comportements leur permettant d’interagir avec les enfants et les jeunes sans porter atteinte à leurs droits, à leur dignité et à leur respect d’eux‑mêmes.»[21]

70.     Les médias peuvent jouer un rôle essentiel dans la diffusion de la Convention et des connaissances s’y rapportant et dans la compréhension de celle‑ci et le Comité les encourage à s’engager dans cette direction, avec le soutien des gouvernements et des ONG[22].

Article 44 (par. 6): Large diffusion des rapports établis en vertu de la Convention

«… Les États parties assurent à leurs rapports une large diffusion dans leur propre pays.».

71.     Pour que les rapports établis en vertu de la Convention jouent un rôle important dans le processus de mise en œuvre de celle‑ci au niveau national, il faut que le processus soit connu des adultes et des enfants dans l’ensemble du pays. Ce processus constitue une façon unique de rendre compte au niveau international de la façon dont les États traitent les enfants et leurs droits. Mais il ne peut avoir d’effet véritable sur la vie des enfants que si les rapports sont diffusés et examinés de manière constructive au niveau national.

72.     Il est stipulé explicitement dans la Convention que les États doivent diffuser largement leurs rapports auprès du public; ceci doit se faire au moment où les rapports sont présentés au Comité. Les rapports doivent être véritablement accessibles et être notamment traduits dans toutes les langues, sous des formes qui conviennent aux enfants et aux personnes handicapées, entre autres. L’Internet est un moyen qui peut grandement aider à la diffusion et gouvernements et parlements sont invités instamment à mettre ces rapports sur leur site Web.

73.     Le Comité invite instamment les États à diffuser largement tous les autres documents liés à l’examen de leurs rapports afin de favoriser des débats constructifs et le processus de mise en œuvre à tous les niveaux. En particulier, les observations finales du Comité devraient être diffusées auprès du public, y compris les enfants, et faire l’objet d’un débat approfondi au Parlement. Les institutions indépendantes de défense des droits de l’homme et les ONG peuvent jouer un rôle essentiel dans les efforts visant à garantir un débat de grande ampleur. Les comptes rendus analytiques des séances auxquelles les représentants de gouvernement sont interrogés par le Comité aident à comprendre le processus et les exigences du Comité et devraient également être diffusés et examinés.

Notes


Annexe I

RATIFICATION D’AUTRES INSTRUMENTS INTERNATIONAUX CLEFS
RELATIFS AUX DROITS DE L’HOMME

Ainsi qu’il a été noté au paragraphe 17 de la présente observation générale, le Comité des droits de l’enfant invite régulièrement, dans le cadre de son examen des mesures d’application générales et à la lumière des principes d’indivisibilité et d’interdépendance des droits de l’homme, les États parties qui ne l’ont pas encore fait, à ratifier les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant (concernant l’implication dans les conflits armés et la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants) et les six autres principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Lors de son dialogue avec les États parties, le Comité les encourage souvent à envisager de ratifier d’autres instruments internationaux pertinents. La liste non exhaustive de ces instruments est jointe en annexe. Le Comité la mettra régulièrement à jour.

               Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques;

               Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort;

               Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes;

               Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants;

               Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement;

               Convention no 29 de l’OIT sur le travail forcé, 1930;

               Convention no 105 de l’OIT sur l’abolition du travail forcé, 1957;

               Convention no 138 de l’OIT concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, 1973;

               Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants, 1999;

               Convention no 183 de l’OIT sur la protection de la maternité, 2000;

               Convention relative au statut des réfugiés de 1951, telle que modifiée par le Protocole relatif au statut des réfugiés de 1967;

               Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui (1949);

               Convention relative à l’esclavage (1926);

               Protocole amendant la convention relative à l’esclavage (1953);

               Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage (1956);

               Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2000);

               Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre;

               Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I);

               Protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II);

               Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction;

               Statut de Rome de la Cour pénale internationale;

               Convention (de La Haye) sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale;

               Convention (de La Haye) sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants;

               Convention (de La Haye) concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (1996).

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[1] Le Comité rappelle aux États parties qu’aux fins de la Convention, un enfant est défini comme «tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable» (art. 1er).

[2] En 1999, le Comité des droits de l’enfant a tenu un atelier de deux jours pour célébrer le dixième anniversaire de l’adoption de la Convention relative aux droits de l’enfant par l’Assemblée générale des Nations Unies. À l’issue de cet atelier, qui avait mis l’accent sur les mesures d’application générales, le Comité a adopté des conclusions et recommandations détaillées (voir document CRC/C/90, par. 291).

[3] Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports initiaux que les États parties doivent présenter conformément au paragraphe 1 a) de l’article 44 de la Convention, CRC/C/5, 15 octobre 1991; Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques que les États parties doivent présenter conformément au paragraphe 1 b) de l’article 44 de la Convention, CRC/C/58, 20 novembre 1996.

[4] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 3 (treizième session, 1981), Article 2: Mise en œuvre du Pacte dans le cadre national; Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale no 3 (cinquième session, 1990), La nature des obligations des États parties (art. 2, par. 1, du Pacte); voir aussi l’Observation générale no 9 (dix‑neuvième session, 1998), Application du Pacte au niveau national, qui approfondit certains aspects de l’Observation générale no 3; une récapitulation des observations générales et recommandations adoptées par les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN/1/Rev.6) est publiée régulièrement par le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme.

[5] Observation générale no 3, HRI/GEN/1/Rev.6, par. 11, p. 17.

[6] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 18 (1989), HRI/GEN/1/Rev.6, p. 147 et suiv.

[7] Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques que les États parties doivent présenter conformément au paragraphe 1 b) de l’article 44 de la Convention relative aux droits de l’enfant, CRC/C/58, 20 novembre 1996, par. 11.

[8] Conférence mondiale sur les droits de l’homme, Vienne, 14‑25 juin 1993, «Déclaration et programme d’action de Vienne», A/CONF.157/23.

[9] Sommet mondial pour les enfants, «Déclaration mondiale en faveur de la survie, de la protection et du développement de l’enfant et Plan d’action pour l’application de la Déclaration mondiale en faveur de la survie, de la protection et du développement de l’enfant dans les années 90», CF/WSC/1990/WS-001, Organisation des Nations Unies, New York, 30 septembre 1990.

[10] Conférence mondiale sur les droits de l’homme, Vienne, 14‑25 juin 1993, «Déclaration et Programme d’action de Vienne», A/CONF.157/23.

[11] Un monde digne des enfants, document final de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants, 2002, par. 59.

[12] Ibid., par. 61 a).

[13] Comité des droits de l’enfant, rapport sur sa trente et unième session, septembre‑octobre 2002, Journée de débat général sur «Le secteur privé en tant que prestataire de services et son rôle dans la mise en œuvre des droits de l’enfant», par. 630 à 653.

[14] Directives générales concernant la forme et le contenu des rapports périodiques que les États parties doivent présenter conformément au paragraphe 1 b) de l’article 44 de la Convention relative aux droits de l’enfant, CRC/C/58, 20 novembre 1996, par. 20.

[15] Ibid., par. 3.

[16] La coopération internationale est explicitement évoquée dans les articles suivants de la Convention: art. 7 (par. 2), 11 (par. 2), 17 (al. b), 21 (al. e), 22 (par. 2), 23 (par. 4), 24 (par. 4), 27 (par. 4), 28 (par. 3), 34 et 35.

[17] Rapport sur la Conférence internationale sur le financement du développement, Monterrey (Mexique), 18‑22 mars 2002 (A/Conf.198/11).

[18] HRI/GEN/1/Rev.6, par. 25, p. 313.

[19] Ibid, par. 15, p. 302.

[20] Voir CRC/C/90, par. 291 k).

[21] Ibid., par. 291 l).

[22] Le Comité a organisé une journée de débat général sur le thème de «L’enfant et les médias» en 1996 et a adopté des recommandations détaillées (voir CRC/C/57, par. 242 et suiv.).



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