CRCConvention relative aux droits de l’enfant
Distr.GÉNÉRALE
CRC/C/GC/927
février 2007
COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT
Quarante‑troisième session
Genève, 11‑29 septembre 2006
OBSERVATION GÉNÉRALE N o 9 (2006)
Les droits des enfants handicapés
I. INTRODUCTION
A. Pourquoi une observation générale sur les enfants handicapés?
1.On estime qu’il y a entre 500 et 650 millions de personnes handicapées dans le monde, soit environ 10 % de la population mondiale; 150 millions d’entre elles sont des enfants. Plus de 80 % vivent dans des pays en développement et n’ont, au mieux, qu’un accès limité aux services. La majorité des enfants handicapés des pays en développement ne sont pas scolarisés et sont complètement analphabètes. Il est reconnu que la plupart des causes de handicap, comme la guerre, la maladie et la pauvreté, pourraient être prévenues, tout comme on pourrait aussi prévenir ou limiter les conséquences du handicap, qui résultent souvent d’une intervention trop tardive. Par conséquent, il faudrait s’employer à susciter la volonté politique nécessaire et à créer un réel engagement pour définir et appliquer les mesures les plus efficaces afin de prévenir les handicaps, avec la participation de l’ensemble de la société.
2.Au cours des dernières décennies, une attention accrue a été accordée aux personnes handicapées en général, et aux enfants en particulier. Cela s’explique en particulier par le fait que les personnes handicapées et les organisations non gouvernementales internationales et nationales qui défendent leur cause se font de mieux en mieux entendre, mais aussi par le fait que les instruments relatifs aux droits de l’homme et les organes conventionnels des Nations Unies s’intéressent davantage au handicap. Les organes conventionnels offrent un énorme potentiel pour la promotion des droits des personnes handicapées mais ils sont généralement sous‑utilisés. Lorsqu’elle a été adoptée, en novembre 1989, la Convention relative aux droits de l’enfant (ci‑après «la Convention») était le premier instrument relatif aux droits de l’homme à faire explicitement référence au handicap (art. 2 sur la non‑discrimination) et à consacrer entièrement un article (l’article 23) aux droits et aux besoins des enfants handicapés. Depuis que la Convention est entrée en vigueur, le 2 septembre 1990, le Comité des droits de l’enfant (ci‑après «le Comité») consacre une attention soutenue et constante à la discrimination fondée sur le handicap, tandis que d’autres organes conventionnels abordent la discrimination fondée sur le handicap sous l’expression «toute autre situation» dans le cadre d’articles de leurs conventions respectives sur la non‑discrimination. En 1994, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a publié son observation générale no 5 sur les personnes souffrant d’un handicap, précisant au paragraphe 15: «C’est dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, du logement, des transports, de la vie culturelle et en ce qui concerne l’accessibilité des lieux et services publics que les effets de cette discrimination se font particulièrement sentir.». Le Rapporteur spécial de la Commission du développement social chargé d’étudier la situation des handicapés, nommé en 1994, a été chargé de suivre l’application des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés, adoptées par l’Assemblée générale à sa quarante‑huitième session en 1993 (A/RES/48/96, annexe), et de faire progresser la situation des personnes handicapées dans le monde entier. Le 6 octobre 1997, le Comité a consacré sa journée de débat général aux enfants handicapés et a adopté une série de recommandations (CRC/C/66, par. 310 à 339), dans lesquelles il a envisagé la possibilité de rédiger une observation générale sur les enfants handicapés. Le Comité prend note avec satisfaction du travail du Comité spécial chargé d’élaborer une convention internationale globale et intégrée pour la protection et la promotion des droits et de la dignité des personnes handicapées et de l’adoption, à sa huitième session, tenue à New York le 25 août 2006, d’un projet de convention relative aux droits des personnes handicapées, devant être présenté à l’Assemblée générale à sa soixante et unième session (A/AC.265/2006/4, annexe II).
3.En examinant les rapports des États parties, le Comité a accumulé de nombreuses informations sur la situation des enfants handicapés dans le monde. Il a constaté que, dans la grande majorité des pays, il fallait formuler des recommandations spécifiques concernant ces enfants. Les problèmes constatés et traités vont de l’exclusion des processus décisionnels à des formes graves de discrimination, voire au meurtre des enfants handicapés. La pauvreté étant à la fois une cause et une conséquence du handicap, le Comité a souligné à plusieurs reprises que les enfants handicapés et leur famille avaient le droit à un niveau de vie suffisant, y compris à une alimentation, à des vêtements et à un logement adaptés, et à l’amélioration constante de leurs conditions de vie. Pour améliorer la situation des enfants handicapés vivant dans la pauvreté, il faudrait allouer des ressources budgétaires suffisantes et veiller à ce que ces enfants aient accès à des programmes de protection sociale et de lutte contre la pauvreté.
4.Le Comité note qu’aucun État partie n’a formulé de réserve ou fait de déclaration au sujet de l’article 23 de la Convention.
5.Le Comité note également que les enfants handicapés connaissent encore de graves difficultés et se heurtent à différents obstacles dans l’exercice des droits consacrés par la Convention. Le Comité souligne que la difficulté ne vient pas du handicap en soi mais plutôt d’un ensemble d’obstacles sociaux, culturels, comportementaux et physiques auxquels se heurtent quotidiennement les enfants handicapés. Pour promouvoir leurs droits, il faut donc prendre les mesures nécessaires pour lever ces obstacles. Tout en reconnaissant l’importance des articles 2 et 23 de la Convention, le Comité tient à établir d’emblée que l’application de la Convention aux enfants handicapés ne saurait se limiter à ces seuls articles.
6.La présente observation générale a pour objet d’offrir une aide et des conseils aux États parties pour mettre en œuvre les droits des enfants handicapés de manière à couvrir l’ensemble des dispositions de la Convention. Le Comité formulera donc tout d’abord des observations concernant directement les articles 2 et 23 puis insistera sur la nécessité de prêter une attention particulière aux enfants handicapés et de les inclure explicitement dans les mesures générales adoptées en vue de la mise en œuvre de la Convention. Ces observations seront suivies de commentaires sur le sens et l’application des différents articles de la Convention (regroupés en modules conformément à la pratique du Comité) pour les enfants handicapés.
B. Définition
7.En vertu du paragraphe 2 de l’article premier du projet de convention sur les droits des personnes handicapées, «par personnes handicapées on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres» (A/AC.265/2006/4, annexe II).
II. DISPOSITIONS CLEFS CONCERNANT LES ENFANTS HANDICAPÉS (art. 2 et 23)
A. Article 2
8.En vertu de l’article 2, les États parties sont tenus de veiller à ce que tous les enfants relevant de leur juridiction jouissent de tous les droits consacrés par la Convention, sans discrimination aucune. Ils doivent donc prendre toutes les mesures appropriées pour prévenir toutes les formes de discrimination, y compris celles fondées sur «l’incapacité». La Convention est l’unique instrument faisant explicitement mention du handicap en tant que motif de discrimination. Cela peut s’expliquer par le fait que les enfants handicapés figurent parmi les groupes d’enfants les plus vulnérables. Dans de nombreux cas, des formes multiples de discrimination, fondées sur une conjugaison de différents facteurs (fillettes autochtones handicapées, enfants handicapés vivant en zone rurale, etc.), accroissent la vulnérabilité de certains groupes. Il a donc semblé nécessaire de mentionner expressément le handicap dans l’article sur la non‑discrimination. Différents aspects de la vie et du développement des enfants handicapés se heurtent à la discrimination, souvent de fait. Ainsi, la discrimination sociale et la stigmatisation conduisent à la marginalisation et à l’exclusion de ces enfants, voire menacent leur survie et leur développement si elles vont jusqu’à la violence physique ou psychologique. La discrimination relative à la fourniture de services exclut les enfants de l’éducation et les empêche d’accéder à des services sanitaires et sociaux de qualité. L’absence d’instruction et de formation professionnelle adaptées constitue une discrimination dans la mesure où elle les exclut de certains emplois. La stigmatisation sociale, les peurs, la surprotection, les attitudes négatives, les idées fausses et les préjugés restent très présents dans de nombreuses communautés et conduisent à la marginalisation et à l’aliénation des enfants handicapés. Le Comité reviendra plus en détail sur ces questions par la suite.
9.En général, dans le cadre des efforts déployés pour prévenir et éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des enfants handicapés, les États parties devraient adopter les mesures suivantes:
a)Inclure explicitement le handicap comme motif interdit de discrimination dans les dispositions constitutionnelles relatives à la non‑discrimination et/ou inclure l’interdiction spécifique de la discrimination fondée sur le handicap dans les lois ou dispositions juridiques antidiscrimination;
b)Prévoir des recours effectifs en cas de violation des droits des enfants handicapés et veiller à ce que ces recours soient facilement accessibles aux enfants et à leurs parents et/ou les personnes prenant soin d’eux;
c)Mener des campagnes de sensibilisation et d’éducation à l’intention du grand public et de groupes professionnels spécifiques, afin de prévenir et d’éliminer la discrimination de fait à l’égard des enfants handicapés.
10.Les filles handicapées sont encore plus susceptibles d’être victimes de discrimination en raison de leur sexe. C’est pourquoi les États parties sont invités à leur prêter une attention particulière en prenant les mesures nécessaires, et si besoin des mesures supplémentaires, afin de veiller à ce qu’elles soient bien protégées, à ce qu’elles aient accès à tous les services et à ce qu’elles soient pleinement intégrées dans la société.
B. Article 23
11.Le paragraphe 1 de l’article 23 devrait être considéré comme énonçant le principe de base pour l’application de la Convention concernant les enfants handicapés: leur permettre de mener une vie pleine et décente, dans des conditions qui garantissent leur dignité, favorisent leur autonomie et facilitent leur participation active à la vie de la collectivité. Les mesures prises par les États parties concernant la réalisation des droits des enfants handicapés devraient tendre vers ce but. Le message clef de ce paragraphe est que les enfants handicapés devraient être intégrés à la société. Les mesures prises en vue de la mise en œuvre des droits consacrés par la Convention concernant les enfants handicapés, par exemple dans les domaines de l’éducation et de la santé, devraient explicitement viser à l’intégration maximale de ces enfants dans la société.
12.En vertu du paragraphe 2 de l’article 23, les États parties reconnaissent le droit des enfants handicapés de bénéficier de soins spéciaux et encouragent et assurent, dans la mesure des ressources disponibles, l’octroi, sur demande, aux enfants handicapés remplissant les conditions requises et à ceux qui en ont la charge, d’une aide adaptée à l’état de l’enfant et à la situation de ses parents ou de ceux à qui il est confié. Le paragraphe 3 du même article énonce des règles supplémentaires concernant le coût des mesures et précise l’objectif de l’assistance apportée aux enfants.
13.Afin de satisfaire aux prescriptions de l’article 23, les États parties doivent élaborer et appliquer une politique globale s’appuyant sur un plan d’action qui non seulement vise la pleine application des droits consacrés par la Convention, sans discrimination aucune, mais garantit aussi qu’un enfant handicapé et ses parents et/ou les personnes qui en ont la charge reçoivent les soins et l’assistance auxquels ils ont droit en vertu de la Convention.
14.Concernant les dispositions des paragraphes 2 et 3 de l’article 23, le Comité fait les observations suivantes:
a)La fourniture de soins spéciaux et d’une assistance est soumise à la disponibilité des ressources et gratuite chaque fois qu’il est possible. Le Comité engage les États parties à faire de la fourniture de soins spéciaux et d’une assistance aux enfants handicapés une question hautement prioritaire et d’investir au maximum les ressources disponibles dans l’élimination de la discrimination à l’égard des enfants handicapés et dans leur intégration maximale dans la société;
b)Les soins et l’assistance doivent être conçus de telle sorte que les enfants aient effectivement accès à l’éducation, à la formation, aux soins de santé, à la rééducation, à la préparation à l’emploi et aux activités récréatives et bénéficient de ces services. Lorsqu’il traitera d’articles spécifiques de la Convention, le Comité se penchera sur les mesures à prendre pour atteindre cet objectif.
15.En ce qui concerne le paragraphe 4 de l’article 23, le Comité note que l’échange international d’informations entre les États parties dans les domaines de la prévention et du traitement est très limité. Il recommande aux États parties de prendre des mesures efficaces, et le cas échéant ciblées, pour promouvoir activement l’information, conformément au paragraphe 4 de l’article 23, afin de permettre aux États parties d’améliorer leurs capacités et leurs compétences dans les domaines de la prévention et du traitement des handicaps chez les enfants.
16.Il est souvent malaisé de déterminer de quelle manière et jusqu’à quel degré les besoins des pays en développement sont pris en compte, conformément au paragraphe 4 de l’article 23. Le Comité recommande fermement aux États parties de veiller à ce que, dans le cadre de l’assistance bilatérale ou multilatérale au développement, une attention particulière soit accordée aux enfants handicapés et à leur survie et leur développement, conformément aux dispositions de la Convention, par exemple en élaborant et en appliquant des programmes spécialement conçus pour faciliter leur intégration dans la société et en allouant des crédits spécifiques à cet effet. Les États parties sont invités à fournir des informations dans leurs rapports au Comité sur les activités entreprises dans le cadre de la coopération internationale et sur les résultats obtenus.
III. MESURES D’APPLICATION GÉNÉRALES (art. 4, 42 et 44, par. 6)
A. Législation
17.Outre les mesures législatives recommandées en ce qui concerne la non‑discrimination (voir par. 9 ci‑dessus), le Comité recommande aux États parties d’entreprendre un examen complet de toute la législation interne et des directives administratives afin de veiller à ce que toutes les dispositions de la Convention soient applicables à tous les enfants, y compris aux enfants handicapés, qui devraient être explicitement mentionnés, le cas échéant. La législation et les directives administratives nationales devraient comporter des dispositions claires et explicites sur la protection et l’exercice des droits spécifiques des enfants handicapés, en particulier de ceux consacrés par l’article 23 de la Convention.
B. Politiques et plans d’action nationaux
18.La nécessité de mettre en place un plan d’action national qui intègre toutes les dispositions de la Convention est largement reconnue et a souvent figuré parmi les recommandations du Comité aux États parties. Les plans d’action doivent être globaux, comprendre des plans et des stratégies pour les enfants handicapés et avoir des résultats mesurables. Le projet de convention relative aux droits des personnes handicapées, au paragraphe 1 c) de son article 4, souligne l’importance de cette question en indiquant que les États parties doivent «prendre en compte la protection et la promotion des droits de l’homme des personnes handicapées dans toutes les politiques et dans tous les programmes» (A/AC.265/2006/4, annexe II). Il est également essentiel que tous les programmes soient dotés de ressources financières et humaines suffisantes et comprennent des mécanismes de suivi intégrés, faisant par exemple appel à des indicateurs permettant de mesurer avec exactitude les résultats obtenus. On ne saurait trop souligner qu’il importe d’inclure tous les enfants handicapés dans les politiques et programmes. Certains États parties ont lancé d’excellents programmes mais n’y ont pas intégré tous les enfants handicapés.
C. Données et statistiques
19.Afin de s’acquitter de leurs obligations, les États parties doivent créer et développer des mécanismes pour collecter des données qui soient exactes et normalisées, qui puissent être ventilées et qui rendent compte de la situation effective des enfants handicapés. Cette question est souvent négligée et n’est pas considérée comme une priorité alors qu’elle a un impact non seulement sur les mesures de prévention à prendre mais aussi sur la répartition des précieuses ressources nécessaires pour financer les programmes. L’un des principaux obstacles à l’obtention de statistiques exactes est l’absence de définition claire et largement reconnue des handicaps. Les États parties sont encouragés à élaborer une définition adaptée qui garantisse l’inclusion de tous les enfants handicapés, de façon que ces enfants bénéficient de la protection et des programmes spéciaux qui ont été mis en place pour eux. Des efforts supplémentaires sont souvent nécessaires pour collecter des données sur les enfants handicapés parce qu’ils sont fréquemment cachés par leurs parents ou les personnes qui s’en occupent.
D. Budget
20.Allocations budgétaires: en vertu de l’article 4, les États parties «prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent». Bien que la Convention ne contienne pas de recommandation spécifique quant au pourcentage du budget de l’État qui devrait être consacré aux services et aux programmes destinés aux enfants, elle souligne que ces derniers doivent être une priorité. La mise en œuvre de ce droit est source de préoccupation pour le Comité, car de nombreux États parties non seulement n’affectent pas de ressources suffisantes à l’enfance mais ont aussi réduit le budget alloué aux enfants au fil des ans. Cette tendance a de nombreuses et lourdes conséquences, en particulier pour les enfants handicapés qui figurent souvent − quand ils y figurent − au bas de la liste des priorités. Par exemple, si un État partie n’alloue pas de ressources suffisantes pour garantir un enseignement obligatoire, gratuit et de qualité pour tous les enfants, il y a peu de chances qu’il affecte des ressources à la formation d’enseignants qui se consacreront aux enfants handicapés ou qu’il prévoie un budget pour le matériel pédagogique et les moyens de transports nécessaires pour ces enfants. La décentralisation et la privatisation des services sont aujourd’hui des moyens de réforme économique. Cela étant, il ne faudrait pas oublier qu’il appartient à l’État partie de s’assurer que des ressources suffisantes sont affectées aux enfants handicapés et de définir des directives strictes pour la fourniture de services. Les ressources allouées aux enfants handicapés doivent être suffisantes − et leur être spécifiquement réservées afin de ne pas pouvoir être utilisées à d’autres fins − pour couvrir tous leurs besoins, y compris pour financer des programmes destinés à former les professionnels amenés à travailler avec ces enfants (enseignants, physiothérapeutes et décideurs, par exemple), l’organisation de campagnes de sensibilisation, la fourniture d’un appui financier aux familles, le maintien des revenus, la sécurité sociale, les appareils pour handicapés et les services connexes. En outre, il faut aussi financer d’autres programmes destinés à intégrer les enfants handicapés dans les écoles ordinaires, notamment en rénovant les établissements scolaires pour les rendre accessibles à ces enfants.
E. Organe de coordination: «Centre de coordination pour les handicaps»
21.Les services destinés aux enfants handicapés sont souvent fournis par différentes institutions gouvernementales ou non gouvernementales et, la plupart du temps, sont fragmentés et non coordonnés, ce qui entraîne des chevauchements de fonctions et des lacunes. Par conséquent, il devient essentiel de mettre en place un mécanisme de coordination adapté. Il devrait être multisectoriel et regrouper toutes les organisations, publiques ou privées. Il doit être doté des pouvoirs nécessaires et être appuyé par le Gouvernement au plus haut niveau possible, afin de fonctionner au maximum de ses capacités. Un organe de coordination pour les enfants handicapés, qui ferait partie d’un système plus large de protection des droits de l’enfant ou d’un mécanisme national de coordination pour les personnes handicapées, présenterait l’avantage de travailler au sein d’un système préétabli, pour autant que le système en question fonctionne bien et soit capable de dégager les ressources financières et humaines nécessaires. D’un autre côté, un système de coordination distinct pourrait contribuer à concentrer l’attention sur les enfants handicapés.
F. Coopération interne et assistance technique
22.Afin de permettre à l’information de circuler librement entre les États parties et de cultiver une atmosphère de partage des connaissances concernant, notamment, la prise en charge et la réadaptation des enfants handicapés, les États parties devraient reconnaître l’importance de la coopération internationale et de l’assistance technique. Il faudrait prêter une attention particulière aux pays en développement qui ont besoin d’assistance pour la mise sur pied et/ou le financement de programmes de protection et de promotion des droits des enfants handicapés. Ces pays ont de plus en plus de mal à mobiliser les ressources nécessaires pour répondre aux besoins urgents des personnes handicapées et auraient grand besoin d’une assistance pour prévenir les handicaps, fournir des services, notamment de réadaptation, et favoriser l’égalisation des chances. Toutefois, pour répondre à ces besoins croissants, la communauté internationale devrait envisager de nouvelles façons de lever des fonds, y compris d’accroître sensiblement des ressources, et prendre les mesures nécessaires de suivi pour mobiliser les ressources. Par conséquent, les contributions volontaires des gouvernements, l’augmentation de l’assistance régionale et bilatérale et les contributions de sources privées devraient aussi être encouragées. L’UNICEF et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont contribué pour une très large part à aider les pays en développement à mettre en place et à appliquer des programmes pour les enfants handicapés. L’échange d’informations permet aussi de diffuser des connaissances médicales et des bonnes pratiques, comme la détection précoce et les approches communautaires de l’intervention précoce et de l’appui aux familles, et de trouver des solutions aux problèmes communs.
23.Les pays qui ont connu, ou continuent de connaître, un conflit interne ou externe, au cours duquel des mines terrestres ont été déposées, se heurtent à un problème particulier. Souvent, les États parties ne connaissent pas les plans des sites où ont été placées des mines ou des munitions non explosées et le coût du déminage est très élevé. Le Comité souligne l’importance de la coopération internationale, conformément à la Convention de 1997 sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, afin de prévenir les blessures et les décès provoqués par les mines terrestres et les munitions non explosées qui sont toujours présentes. À cet égard, le Comité recommande aux États parties de coopérer étroitement afin d’enlever complètement toutes les mines terrestres et les munitions non explosées dans les zones de conflit armé, actuel ou passé.
G. Mécanisme indépendant de surveillance
24.La Convention comme les Règles pour l’égalisation des chances des handicapés reconnaissent l’importance de la mise en place d’un système de surveillance adapté. Le Comité a souvent fait référence aux «Principes de Paris» (A/RES/48/134) comme étant les directives auxquelles les institutions de défense des droits de l’homme devraient se conformer (voir l’Observation générale n° 2 (2002) du Comité sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant). Les institutions nationales de défense des droits de l’homme peuvent prendre de nombreuses formes, comme celle d’un médiateur ou d’un commissaire et peuvent être généralistes ou spécifiques. Quel que soit le mécanisme choisi, il doit:
a)Être indépendant et doté de ressources humaines et financières suffisantes;
b)Être bien connu des enfants handicapés et de ceux qui s’occupent d’eux;
c)Être accessible physiquement et permettre aussi aux enfants handicapés de faire part de leurs plaintes ou de leurs problèmes facilement et en toute confidentialité;
d)Avoir l’autorité juridique pour recevoir, instruire et traiter les plaintes des enfants handicapés en faisant preuve de tact, eu égard à leur âge et à leur handicap.
H. Société civile
25.Bien que l’État ait obligation de s’occuper des enfants handicapés, ce sont souvent les ONG qui assument cette responsabilité, sans bénéficier de l’appui, du financement ou de la reconnaissance qu’ils devraient obtenir des gouvernements. Les États parties sont donc invités à appuyer les ONG et à coopérer avec elles pour leur permettre de contribuer à fournir des services aux enfants handicapés et veiller à ce qu’elles respectent pleinement les dispositions et les principes de la Convention. À cet égard, le Comité appelle l’attention des États parties sur les recommandations adoptées à l’issue de sa journée de débat général sur le secteur privé en tant que prestataire de services, tenue le 20 septembre 2002 (CRC/C/121, par. 630 à 653).
I. Diffusion des connaissances et formation des professionnels
26.La connaissance de la Convention et de ses dispositions spécifiquement consacrées aux enfants handicapés est un outil nécessaire et efficace pour la réalisation des droits de ces enfants. Les États parties sont encouragés à diffuser les connaissances, notamment en organisant des campagnes systématiques de sensibilisation, en élaborant des documents appropriés, comme une version de la Convention adaptée aux enfants, disponible aussi en braille, et en recourant aux médias pour favoriser l’adoption d’attitudes positives vis-à-vis des enfants handicapés.
27.Les professionnels travaillant avec et pour les enfants handicapés devraient, pour obtenir leur qualification, être tenus de suivre des programmes de formation comprenant des modules ciblés axés spécifiquement sur les droits de ces enfants. Ces professionnels sont notamment, mais non exclusivement, les décideurs, les juges, les avocats, les membres des forces de l’ordre, les éducateurs, le personnel de santé, les travailleurs sociaux et le personnel des médias.
IV. PRINCIPES GÉNÉRAUX
Article 2 − Non-discrimination
28.Voir paragraphes 8 à 10 ci-dessus.
Article 3 − Intérêt supérieur de l’enfant
29.«Dans toutes les décisions qui concernent les enfants […] l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.». Par son caractère large, cet article vise à couvrir tous les aspects de la prise en charge et de la protection des enfants dans tous les contextes. Il porte sur l’action du législateur chargé de mettre en place le cadre juridique pour la protection des droits des enfants handicapés ainsi que sur les processus décisionnels relatifs à ces enfants. L’article 3 devrait constituer la base des programmes et des politiques et devrait être dûment pris en compte pour tous les services fournis aux enfants handicapés et pour toute décision les concernant.
30.La prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant est particulièrement importante dans les institutions et autres établissements qui fournissent des services aux enfants handicapés, car ils doivent se conformer aux normes et règlements et avoir pour considérations premières la sécurité et la protection des enfants et les soins à leur apporter. Ces considérations devraient primer sur toute autre et dans toutes circonstances, par exemple lors de l’affectation des budgets.
Article 6 − Droit à la vie, à la survie et au développement
31.Le droit inhérent à la vie, à la survie et au développement est un droit qui mérite une attention particulière en ce qui concerne les enfants handicapés. Dans de nombreux pays, les enfants handicapés sont victimes de pratiques qui compromettent totalement ou partiellement l’exercice de ce droit. Ils sont plus susceptibles de faire l’objet d’infanticide et, dans certaines cultures, ils sont considérés comme un mauvais présage qui pourrait nuire au «pedigree familial» et, par conséquent, une personne désignée par la communauté tue systématiquement ces enfants. Les coupables de ces crimes restent souvent impunis, ou ne sont condamnés qu’à des peines réduites. Les États parties sont instamment invités à prendre toutes les mesures qui s’imposent pour mettre fin à ces pratiques, notamment en sensibilisant le public, en adoptant une législation appropriée et en faisant appliquer des lois pour sanctionner comme il se doit tous ceux qui violent, directement ou indirectement, le droit à la vie, à la survie et au développement des enfants handicapés.
Article 12 − Respect de l’opinion de l’enfant
32.La plupart du temps, ce sont les adultes, handicapés ou non, qui adoptent les politiques et les décisions relatives aux enfants handicapés, sans que ceux-ci soient consultés. Il est essentiel que les enfants handicapés soient entendus dans toutes les procédures les concernant et leurs vues soient respectées, en tenant compte du développement de leurs capacités. Pour faire respecter ce principe, il faut que les enfants soient représentés dans différents organes comme les parlements, les comités et autres forums où ils peuvent faire entendre leur voix et participer à la prise de décisions les concernant en tant qu’enfants en général et en tant qu’enfants handicapés en particulier. Faire participer les enfants à la prise de décisions permet non seulement de veiller à ce que les politiques répondent bien à leurs besoins et à leurs souhaits mais aussi de favoriser leur intégration, le processus étant ainsi participatif. Les enfants devraient avoir accès à tout mode de communication leur permettant d’exprimer leur opinion plus facilement. En outre, les États parties devraient appuyer la formation des familles et des professionnels à la promotion et au respect du développement des capacités des enfants, afin que ceux‑ci puissent prendre de plus en plus de responsabilités dans la prise de décisions concernant leur propre existence.
33.Les enfants handicapés ont souvent besoin de services spécialisés dans les domaines de la santé et de l’éducation pour pouvoir tirer pleinement parti de leurs capacités. Cette question sera examinée plus en détail ci-après. Cela étant, il convient de noter que le bien-être et le développement spirituel, émotionnel et culturel des enfants handicapés sont très souvent négligés. La participation de ces enfants à des manifestations et à des activités favorisant ces aspects essentiels de la vie d’un enfant est soit nulle, soit minimale. En outre, lorsqu’ils sont invités à participer à des activités, il s’agit souvent d’activités spécialement conçues pour eux. Cette pratique ne fait qu’accroître la marginalisation des enfants handicapés et aggraver leur sentiment d’isolement. Les programmes et activités conçus pour le développement culturel et le bien-être spirituel de l’enfant devraient s’adresser à tous les enfants, handicapés ou non, en les impliquant de manière intégrée et participative.
V. Libertés et droits civils (art. 7, 8, 13 à 17, et 37 a))
34.Le droit à un nom et à une nationalité, à la préservation de l’identité, à la liberté d’expression, à la liberté de pensée, de conscience et de religion, à la liberté d’association et de réunion pacifique, à la protection de la vie privée, à ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et à ne pas être privé de liberté de façon illégale sont autant de libertés et droits civils qui doivent être respectés, protégés et promus pour tous, y compris pour les enfants handicapés. Il convient de prêter une attention particulière aux domaines dans lesquels les droits des enfants handicapés risquent le plus d’être bafoués ou dans lesquels il faudrait mettre en place des programmes spéciaux pour les protéger.
A. Enregistrement des naissances
35.Les enfants handicapés sont beaucoup plus susceptibles que les autres de ne pas être enregistrés à la naissance. Non enregistrés, ils ne sont pas reconnus par la loi et deviennent invisibles dans les statistiques gouvernementales. Le non-enregistrement a des conséquences profondes pour la réalisation de leurs droits, notamment en matière de nationalité et d’accès aux services sociaux et sanitaires et à l’éducation. Les enfants handicapés qui ne sont pas enregistrés à la naissance courent un risque plus élevé de négligence, de placement en institution, ou même de mort.
36.À la lumière de l’article 7 de la Convention, le Comité recommande aux États parties d’adopter toutes les mesures appropriées pour garantir l’enregistrement des enfants handicapés à la naissance. Ces mesures devraient comprendre l’élaboration et l’application d’un système efficace d’enregistrement, la suppression des frais d’enregistrement, l’introduction de bureaux mobiles d’enregistrement et, pour les enfants qui n’ont pas encore été enregistrés, la création d’unités d’enregistrement dans les écoles. Dans ce contexte, les États parties devraient veiller à ce que les dispositions de l’article 7 soient pleinement appliquées, conformément aux principes de non-discrimination (art. 2) et de respect de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3).
B. Accès à une information appropriée et aux médias
37.L’accès à l’information et aux modes de communication, y compris aux systèmes et technologies de l’information et de la communication, permet aux enfants handicapés de vivre de façon indépendante et de participer pleinement à tous les aspects de la vie. Les enfants handicapés et les personnes qui s’occupent d’eux devraient avoir accès à l’information concernant leur handicap, afin d’être dûment informés sur le handicap, notamment ses causes, la façon de le gérer et le pronostic. Ces connaissances sont extrêmement précieuses car elles permettent aux enfants non seulement de s’adapter et de vivre mieux avec leur handicap mais aussi de s’impliquer davantage et de prendre des décisions informées concernant les soins à entreprendre. Les enfants handicapés devraient aussi avoir accès à des technologies appropriées et d’autres services ainsi qu’à des langues, comme le braille et la langue des signes, qui leur permettraient d’accéder aux médias sous toutes leurs formes, y compris la télévision, la radio et la presse écrite, ainsi que les nouveaux systèmes et technologies de l’information et de la communication, comme Internet.
38.Parallèlement, les États parties doivent protéger tous les enfants, y compris les enfants handicapés, contre les informations préjudiciables, notamment les documents pornographiques et les documents qui incitent à la xénophobie ou à toute autre forme de discrimination et qui pourraient renforcer les préjugés.
C. Accessibilité des transports et des bâtiments publics
39.L’inaccessibilité physique des transports et des bâtiments publics, y compris des administrations, des commerces et des équipements récréatifs, est un facteur essentiel de la marginalisation et de l’exclusion des enfants handicapés et compromet grandement leur accès aux services, notamment en matière de santé et d’éducation. Si l’accessibilité est en grande partie prise en compte dans les pays développés, elle est encore largement négligée dans le monde en développement. Tous les États parties sont instamment invités à élaborer des politiques et des procédures appropriées pour rendre les transports publics sûrs, facilement accessibles aux enfants handicapés et gratuits, chaque fois qu’il est possible, compte tenu des ressources financières des parents ou des personnes à qui ces enfants sont confiés.
40.Tous les nouveaux bâtiments publics devraient être conformes aux spécifications internationales concernant l’accès des personnes handicapées et les bâtiments existants, notamment les écoles, les établissements sanitaires, les administrations et les commerces, devraient être aménagés pour faciliter autant que possible l’accès des personnes handicapées.
VI. Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18, par. 1 et 2, 19 à 21, 25, 27, par. 4, et 39)
A. Appui aux familles et responsabilités des parents
41.Les familles sont les mieux à même de pourvoir à l’entretien et à l’éducation des enfants handicapés pour autant qu’elles disposent des moyens nécessaires. Il est possible de leur venir en aide de plusieurs manières: en expliquant aux parents et aux frères et sœurs non seulement la nature et la cause du handicap de l’enfant mais aussi ses besoins physiques et mentaux particuliers; en leur offrant un appui psychologique tenant compte du stress et des difficultés auxquelles ces familles sont confrontées; en leur enseignant un moyen de communiquer avec la personne handicapée, par exemple le langage des signes; en leur offrant un soutien matériel sous forme d’allocations spéciales, de produits de consommation et d’équipements (mobilier spécial et dispositifs d’aide au déplacement, par exemple) permettant aux enfants handicapés de vivre d’une manière digne et autonome et de participer pleinement à la vie de la famille et aux activités sociales. À cet égard, il faudrait aussi fournir une assistance aux enfants qui sont sous la garde d’une personne handicapée. Par exemple, lorsque l’un des parents ou la personne qui s’occupe d’un enfant souffre d’un handicap, ce dernier devrait bénéficier d’un soutien de façon à préserver ses droits et lui permettre de continuer à vivre avec cette personne, si cela est dans son intérêt. Les mesures d’assistance devraient aussi comprendre différentes formes de prise en charge ponctuelle (par exemple, aide à domicile ou accès à des services de garderie d’enfants dans le voisinage). Ces services permettent aux parents de travailler et les déchargent du stress dans lequel ils vivent, tout en préservant un climat familial harmonieux.
B. Sévices ou délaissement
42.Les enfants handicapés sont particulièrement exposés à la violence, qu’elle soit psychologique, physique ou sexuelle, et ce, aussi bien dans le cadre de la famille qu’à l’école, dans les établissements privés ou publics, notamment dans les structures de protection de remplacement, sur le lieu de travail ou dans leur quartier. On dit souvent que les enfants handicapés courent cinq fois plus de risques d’être victimes de violences. Chez eux comme en institution, les enfants handicapés sont souvent victimes de brutalités physiques et de cruauté mentale ainsi que de sévices sexuels et ils sont en outre particulièrement exposés au délaissement du fait qu’ils représentent une charge physique et financière supplémentaire pour la famille. En outre, en l’absence d’un mécanisme efficace d’examen des plaintes et de surveillance, ces mauvais traitements deviennent systématiques. Les brimades à l’école sont une forme particulière de violence à laquelle sont exposés les enfants et qui touche plus fréquemment les enfants handicapés, pour les raisons suivantes:
a)Le fait qu’ils ne puissent pas entendre, se déplacer, s’habiller, aller aux toilettes et se laver tout seuls les expose davantage à des atteintes à leur intimité ou à des sévices;
b)S’ils sont séparés de leurs parents, de leurs frères et sœurs, d’autres membres de la famille et de leurs amis, ils sont davantage exposés à des violences;
c)Ceux d’entre eux qui présentent des problèmes de communication ou des déficiences intellectuelles suscitent parfois l’indifférence, la méfiance ou l’incompréhension lorsqu’ils se plaignent des abus dont ils ont été victimes;
d)Les parents ou les autres personnes qui s’occupent de l’enfant sont parfois extrêmement tendus ou stressés en raison des problèmes d’ordre physique, financier et psychologique que pose l’éducation de cet enfant. Des études ont montré que les personnes stressées ont davantage tendance à se montrer violentes;
e)Les enfants handicapés sont souvent considérés à tort comme dépourvus de sexualité et peu conscients de leur propre corps et sont, par conséquent, exposés à des mauvais traitements et en particulier à des sévices sexuels.
43.Dans les efforts qu’ils déploient pour lutter contre la violence et les mauvais traitements, les États parties sont instamment invités à prendre toutes les mesures de prévention nécessaires pour protéger les enfants handicapés, notamment:
a)Sensibiliser les parents et les autres personnes ayant la charge de ces enfants aux risques auxquels ces derniers sont exposés et leur apprendre à repérer les signes évocateurs de mauvais traitements;
b)Encourager les parents à se montrer très circonspects dans le choix des personnes et des établissements auxquels ils confient leur enfant et leur apprendre à déceler les signes de maltraitance;
c)Favoriser la création d’associations de soutien aux parents, aux frères et sœurs et aux personnes qui ont la charge d’enfants handicapés pour les aider à les élever et à faire face à leur handicap;
d)Faire prendre conscience aux enfants et aux personnes qui s’occupent d’eux que l’enfant a le droit d’être traité avec dignité et respect et qu’il a le droit se plaindre aux autorités compétentes de toute violation de ce droit;
e)Veiller à ce que les établissements scolaires s’efforcent par tous les moyens de lutter contre les brimades et prêtent une attention particulière aux enfants handicapés, en leur assurant la protection nécessaire pour qu’ils puissent demeurer dans le système d’enseignement ordinaire;
f)Veiller à ce que le personnel employé par les établissements qui accueillent des handicapés bénéficie d’une formation spécialisée conforme aux normes en vigueur, à ce que ces établissements fassent l’objet d’une surveillance et d’une évaluation régulières et à ce qu’ils soient dotés de mécanismes d’examen des plaintes accessibles et à l’écoute des enfants;
g)Mettre sur pied un mécanisme d’examen des plaintes accessible et à l’écoute des enfants ainsi qu’un mécanisme opérationnel de surveillance, conformément aux Principes de Paris (voir par. 24 ci‑dessus);
h)Adopter toutes les mesures législatives nécessaires pour que les personnes qui maltraitent un enfant soient sanctionnées et éloignées du domicile, de manière à ce que l’enfant ne soit pas privé de sa famille et continue de vivre dans un environnement sûr et sain;
i)Assurer le traitement et la réinsertion des victimes de mauvais traitements, en mettant l’accent sur les programmes complets de réadaptation.
44.Dans ce contexte, le Comité souhaite aussi appeler l’attention des États parties sur le rapport de l’expert indépendant chargé de l’étude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants (A/61/299) qui décrit les enfants handicapés comme un groupe d’enfants particulièrement exposés à la violence. Il encourage les États parties à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations − générales et particulières − contenues dans ce rapport.
C. Protection de remplacement de type familial
45.La famille élargie, qui demeure l’une des structures essentielles pour l’éducation des enfants dans de nombreux pays et que l’on considère comme la meilleure solution de remplacement, doit être renforcée et dotée de moyens accrus pour venir en aide à l’enfant et à ses parents ou aux autres personnes qui prennent soin de lui.
46.Si les familles d’accueil représentent une solution de remplacement reconnue et utilisée dans un grand nombre d’États parties, force est de constater qu’elles répugnent bien souvent à assumer la garde d’enfants handicapés, qui, bien souvent, s’avère problématique en raison des soins supplémentaires dont certains d’entre eux ont besoin et des difficultés particulières que présente leur éducation sur le plan physique, psychologique et mental. Les organisations qui s’occupent du placement des enfants dans des familles d’accueil doivent par conséquent s’efforcer d’offrir à ces familles la formation et les encouragements nécessaires et leur fournir un appui pour leur permettre de s’occuper correctement des enfants handicapés.
D. Établissements
47.Le Comité s’est déclaré à maintes reprises préoccupé par le placement d’un nombre élevé d’enfants handicapés dans des établissements et par le fait que cette formule est la solution privilégiée dans de nombreux pays. La qualité des prestations assurées dans ces établissements, que ce soit dans le domaine de l’éducation, des soins de santé ou de la réadaptation, y est bien souvent largement insuffisante, soit parce qu’il n’existe pas de normes précises en la matière, soit parce qu’elles ne sont pas appliquées ou que leur application ne fait l’objet d’aucun contrôle. Ces établissements constituent en outre un contexte particulier dans lequel les enfants handicapés sont davantage exposés à des actes de cruauté mentale, des brutalités ou des sévices sexuels ou autres et au délaissement (voir par. 42 à 44 ci‑dessus). En conséquence, le Comité demande instamment aux États parties de ne considérer le placement en établissement que comme une mesure de dernier recours, à utiliser uniquement si elle est absolument nécessaire et conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant. Il leur recommande de veiller à ce que cette mesure ne soit pas adoptée dans le simple but de restreindre la liberté de l’enfant ou de limiter ses déplacements. Il préconise en outre une restructuration des établissements existants au profit de petites unités centrées sur les droits et les besoins de l’enfant, ainsi que l’élaboration de normes nationales applicables aux prestations fournies dans ces établissements et la mise en place de procédures rigoureuses de contrôle et de surveillance pour garantir l’application de ces normes.
48.Le Comité déplore que les enfants handicapés ne soient pas souvent entendus dans les procédures de séparation et de placement et que, d’une manière générale, le processus de prise de décisions n’attache pas suffisamment d’importance aux enfants en tant que partenaires, même si ces décisions ont d’importantes répercussions sur leur vie et leur avenir. En conséquence, il recommande à toutes les parties prenantes de poursuivre et d’intensifier leurs efforts pour prendre en considération les opinions des enfants handicapés et faciliter leur participation à toutes les affaires les concernant dans la procédure d’évaluation, de séparation et de placement dans une structure de protection en dehors du milieu familial et au cours du processus de transition. Il recommande que les enfants soient entendus tout au long de la procédure des mesures de protection, avant que la décision ne soit prise, pendant que la décision est appliquée et aussi après son application. À cette fin, il appelle l’attention des États parties sur les recommandations qu’il a adoptées à l’issue de sa journée de débat général consacré aux enfants sans protection parentale, le 16 septembre 2005 (CRC/C/153, par. 636 à 689).
49.Les États parties sont par conséquent instamment priés d’élaborer des programmes de désinstitutionnalisation des enfants handicapés, en vue de les replacer au sein de leur famille ou de la famille élargie ou dans des familles d’accueil. Les parents et les autres membres de la famille élargie doivent systématiquement recevoir l’assistance et la formation nécessaires pour s’occuper d’un enfant handicapé, pour permettre à ces enfants de retourner vivre dans leur milieu familial.
E. Examen périodique du placement
50.Quelle que soit la formule choisie par les autorités compétentes pour le placement d’un enfant handicapé, il importe de mettre en place un examen périodique du traitement dont il fait l’objet et de toute autre circonstance relative à son placement, dans le souci de garantir son bien‑être.
VII. Santé et bien ‑être (art. 6, 18, par. 3, 23, 24, 26 et 27, par. 1 à 3)
A. Droit à la santé
51.Le droit de jouir du meilleur état de santé possible et celui d’avoir accès à des soins de santé de qualité et financièrement accessibles sont des droits naturels et légitimes pour tous les enfants. Les enfants handicapés sont souvent privés de l’exercice de ces droits fondamentaux en raison des divers obstacles auxquels ils sont confrontés: discrimination, manque d’information et/ou de moyens financiers, problèmes de transport, éloignement géographique des établissements de santé et difficultés d’accès à ces établissements. Il faut mentionner aussi l’absence de programmes de soins de santé ciblés sur les besoins spécifiques de ces enfants. Les politiques sanitaires doivent prendre en considération l’ensemble des problèmes et favoriser un dépistage précoce des incapacités, une intervention rapide associant un traitement psychologique et physique et des mesures de réadaptation au moyen notamment d’appareillage, comme des prothèses de membres, des dispositifs d’aide à la marche, des appareils acoustiques et des aides visuelles.
52.Les services de santé destinés aux enfants handicapés devraient être fournis dans le cadre du même système que celui qui prend en charge les enfants non handicapés et devraient être gratuits, dans la mesure du possible, et qu’ils soient aussi modernes que possible. L’utilité des stratégies visant à fournir une assistance et permettre la réadaptation au sein de la communauté doit être prise en considération dans la fourniture de services de santé aux enfants handicapés. Les États parties doivent s’assurer que les professionnels de la santé qui travaillent avec des enfants handicapés ont reçu la meilleure formation possible et qu’ils possèdent une grande expérience dans ce domaine. À cette fin, bon nombre d’entre eux tireraient grand profit d’une coopération avec des organisations internationales et d’autres États parties.
B. Prévention
53.Les causes de handicap sont multiples et les activités de prévention doivent être adaptées en conséquence. Dans certaines sociétés où la pratique des mariages consanguins est répandue, il est possible de prévenir les maladies héréditaires qui sont souvent à l’origine d’incapacités, par une meilleure information du public et la promotion du dépistage préconceptionnel. Les maladies transmissibles restent à l’origine d’un grand nombre d’infirmités dans le monde et les programmes de vaccination doivent être intensifiés en vue d’atteindre l’objectif de la vaccination universelle contre toutes les maladies transmissibles évitables. La malnutrition a des effets à long terme sur le développement de l’enfant et peut être à l’origine de handicaps comme la cécité liée à la carence en vitamine A. Le Comité recommande aux États parties de renforcer les soins prénatals pour les enfants et de veiller à la qualité des soins prodigués pendant l’accouchement. Il leur recommande en outre de mettre en place des services de soins de santé postnatals et d’organiser des campagnes d’information destinées aux parents et aux autres personnes qui s’occupent d’enfants sur les soins de santé de base et les questions de nutrition et, à cet égard, de continuer à coopérer avec des organisations comme l’OMS et l’UNICEF et de solliciter leur assistance technique si nécessaire.
54.Les accidents domestiques et les accidents de la circulation étant à l’origine d’un très grand nombre de handicaps dans certains pays, il importe d’adopter et de faire appliquer des mesures de prévention, telles que des lois sur le port de la ceinture et la sécurité routière. Certains comportements néfastes tels que la consommation excessive d’alcool et de drogues pendant la grossesse, sont aussi une cause de handicap évitable et, dans certains pays, le syndrome d’alcoolisme fœtal est un grave sujet de préoccupation. Il est possible de prévenir ces causes d’incapacité par un certain nombre de mesures comme celles qui consistent à éduquer la population ou à recenser et soutenir les femmes enceintes qui ont tendance à abuser de ces substances. De nombreux handicaps sont aussi attribuables aux produits toxiques présents dans l’environnement, comme par exemple le plomb, le mercure et l’amiante, que l’on trouve couramment dans la plupart des pays. Les pays devraient élaborer et mettre en œuvre des politiques visant à prévenir la pollution de l’environnement, notamment par l’interdiction du rejet de substances dangereuses. Ils devraient aussi adopter des directives et des garanties très strictes pour prévenir les irradiations accidentelles.
55.Les conflits armés et leurs retombées telles que la facilité d’accès à des armes légères sont aussi une source importante d’incapacités. Les États parties sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les enfants des effets délétères des conflits et de la violence armée et pour que les enfants touchés par un conflit armé puissent bénéficier de services de santé et de protection sociale appropriés, notamment pour leur réadaptation psychosociale et leur réintégration sociale. Le Comité insiste en particulier sur l’importance d’informer les enfants, les parents et l’ensemble de la population des dangers représentés par les mines terrestres et les munitions non explosées, en vue de prévenir des blessures et des décès. Il invite instamment les États parties à poursuivre leurs activités de détection des mines terrestres et des munitions non explosées, à prendre des mesures pour tenir les enfants éloignés des zones à risque et à renforcer leurs activités de déminage, en sollicitant le cas échéant un appui technique et financier d’une structure de coopération internationale, y compris d’organismes des Nations Unies.
(Se reporter également au paragraphe 23 supra consacré aux mines terrestres et aux munitions non explosées et au paragraphe 78 ci‑après consacré aux conflits armés dans le cadre des mesures de protection spéciales.)
C. Dépistage précoce
56.Les handicaps sont souvent détectés tardivement chez les enfants, rendant le traitement et la réadaptation impossibles. Pour pouvoir dépister les handicaps de manière précoce, les professionnels de la santé, les parents, le personnel enseignant et les autres professionnels qui travaillent avec des enfants doivent être extrêmement bien informés. Ils doivent être capables de reconnaître les premiers signes d’une incapacité et de diriger l’enfant vers les services compétents pour l’établissement du diagnostic et l’administration du traitement. C’est pourquoi le Comité recommande aux États parties de mettre en place un système de dépistage précoce et d’intervention rapide dans le cadre des services de santé, ainsi qu’un système d’enregistrement des naissances et des procédures permettant de suivre les progrès accomplis par un enfant atteint d’un handicap qui a été détecté très tôt. Les services doivent être proposés au niveau de la collectivité et à domicile et être aisément accessibles. En outre, les services d’intervention rapide doivent travailler en collaboration avec les établissements préscolaires et scolaires pour faciliter la transition.
57.Lorsqu’une incapacité a été décelée, les structures compétentes doivent mettre rapidement en place un traitement et des mesures de réadaptation en fournissant tous les appareils nécessaires pour assurer la pleine capacité fonctionnelle de l’enfant handicapé (dispositifs d’aide à la mobilité, appareils acoustiques, aides visuelles et prothèses). Il importe en outre que ces prestations soient, dans la mesure du possible, fournies gratuitement, sans donner lieu à des démarches longues et fastidieuses.
D. Soins pluridisciplinaires
58.Les enfants handicapés souffrent très souvent de multiples problèmes de santé dont le traitement doit être envisagé de façon globale. Ils sont très souvent obligés de consulter de nombreux spécialistes parmi lesquels des neurologues, des psychologues, des psychiatres, des chirurgiens orthopédistes et des kinésithérapeutes. L’idéal serait que ces professionnels établissent collectivement un plan de prise en charge des enfants handicapés afin de garantir une efficacité maximale.
E. Santé et développement de l’adolescent
59.Le Comité note que les enfants handicapés ont beaucoup de difficultés à établir des relations avec les enfants de leur âge, notamment pendant l’adolescence, et qu’ils sont particulièrement vulnérables sur le plan de la santé procréative. Il recommande par conséquent aux États parties de leur donner les informations, les conseils et l’orientation nécessaires pour gérer leur handicap et de se conformer pleinement à ses Observations générales no 3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l’enfant et no 4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant.
60.Le Comité est profondément préoccupé par la pratique de la stérilisation forcée des enfants handicapés, et surtout des filles, qui constitue une grave violation du droit de l’enfant à l’intégrité physique et dont les conséquences, tant sur les plans physique que psychologique, perdurent tout au long de la vie. Il demande instamment aux États parties d’édicter des lois interdisant la stérilisation forcée des enfants handicapés.
F. Recherche
61.Les causes, la prévention et la prise en charge des incapacités ne reçoivent pas l’attention qu’elles méritent dans les programmes de recherche nationaux et internationaux. Les États parties sont invités à inscrire cette question dans leurs priorités nationales et à financer et suivre de près la recherche axée sur l’incapacité, en se préoccupant tout particulièrement de ses répercussions sur le plan éthique.
VIII. Éducation et loisirs (art. 28, 29 et 31)
A. Éducation de qualité
62.Les enfants handicapés ont droit à l’éducation au même titre que tous les autres enfants et l’exercice de ce droit doit leur être assuré sans discrimination et sur la base de l’égalité des chances, ainsi que le prévoit la Convention. À cette fin, les États parties doivent veiller à ce que les enfants handicapés aient effectivement accès à l’éducation pour favoriser «l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leur potentialité (voir art. 28 et 29 de la Convention et l’Observation générale no 1 (2001) du Comité sur les buts de l’éducation). La Convention reconnaît la nécessité de modifier les pratiques scolaires et de dispenser une formation aux enseignants pour les préparer à enseigner à des enfants qui ont différentes compétences et à obtenir d’eux de bons résultats scolaires.
63.Étant donné que les enfants handicapés sont très différents les uns des autres, les parents, les enseignants et les autres professionnels spécialisés doivent aider chaque enfant à mettre au point ses propres techniques de communication et son propre langage, et à trouver les méthodes d’interaction, d’orientation et de résolution des problèmes les mieux adaptées à ses possibilités. Chacune des personnes qui s’efforce d’améliorer les compétences, les capacités et l’autonomie d’un enfant doit suivre de près son évolution et être attentive à ses messages verbaux et émotionnels, afin de soutenir du mieux possible son éducation et son épanouissement.
B. Estime de soi et confiance en soi
64.L’éducation d’un enfant handicapé doit absolument viser à améliorer l’image qu’il a de lui‑même, en faisant en sorte qu’il se sente respecté par les autres, en tant qu’être humain dans toute sa dignité. Il doit être à même de s’apercevoir que les autres le respectent et reconnaissent ses libertés et ses droits fondamentaux. L’intégration d’un enfant handicapé au milieu d’autres enfants dans une classe montre à l’enfant qu’il est reconnu dans son identité et qu’il appartient à la communauté des élèves, à celle des enfants de son âge et à l’ensemble des citoyens. L’utilité du soutien par les pairs pour développer l’estime que les enfants handicapés ont d’eux-mêmes devrait être plus largement reconnue. L’éducation devrait aussi autonomiser l’enfant en lui apprenant le contrôle et en lui permettant de réussir, dans la mesure de ses moyens.
C. Éducation dans le système scolaire
65.L’éducation préscolaire est particulièrement importante pour les enfants handicapés car c’est souvent à ce stade que l’on découvre leurs incapacités et leurs besoins spéciaux. Il est extrêmement important d’intervenir le plus tôt possible afin d’aider les enfants à développer tout leur potentiel. Lorsque le handicap ou le retard de développement d’un enfant est dépisté très tôt, ce dernier a beaucoup plus de chances de bénéficier d’une éducation préscolaire adaptée à ses besoins. Les programmes éducatifs destinés à la petite enfance proposés par l’État, la communauté ou des institutions de la société civile peuvent grandement contribuer au bien‑être et au développement de tous les enfants handicapés (voir l’Observation générale no 7 (2005) du Comité sur la mise en œuvre des droits de l’enfant dans la petite enfance). L’éducation élémentaire, qui recouvre l’enseignement primaire, et dans bon nombre d’États parties, l’enseignement secondaire, doit être dispensée gratuitement aux enfants handicapés. Les établissements scolaires ne doivent présenter aucun obstacle à la communication ou à l’accès des enfants à mobilité réduite. De même, l’accès à l’enseignement supérieur, qui se fait sur la base des capacités, doit être possible pour les adolescents handicapés possédant le niveau requis. Afin de pouvoir exercer pleinement leur droit à l’éducation, beaucoup d’enfants ont besoin d’une assistance individuelle, et en particulier d’enseignants formés aux méthodes et techniques d’enseignement spécialisé, comme les langages spéciaux et à d’autres modes de communication, qui soient capables de s’adapter à des enfants atteints de diverses incapacités et d’utiliser des stratégies d’enseignement individualisées ainsi que des matériels didactiques, équipements et dispositifs d’assistance que les États parties doivent mettre à leur disposition dans toutes les limites des ressources dont ils disposent.
D. Éducation intégratrice
66.L’éducation des enfants handicapés doit être axée sur leur intégration. Les modalités de cette intégration dépendent des besoins éducatifs individuels de l’enfant, puisque l’éducation de certains enfants handicapés nécessite des mesures d’assistance qui ne sont pas forcément proposées dans le système scolaire ordinaire. Le Comité prend note de l’engagement explicite en faveur de l’objectif de l’éducation intégratrice qui transparaît dans le projet de convention relative aux droits des personnes handicapées, lequel fait obligation aux États de veiller à ce que les personnes handicapées, y compris les enfants, ne soient pas exclues du système d’enseignement général sur le fondement de leur handicap et qu’elles bénéficient, au sein du système d’enseignement général, de l’accompagnement nécessaire pour faciliter leur éducation effective. Il encourage les États parties qui ne l’ont pas encore fait à introduire les mesures nécessaires pour mettre en place un programme d’intégration. Toutefois, il souligne que les modalités de cette intégration peuvent varier. D’autres options doivent être proposées lorsqu’il n’est pas possible d’offrir une éducation pleinement intégrée dans un avenir immédiat.
67.Si le concept de l’éducation intégrée est très en vogue depuis quelques années, il n’a pas toujours la même signification. Le concept repose sur une série de valeurs, de principes et de pratiques ayant pour objectif l’instauration d’un mode d’éducation cohérent, efficace et de qualité qui tienne compte de la diversité des conditions et des besoins d’apprentissage, non seulement des enfants handicapés mais aussi de tous les élèves. Plusieurs formules peuvent être adoptées pour atteindre cet objectif en respectant la diversité des enfants. L’intégration peut aller du placement à plein temps de tous les enfants handicapés dans une classe ordinaire au placement pour certains cours seulement, complété par un enseignement spécialisé. Il importe de souligner que l’intégration ne peut en aucune façon être comprise ni appliquée comme le simple fait d’intégrer les enfants handicapés dans le système ordinaire sans tenir compte de leurs problèmes et de leurs besoins particuliers. Une étroite coopération est indispensable entre les enseignants spécialisés et les enseignants généralistes. Il convient de revoir les programmes scolaires et de les réadapter pour répondre aux besoins des enfants, handicapés ou non. Les programmes de formation des enseignants et autres personnels qui participent au système éducatif doivent être modifiés afin de prendre en considération la philosophie de l’éducation intégratrice.
E. L’éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles
68.Toutes les personnes handicapées, quel que soit leur âge, doivent bénéficier d’une orientation et d’une formation professionnelles. Il faut impérativement commencer cette préparation à un très jeune âge parce qu’un parcours professionnel se commence très tôt et se poursuit tout au long de la vie. Le fait d’inculquer aux enfants des aspirations et une formation professionnelles le plus tôt possible dès le début de l’enseignement élémentaire leur permet de faire de meilleurs choix professionnels plus tard dans la vie. L’orientation professionnelle à l’école élémentaire ne signifie pas que les enfants sont utilisés pour accomplir des travaux en ouvrant la voie à l’exploitation économique. Dans un premier temps, les élèves choisissent les objectifs en fonction de leurs capacités naissantes puis, dans le secondaire, un programme fonctionnel devrait leur inculquer des compétences et leur offrir l’accès à une expérience professionnelle, sous la surveillance conjointe et systématique de l’école et de l’employeur.
69.L’orientation et la formation professionnelles devraient faire partie du programme scolaire. Il convient d’inculquer aux enfants un intérêt pour la vie professionnelle et des compétences professionnelles pendant les années d’enseignement obligatoire. Dans les pays où seules les années d’enseignement élémentaire sont obligatoires, une formation professionnelle devrait être rendue obligatoire après l’enseignement élémentaire pour les enfants handicapés. Les gouvernements doivent mettre en place des politiques et consacrer un budget suffisant à cet effet.
F. Activités récréatives et culturelles
70.La Convention garantit à l’article 31 le droit de l’enfant d’avoir des activités récréatives et culturelles adaptées à son âge. Cet article doit être interprété comme faisant référence à l’âge et aux capacités de l’enfant sur les plans mental, psychologique et physique. Le jeu est reconnu comme le meilleur moyen d’acquérir diverses aptitudes, y compris celle de vivre en société. Les enfants handicapés s’intègrent parfaitement dans la société lorsqu’on leur offre la possibilité et le temps de jouer en compagnie d’autres enfants (handicapés ou non) ainsi que des lieux ad hoc. Des activités récréatives et ludiques devraient être enseignées aux enfants handicapés d’âge scolaire.
71.Il faut offrir aux enfants handicapés des chances égales de participer à diverses activités culturelles et artistiques mais aussi sportives. Ces activités doivent être considérées à la fois comme un moyen de s’exprimer et un moyen d’atteindre une qualité de vie satisfaisante.
G. Sports
72.Dans toute la mesure possible, il convient d’associer les enfants handicapés à des activités sportives, compétitives ou non. Plus exactement, dans la mesure où un enfant handicapé est capable de se mesurer à un enfant non handicapé, il faut l’encourager dans cette voie. Cela dit, étant donné que le sport est axé sur des performances physiques, il est souvent nécessaire d’organiser des jeux et des activités réservés aux enfants handicapés pour qu’ils puissent s’affronter dans des conditions d’égalité et de sécurité. Il faut toutefois souligner que, lorsque de telles manifestations sont organisées, les médias devraient jouer leur rôle en leur assurant la même couverture que les compétitions sportives pour enfants non handicapés.
IX. Mesures de protection spéciales (art. 22, 32 à 36, 37 b), c) et d), 38, 39 et 40)
A. Administration de la justice pour mineurs
73.Conformément à l’article 2, les États parties sont tenus de veiller à ce que les enfants handicapés en conflit avec la loi (tels que les cas décrits au paragraphe 1 de l’article 40) soient protégés non seulement par les dispositions de la Convention qui se rapportent expressément à la justice pour mineurs (art. 37, 39 et 40) mais aussi par toutes les autres dispositions et garanties contenues dans la Convention, par exemple dans le domaine de la santé et de l’éducation. En outre, les États parties devraient prendre, le cas échéant, des mesures spéciales pour garantir aux enfants handicapés l’exercice des droits susmentionnés et la protection conférée par ces droits.
74.S’agissant des droits consacrés à l’article 23 et compte tenu du niveau élevé de vulnérabilité des enfants handicapés, le Comité recommande − en complément de la recommandation générale qu’il a faite au paragraphe 73 ci‑dessus − que soient pris en compte les éléments ci‑après concernant le traitement des enfants handicapés (réputés être) en conflit avec la loi:
a)L’interrogatoire d’un enfant handicapé qui entre en conflit avec la loi doit être conduit dans la langue appropriée et par des professionnels tels que des policiers, avocats, agents des services sociaux, procureurs et/ou juges, dûment formés à cette fin;
b)Les gouvernements doivent élaborer et mettre en œuvre une série de mesures susceptibles d’être adaptées à la situation de chaque enfant, qui permettent de ne pas recourir à des poursuites judiciaires. Il convient d’éviter au maximum de soumettre un enfant handicapé en conflit avec la loi à une procédure officielle/juridique et de réserver cette solution aux cas où elle s’avère nécessaire dans l’intérêt de l’ordre public. Dans cette éventualité, il faut s’efforcer d’expliquer à l’enfant les modalités de la procédure judiciaire impliquant des mineurs et l’informer de ses droits;
c)Les enfants handicapés en conflit avec la loi ne devraient pas être placés dans un centre de détention pour jeunes délinquants au stade de la détention avant jugement ni à titre de sanction. La privation de liberté ne devrait être imposée que dans la mesure où elle est nécessaire pour assurer à l’enfant un traitement adapté aux problèmes qui sont à l’origine de l’infraction commise et celui‑ci doit être placé dans un établissement disposant de personnels spécialement formés et des équipements nécessaires à son traitement. L’autorité compétente à qui incombe cette décision doit veiller à ce que les droits de l’homme et les garanties légales soient pleinement respectés.
B. Exploitation économique
75.Les enfants handicapés sont plus exposés que les autres à différentes formes d’exploitation économique, notamment aux pires formes de travail des enfants, au trafic de drogues et à la mendicité. Le Comité recommande en conséquence aux États parties qui ne l’ont pas encore fait de ratifier les Conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) no 138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi et no182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination. Dans la mise en œuvre de ces conventions, les États parties sont invités à s’intéresser tout particulièrement à la vulnérabilité et aux besoins des enfants handicapés.
C. Enfants des rues
76.Les enfants handicapés, et en particulier ceux qui souffrent d’incapacité physique, finissent souvent dans la rue pour toutes sortes de raisons, notamment économiques et sociales. Il convient d’assurer aux enfants handicapés qui vivent ou travaillent dans la rue ce qu’il leur faut comme nourriture, habillement, logement, soins de santé et possibilités d’éducation, y compris l’apprentissage des compétences nécessaires dans la vie courante et de les protéger contre les dangers auxquels ils sont exposés et notamment contre l’exploitation économique et sexuelle. À cet égard, une approche individualisée est nécessaire pour prendre en compte les besoins et les capacités propres à chaque enfant. Le Comité s’inquiète en particulier de ce que les enfants handicapés sont parfois exploités à des fins de mendicité dans la rue ou ailleurs, certains étant même rendus infirmes à cette fin. Les États parties sont invités à prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et pénaliser expressément cette forme d’exploitation, et faire en sorte que les coupables soient traduits en justice.
D. Exploitation sexuelle
77.Le Comité s’est souvent déclaré gravement préoccupé par le nombre croissant d’enfants victimes de prostitution infantile et de pornographie impliquant des enfants. Les enfants handicapés sont plus exposés que les autres. Les gouvernements sont instamment invités à mettre en œuvre le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et, dans l’exercice des obligations qui leur incombent en vertu de cet instrument, à accorder une attention particulière à la protection des enfants handicapés compte tenu de leur grande vulnérabilité.
E. Enfants touchés par des conflits armés
78.Les conflits armés, ainsi qu’on l’a déjà dit plus haut, sont l’une des principales causes d’incapacité pour les enfants, qu’ils participent ou non aux hostilités. Dans ce contexte, les gouvernements sont instamment priés de ratifier et mettre en œuvre le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en prêtant une attention spéciale à la réadaptation et à la réinsertion sociale des enfants rendus infirmes par des conflits armés. Le Comité recommande en outre aux États parties d’interdire expressément l’enrôlement d’enfants dans les forces armées et de prendre les mesures nécessaires, d’ordre législatif et autres, pour assurer la pleine mise en œuvre de cette interdiction.
F. Enfants réfugiés ou déplacés à l’intérieur de leur pays, enfants appartenant à des minorités et enfants autochtones
79.Certaines incapacités résultent directement d’événements comme des catastrophes naturelles ou provoquées par l’homme, qui sont responsables de la situation dans laquelle se trouvent des personnes réfugiées ou déplacées à l’intérieur de leur pays. Ainsi, des enfants réfugiés ou déplacés à l’intérieur de leur pays, tout comme ceux qui appartiennent à la population résidente, continuent d’être blessés ou tués par des mines terrestres ou des munitions non explosées, de nombreuses années après la fin d’un conflit armé. Les enfants réfugiés ou déplacés à l’intérieur de leur pays qui sont handicapés sont exposés à des multiples formes de discrimination, et en particulier les filles, qui sont la cible privilégiée de violences, notamment sexuelles, de délaissement et d’exploitation. Le Comité insiste tout particulièrement sur le fait que les enfants handicapés réfugiés ou déplacés doivent bénéficier en priorité d’une assistance spéciale, notamment en vue de les soustraire à de tels risques, de leur faciliter l’accès à des services de santé et de protection sociale appropriés, notamment pour leur réadaptation psychosociale et leur réintégration. Le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a fait des enfants sa priorité et adopté plusieurs documents pour orienter ses activités dans ce domaine, et notamment les Principes directeurs concernant les enfants réfugiés, publiés en 1988, qui font partie de sa politique concernant les enfants réfugiés. Le Comité recommande en outre aux États parties de prendre en considération son Observation générale no 6 (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine.
80.Il convient de tenir compte, dans toutes les mesures prises pour protéger et promouvoir les droits des enfants handicapés, de la vulnérabilité et des besoins particuliers des enfants appartenant à des minorités et des enfants autochtones, qui sont souvent déjà marginalisés dans leur propre communauté. Les programmes et politiques doivent toujours tenir compte des questions culturelles et ethniques.
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