COMITE DES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
AUTRICHE
243. Le Comité a examiné à ses 39e, 40e et 41e séances, tenues les 28 et 29 novembre 1994, le deuxième rapport périodique de l'Autriche concernant les droits visés aux articles 6 à 9 et 13 à 15 du Pacte (E/1990/6/Add.5), en même temps que les réponses écrites aux questions supplémentaires formulées par le groupe de travail de présession, et il a approuvé, à sa 52e séance, le 7 décembre 1994, les observations finales ci-après.
A. Introduction
244. Le Comité exprime sa satisfaction à l'Etat partie pour le rapport détaillé qu'il a soumis et pour les renseignements complémentaires qu'il lui a communiqués par écrit, ainsi que pour le dialogue constructif qui s'est instauré entre les membres du Comité et la délégation autrichienne.
245. Le Comité apprécie vivement la façon franche et détaillée dont la délégation autrichienne a répondu à toutes les questions qu'il a posées, lui permettant, dans l'ensemble, de se faire une idée de la manière dont l'Autriche s'acquitte de ses obligations au titre du Pacte.
B. Aspects positifs
246. Le Comité se félicite des efforts entrepris par le Gouvernement autrichien pour créer les conditions nécessaires à l'exercice des droits reconnus dans le Pacte. Il note avec satisfaction l'adoption de mesures législatives garantissant la non-discrimination à l'égard des femmes, notamment la loi no 833/1992 amendant la loi de 1979 sur l'égalité de traitement, qui vise les questions de discrimination fondées sur le sexe en matière d'emploi, et la loi fédérale de 1993 sur l'égalité de traitement des hommes et des femmes et sur la promotion des femmes au sein de l'administration fédérale, telle qu'elle a été amendée en 1994, qui garantit l'égalité de traitement pour les femmes et les hommes employés par l'administration fédérale. Le Comité note la création, au niveau fédéral, d'une commission pour l'égalité de traitement, ainsi que d'un poste de conseiller en matière d'égalité de traitement.
247. Le Comité prend note des efforts accomplis par le Gouvernement autrichien, y compris dans le domaine de l'éducation, pour intégrer les travailleurs étrangers et leurs familles. Le Comité note également la création d'un fonds pour l'intégration des migrants, ainsi que les mesures prises pour lutter contre la xénophobie et encourager la tolérance.
248. Le Comité prend note des initiatives visant à lutter contre le chômage et les effets adverses de la restructuration des grandes entreprises, notamment la création de fondations pour le travail.
249. Le Comité exprime sa satisfaction au sujet de l'étendue et de la qualité des services fournis à l'ensemble de la population, notamment en matière de prestations sociales en faveur des personnes âgées et des handicapés.
250. Le Comité note avec intérêt les efforts entrepris dans le domaine de la formation professionnelle et le large éventail de possibilités qui sont offertes en matière d'éducation, une fois achevé le cycle de l'enseignement obligatoire. Il prend note de l'étendue du système d'éducation qui permet aux adultes d'élargir constamment leurs connaissances.
251. Le Comité prend note avec satisfaction des diverses mesures prises par l'Etat partie pour assurer la protection des diverses minorités ethniques et leur garantir le droit à l'enseignement dans leur langue maternelle ainsi que le droit de préserver et de maintenir leur identité culturelle. A cet égard, le Comité se félicite de la reconnaissance de la minorité rom en tant que minorité nationale, et note avec satisfaction l'attribution de subsides destinés à promouvoir les activités culturelles des minorités, ainsi que l'établissement, au sein de la chancellerie fédérale, de conseils consultatifs pour les minorités ethniques.
C. Principaux sujets de préoccupation
252. Le Comité note que les dispositions des instruments universels relatifs aux droits de l'homme, y compris celles du Pacte, ne peuvent pas être invoquées directement devant les tribunaux autrichiens, à la différence de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui a été transformée en droit interne et a force de loi constitutionnelle. Bien que la délégation autrichienne ait déclaré que la législation de son pays est conforme aux dispositions du Pacte, le Comité s'inquiète néanmoins de relever qu'en cas de conflit entre les dispositions du Pacte et la législation interne, les obligations internationales contractées au titre du Pacte risquent de ne pas être respectées.
253. Le Comité s'inquiète des conséquences négatives que pourraient avoir, pour l'application des dispositions du Pacte en matière de non-discrimination, les dispositions de la nouvelle loi sur la résidence et l'autorisation de séjour, visant à limiter le nombre d'étrangers autorisés à travailler en Autriche, ainsi que les conditions arrêtées, notamment en matière de logement, pour obtenir l'autorisation de séjour dans ce pays.
254. Le Comité fait observer que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT, dans le rapport qu'elle a présenté en 1994 à la Conférence internationale du travail, s'est déclarée préoccupée par la persistance d'inégalités dans la rémunération du travail des femmes par rapport aux hommes, en particulier dans le secteur privé. A cet égard, le Comité note que malgré les efforts législatifs importants de l'Etat partie pour assurer l'égalité entre les sexes, une inégalité persiste en pratique, notamment en matière de promotion et, parfois, de prestations sociales.
255. Le Comité relève que les exigences en matière de protection des travailleurs, en ce qui concerne la durée de la journée de travail et le repos hebdomadaire, ne sont pas toujours entièrement satisfaites en raison de la lenteur mise par certaines parties du secteur privé à appliquer la législation en la matière.
256. Le Comité constate d'autre part avec inquiétude que les travailleurs des petites entreprises, comptant cinq salariés ou moins, semblent ne pas bénéficier d'une protections suffisante contre les risques de mise à pied ou de licenciement pour cause d'activités syndicales. De même, le Comité estime que la représentation des employés au comité d'entreprise n'est pas suffisante pour assurer l'équilibre des intérêts.
D. Suggestions et recommandations
257. Le Comité recommande à l'Etat partie d'envisager les mesures nécessaires pour mettre sur un pied d'égalité les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, notamment le Pacte, et la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, pour ce qui est de la place qu'ils occupent dans l'ordre juridique interne.
258. Le Comité recommande que les autorités autrichiennes poursuivent leurs efforts en vue d'assurer l'égalité de fait entre hommes et femmes, notamment en ce qui concerne l'accès au travail, la rémunération égale pour un travail de valeur égale, les conditions de travail, le droit à la sécurité sociale et la participation à l'enseignement supérieur.
259. Le Comité recommande que le Gouvernement autrichien prenne les mesures nécessaires pour éviter que l'application des nouvelles lois en matière d'immigration et de résidence n'entrave l'exercice, par les non-nationaux, des droits énoncés dans le Pacte.
260. Le Comité invite instamment l'Etat partie à surveiller attentivement les effets que pourraient avoir le chômage et la réduction des services de protection sociale sur la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier dans le cas des groupes les plus vulnérables de la société, et à prendre les mesures nécessaires pour en atténuer les répercussions négatives.
261. Tenant compte des observations faites par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT dans son rapport de 1994, relatives au travail des détenus à l'intérieur des prisons, pour le compte d'entreprises privées, le Comité fait siennes les recommandations adressées au Gouvernement autrichien, l'encourageant à prendre des mesures pour améliorer le niveau des rémunérations et de la protection sociale de ces détenus.
262. Le Comité recommande à l'Etat partie de poursuivre ses efforts pour assurer l'exercice de tous les droits reconnus à l'article 8 du Pacte, en particulier pour les travailleurs employés dans de petites entreprises.
263. Le Comité estime qu'il importe que l'Etat partie maintienne le dialogue avec la société civile lors de la préparation des rapports présentés au Comité et qu'il en assure la plus large diffusion.