Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Norway, U.N. Doc. E/C.12/1/Add.109 (2005).
Convention Abbreviation: CESCR
COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS
Trente-quatrième session
25 avril-13 mai 2005
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE
Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels
NORVÈGE
1. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le quatrième rapport périodique de la Norvège sur l'application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/4/Add.14) à ses 14e et 15e séances, tenues les 3 et 4 mai 2005 (voir E/C.12/2005/SR.14 et SR.15), et a adopté, à sa 27e séance, tenue le 13 mai 2005, les observations finales ci-après (voir E/C.12/2005/SR.27).
A. Introduction
2. Le Comité se félicite de la présentation du quatrième rapport périodique de l'État partie, ainsi que des réponses écrites complètes à la liste des points à traiter. Il se félicite également du dialogue franc et constructif qu'il a eu avec la délégation d'experts de l'État partie.
B. Aspects positifs
3. Le Comité salue l'engagement de l'État partie en faveur de la coopération internationale, dont témoigne le volume de l'aide publique au développement, qui représente 0,92 % du revenu national brut. Il se félicite en outre de la place accordée aux droits de l'homme dans le Plan d'action pour lutter contre la pauvreté dans les pays du Sud d'ici à 2015.
4. Le Comité se félicite de l'adoption de la loi sur les droits de l'homme du 21 mai 1999, par laquelle le Pacte a été incorporé au droit interne et qui dispose, en son article 3, que celui-ci l'emporte en cas de conflit avec toute autre disposition législative.
5. Le Comité se félicite de l'adoption, le 26 avril 2005, de la loi interdisant la discrimination ethnique et religieuse.
6. Le Comité se félicite des politiques et mesures adoptées pour renforcer la protection des droits économiques, sociaux et culturels, notamment dans le cadre du Plan d'action de 2002 pour lutter contre la pauvreté et du Plan d'action national pour lutter contre le racisme et la discrimination (2002-2006).
7. Le Comité prend note avec satisfaction de la présentation au Parlement, le 1er octobre 2004, d'un nouveau Livre blanc, traitant de la Norvège en tant que société multiculturelle composée de personnes d'origines, d'appartenances ethniques, de religions, de cultures, de langues et de modes de vie divers.
8. Le Comité se félicite du Plan national d'action contre la traite (2003-2005) et de l'adoption d'une disposition pénale distincte sur la traite des êtres humains, qui est entrée en vigueur en juillet 2003, ainsi que de la ratification par l'État partie, en septembre 2003, de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et du Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, qui complète ladite Convention.
C. Facteurs et difficultés entravant l'application du Pacte
9. Le Comité ne relève aucun facteur ni difficulté notable empêchant l'État partie d'appliquer effectivement les dispositions du Pacte.
D. Principaux sujets de préoccupation
10. Le Comité est préoccupé par les cas de discrimination à l'encontre des personnes issues de l'immigration, en particulier dans les domaines du logement et de l'emploi.
11. Le Comité se déclare préoccupé par les problèmes rencontrés par les personnes issues de l'immigration, en particulier les femmes, pour accéder au marché du travail. À cet égard, il constate que les mesures prises à ce jour par l'État partie pour renforcer la place des immigrés sur le marché du travail n'ont eu qu'un effet limité.
12. Le Comité note avec préoccupation que les écarts de salaire entre hommes et femmes persistent en dépit des mesures appréciables prises pour mettre fin à la discrimination à l'égard des femmes sur le lieu de travail.
13. Le Comité est préoccupé par le nombre élevé d'accidents dans les secteurs de la pêche et de la prospection pétrolière en mer.
14. Le Comité se déclare préoccupé par le nombre élevé d'enfants qui sont retirés de leur famille et placés dans des institutions ou des familles d'accueil dans l'État partie.
15. Le Comité s'inquiète de ce que la violence familiale demeure un problème à grande échelle dans l'État partie et note qu'une législation spécifique sur la question fait défaut.
16. Le Comité s'inquiète de ce que les conditions de ressources empêchent indûment certains étrangers, y compris ceux qui ont obtenu un permis de séjour pour raisons humanitaires, d'être réunis avec leurs proches.
17. Le Comité s'inquiète de ce que la Norvège est un pays de destination pour les femmes victimes de la traite à des fins d'exploitation sexuelle.
18. Le Comité est préoccupé par le nombre croissant d'expulsions dans l'État partie, et en particulier à Oslo, qui s'expliquent principalement par le non-paiement du loyer. Il s'inquiète aussi de ce que les groupes défavorisés et marginalisés sont particulièrement touchés par la privatisation des logements municipaux et l'augmentation des prix du logement. En dépit de l'assistance fournie par l'intermédiaire de la Banque publique pour le logement, le Comité exprime sa vive préoccupation devant le nombre nettement insuffisant de logements sociaux pour les individus et les familles à faible revenu. Il déplore à cet égard l'absence d'information sur le nombre de personnes occupant illégalement un logement et le point de savoir si celles-ci risquent d'en être expulsées, ainsi que le nombre de personnes inscrites sur les listes d'attente pour obtenir un logement municipal.
19. Le Comité note avec préoccupation que l'État partie compte quelque 5 200 sans-abri. Il s'inquiète en outre de ce que les demandeurs d'asile déboutés qui ne peuvent être expulsés vers leur pays d'origine ne sont pas hébergés dans des centres d'accueil après la date limite fixée pour leur départ.
20. Le Comité est préoccupé par les informations qu'il a reçues selon lesquelles de nombreux demandeurs d'asile mineurs traumatisés et malades ne bénéficient pas d'une assistance satisfaisante.
21. Le Comité est préoccupé par l'incidence élevée des troubles de l'alimentation chez les adolescents dans l'État partie et par le nombre élevé de suicides chez les garçons âgés de 15 à 19 ans.
22. Le Comité est préoccupé par les restrictions imposées aux demandeurs d'asile dans le domaine de l'accès à l'éducation, dans la mesure où les demandeurs d'asile mineurs ne peuvent suivre que l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire du premier cycle gratuits et où il n'est pas proposé de cours de norvégien aux demandeurs d'asile de plus de 18 ans.
E. Suggestions et recommandations
23. Compte tenu de la décision rendue par la Cour suprême dans l'«affaire KRL» (Rapports de 2001 de la Cour suprême, p. 1006), selon laquelle les instruments internationaux qui ont été incorporés dans la législation nationale ne peuvent être appliqués directement que s'il est possible de dériver des droits et des devoirs concrets de leurs dispositions, le Comité réaffirme le principe de l'interdépendance et de l'indivisibilité de tous les droits, ainsi que l'invocabilité de tous les droits économiques, sociaux et culturels, et engage l'État partie à veiller à ce que les juridictions internes donnent effet à toutes les dispositions du Pacte. À cet égard, le Comité renvoie l'État partie à son observation générale no 9 (1998) concernant l'application du Pacte au niveau national.
24. Le Comité recommande à l'État partie de poursuivre ses efforts pour garantir la pleine indépendance du Centre norvégien pour les droits de l'homme en tant qu'institution nationale des droits de l'homme, conformément aux Principes de Paris.
25. Le Comité demande à l'État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des données ventilées sur son aide publique au développement, en indiquant les fonds alloués aux différents secteurs dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels. Il souhaite également obtenir des informations sur les mesures prises par l'État partie pour honorer ses obligations en vertu du Pacte dans le cadre de sa coopération internationale pour le développement.
26. Le Comité engage l'État partie à s'assurer que la loi sur le Finnmark, dont est actuellement saisi le Parlement, tient dûment compte des droits des Samis de participer à la gestion et au contrôle des ressources naturelles dans le comté de Finnmark. Il lui demande de fournir dans son prochain rapport périodique une information à jour sur l'application de ladite loi et la mesure dans laquelle les opinions des représentants des Samis ont été prises en considération.
27. Le Comité recommande à l'État partie de renforcer les mesures visant à lutter contre la discrimination à l'égard des personnes issues de l'immigration et d'assurer un suivi efficace de la législation antidiscrimination.
28. Le Comité encourage l'État partie à poursuivre et renforcer son action pour éliminer les obstacles rencontrés par les personnes issues de l'immigration, en particulier les femmes, sur le plan de l'accès au marché du travail.
29. Le Comité encourage l'État partie à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
30. Le Comité encourage l'État partie à poursuivre et renforcer son action pour garantir que les femmes et les hommes ont accès au marché du travail dans des conditions d'égalité et reçoivent un salaire égal pour un travail de valeur égale. En particulier, l'État partie devrait prendre des mesures pour encourager les femmes à choisir des métiers et professions qui sont habituellement exercés par les hommes et sont mieux rémunérés.
31. Le Comité encourage l'État partie à renforcer son action pour garantir des conditions de travail sûres aux personnes travaillant dans les secteurs de la pêche et de la prospection pétrolière en mer.
32. Le Comité demande à l'État partie de se pencher sur la situation des enfants qui sont retirés de leur famille et placés dans des institutions ou des familles d'accueil et de prendre des mesures pour identifier les causes du problème et y faire face. À cet égard, il recommande à l'État partie de procéder à un examen périodique complet de la situation des enfants placés dans des familles et des institutions et d'intensifier ses efforts pour fournir aux parents l'assistance et le soutien dont ils ont besoin pour pouvoir exercer leur rôle et leur responsabilité parentale dans l'éducation de leurs enfants. Le Comité demande à l'État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des données annuelles ventilées sur le nombre et l'origine ethnique des enfants placés dans des institutions ou des familles d'accueil, sur la durée moyenne et les motifs de leur placement et sur les mesures prises pour réunir ces enfants avec leurs parents biologiques.
33. Le Comité engage l'État partie à donner la priorité à la création d'un nombre suffisant de places dans les jardins d'enfants, en particulier dans les zones urbaines à forte densité de population.
34. Le Comité engage l'État partie à poursuivre et à renforcer les mesures sociales, psychologiques et juridiques prises dans le cadre du Plan d'action contre la violence à l'égard des femmes (2004-2007), ainsi qu'à envisager d'adopter une législation traitant spécifiquement de la violence familiale. Il demande à l'État partie de fournir des informations sur les progrès faits dans son prochain rapport périodique.
35. Le Comité encourage l'État partie à envisager d'assouplir les restrictions à la réunification familiale, en vue d'accorder une protection et une assistance aussi larges que possible à la famille.
36. Le Comité engage l'État partie à poursuivre et renforcer ses efforts pour remédier aux problèmes de la traite et de l'exploitation sexuelle à des fins commerciales et demande à l'État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés sur les progrès enregistrés et les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre du deuxième plan d'action national contre la traite des femmes qui devrait être adopté en juin 2005.
37. Le Comité engage l'État partie à s'assurer que les expulsions de squatters et de locataires qui ne peuvent payer leur loyer soient effectuées conformément aux directives définies par le Comité dans son observation générale no 7 (1997) concernant le droit à un logement suffisant (art. 11, par. 1, du Pacte). En outre, conformément à l'observation générale no 4 (1991) du Comité concernant le droit à un logement suffisant (art. 11, par. 1, du Pacte), l'État partie devrait prendre des mesures efficaces pour fournir suffisamment de logements afin de répondre aux besoins des familles à faible revenu et des groupes défavorisés et marginalisés. Le Comité demande à l'État partie de fournir, dans son prochain rapport, des données ventilées sur les personnes inscrites sur les listes d'attente pour obtenir un logement social municipal, ainsi que des informations sur les progrès accomplis dans l'ensemble du domaine du logement.
38. Le Comité engage l'État partie à renforcer les mesures pour remédier au problème des sans-abri et à s'assurer que des possibilités d'hébergement sont proposées aux demandeurs d'asile déboutés qui ne peuvent être expulsés vers leur pays d'origine.
39. Le Comité encourage l'État partie à prendre des mesures pour remédier effectivement aux causes profondes des disparités régionales en ce qui concerne les indicateurs de santé.
40. Le Comité engage l'État partie à renforcer les mesures prises pour faire en sorte que les demandeurs d'asile mineurs bénéficient de services psychiatriques et sanitaires appropriés.
41. Le Comité recommande à l'État partie de poursuivre et de renforcer les mesures prises pour appliquer la stratégie cohérente de lutte contre les troubles de l'alimentation élaborée en 2000 et, en outre, d'assurer un suivi satisfaisant du Plan d'action contre le suicide.
42. Le Comité recommande à l'État partie de faire en sorte que toute décision d'interner une personne atteinte de troubles mentaux pour lui faire suivre un traitement psychiatrique obligatoire soit examinée rapidement par un organe judiciaire indépendant.
43. Le Comité encourage l'État partie à faire en sorte qu'aucune restriction ne soit imposée aux demandeurs d'asile dans le domaine de l'accès à l'éducation pendant la période au cours de laquelle leur demande est examinée.
44. Le Comité demande à l'État partie d'assurer une large diffusion des présentes observations finales à tous les niveaux de la société, y compris parmi les fonctionnaires et les agents de l'appareil judiciaire, et de l'informer, dans son prochain rapport périodique, de toutes les mesures qu'il aura prises pour mettre en œuvre ses observations. En outre, il encourage l'État partie à associer des organisations non gouvernementales et d'autres membres de la société civile à l'élaboration de son cinquième rapport périodique.
45. Le Comité demande à l'État partie de présenter son cinquième rapport périodique au plus tard le 30 juin 2010.
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