Préambule
Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires du présent Protocole,
Résolus à prendre de nouvelles mesures propres à élargir la protection des droits sociaux et économiques garantie par la Charte sociale européenne, ouverte à la signature à Turin le 18 octobre 1961 (ci-après dénommée «la Charte»),
Sont convenus de ce qui suit:
Partie I
Les Parties reconnaissent comme objectif d'une politique qu'elles poursuivront par tous les moyens utiles, sur les plans national et international, la réalisation de conditions propres à assurer l'exercice effectif des droits et principes suivants:
1.Tous les travailleurs ont droit à l'égalité
de chances et de traitement en matière d'emploi et de profession,
sans discrimination fondée sur le sexe.
2.Les travailleurs ont droit à l'information et à
la consultation au sein de l'entreprise.
3.Les travailleurs ont le droit de prendre part à la
détermination et à l'amélioration des conditions
de travail et du milieu du travail dans l'entreprise.
4.Toute personne âgée a droit à une protection
sociale.
Partie II
Les Parties s'engagent à se considérer comme liées, ainsi que prévu à la partie III, par les obligations résultant des articles ci-après:
Article 1 - Droit à l'égalité de chances et de traitement en matière d'emploi et de profession, sans discrimination fondée sur le sexe
1.En vue d'assurer l'exercice effectif du droit à
l'égalité de chances et de traitement en matière
d'emploi et de profession sans discrimination fondée sur
le sexe, les Parties s'engagent à reconnaître ce
droit et à prendre les mesures appropriées pour
en assurer ou en promouvoir l'application dans les domaines suivants:
accès à l'emploi, protection contre le licenciement
et réinsertion professionnelle;
orientation et formation professionnelles, recyclage,
réadaptation professionnelle;
conditions d'emploi et de travail, y compris la rémunération;
déroulement de la carrière, y compris
la promotion.
2.Ne seront pas considérées comme des discriminations
au sens du paragraphe 1 du présent article les dispositions
relatives à la protection de la femme, notamment en ce
qui concerne la grossesse, l'accouchement et la période
postnatale.
3.Le paragraphe 1 du présent article ne fait pas obstacle
à l'adoption de mesures spécifiques visant à
remédier à des inégalités de fait.
4.Pourront être exclues du champ d'application du présent
article, ou de certaines de ses dispositions, les activités
professionnelles qui, en raison de leur nature ou des conditions
de leur exercice, ne peuvent être confiées qu'à
des personnes d'un sexe donné.
Article 2 - Droit à l'information et à la consultation
1.En vue d'assurer l'exercice effectif du droit des travailleurs
à l'information et à la consultation au sein de
l'entreprise, les Parties s'engagent à prendre ou à
promouvoir des mesures permettant aux travailleurs ou à
leurs représentants, conformément à la législation
et la pratique nationales:
a d'être informés régulièrement
ou en temps opportun et d'une manière compréhensible
de la situation économique et financière de l'entreprise
qui les emploie, étant entendu que la divulgation de certaines
informations pouvant porter préjudice à l'entreprise
pourra être refusée ou qu'il pourra être exigé
que celles-ci soient tenues confidentielles; et
b d'être consultés en temps utile sur les
décisions envisagées qui sont susceptibles d'affecter
substantiellement les intérêts des travailleurs et
notamment sur celles qui auraient des conséquences importantes
sur la situation de l'emploi dans l'entreprise.
2.Les Parties pourront exclure du champ d'application du paragraphe
1 du présent article les entreprises dont les effectifs
n'atteignent pas un seuil déterminé par la législation
ou la pratique nationales.
Article 3 - Droit de prendre part à la détermination et à l'amélioration des conditions de travail et du milieu du travail
1.En vue d'assurer l'exercice effectif du droit des travailleurs
de prendre part à la détermination et à l'amélioration
des conditions de travail et du milieu du travail dans l'entreprise,
les Parties s'engagent à prendre ou à promouvoir
des mesures permettant aux travailleurs ou à leurs représentants,
conformément à la législation et à
la pratique nationales, de contribuer:
a à la détermination et à l'amélioration
des conditions de travail, de l'organisation du travail et du
milieu du travail;
b à la protection de la santé et de la
sécurité au sein de l'entreprise;
c à l'organisation de services et facilités
sociaux et socioculturels de l'entreprise;
d au contrôle du respect de la réglementation
en ces matières.
2.Les Parties pourront exclure du champ d'application du paragraphe
1 du présent article les entreprises dont les effectifs
n'atteignent pas un seuil déterminé par la législation
ou la pratique nationales.
Article 4 - Droit des personnes âgées à une protection sociale
En vue d'assurer l'exercice effectif du droit des personnes
âgées à une protection sociale, les Parties
s'engagent à prendre ou à promouvoir, soit
directement soit en coopération avec les organisations
publiques ou privées, des mesures appropriées tendant
notamment:
1.à permettre aux personnes âgées
de demeurer le plus longtemps possible des membres à part
de la société, moyennant: entière
a des ressources suffisantes pour leur permettre
de mener une existence décente et de participer activement
à la vie publique, sociale et
culturelle;
b la diffusion des informations concernant les
services et les facilités existants en faveur des personnes
âgées et les possibilités pour
celles-ci d'y recourir;
2.à permettre aux personnes âgées
de choisir librement leur mode de vie et de mener une existence
indépendante dans leur environnement habituel
aussi longtemps qu'elles le souhaitent et que cela est
possible, moyennant:
a la mise à disposition de logements appropriés
à leurs besoins et à leur état de santé
ou d'aides adéquates en vue de l'aménagement du
logement;
b les soins de santé et les services que
nécessiterait leur état;
3.à garantir aux personnes âgées vivant
en institution l'assistance appropriée dans le respect
de la vie privée, et la participation à la détermination
des conditions de vie dans l'institution.
Partie III
Article 5 - Engagements
1.Chacune des Parties s'engage:
a à considérer la partie I du présent
Protocole comme une déclaration déterminant les
objectifs dont elle poursuivra par tous les moyens utiles la
réalisation, conformément aux dispositions
du paragraphe introductif de ladite Partie;
b à se considérer comme liée par un ou plusieurs articles de la partie II du présent Protocole.
2.Le ou les articles choisi(s) conformément aux dispositions
de l'alinéa b du paragraphe 1 du présent article
seront notifiés au Secrétaire Général
du Conseil de l'Europe par l'Etat contractant au moment du dépôt
de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.
3.Chacune des Parties pourra, à tout moment ultérieur,
déclarer par notification adressée au Secrétaire
Général qu'elle se considère comme liée
par tout autre article figurant dans la partie II du présent
Protocole et qu'elle n'avait pas encore accepté conformément
aux dispositions du paragraphe 1 du présent article. Ces
engagements ultérieurs seront réputés partie
intégrante de la ratification, de l'acceptation ou de l'approbation
et porteront les mêmes effets dès le trentième
jour suivant la date de la notification.
Partie IV
Article 6 - Contrôle du respect des obligations souscrites
Les Parties présenteront les rapports relatifs
à l'application des dispositions de la partie II du présent
Protocole qu'elles auront acceptées dans le cadre
des rapports établis en vertu de l'article 21 de la
Charte.
Partie V
Article 7 - Mise en uvre des engagements souscrits
1.Les dispositions pertinentes des articles 1 à 4
de la partie II du présent Protocole peuvent être
mises en uvre par:
a la législation ou la réglementation;
b des conventions conclues entre employeurs ou organisations
d'employeurs et organisations de travailleurs;
c une combinaison de ces deux méthodes; ou
d d'autres moyens appropriés.
2.Les engagements découlant des articles 2 et 3 de la
partie II du présent Protocole seront considérés
comme remplis dès que ces dispositions seront
appliquées, conformément au paragraphe 1 du
présent article, à la grande majorité des
travailleurs intéressés.
Article 8 - Relations entre la Charte et le présent Protocole
1.Les dispositions du présent Protocole ne portent
pas atteinte aux dispositions de la Charte.
2.Les articles 22 à 32, et 36 de la Charte s'appliquent,
mutatis mutandis, au présent Protocole.
Article 9 - Application territoriale
1.Le présent Protocole s'applique au territoire métropolitain
de chaque Partie. Tout Etat peut, au moment de la signature ou
au moment du dépôt de son
instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation,
préciser, par déclaration faite au Secrétaire
Général du Conseil de l'Europe, le territoire qui
est considéré à cette fin comme son territoire
métropolitain.
2.Tout Etat contractant peut, au moment de la ratification,
de l'acceptation ou de l'approbation du présent Protocole,
ou à tout autre moment par la suite, déclarer, par
notification adressée au Secrétaire Général
du Conseil de l'Europe que le Protocole, en tout ou en partie,
s'appliquera à celui ou à ceux des territoires non
métropolitains désignés dans ladite déclaration
et dont il assure les relations internationales ou dont il assume
la responsabilité internationale. Il spécifiera
dans cette déclaration le ou les articles de la partie
II du présent Protocole qu'il accepte comme obligatoires
en ce qui concerne chacun des territoires désignés
dans la déclaration.
3.Le présent Protocole entrera en vigueur à l'égard
du territoire ou des territoires désignés dans la
déclaration visée au paragraphe précédent
à partir du
trentième jour qui suivra la date à laquelle
le Secrétaire Général aura reçu la
notification de cette déclaration.
4.Toute Partie pourra, à tout moment ultérieur,
déclarer, par notification adressée au Secrétaire
Général du Conseil de l'Europe, que, en ce qui concerne
un ou plusieurs des territoires auxquels le présent Protocole
s'applique en vertu du paragraphe 2 du présent article,
elle accepte comme obligatoire tout article qu'elle n'avait pas
encore accepté en ce qui concerne ce ou ces territoires.
Ces engagements ultérieurs seront réputés
partie intégrante de la déclaration originale en
ce qui concerne le territoire en question et porteront les mêmes
effets à partir du trentième jour qui suivra la
date à laquelle le Secrétaire Général
aura reçu la notification de cette déclaration.
Article 10 - Signature, ratification, acceptation, approbation et entrée en vigueur
1.Le présent Protocole est ouvert à la signature
des Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires de la Charte.
Il sera soumis à ratification, acceptation ou approbation.
Un Etat membre du Conseil de l'Europe ne pourra ratifier, accepter
ou approuver le présent Protocole sans avoir simultanément
ou antérieurement ratifié la Charte. Les instruments
de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés
près le Secrétaire Général du Conseil
de l'Europe.
2.Le présent Protocole entrera en vigueur le trentième
jour suivant la date du dépôt du troisième
instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.
3.Pour tout signataire qui le ratifiera ultérieurement,
le présent Protocole entrera en vigueur le trentième
jour suivant la date du dépôt de son instrument de
ratification, d'acceptation ou d'approbation.
Article 11 - Dénonciation
1.Aucune Partie ne peut dénoncer le présent
Protocole avant l'expiration d'une période de cinq ans
après la date à laquelle le Protocole est entré
en vigueur en ce qui la concerne, ou avant l'expiration de toute
autre période ultérieure de deux ans et, dans tous
les cas, un préavis de six mois sera notifié au
Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
Cette dénonciation n'affecte pas la validité du
Protocole à l'égard des autres Parties sous réserve
que le nombre de celles-ci ne soit jamais inférieur à
trois.
2.Toute Partie peut, aux termes des dispositions énoncées
dans le paragraphe précédent, dénoncer tout
article de la partie II du présent Protocole qu'elle a
accepté, sous réserve que le nombre des articles
auxquels cette Partie est tenue ne soit jamais inférieur
à un.
3.Toute Partie peut dénoncer le présent Protocole
ou tout article de la partie II du Protocole aux conditions prévues
au paragraphe 1 du présent article, en ce qui concerne
tout territoire auquel s'applique le Protocole en vertu d'une
déclaration faite conformément aux paragra-phes
2 et 4 de l'article 9.
4.Toute Partie liée par la Charte et par le présent
Protocole qui aura dénoncé la Charte aux termes
des dispositions du paragraphe 1 de l'article 37 de celle-ci,
sera considérée comme ayant dénoncé
aussi le Protocole.
Article 12 - Notifications
Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil et au Directeur général du Bureau international du travail:
a toute signature;
b le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;
c toute date d'entrée en vigueur du présent Protocole conformément à ses articles 9 et 10;
d tout autre acte, notification ou communication ayant trait au présent Protocole.
Article 13 - Annexe
L'annexe au présent Protocole fait partie intégrante de celui-ci.
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.
Fait à Strasbourg, le 5 mai 1988 en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l'Europe.
ANNEXE AU PROTOCOLE
Portée du Protocole en ce qui concerne les personnes protégées
1.Les personnes visées aux articles 1 à 4
ne comprennent les étrangers que dans la mesure où
ils sont des ressortissants des autres Parties résidant
légalement ou travaillant régulièrement sur
le territoire de la Partie intéressée étant
entendu que les articles susvisés seront interprétés
à la lumière des dispositions des articles 18 et
19 de la Charte. La présente interprétation n'exclut
pas l'extension de droits analogues à d'autres personnes
par l'une quelconque des Parties.
2.Chaque Partie accordera aux réfugiés répondant
à la définition de la Convention de Genève
du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés
et du Protocole du 31 janvier 1967 et résidant régulièrement
sur son territoire, un traitement aussi favorable que possible
et en tout cas non moins favorable que celui auquel elle s'est
engagée en vertu de ces instruments ainsi que de tous autres
accords internationaux existants et applicables aux réfugiés
mentionnés ci-dessus.
3.Chaque Partie accordera aux apatrides répondant à
la définition de la Convention de New York du 28 septembre
1954 relative au statut des apatrides et résidant régulièrement
sur son territoire, un traitement aussi favorable que possible
et en tout cas non moins favorable que celui auquel elle s'est
engagée en vertu de cet instrument ainsi que de tous autres
accords internationaux existants et applicables aux apatrides
mentionnés ci-dessus.
Article 1
Il est entendu que les matières relevant de la
sécurité sociale, ainsi que les dispositions relatives
aux prestations de chômage, aux prestations de
vieillesse et aux prestations de survivants, peuvent être
exclues du champ d'application de cet article.
Article 1, paragraphe 4
Cette disposition ne saurait être interprétée
comme obligeant les Parties à arrêter par la voie
législative ou réglementaire la liste des activités
professionnelles qui, en raison de leur nature ou des conditions
de leur exercice, peuvent être réservées à
des travailleurs d'un sexe déterminé.
Articles 2 et 3
1.Aux fins d'application de ces articles, les termes «représentants
des travailleurs» désignent des personnes reconnues
comme telles par la législation ou la pratique nationales.
2.Les termes «la législation et la pratique nationales»
visent, selon le cas, outre les lois et les règlements,
les conventions collectives, d'autres accords entre les employeurs
et les représentants des travailleurs, les usages et les
décisions judiciaires pertinentes.
3.Aux fins d'application de ces articles, le terme «entreprise»
est interprété comme visant un ensemble d'éléments
matériels et immatériels, ayant ou non la personnalité
juridique, destiné à la production de biens ou à
la prestation de services, dans un but économique, et disposant
du pouvoir de décision quant à son comportement
sur le marché.
4.Il est entendu que les communautés religieuses et
leurs institutions peuvent être exclues de l'application
de ces articles même lorsque ces institutions sont des entreprises
au sens du paragraphe 3. Les établissements poursuivant
des activités inspirées par certains idéaux
ou guidées par certains concepts moraux, idéaux
et concepts protégés par la législation nationale,
peuvent être exclus de l'application de ces articles dans
la mesure nécessaire pour protéger l'orientation
de l'entreprise.
5.Il est entendu que, lorsque dans un Etat les droits énoncés
dans les articles 2 et 3 sont exercés dans les divers établissements
de l'entreprise, la Partie
concernée doit être considérée comme
satisfaisant aux obligations découlant de ces dispositions.
Article 3
Cette disposition n'affecte ni les pouvoirs et obligations
des Etats en matière d'adoption de règlements concernant
l'hygiène et la sécurité sur les lieux de
travail ni les compétences et responsabilités
des organes chargés de surveiller le respect de leur application.
Les termes «services et facilités sociaux
et socioculturels» visent les services et facilités
de nature sociale et/ou culturelle qu'offrent certaines entreprises
aux travailleurs tels qu'une assistance sociale, des terrains
de sport, des salles d'allaitement, des bibliothèques,
des colonies de vacances, etc.
Article 4 , paragraphe 1
Aux fins d'application de ce paragraphe, l'expression
«le plus longtemps possible» se réfère
aux capacités physiques, psychologiques et intellectuelles
de la personne âgée.
Article 7
Il est entendu que les travailleurs exclus conformément
au paragraphe 2 de l'article 2 et au paragraphe 2 de l'article
3 ne sont pas pris en compte lors de l'établissement du
nombre des travailleurs intéressés.