2. Le Comité fait observer à ce sujet que les droits prévus à l'article 24 ne sont pas les seuls que le Pacte reconnaît aux enfants, qui bénéficient aussi, en tant qu'individus, de tous les autres droits civils énoncés dans cet instrument. Certaines des dispositions du Pacte, en établissant un droit, indiquent expressément aux Etats les mesures qu'ils doivent adopter pour que les mineurs soient mieux protégés que les adultes. C'est ainsi qu'en ce qui concerne le droit à la vie, la sentence de mort ne peut être prononcée contre les mineurs de 18 ans. De même, s'ils sont légalement privés de la liberté, les jeunes prévenus doivent être séparés des adultes, et leur cas doit être décidé aussi rapidement que possible; les jeunes délinquants condamnés doivent être soumis à un régime pénitentiaire où ils sont séparés des adultes et qui est approprié à leur âge et à leur statut légal, le but étant de les amener à se réformer et de favoriser leur réinsertion sociale. Il est aussi prévu qu'un droit garanti par le Pacte peut être restreint lorsqu'il s'agit de protéger des enfants, pourvu que cette restriction soit justifiée: ainsi, lorsque l'intérêt d'un mineur l'exige, il est permis de faire exception à la règle qui commande que tout jugement civil ou pénal soit public.
3. Dans la plupart des cas, toutefois, les mesures à adopter ne sont pas précisées dans le Pacte, et il appartient à chaque Etat de les déterminer, en fonction des exigences de la protection des enfants qui se trouvent sur son territoire ou relèvent de sa compétence. Le Comité rappelle à cet égard que ces mesures, bien que destinées en premier lieu à assurer aux enfants le plein exercice des droits sur lesquels porte le Pacte, peuvent également être d'ordre économique, social ou culturel. Ainsi, par exemple, toutes les mesures possibles devraient être prises dans les domaines économique et social pour réduire la mortalité infantile, faire disparaître la malnutrition chez les enfants et éviter que ceux-ci ne soient victimes d'actes de violence ou de traitements cruels et inhumains, ou qu'on ne les exploite en les obligeant à exécuter un travail forcé ou à se livrer à la prostitution, ou en les utilisant pour le trafic illicite de stupéfiants, ou de toute autre façon. Dans le domaine culturel, tout devrait être fait pour favoriser l'épanouissement de la personnalité des enfants et leur assurer un degré d'instruction qui leur permette d'exercer les droits visés par le Pacte, notamment la liberté d'opinion et d'expression. En outre, le Comité attire l'attention des Etats parties sur la nécessité d'inclure dans leurs rapports des informations sur les mesures adoptées pour assurer qu'aucun enfant ne participe directement à un conflit armé.
4. Tout enfant, en raison de son état de mineur, a droit à des mesures spéciales de protection. L'âge auquel l'enfant devient majeur n'est pas indiqué par le Pacte, et il revient à chaque Etat partie de le fixer, compte tenu des conditions sociales et culturelles. A cet égard, les Etats devraient préciser dans leurs rapports l'âge de la majorité civile et l'âge à partir duquel un enfant devient pénalement responsable. Les Etats devraient également préciser l'âge à partir duquel l'enfant est légalement autorisé à travailler, et l'âge à partir duquel l'enfant est assimilé aux adultes en matière de droit du travail. En outre, les Etats devraient préciser l'âge à partir duquel l'enfant est considéré adulte aux fins de l'application des paragraphes 2 et 3 de l'article 10. Toutefois, le Comité observe que l'âge de la majorité ne devrait pas être trop bas et que, dans tous les cas, un Etat partie ne peut pas se dégager de ses obligations au titre du Pacte concernant les personnes de moins de 18 ans, même si elles ont atteint l'âge de la majorité selon le droit interne.
5. Le Pacte stipule que les enfants doivent être protégés contre toute discrimination, quelle que soit la raison sur laquelle celle-ci se fonde: race, couleur, sexe, langue, religion, origine nationale ou sociale, fortune ou naissance. Le Comité observe à cet égard que, tandis que l'obligation de non-discrimination à leur égard découle de l'article 2 en ce qui concerne l'ensemble des droits prévus par le Pacte, et de l'article 26 en ce qui concerne l'égalité devant la loi, la clause de non-discrimination que renferme l'article 24 porte très précisément sur les mesures de protection les concernant spécifiquement, telles qu'elles sont prévues dans cette même disposition. Les Etats devraient indiquer dans leurs rapports comment leur législation et leur pratique assurent que les mesures de protection tendent à abolir toute discrimination dans tous les domaines, y compris en matière successorale, et notamment toute discrimination entre les enfants qui sont des nationaux de l'Etat et les enfants étrangers, et entre enfants légitimes et enfants nés hors mariage.
6. L'obligation d'assurer aux enfants la protection nécessaire incombe à la famille, à la société et à l'Etat. Bien que le Pacte n'indique pas comment doit être partagée cette obligation, c'est en premier lieu à la famille, interprétée au sens large de manière à comprendre toutes les personnes qui s'y rattachent dans la société de l'Etat, et tout particulièrement aux parents qu'il incombe de créer des conditions qui favorisent l'épanouissement harmonieux de la personnalité de l'enfant et le fassent jouir des droits prévus par le Pacte. Toutefois, puisqu'il est courant que le père et la mère aient une activité professionnelle hors du foyer, les Etats parties devraient préciser dans leurs rapports comment la société, ses institutions et l'Etat font face à leurs responsabilités et aident la famille à assurer la protection de l'enfant. D'autre part, dans le cas où les parents et la famille manquent gravement à leurs devoirs, maltraitent l'enfant et le négligent, l'Etat doit intervenir pour restreindre l'autorité parentale, et, lorsque les circonstances l'exigent, l'enfant peut être séparé des siens. En cas de dissolution du mariage, des dispositions dans lesquelles la considération dominante est l'intérêt de l'enfant doivent être prises afin d'assurer à ce dernier la protection nécessaire et de lui garantir autant que possible des relations personnelles avec ses deux parents. Le Comité pense qu'il serait utile que, dans leurs rapports, les Etats fournissent des renseignements sur les mesures spécialement adoptées pour protéger les enfants abandonnés ou séparés de leur milieu familial et pour leur permettre de se développer dans des conditions analogues à celles qu'offre le milieu familial.
7. Le paragraphe 2 de l'article 24 stipule que tout enfant a le droit d'être enregistré immédiatement après sa naissance et de recevoir un nom. Selon le Comité, cette disposition doit être interprétée comme étroitement liée à celle qui établit que l'enfant a droit à des mesures spéciales de protection et qui vise à faire reconnaître sa personnalité juridique. Il est particulièrement important de garantir le droit à un nom dans le cas des enfants nés hors mariage. L'obligation d'enregistrer les enfants à la naissance est conçue principalement pour réduire les risques d'enlèvement, de vente ou de traite d'enfants ou les autres traitements contraires aux droits prévus dans le Pacte. Les Etats parties devraient indiquer avec précision dans leurs rapports les mesures conçues pour que soient enregistrés dès la naissance des enfants nés sur leur territoire.
8. De même, dans le cadre de la protection à accorder aux enfants, il convient d'accorder une attention particulière au droit de tout enfant à la nationalité, énoncé au paragraphe 3 de l'article 24. Cette disposition, qui a pour but d'éviter qu'un enfant ne soit moins protégé par la société et l'Etat s'il est apatride, n'impose pas pour autant aux Etats parties de donner en toutes circonstances leur nationalité à tout enfant né sur leur territoire. Cependant, les Etats sont tenus d'adopter toutes les mesures appropriées, sur le plan interne et en coopération avec les autres Etats, pour que tout enfant ait une nationalité dès sa naissance. Ils ne devraient tolérer dans la législation interne en matière d'acquisition de la nationalité aucune discrimination qui distingue entre enfants légitimes et enfants nés hors mariage ou de parents apatrides, ou qui soit motivée par la nationalité des parents ou de l'un d'entre eux. Les rapports présentés devraient toujours mentionner les mesures adoptées pour assurer aux enfants une nationalité.