1. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique du Costa Rica (CCPR/C/70/Add.4) à ses 1298ème, 1299ème et 1300ème séances, tenues les 25 et 26 mars (CCPR/C/SR.1298, 1299 et 1300) et adopté à sa 1315ème séance (cinquantième session), tenue le 6 avril 1994 les observations suivantes :
2. Le Comité se félicite de l'occasion qui lui est donnée de poursuivre le dialogue avec l'Etat partie, mais note avec regret que le rapport ne contient pas suffisamment d'informations sur la manière dont le Pacte est appliqué en pratique. Le Comité note avec satisfaction que la délégation a fourni des renseignements utiles sur plusieurs points qui n'avaient pas été abordés dans le rapport.
3. Le Comité se déclare préoccupé par le fait que l'Etat partie n'a pas fait le nécessaire pour s'acquitter comme il convient de l'obligation de présenter des rapports qui lui est faite à l'article 40 du Pacte. A cet égard, il regrette que les observations qu'il avait formulées à l'occasion de l'examen du deuxième rapport périodique n'aient pas été prises en considération lors de l'établissement du troisième rapport périodique. En outre, le troisième rapport périodique ne suit pas du tout les lignes directrices fixées par le Comité pour l'établissement des rapports. Le Comité est préoccupé également par le fait que le rapport n'a pas été suffisamment diffusé au Costa Rica et qu'il n'a pas été mis à la disposition du public ou des organisations de défense des droits de l'homme au Costa Rica préalablement à son examen par le Comité.
4. Le Comité note qu'il n'a pas été indiqué dans le rapport quels étaient les facteurs et les difficultés qui avaient une incidence sur l'application du Pacte.
5. Le Comité présume que l'accroissement de la criminalité a sensiblement accru le travail des tribunaux.
6. Le Comité prend note avec satisfaction du niveau atteint dans la jouissance des droits de l'homme au Costa Rica. Il note avec satisfaction les mesures que le gouvernement a prises pour protéger les droits de l'homme au niveau national, notamment en créant des services de défense des droits de l'homme, de la femme, de l'enfant et des détenus, et, plus récemment, de défense des habitants. Le Comité se déclare particulièrement satisfait de la bonne volonté que le gouvernement a manifestée pour assurer une protection efficace des droits de l'homme et de l'esprit progressiste dont il a fait preuve lorsqu'il a incorporé les normes internationales relatives aux droits de l'homme dans sa législation nationale. Le Comité sait gré au Costa Rica d'avoir contribué pour beaucoup à renforcer les efforts déployés sur le plan international pour promouvoir et protéger les droits de l'homme.
7. Le Comité note avec inquiétude que, l'Etat partie ayant donné des renseignements insuffisants, il ne ressort pas clairement du rapport dans quelle mesure les droits des détenus sont effectivement protégés dans la pratique, en particulier le droit à la liberté et à la sécurité de la personne et le droit d'introduire un recours. A cet égard, il y a lieu de s'interroger sur l'actuel niveau de protection des détenus compte tenu de la durée de la détention préventive. Il y a lieu de se demander aussi si la police et les forces de sécurité sont suffisamment bien informées des normes à respecter en matière de droits de l'homme, en particulier de celles que prévoient le Pacte, et si leurs activités sont suffisamment bien surveillées.
8. Le Comité note avec préoccupation que, dans le domaine du droit du travail, de nombreuses règles, en particulier celles qui régissent la liberté d'association, telle qu'elle est consacrée à l'article 22 du Pacte, ne sont pas conformes aux normes internationales. Il note en particulier que la législation en vigueur ne protège pas comme il convient les droits des travailleurs employés par de petites entreprises agricoles, notamment lorsqu'ils entendent constituer des syndicats dans les plantations de café et de canne à sucre. En outre, il est à craindre que le système des organisations de "solidarité" (asociaciones solidaristas) n'entrave la jouissance effective de ces droits.
9. En ce qui concerne l'article 18 du Pacte, le Comité s'inquiète de la prééminence accordée à l'Eglise catholique romaine dans la loi et l'administration. Il est également préoccupé par certaines dispositions de la législation (notamment l'article 34 de la Ley de Carrera Docente), qui confèrent à la Conférence épiscopale nationale le pouvoir d'empêcher que des religions autres que le catholicisme soient enseignées dans les écoles publiques et que l'enseignement religieux soit dispensé par des non-catholiques dans ces écoles.
10. Le Comité note avec préoccupation que de nombreuses lois visant à promouvoir l'égalité entre les sexes n'ont pas produit les effets attendus et qu'il y a encore beaucoup de progrès à faire dans ce domaine.
11. Le Comité recommande que les mesures actuelles de protection des droits des détenus soient renforcées. A cet égard, il importe d'être particulièrement vigilant en ce qui concerne la détention préventive et d'entreprendre immédiatement une enquête lorsque des abus sont signalés. Le Comité estime important que la police et les autres forces de sécurité soient suffisamment bien informées des dispositions pertinentes du Pacte ainsi que des autres règles internationales applicables en matière de droits de l'homme, en particulier l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus.
12. Le Comité suggère que le gouvernement envisage des mesures pour revoir et, s'il y a lieu, modifier la législation du travail pour que tous les travailleurs au Costa Rica jouissent de la liberté d'association, telle qu'elle est garantie à l'article 22 du Pacte, et notamment que les travailleurs employés par de petites entreprises agricoles puissent s'organiser comme ils l'entendent.
13. Le Comité recommande que l'Etat partie prenne des mesures pour garantir, sans discrimination, l'exercice du droit à l'enseignement religieux, en particulier l'enseignement de religions autres que le catholicisme. Les pratiques actuelles telles que celle qui consiste à soumettre le choix des personnes chargées de l'instruction religieuse à l'autorisation de la Conférence épiscopale nationale sont incompatibles avec le Pacte.
14. Le Comité recommande que de nouvelles mesures soient prises pour lutter contre l'inégalité entre les sexes et améliorer la situation des femmes au Costa Rica.
15. Le Comité demande instamment au gouvernement, lorsqu'il rédigera son quatrième rapport périodique, de se conformer aux lignes directrices fixées pour l'établissement des rapports des Etats parties et de tenir compte des préoccupations exprimées lors de l'examen de son troisième rapport périodique. Le Comité souligne que le Costa Rica devrait être préparé à faire rapport sur un dialogue concernant chaque article du Pacte; et qu'il n'est pas dispensé de cette obligation parce qu'il estime avoir communiqué une partie des renseignements pertinents à un autre organe créé en vertu d'un instrument international relatif aux droits de l'homme. Le quatrième rapport périodique devrait, notamment, donner des renseignements détaillés et à jour sur la jouissance effective de chacun des droits protégés par le Pacte, y compris le droit énoncé à l'article 27, et sur les mesures qui ont été prises pendant la période faisant l'objet du rapport pour que le Pacte soit mieux appliqué. Le Comité insiste sur le fait que l'Etat partie ne devrait pas sous-estimer l'importance des obligations qui lui sont faites à l'article 40 du Pacte et devrait s'en acquitter comme il convient. A cet égard, l'attention est appelée sur le fait que le Centre pour les droits de l'homme peut dispenser des conseils et une formation appropriés en ce qui concerne la présentation des rapports.
16. Le Comité souligne qu'il importe d'associer les organisations professionnelles et les organisations non gouvernementales compétentes, les médias ainsi que l'opinion publique aux efforts qui sont faits pour mieux appliquer le Pacte. A cette fin, l'Etat partie devrait faire le nécessaire pour que les rapports qu'il établit en application de l'article 40 du Pacte soient rendus publics et que tout le monde puisse facilement en prendre connaissance au Costa Rica bien avant que le Comité ne les examine. Des mesures supplémentaires devraient être prises pour faire mieux connaître les dispositions du Pacte aux magistrats, aux avocats, aux enseignants et à l'opinion publique.