Convention Abbreviation: CCPR
COMITE DES DROITS DE L'HOMME
1. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de la Hongrie (CCPR/C/64/Add.2 et HRI/CORE/1/Add.11) de ses 1240ème à 1242ème séances, les 15 et 16 juillet 1993, et adopté à sa 1259ème séance (quarante-huitième session), le 28 juillet 1993 les observations ci-après :
2. Le Comité accueille avec intérêt le troisième rapport périodique de la Hongrie et exprime son appréciation à l'Etat partie pour le dialogue constructif engagé avec le Comité par l'intermédiaire d'une délégation de haut rang. Ce rapport traite des changements importants survenus dans ce pays depuis sa transition vers une démocratie multipartite. Bien que le rapport lui-même ne fournisse pas d'informations suffisantes sur l'application du Pacte dans la pratique et sur les facteurs et les difficultés pouvant l'entraver, les renseignements complémentaires très complets fournis dans la déclaration introductive et dans les réponses de la délégation hongroise aux questions soulevées par le Comité ont permis à ce dernier de se faire une idée plus nette de la situation globale dans le pays en ce qui concerne le respect des obligations découlant du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
3. Le Comité note avec satisfaction que des réformes étendues sont en cours en Hongrie dans le sens du développement d'un nouvel ordre juridique et de la création d'institutions démocratiques. Le nouveau cadre juridique qui est en cours d'établissement permet une reconnaissance accrue des normes en matière de droits de l'homme énoncées dans le Pacte et une meilleure application des obligations découlant de ce dernier.
4. Le Comité prend note avec une satisfaction particulière de l'adoption récente d'une loi sur les minorités nationales et ethniques, de la disposition selon laquelle les ressortissants étrangers résidant en permanence en Hongrie sont autorisés à voter lors des élections locales, des modifications législatives récemment introduites pour assurer un meilleur accès aux tribunaux, de la loi sur l'ombudsman parlementaire pour les droits civils, ainsi que du projet de législation sur les états d'exception qui tient compte des dispositions de l'article 4 du Pacte. Ces changements et d'autres changements récents montrent clairement que le Gouvernement hongrois est déterminé à s'acquitter pleinement de ses obligations en vertu du Pacte et à établir les mécanismes juridiques nécessaires à la protection et à la jouissance des droits fondamentaux de l'homme.
5. Le Comité note que les survivances du régime autoritaire ne sont sans doute pas faciles à éliminer et reconnaît qu'il reste beaucoup à faire, particulièrement dans les domaines de l'éducation et de l'information, pour familiariser davantage les juges, les avocats en exercice, les responsables de l'application des lois et le grand public avec les droits énoncés dans le Pacte. Le Comité invite instamment l'Etat partie à intensifier ses efforts pour faire en sorte que les divers problèmes rencontrés pendant l'actuelle période de transition ne retardent pas la mise en oeuvre des droits civils et politiques, en particulier du droit à la liberté d'association et du droit de participer à la conduite des affaires publiques.
6. Le Comité se déclare préoccupé par le fait que la Constitution et la législation interne n'incorporent pas tous les droits énoncés dans le Pacte et que le statut du Pacte dans le système juridique hongrois n'est pas clairement défini. En particulier, il craint un conflit éventuel entre une disposition du Pacte qui n'a pas été incorporée à la Constitution et une disposition du droit interne.
7. Les dispositions de la législation hongroise relatives à la détention préventive et à la procédure selon laquelle les accusés sont traduits en justice l'inquiètent également, de même que la durée excessive de la garde à vue. Ces dispositions ne sont pas entièrement conformes à celles, qui leur correspondent, des articles 9 et 14 du Pacte. L'absence de tribunal administratif est aussi une question préoccupante; il y a lieu de noter toutefois qu'il peut être fait appel de toutes les décisions administratives devant les tribunaux ordinaires et que le Parlement est actuellement saisi d'un projet de loi concernant la création de tribunaux administratifs.
8. De même, le Comité souhaite exprimer sa préoccupation au sujet de l'emploi d'une force excessive par la police, particulièrement contre des étrangers résidant en Hongrie et des demandeurs d'asile placés en détention. Le Comité est préoccupé en outre par les motifs pour lesquels la délivrance de passeports et les voyages à l'étranger peuvent être restreints, en particulier par la disposition concernant les détenteurs de secrets d'Etat.
9. Des préoccupations ont également été exprimées au sujet des dispositions permettant l'expulsion des étrangers et de l'étendue du pouvoir discrétionnaire dans l'application de la loi sur l'immigration. Un autre sujet de préoccupation est la participation très faible des femmes au processus de décision et à la conduite des affaires publiques.
10. Le Comité se déclare enfin préoccupé par la persistance de préjugés et d'attitudes discriminatoires à l'encontre de certaines minorités, notamment les Roms (Gitans) ainsi que par quelques incidents découlant de l'hostilité et la xénophobie manifestées à l'égard d'étrangers.
11. Le Comité recommande que l'Etat partie veille à ce que les dispositions du Pacte soient pleinement incorporées au droit interne ou soient directement suivies d'effet. Il souligne aussi que les textes du Pacte et du premier Protocole facultatif devraient être largement diffusés afin que les magistrats, les services publics compétents et le grand public aient pleinement conscience des droits consacrés par les dispositions de ces instruments. Une formation adéquate en matière de normes relatives aux droits de l'homme devrait être dispensée aux membres du corps judiciaire et du corps d'avocats ainsi qu'aux membres de la police et du personnel pénitentiaire et l'enseignement des droits de l'homme devrait figurer dans les programmes scolaires et universitaires. Des mesures positives devraient être prises pour assurer la participation des femmes à la vie politique et à la prise de décisions. Il faudrait que les lois concernant l'entrée, la résidence, la détention et l'expulsion des étrangers soient complètement revues. Le Comité recommande aussi que, dans la législation actuelle et future et dans la pratique, il soit veillé à ce que toutes les limitations à l'exercice des droits de l'homme soient strictement conformes à celles qui sont admises par le Pacte.