5. Le Comité prend note avec satisfaction des mesures prises par l'État partie pour lutter contre la traite des femmes aux fins de prostitution, en particulier de l'adoption en juillet 2000 de la loi interdisant la traite et des poursuites engagées contre les trafiquants depuis cette date.
6. Le Comité prend note des efforts déployés pour relever le niveau d'instruction des communautés arabe, druze et bédouine en Israël. Il prend note en particulier de l'application de la loi sur l'éducation spécialisée et de l'amendement à la loi sur l'enseignement obligatoire (2000).
7. Le Comité prend note également des informations fournies par l'État partie sur les mesures importantes prises en vue du développement du secteur arabe, en particulier dans le cadre du Plan de développement pour la période 2001-2004.
8. Le Comité se félicite de la législation adoptée par l'État partie en faveur des personnes handicapées, en particulier de la promulgation de la loi sur l'égalité de droits des personnes handicapées (1998). Il exprime l'espoir que l'on interviendra dès que possible dans les domaines où, comme l'a reconnu la délégation, les droits des handicapés ne sont pas respectés actuellement et où des améliorations sont nécessaires.
9. Le Comité constate que l'État partie s'efforce d'assurer de meilleures conditions aux travailleurs migrants. Il se félicite de l'adoption de l'amendement à la loi sur les travailleurs étrangers et de l'aggravation des peines infligées aux employeurs qui ne respectent pas la loi. Il note aussi avec satisfaction que les travailleurs migrants ont librement accès aux tribunaux du travail et que des informations leur sont fournies sur leurs droits en plusieurs langues étrangères.
10. Le Comité accueille avec satisfaction l'arrêt de la Cour suprême de septembre 1999 par lequel celle-ci a invalidé les anciennes directives gouvernementales autorisant le recours à des «pressions physiques modérées» au cours des interrogatoires, et dans lequel elle a estimé que l'Agence israélienne de sécurité (AIS) n'est pas habilitée en vertu de la législation israélienne à recourir à la force physique lors des interrogatoires.
D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
11. Le Comité a pris note de la position de l'État partie, qui considère que le Pacte ne s'applique pas au-delà de son propre territoire, notamment en Cisjordanie et à Gaza, en particulier tant qu'il règnera une situation de conflit armé dans ces zones. Le Comité maintient l'opinion, formulée précédemment au paragraphe 10 de ses observations finales sur le rapport initial d'Israël (CCPR/C/79/Add.93 du 18 août 1998), selon laquelle l'applicabilité des règles du droit international humanitaire en période de conflit armé ne fait pas obstacle en soi à l'application du Pacte, y compris de l'article 4 qui traite du cas où un danger public menace la vie de la nation. L'applicabilité des règles du droit international humanitaire ne fait pas obstacle non plus à la responsabilité que doivent assumer les États parties, en vertu du paragraphe 1 de l'article 2 du Pacte, pour les actes accomplis par leurs autorités hors de leur propre territoire, y compris dans des territoires occupés. En conséquence, le Comité réaffirme que, dans les circonstances actuelles, les dispositions du Pacte s'appliquent au profit de la population des territoires occupés, en ce qui concerne tous les actes accomplis par les autorités ou les agents de l'État partie dans ces territoires, qui compromettent la jouissance des droits consacrés dans le Pacte et relèvent de la responsabilité de l'État d'Israël conformément aux principes du droit international public.
L'État partie devrait reconsidérer sa position et inclure dans son troisième rapport périodique tous les renseignements pertinents concernant l'application du Pacte dans les territoires occupés du fait de ses activités dans ces territoires.
12. Tout en se félicitant de la décision de l'État partie de réexaminer la nécessité de maintenir l'état d'urgence proclamé et de le proroger sur une base annuelle et non indéfiniment, le Comité reste préoccupé par les mesures radicales appliquées pendant l'état d'urgence, qui semblent déroger à d'autres dispositions du Pacte que l'article 9, lequel fait l'objet d'une dérogation que l'État partie a signalée au moment de la ratification. De l'avis du Comité, ces dérogations vont au-delà de ce qui serait licite en vertu des dispositions du Pacte qui autorisent des restrictions aux droits (par exemple les articles 12, par. 3, 19, par. 3, et 21, par. 3). Quant aux mesures qui dérogent à l'article 9 lui-même, le Comité est préoccupé par le recours fréquent à diverses formes de détention administrative, en particulier de Palestiniens des territoires occupés, auxquelles sont associées des restrictions au droit de consulter un avocat et d'être pleinement informé des motifs de la détention. La possibilité d'un contrôle judiciaire effectif est ainsi limitée, ce qui constitue une atteinte au droit à la protection contre la torture et d'autres traitements inhumains interdits par l'article 7 et une dérogation à l'article 9 qui, de l'avis du Comité, va au-delà de ce qui est licite selon l'article 4. À cet égard, le Comité renvoie à ses précédentes observations finales sur le rapport d'Israël et à son Observation générale no 29.
L'État partie devrait achever dès que possible le réexamen de la législation relative aux états d'exception entrepris par le Ministère de la justice. À cet égard et en attendant l'adoption d'une loi appropriée, l'État partie devrait réexaminer les modalités de renouvellement de l'état d'urgence et préciser à quelles dispositions du Pacte il souhaite déroger dans la stricte mesure où la situation l'exige (art. 4).
13. Le Comité craint que le recours à la détention prolongée sans possibilité de consulter un avocat ou de communiquer avec d'autres personnes de l'extérieur ne constitue une violation des articles du Pacte (art. 7, 9, 10 et 14, par. 3 b)).
L'État partie devrait veiller à ce que nul ne soit détenu pendant plus de 48 heures sans pouvoir consulter un avocat.
14. Le Comité juge préoccupant le manque de précision des définitions qui figurent dans la législation et les règlements antiterroristes israéliens dont l'application est soumise au contrôle des tribunaux mais qui semblent être à plusieurs égards en contradiction avec le principe de légalité en raison de la terminologie ambiguë employée et de l'utilisation de plusieurs présomptions considérées comme preuves au détriment du suspect. Cela a des effets néfastes sur les droits protégés par l'article 15 du Pacte, auquel il ne peut être dérogé en vertu du paragraphe 2 de l'article 4 du Pacte.
L'État partie devrait veiller à ce que les mesures visant à lutter contre le terrorisme, qu'elles aient été adoptées en application de la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité ou dans le contexte du conflit armé en cours, soient pleinement conformes au Pacte.
15. Le Comité est préoccupé par ce que l'État partie appelle des «targeted killings» (opérations meurtrières ciblées) contre les personnes que ce dernier soupçonne d'être des terroristes dans les territoires occupés. Cette pratique serait utilisée, du moins en partie, comme mesure de dissuasion ou de sanction, ce qui soulève des questions au titre de l'article 6. Tout en prenant note des observations de la délégation concernant le respect du principe de proportionnalité dans toute action menée en réaction à des activités terroristes contre des civils et du fait qu'elle affirme que seules les personnes participant directement aux hostilités ont été visées, le Comité reste préoccupé par la nature et l'ampleur des opérations menées par les forces de défense israéliennes (FDI) en riposte aux attentats terroristes palestiniens.
L'État partie ne devrait pas utiliser ces opérations meurtrières ciblées comme mesure de dissuasion ou de sanction. Il devrait veiller à ce que la plus haute importance soit accordée au principe de proportionnalité dans toutes les opérations qu'il mène en riposte aux menaces et aux activités terroristes. La politique de l'État en la matière devrait être clairement énoncée dans des directives adressées aux commandants militaires régionaux et toutes les plaintes relatives à un usage excessif de la force devraient donner rapidement lieu à une enquête effectuée par un organe indépendant. Avant de recourir à l'emploi d'une force meurtrière, tous les moyens permettant d'arrêter une personne soupçonnée d'être en train de commettre un acte de terrorisme devraient être épuisés.
16. Tout en étant pleinement conscient de la menace que représentent les activités terroristes dans les territoires occupés, le Comité déplore les actions à caractère en partie punitif selon lui que constituent les démolitions de biens et d'habitations dans les territoires occupés. À son avis, la démolition des biens et des maisons des familles, dont certains membres ont été ou sont soupçonnés d'être impliqués dans des activités terroristes ou des attentats-suicide à la bombe, est contraire à l'obligation de l'État partie de garantir sans discrimination le droit de ne pas être l'objet d'immixtions arbitraires dans son domicile (art. 17), le droit de choisir librement sa résidence (art. 12), l'égalité de tous devant la loi et le droit de toutes les personnes à une égale protection de la loi (art. 26) et le droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels et inhumains (art. 7).
L'État partie devrait mettre immédiatement un terme à cette pratique.
17. Le Comité est préoccupé par la pratique des FDI consistant à utiliser les habitants des territoires occupés comme «volontaires» ou boucliers lors d'opérations militaires, en particulier pour fouiller les maisons et obtenir la reddition des personnes soupçonnées par l'État partie d'être des terroristes.
L'État partie ne devrait plus avoir recours à cette pratique, qui aboutit souvent à une privation arbitraire de la vie (art. 6).
18. Le Comité note avec préoccupation que des méthodes d'interrogatoire incompatibles avec l'article 7 du Pacte seraient encore fréquemment utilisées et que l'argument de la «nécessité», qui n'est pas reconnu par le Pacte, est souvent invoqué et retenu pour justifier les agissements de l'AIS au cours des enquêtes.
L'État partie devrait revoir l'utilisation qu'il fait de l'argument de la «nécessité» et présenter des informations détaillées sur la question dans son prochain rapport périodique au Comité, notamment des statistiques détaillées sur la période écoulée depuis l'examen du rapport initial. Il devrait veiller à ce que les cas de mauvais traitements et de torture fassent l'objet d'enquêtes approfondies par des mécanismes véritablement indépendants et à ce que les responsables de ces actes soient poursuivis. L'État partie devrait fournir des statistiques pour la période allant de 2000 à ce jour indiquant combien de plaintes ont été déposées auprès du Procureur général, combien de plaintes ont été rejetées parce qu'elles n'étaient pas fondées ou parce que l'argument de la «nécessité» a été retenu, et combien de plaintes ont été acceptées et avec quelles conséquences pour les auteurs des actes incriminés.
19. Tout en étant conscient encore une fois des sérieuses préoccupations de l'État partie en matière de sécurité qui ont conduit récemment à des restrictions au droit à la liberté de circulation, par exemple par l'imposition de couvre-feux ou la mise en place d'un très grand nombre de barrages routiers, le Comité craint que la création de la «Zone de séparation» au moyen d'une clôture et, en partie, d'un mur, au-delà de la ligne verte n'impose de nouvelles restrictions d'une sévérité injustifiée au droit à la liberté de circulation, en particulier des Palestiniens, à l'intérieur des territoires occupés. La «Zone de séparation» a de graves conséquences dans pratiquement tous les secteurs de la vie des Palestiniens; en particulier, les restrictions très importantes à la liberté de circulation rendent plus difficile l'accès aux soins de santé, notamment aux services médicaux d'urgence, ainsi que l'accès à l'eau. Le Comité considère que ces restrictions sont incompatibles avec l'article 12 du Pacte.
L'État partie devrait respecter le droit à la liberté de circulation garanti par l'article 12. Il devrait arrêter les travaux de construction en vue de la création d'une «Zone de séparation» à l'intérieur des territoires occupés.
20. Le Comité juge préoccupantes les déclarations publiques faites par plusieurs personnalités israéliennes éminentes à propos des Arabes, qui peuvent être considérées comme un appel à la haine raciale et religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité et à la violence.
L'État partie devrait prendre les mesures nécessaires pour que ces actes fassent l'objet d'une enquête et que leurs auteurs soient poursuivis et punis de façon à garantir le respect du paragraphe 2 de l'article 20 du Pacte.
21. Le Comité est préoccupé par la décision de suspension temporaire prise par Israël en mai 2002, transformée en loi sur la nationalité et l'entrée en Israël (Suspension temporaire) le 31 juillet 2003, qui suspend pendant une période d'un an renouvelable la possibilité de regroupement familial, sous réserve d'exceptions limitées et subjectives, en particulier dans les cas de mariages entre citoyens israéliens et personnes résidant en Cisjordanie et à Gaza. Il note avec préoccupation que des milliers de familles et de mariages ont déjà pâti de la décision de suspension de mai 2002.
L'État partie devrait abroger la loi sur la nationalité et l'entrée en Israël (Suspension temporaire) du 31 juillet 2003, qui soulève de graves questions au titre des articles 17, 23 et 26 du Pacte. Il devrait reconsidérer sa politique en vue de faciliter le regroupement familial de tous les citoyens et résidents permanents. Il devrait fournir des statistiques détaillées sur cette question pour la période écoulée depuis l'examen du rapport initial.
22. Le Comité est préoccupé par les critères fixés dans la loi de 1952 sur la nationalité permettant la révocation de la nationalité israélienne, notamment du point de vue de son application aux Arabes israéliens. Le Comité s'interroge sur la compatibilité avec le Pacte, en particulier son article 24, de la révocation de la nationalité de citoyens israéliens.
L'État partie devrait veiller à ce que toute modification de la législation relative à la nationalité soit conforme à l'article 24 du Pacte.
23. Nonobstant les observations figurant aux paragraphes 4 et 7 ci-dessus, le Comité note avec préoccupation que le pourcentage d'Israéliens arabes dans la fonction publique et le secteur public demeure très faible et que leur représentation, en particulier celle des femmes israéliennes arabes, n'a que lentement augmenté (art. 3, 25 et 26).
L'État partie devrait adopter des mesures ciblées en vue d'accroître la représentation des femmes israéliennes arabes dans le secteur public et d'accélérer les progrès vers l'égalité.
24. Tout en prenant note de l'arrêt rendu par la Cour suprême le 30 décembre 2002 dans l'affaire des huit réservistes des FDI (arrêt HC 7622/02), le Comité demeure préoccupé par la législation, les critères appliqués et les décisions généralement défavorables rendues dans la pratique par les tribunaux militaires dans les affaires concernant des objecteurs de conscience (art. 18).
L'État partie devrait revoir la législation, les critères appliqués et les décisions rendues par les tribunaux dans les affaires d'objection de conscience, de façon à garantir le respect de l'article 18 du Pacte.
25. L'État partie est invité à diffuser largement son deuxième rapport périodique, les réponses fournies à la liste des points à traiter établie par le Comité et les présentes observations finales.
26. Conformément au paragraphe 5 de l'article 70 du Règlement intérieur du Comité, l'État partie est invité à fournir dans un délai d'un an des renseignements pertinents sur l'application des recommandations du Comité figurant aux paragraphes 13, 15, 16, 18 et 21 ci-dessus. Le troisième rapport périodique de l'État partie devrait être soumis avant le 1er août 2007.