Convention Abbreviation: CCPR
COMITE DES DROITS DE L'HOMME
Cinquante et unième session
1. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de l'Italie (CCPR/C/64/Add.8) à ses 1330ème à 1332ème séances, les 11 et 12 juillet 1994 (CCPR/C/SR.1330 à 1332) et adopté à sa 1353ème séance (cinquante et unième session), le 27 juillet 1994 les observations suivantes.
2. Le Comité remercie l'Etat partie d'avoir présenté un rapport détaillé et complet, établi conformément aux directives du Comité, et d'avoir engagé avec le Comité, par l'intermédiaire d'une délégation hautement qualifiée, un dialogue très constructif. Il note avec satisfaction que les informations fournies dans le rapport, et présentées oralement par la délégation en réponse aux questions posées par les membres, ont permis au Comité de se faire une idée précise de la manière dont l'Italie s'acquitte effectivement des obligations qui lui incombent en vertu du Pacte.
3. Le Comité note l'apparition chez certains éléments de la population de l'Italie d'une tendance au racisme et à l'intolérance à l'égard des étrangers, en particulier des demandeurs d'asile et des travailleurs migrants, ainsi que la réapparition de certains éléments militant en faveur de mouvements politiques qui rappellent un passé dans lequel les droits de l'homme étaient gravement violés. Le Comité note aussi que la lutte nécessaire contre le crime organisé et la corruption, en particulier dans les sphères les plus élevées du pouvoir, d'une manière qui soit compatible avec les dispositions du Pacte ne va pas sans difficultés dans la pratique.
4. Le Comité note avec une satisfaction toute particulière le niveau élevé de respect des droits de l'homme auquel l'Italie est parvenue, ainsi que l'engagement sans réserve de l'Etat partie à l'égard de la promotion et de la protection des droits de l'homme, à l'échelon national comme à l'échelon international. A cet égard, il se félicite en particulier de l'intention de l'Etat partie d'adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, qui vise à abolir la peine de mort.
5. Le Comité se félicite des efforts entrepris par l'Etat partie pour promouvoir l'égalité des chances des femmes, en particulier grâce aux travaux de la Commission pour la parité et l'égalité des chances entre l'homme et la femme, ainsi que des progrès réalisés dans l'amélioration de la participation des femmes à la conduite des affaires publiques, à la vie professionnelle et au secteur économique privé. Il se félicite également de l'adoption, le 26 avril 1993, d'une loi visant à renforcer la prévention, l'élimination et le châtiment des actes racistes. Le Comité prend note des accords récemment conclus entre l'Etat partie et certaines confessions religieuses, ainsi que de la création envisagée d'un bureau spécial de la liberté religieuse. Il se félicite aussi des améliorations apportées au système d'assistance judiciaire gratuite et de la création d'un comité consultatif national de bioéthique. Le Comité accueille de plus avec satisfaction les diverses mesures prises par l'Etat partie pour protéger et promouvoir les droits des personnes appartenant à des minorités linguistiques, qui constituent une approche positive à l'égard de la pleine application de l'article 27 du Pacte.
6. Le Comité continue de regretter l'ampleur des réserves formulées par l'Etat partie à l'égard du Pacte et le fait qu'il n'ait pas encore envisagé d'en retirer certaines.
7. Le Comité regrette que la fonction de défenseur civique n'ait pas encore été créée à l'échelon national et qu'il n'existe pas de bureau du défenseur civique dans toutes les régions de l'Etat partie. De plus, il ne semble y avoir aucun principe directeur concernant la coopération et la coordination entre ces différents bureaux. Ces faits, auxquels s'ajoutent des différences, du point de vue des pouvoirs et des fonctions, entre défenseurs civiques régionaux et locaux, risquent de se traduire par une protection inégale des individus selon l'endroit où ils vivent.
8. Le Comité est préoccupé par les cas, dont il a été informé, de mauvais traitements infligés à des personnes par les forces de police et de sécurité dans des lieux publics ou dans des commissariats. Le Comité est également préoccupé par l'accroissement du nombre des cas de mauvais traitements dans les prisons. Il note avec inquiétude que le gouvernement ne fait pas toujours enquêter de façon exhaustive sur ces affaires, que la torture ne constitue pas en soi un délit passible de sanctions en vertu de la législation interne, et que, partant, des sanctions appropriées ne sont pas toujours infligées à ceux qui ont été reconnus coupables.
9. Le Comité est préoccupé par la durée de la détention provisoire prévue par la loi, qui ne semble pas compatible avec les dispositions des articles 9 et 14 du Pacte. Les retards dans les procédures judiciaires restent inquiétants, malgré les efforts tendant à les réduire. Le Comité se préoccupe également des différents problèmes auxquels doit faire face l'administration des prisons et d'autres centres de détention, en particulier du surpeuplement.
10. Le Comité est préoccupé par la concentration excessive des médias par un petit groupe de personnes. Il note aussi qu'une telle concentration risque d'influer sur la jouissance du droit à la liberté d'expression et d'information énoncé par l'article 19 du Pacte.
11. Le Comité est préoccupé par le fait que la définition des minorités donnée par l'Etat partie ne concerne que les minorités linguistiques à l'intérieur de son propre territoire et que, par conséquent, les membres des autres minorités ne bénéficient peut-être pas d'une protection égale de leurs droits énoncés à l'article 27.
12. Le Comité recommande à l'Etat partie de réexaminer les réserves qu'il a formulées à l'égard du Pacte en vue de les retirer.
13. Compte tenu du fait que la législation pénale ne prévoit pas la peine de mort, le Comité souhaite encourager l'Etat partie à prendre les mesures nécessaires pour adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
14. Le Comité exprime l'espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour créer un bureau du défenseur civique à l'échelon national. Il recommande également que des bureaux du défenseur civique soient créés à l'échelon régional, lorsque cela n'a pas déjà été fait, et que les fonctions et les pouvoirs des défenseurs civiques régionaux soient harmonisés.
15. Le Comité prie instamment l'Etat partie d'envisager de faire de la torture un délit pénal spécifique. En outre, il suggère que l'Etat partie renforce davantage les mesures visant à protéger les droits des détenus, à assurer qu'il soit promptement enquêté sur les allégations de mauvais traitements et que des sanctions appropriées soient infligées lorsque de telles infractions sont commises, à prévenir la commission de tels actes grâce à des efforts visant à assurer un respect plus strict des règlements concernant le traitement des détenus et des délinquants et enfin à réduire la durée de la détention provisoire, en tenant compte du principe de la présomption d'innocence et de la complexité de l'enquête. Le Comité suggère aussi qu'une formation plus efficace et plus complète en matière de droits de l'homme soit assurée aux responsables de l'application des lois et au personnel pénitentiaire.
16. Le Comité recommande à l'Etat partie de réexaminer la possibilité de reconnaître la responsabilité civile des magistrats à la lumière des Principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature.
17. Pour éviter les risques inhérents à la concentration excessive du contrôle des moyens d'information de masse par un petit groupe de personnes, le Comité souligne l'importance que revêtent l'application de mesures visant à assurer une allocation impartiale des ressources et un accès équitable à ces médias, et l'adoption d'une législation antitrust régissant ces derniers.
18. Le Comité recommande que l'Etat partie continue de renforcer ses programmes d'éducation et de formation axés sur le multiculturalisme afin d'éliminer la discrimination raciale, et de faire progresser la tolérance et la compréhension parmi les peuples et les races.
19. Un surcroît d'efforts est nécessaire pour assurer l'égale participation des femmes aux affaires publiques et une protection plus effective des femmes contre toutes les formes de violence.
20. Le Comité serait heureux de recevoir dans le prochain rapport périodique des informations concernant les questions qui, faute de temps, sont restées sans réponse, en ce qui concerne notamment les mesures prises par l'Etat partie pour donner effet aux constatations formulées par le Comité en vertu du Protocole facultatif.