Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 1er avril 2004,
Adopte ce qui suit:
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication, dont la lettre initiale est datée du 20 mars
2003, est John Wilson, de nationalité australienne, né en 1942 et résidant
en Australie. (1) Il se déclare victime de violations par l'Australie
des articles 1, 2, 9, 14 et 17 du Pacte. Il n'est pas représenté par un conseil.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 L'auteur déclare qu'il a été partie à de nombreuses et diverses procédures
judiciaires dans l'État de la Nouvelle-Galles du Sud, qui n'ont pas été
conduites de manière impartiale et au cours desquelles il n'a pas eu le
droit d'être jugé par ses pairs. Il affirme qu'en conséquence il a été illégalement
emprisonné et expulsé de son domicile, et a fait l'objet de diffamations.
Il affirme aussi avoir été victime de ce qu'il présente comme un exercice
illégal d'autorité par une puissance étrangère.
2.2 L'auteur explique que le 5 septembre 1997, il a été arrêté et accusé
d'infraction à l'article 326 de la loi de 1900 sur les infractions pénales
de la Nouvelle-Galles du Sud, qui criminalise le fait de menacer un témoin,
un juré ou un magistrat, de le frapper ou de lui nuire (l'auteur ne fournit
pas de détails sur les accusations portées contre lui ni sur les circonstances
de l'espèce). Le 26 septembre 1997, l'auteur a comparu devant le tribunal
de première instance et a demandé à être jugé par ses pairs, demande que
le Président du tribunal a acceptée.
2.3 Le 17 novembre 1997, l'auteur a comparu devant la Cour suprême de la
Nouvelle-Galles du Sud suite à une citation délivrée par le greffier de
la Cour aux fins de l'inculper d'outrage à l'autorité de la justice. Aucune
précision n'est fournie et il ne ressort pas clairement du dossier si, et
de quelle manière, cette nouvelle inculpation était liée à celles visées
par la loi sur les infractions pénales. Pour répondre de ce nouveau chef
d'accusation, l'auteur a demandé à être jugé par un tribunal siégeant avec
jury, requête à laquelle le Président de la Cour n'a pas accédé. L'auteur
a contesté cette décision devant la Cour suprême mais a été débouté par
ladite Cour siégeant à juge unique le 13 février 1998 puis par la cour d'appel
le 26 août 1998. Il a alors saisi la Cour suprême d'Australie d'une demande
d'autorisation de faire appel de la décision lui refusant d'être jugé par
un jury mais celle-ci a été rejetée le 16 avril 1999.
2.4 L'auteur soutient qu'il a été illégalement détenu du 9 novembre 1999
au 28 février 2000 au centre correctionnel de Silverwater à Sydney, après
avoir été jugé et reconnu coupable d'outrage à l'autorité de la justice
par la Cour suprême de la Nouvelle-Galles du Sud. Aucun détail sur les circonstances
de sa condamnation n'est fourni. Il affirme que sa demande d'être jugé par
un jury a été rejetée en raison de l'accusation d'outrage à l'autorité de
la justice retenue contre lui. Le 28 février 2000, il a été remis en liberté,
son recours ayant été accueilli par la cour d'appel. L'auteur affirme, au
vu des circonstances décrites ci-dessus, être victime d'une violation du
paragraphe 5 de l'article 9 du Pacte.
2.5 L'auteur affirme que le 28 décembre 2000, il a engagé une procédure
contre la St. George Bank au motif qu'elle aurait tenté de l'escroquer en
introduisant dans le cadre d'un contrat de prêt au logement des clauses
concernant des taux d'intérêt variables. La plainte concernait aussi l'État
de la Nouvelle-Galles du Sud qui, d'après l'auteur, était «responsable par
personne interposée» d'une décision rendue antérieurement par un magistrat
de la Cour suprême de cet État. Cette décision autorisait la banque à saisir
la maison de l'auteur pour défaut de remboursement de prêt. L'auteur prétendait
que le magistrat avait entravé le cours de la justice en ne lui accordant
pas le droit d'être jugé par ses pairs dans le cadre de la procédure engagée
par la banque contre lui. Dans la plainte déposée contre la banque et l'État
de la Nouvelle-Galles du Sud, l'auteur a fait valoir qu'il avait le droit
d'être jugé par un jury, mais que ce droit lui avait été refusé par un magistrat
de la Cour suprême de cet État. Les recours formés par l'auteur contre cette
décision de procédure auprès de la cour d'appel de la Nouvelle-Galles du
Sud et de la Cour suprême d'Australie ont été rejetés le 16 novembre 2001
et le 14 février 2003, respectivement.
2.6 L'auteur fait référence à 23 procédures dans lesquelles le tribunal
compétent a refusé qu'il soit jugé par un jury et fait valoir que cela constitue
une violation par l'État partie des articles 2 et 14 du Pacte.
2.7 L'auteur affirme en outre que la procédure qu'il a engagée contre un
organe de presse pour diffamation en juin 1997, et dont il ne précise pas
le détail, n'a pas abouti et que la Cour suprême de la Nouvelle-Galles du
Sud a rejeté sa plainte alors que selon lui, la procédure aurait dû faire
l'objet d'un procès par jury. L'auteur y voit une violation de l'article
17 par l'État partie.
2.8 L'auteur affirme également que comme les magistrats et les parlementaires
de l'État partie prêtent allégeance à la Reine Élisabeth II, monarque d'un
État étranger, il y a violation de l'article premier du Pacte.
2.9 Enfin, l'auteur affirme que le refus des tribunaux de l'État partie
d'accepter ses plaintes contre la banque concernant son contrat de prêt
au logement constitue une violation de l'article 26 dans la mesure où la
protection de la loi contre ce qu'il estime être des pratiques frauduleuses
de la part de la banque lui a été refusée.
Teneur de la plainte
3. L'auteur affirme que dans les diverses procédures judiciaires évoquées
dans sa communication, il n'a pas bénéficié d'un procès avec jury et que
les procédures n'ont pas été conduites de manière impartiale, ce qui constitue
une violation des articles 9 et 14. Il ajoute que le comportement qu'il
dénonce revenait à une violation des articles 1, 2, 17 et 26 du Pacte.
Délibérations du Comité
4.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité
des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement
intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte.
4.2 Le Comité s'est assuré, comme il est tenu de le faire conformément
au paragraphe 2 a) de l'article 5 du Protocole facultatif, que la même question
n'est pas déjà en cours d'examen devant une autre instance internationale
d'enquête ou de règlement.
4.3 Le Comité rappelle sa position selon laquelle un particulier ne peut
se prétendre «victime» de violations du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes
consacré à l'article premier du Pacte. (2) En conséquence, cette
partie de la communication est irrecevable en vertu de l'article premier
du Protocole facultatif.
4.4 S'agissant des griefs au regard des articles 2, 9, 14, 17 et 26 du
Pacte, le Comité considère qu'ils ne relèvent pas du champ d'application
de ces articles ou qu'ils n'ont pas été suffisamment étayés aux fins de
la recevabilité. Le Comité note en particulier que le Pacte ne consacre
pas le droit d'être jugé par un jury, que ce soit au civil ou au pénal,
mais dispose que toutes les procédures judiciaires, avec ou sans jury, doivent
s'accompagner des garanties d'un procès équitable (3). Par conséquent,
les plaintes de l'auteur sont irrecevables en vertu des articles 2 et 3
du Protocole facultatif.
5. En conséquence, le Comité décide que la communication est irrecevable
et que la présente décision sera communiquée à l'auteur et, pour information,
à l'État partie.
__________________
[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra
ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du
Comité à l'Assemblée générale.]
* Les membres du Comité dont le nom suit ont participé à l'examen de la
communication: M. Nisuke Ando, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, M.
Alfredo Castillero Hoyos, Mme Christine Chanet, M. Franco Depasquale, M.
Maurice Glèlè Ahanhanzo, M. Walter Kälin, M. Ahmed Tawfik Khalil, M. Rafael
Rivas Posada, Sir Nigel Rodley, M. Martin Scheinin, M. Ivan Shearer, M.
Hipólito Solari Yrigoyen, M. Roman Wieruszewski et M. Maxwell Yalden.
Notes
1. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l'Australie le 25 décembre
1991.
2. Voir, par exemple, Hom c. Philippines, communication no
1169/2003, décision adoptée le 8 août 2003.
3. Voir, par exemple, Kavanagh c. Irlande (no 1), communication
no 818/1998, constatations adoptées le 4 avril 2001.