Convention Abbreviation: CCPR
des communications présentées en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques
- Quatre-vingt-troisième session -
Communication No. 1356/2005
Au nom de: L'auteur
État partie: Espagne
Date de la communication initiale: 12 décembre 2004
Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 29 mars 2005,
Adopte ce qui suit:
Exposé des faits
2.1 Le 9 décembre 2001, la deuxième chambre du tribunal provincial d'Almería (Audiencia Provincial) a condamné l'auteur à sept ans et demi d'emprisonnement pour destruction de biens, tentative d'homicide et fabrication illégale d'explosifs, et à un an d'emprisonnement pour menaces continues. (1)
2.2 L'auteur a interjeté appel de la décision devant le Tribunal suprême (Tribunal Supremo) en faisant valoir des violations des garanties de procédure et de droits substantiels. Le 12 décembre 2002, le Tribunal suprême a déclaré l'appel irrecevable. L'auteur a alors engagé un recours en amparo devant le Tribunal constitutionnel (Tribunal Constitucional), qui l'a rejeté le 20 octobre 2004.
Teneur de la plainte
3.1 La plainte de l'auteur concerne essentiellement le droit à un recours effectif contre une déclaration de culpabilité et une condamnation. L'auteur fait valoir que la loi de procédure pénale espagnole (Ley de Enjuiciamiento Criminal) viole le paragraphe 5 de l'article 14 et l'article 26 du Pacte dans la mesure où les affaires dans lesquelles les prévenus sont accusés des infractions les plus graves sont instruites par un juge unique (Juzgado de Instrucción) qui dirige toute l'instruction et renvoie l'affaire, lorsqu'elle est en état d'être jugée, au tribunal provincial (Audiencia Provincial), où un collège de trois juges conduit le procès et statue sur l'affaire. Leur décision ne peut donner lieu à un contrôle juridictionnel que dans un nombre très limité de cas. Toutes les décisions sur les éléments de fait prises par les juridictions inférieures étant définitives, le Tribunal suprême n'a pas la possibilité de réexaminer les éléments de preuve. En revanche, les affaires concernant des infractions moins graves, dans lesquelles les condamnés encourent des peines de prison de moins de six ans, sont instruites par un juge unique (Juzgado de Instrucción) qui renvoie l'affaire, lorsqu'elle est en état d'être jugée, à un juge ad quo unique (Juzgado de lo Penal), dont la décision peut être contestée devant le tribunal provincial (Audiencia Provincial), procédure qui assure un contrôle effectif non seulement de l'application du droit, mais également de la qualification des faits.
3.2 Selon l'auteur, le Tribunal suprême ne procédant pas à une nouvelle appréciation des éléments de preuve, le système judiciaire espagnol ne garantit pas le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation conformément à la loi (par. 5 de l'article 14 du Pacte). Il soutient que le Tribunal suprême a rejeté son recours pour des motifs formels et procéduraux, sans avoir réexaminé les éléments de preuve établis par la juridiction inférieure. Dans son arrêt, le Tribunal constitutionnel a indiqué qu'il n'était pas compétent pour apprécier les éléments de preuve établis par la juridiction de jugement, ou pour contrôler les conclusions du Tribunal suprême.
Examen concernant la recevabilité
4.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 93 de son règlement intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
4.2 Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle le principe d'épuisement des recours internes, qui permet à l'État partie de réparer une violation alléguée avant que la même question ne soit soumise au Comité, oblige l'auteur à soulever devant les juridictions internes les questions de fond présentées au Comité. L'auteur n'ayant pas avancé au fond, devant les juridictions internes, le grief de violation du principe de non-discrimination (par. 5 de l'article 14, lu conjointement avec l'article 26 du Pacte), le Comité estime que cette partie de la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 b) de l'article 5 du Protocole facultatif.
4.3 Le Comité observe que l'autre aspect de l'allégation concernant le paragraphe 5 de l'article 14 − le fait que les juridictions espagnoles ne procèdent pas à une nouvelle appréciation des éléments de preuve − est contredit par les arrêts du Tribunal suprême et du Tribunal constitutionnel en l'espèce. Ces deux juridictions ont examiné de façon approfondie l'allégation de l'auteur selon laquelle les éléments de preuve indirects étaient insuffisants pour le condamner et elles l'ont rejetée, en mettant en avant de nombreux arguments qui permettent de conclure que les éléments de preuve, bien qu'indirects, étaient suffisants pour justifier la condamnation de l'auteur. En l'espèce, le Comité conclut que l'auteur n'a pas suffisamment étayé sa plainte au titre du paragraphe 5 de l'article 14, et conclut que cette partie de la communication est irrecevable conformément à l'article 2 du Protocole facultatif. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide:
a) Que la communication est irrecevable en vertu de l'article 2 et du paragraphe 2 de l'article 5 du Protocole facultatif;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'auteur et, pour information, à l'État partie.
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[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l'Assemblée générale.]
** Les membres du Comité dont le nom suit ont participé à l'examen de la communication: M. Abdelfattah Amor, M. Nisuke Ando, M. Prafullanchandra Natwarlal Bhagwati, Mme Christine Chanet, M. Maurice Glèlè Ahanhanzo, M. Edwin Johnson, M. Walter Kälin, M. Ahmed Tawfik Khalil, M. Michael O'Flaherty, Mme Elisabeth Palm, M. Rafael Rivas Posada, Sir Nigel Rodley, M. Ivan Shearer, M. Hipólito Solari-Yrigoyen et M. Roman Wieruszewski.
1. Selon le jugement, l'auteur et un complice ont menacé un partenaire commercial qui refusait de transporter du bétail pour leur compte. Ils ont placé une charge explosive en face de la maison de la victime et provoqué une explosion qui a causé de graves dommages. Les éléments de preuve à charge consistaient en témoignages au sujet des menaces, en attestations d'experts concernant les types d'explosifs utilisés par l'accusé et l'importance des dégâts causés aux locaux de la victime.