concernant
la communication No 291/1988
4.2 L'Etat partie expose ensuite les motifs qui ont servi de base a la détention de l'auteur; la première décision, datée du 7 octobre 1987, était fondée sur des raisons ayant trait à un risque présumé de délit (loi sur les étrangers, art. 23, par. 1 et 2). La deuxième, datée du 3 décembre 1987, était fondée sur la nécessité de préparer son extradition et d'éviter qu'il ne commette un délit ou ne se cache (loi sur les étrangers, art. 23, par. 1 et 2). La troisième, datée du 5 janvier 1988, était notamment motivée par un risque présumé de délit (loi sur les étrangers, art. 23, par. 1 et 2). 4.3 En vertu de l'article 33 de la loi sur les étrangers, M. Torres avait la possibilité de faire appel, devant le Tribunal administratif suprême, dans un délai de 14 jours, de la décision de prolonger sa détention. Il a effectivement introduit un recours, le 26 novembre 1987, contre la décision du Ministère de l'intérieur tendant à prolonger sa détention provisoire mais le Tribunal l'a débouté le 4 mars 1988. En vertu de l'article 32 de la loi sur les étrangers (" Demande d'annulation d'une décision prise par la police ou un fonctionnaire chargé du contrôle des passeports"), M. Torres avait également le droit de faire examiner par le Ministère de l'intérieur les décisions concernant sa détention provisoire (pour les sept premiers jours) prises par la police les 7 octobre 1987, 3 décembre 1987 et 5 janvier 1988, respectivement. Il a effectivement présenté une demande d'annulation pour ces deux dernières mais, dans sa décision du 23 février 1988, le Ministère de l'intérieur a estimé qu'il existait des motifs suffisants pour justifier sa détention provisoire. 4.4 L'Etat partie soutient èn outre qu'en vertu de l'article 19 de la loi sur l'extradition des criminels, le tribunal de district doit être saisi "sans délai" de la décision de mise en détention et doit, conformément à l'article 20 de cette loi. statuer en référé sur l'opportunité de prolonger la détention. La détention provisoire ordonnée le 16 décembre 1987 a été prolongée par une décision prise le 23 décembre 1987 par le tribunal de district d'Helsinki. Or, l'article 22 de la loi d'extradition prévoit qu'il peut être fait appel de la décision d'un tribunal de district devant la Cour suprême et il n'y a pas de délai prescrit pour former ce recours. Pourtant, d'après le dossier, il ne semble pas que M. Torres ait fait appel. Cette voie de recours interne n'a donc pas été épuisée et reste en principe ouverte au plaignant. 4.5 Enfin, 1'Etat partie indique qu'un projet de loi gouvernemental visant à modifier la loi sur les étrangers sera prochainement soumis au Parlement afin de garantir le droit à ce qu'un tribunal statue sans délai sur la légalité de la décision de mise en détention. Questions que le Comité doit examiner 5.1 Sur la base des renseignements qui lui ont été fournis, le Comité a conclu que toutes les conditions requises pour déclarer la communication recevable, y compris le critère de l'épuisement des recours internes prévu au paragraphe 2 de l'article 5 du Protocole facultatif, étaient réunies. 5.2 Dans sa décision sur la recevabilité, le Comité a différé l'examen quant au fond des allégations de l'auteur au titre de l'article 7 afin de pouvoir déterminer si le Gouvernement finlandais, lorsqu'il a décidé d'extrader M. Torres, était en possession de renseignements donnant à penser que ce dernier risquait d'être soumis à la torture ou à d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants après son extradition. 5.3 Le Comité a rappelé en outre que, d'après les faits non contestés, M. Torres n'a pu, à plusieurs reprises, contester sa détention en vertu de la loi sur les étrangers pendant la première semaine de détention. Le Comité a noté que ladite loi ne prévoyait pas le droit de faire appel d'une détention avant sept jours; le Comité devait donc déterminer si les clauses de la loi sur les étrangers qui ont été appliquées concrètement à l'auteur étaient conformes aux dispositions du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte. Le Comité a fait observer que 1'Etat partie n'avait fourni aucune information sur les recours internes que l'auteur aurait pu former en l'espèce; il a donc conclu qu'il n'existait pas en l'espèce de recours internes que M. Torres aurait pu exercer. 5.4 Le Comité a noté que 1'Etat partie avait déclaré que, alors que l'auteur avait formé, le 9 décembre 1987, un recours devant la Cour administrative suprême contre la décision prise le 26 novembre 1987 par le Ministère de l'intérieur, la Cour n'avait rendu sa décision que près de trois mois plus tard. Vu les circonstances, le Comité a estimé que le grief de M. Torres relatif au délai qui s'est écoulé avant qu'il fût statué sur sa détention pouvait soulever des questions Concernant l'application du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte. 5.5 Sur la base des observations écrites qui lui ont été présentées, le Comité a estimé qu'aucun élément ne fondait l'affirmation de l'auteur selon laquelle il avait été victime de la violation de droits énoncés à l'article 14 du Pacte. 5.6 Le 30 mars 1989, le Comité des droits de l'homme a déclaré que la communication était recevable dans la mesure où elle concernait des plaintes au titre de l'article 7 et du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte.
6. Le Comité prend acte de l'allégation de l'auteur selon laquelle la Finlande aurait violé l'article 7 du Pacte en l'extradant vers un pays où il y avait des motifs de penser qu'il serait soumis à la torture. Le Comité constate toutefois que l'auteur n'a pas fourni de motifs suffisants pour justifier ses craintes d'être soumis à la torture en Espagne. 7.1 Trois questions distinctes se posent au titre du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte : a) le fait que l'auteur a été empêché, en vertu de la loi sur les étrangers, de faire appel devant un tribunal de la décision concernant sa détention pendant les périodes allant du 8 au 15 octobre 1987, du 3 au 10 décembre 1987 et du 5 au 10 janvier 1988, alors qu'il était détenu sur ordre de la police, constitue-t-il une violation de cette disposition: b) lorsque l'auteur a été légalement autorisé à contester sa détention en vertu de la loi sur les étrangers, le prétendu retard avec lequel le jugement a été rendu constitue-t-il une violation: et c) l'application de la loi d'extradition a l'auteur constitue-t-elle une violation de ladite disposition. 7.2 En ce qui concerne la première question, le Comité a noté que 1'Etat partie a prétendu que l'auteur avait le droit, en vertu de l'article 32 de la loi sur les étrangers, de faire examiner par le Ministère de l'intérieur les décisions concernant sa mise en détention prises par la police les 7 octobre 1987, 3 décembre 1987 et 5 janvier 1988. De l'avis du Comité, cette possibilité, tout en offrant une certaine protection et un contrôle de la légalité de la détention, ne satisfait pas aux conditions prévues au paragraphe 4 de l'article 9, qui prévoit que la légalité de la détention doit être déterminée par un tribunal afin de garantir une objectivité et une indépendance plus grandes. Le Comité note en outre que, pendant qu'il était détenu sur ordre de la police, l'auteur n'aurait pas pu faire examiner par un tribunal la légalité de sa détention. Il ne pouvait saisir un tribunal qu'après sept jours, lorsque la détention aurait été confirmée par le Ministre. Comme l'auteur n'aurait pu contester sa détention avant la deuxième semaine de détention, il a été détenu du 8 au 15 octobre 1987, du 3 au 10 décembre 1987 et du 5 au 10 janvier 1988 en violation du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte, selon lequel un détenu "a le droit d'introduire un recours devant un tribunal afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale". (C'est le Comité qui souligne.) 7.3 En ce qui concerne la seconde question, le Comité souligne que, par principe, tout tribunal est tenu de statuer aussi rapidement que possible sur la légalité de la détention. Aucune limite précise n'a cependant été fixée, de sorte qu'il n'est pas possible d'établir qu'une décision n'a pas été prise "sans délai". La question de savoir si une décision a été prise sans délai doit être tranchée cas par cas. Le Comité note que près de trois mois se sont écoulés entre la date à laquelle l'auteur a fait appel de la décision du Ministère de l'intérieur en vertu de la loi sur les étrangers et la date a laquelle le Tribunal administratif suprême a rendu sa décision. Cette période est en principe trop longue mais, comme il ne connaît pas les raisons pour lesquelles le jugement n'a été rendu que le 4 mars 1988, le Comité ne fait aucune constatation au sujet du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte. 7.4 En ce qui concerne la troisième question, le Comité note que le tribunal de district d'Helsinki a examiné la détention de l'auteur en vertu de la loi d'extradition à des intervalles de deux semaines. Le Comité estime que cette procédure satisfait aux exigences du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte. 8. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est d'avis que les faits qui lui ont été soumis font apparaître une violation du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques car l'auteur n'a pas été en mesure de faire appel devant un tribunal de la décision relative à sa mise en détention du 8 au 15 octobre 1987, du 3 au 10 décembre 1987 et du 5 au 10 janvier 1988. 9. Conformément aux dispositions de l'article 2 du Pacte, 1'Etat partie est tenu de réparer les violations dont l'auteur a été victime et de faire en sorte que des violations analogues ne se produisent pas à l'avenir. Le Comité saisit cette occasion pour indiquer qu'il serait heureux de recevoir des renseignements sur toute mesure pertinente que 1'Etat partie aurait prise comme suite aux constatations du Comité. A cet égard, le Comité se félicite de l'intention exprimée par 1'Etat partie de modifier sa législation afin de garantir le droit a ce qu'un tribunal statue sans délai sur la légalité d'une détention fondée sur la loi sur les étrangers.