Comité des droits de l'homme
Cinquantième session
ANNEXE
Constatations du Comité des droits de l'homme au
titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits civils et politiques
- Cinquantième session -
Communication No 330/1988
Présentée par : Albert Berry (représenté par un conseil)
Au nom de : L'auteur
État partie : Jamaïque
Date de la communication : 6 mai 1988
Le Comité des droits de l'homme, institué conformément à l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 7 avril 1994,
Ayant achevé l'examen de la communication No 330/1988, présentée
au Comité des droits de l'homme par M. Albert Berry en vertu du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques,
Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui
ont été communiquées par l'auteur de la communication, son conseil et
l'État partie,
Adopte les constatations suivantes au titre du paragraphe 4 de
l'article 5 du Protocole facultatif.
1. L'auteur de la communication est Albert Berry, citoyen jamaïcain né
en 1964, détenu à la prison du district de Sainte-Catherine (Jamaïque),
en attente d'exécution. Il affirme être victime de violations par la Jamaïque
du paragraphe 1 de l'article 6, de l'article 7, des paragraphes 3 et 4
de l'article 9, des paragraphes 1 et 2 a) de l'article 10, des paragraphes
1, 3 b) à e) et g) et 5 de l'article 14 et de l'article 17 du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques. Il est représenté par un conseil.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 L'auteur a été arrêté et inculpé de meurtre le 27 mars 1984. L'audience
préliminaire a eu lieu le 15 juin 1984. Le 30 janvier 1985, après un procès
de trois jours, l'auteur a été reconnu coupable et condamné à mort par
le Circuit Court de Sainte-Anne. Il s'est pourvu devant la cour
d'appel de la Jamaïque le 5 février 1985. Son appel a été rejeté le 21
octobre 1987. La cour d'appel a produit la minute de l'arrêt le 11 novembre
1987. L'auteur a ensuite demandé une autorisation spéciale de former recours
auprès de la Section judiciaire du Conseil privé. Le 17 mai 1990, la Section
judiciaire a rejeté sa demande. L'auteur affirme en conséquence que les
recours internes disponibles ont été épuisés.
2.2 L'auteur était accusé du meurtre d'un certain D. G. Selon le ministère
public, le 23 mars 1984, vers 20 heures, 11 hommes, dont D. G., marchaient
ensemble le long d'une route non éclairée, à Maider, dans la commune de
Sainte-Anne. L'un des hommes, ou deux d'entre eux, étaient munis de lampes
de poche, dont l'une était allumée. Ils se sont subitement trouvés face
à face avec l'auteur et deux ou trois autres hommes non identifiés qui
leur ont barré la route et ont ouvert le feu. Une balle a atteint D. G.
dans le dos.
2.3 L'accusation se fondait uniquement sur les dépositions aux fins d'identification
faites par quatre témoins, lesquels auraient appartenu à une bande rivale.
La défense invoquait un alibi.
2.4 Selon les témoins à charge, juste avant les coups de feu, la lampe
de poche de l'un des leurs a éclairé les autres hommes en face d'eux.
Chacun des témoins aurait reconnu l'auteur, qu'ils connaissaient depuis
l'enfance et qui, selon leurs déclarations, ne portait pas de masque.
Les témoins n'ont pas pu identifier les autres hommes, qui étaient masqués.
Selon l'auteur, les témoins auraient fait des dépositions contradictoires
concernant : le nombre d'hommes munis de lampes de poche, le nombre d'attaquants,
le fait que l'auteur ait été armé ou non, la distance qui séparait les
deux groupes, le temps qui s'est écoulé entre la rencontre avec les attaquants
et le moment où les coups de feu ont éclaté, la durée de la fusillade,
la position de l'auteur au sein du groupe des attaquants et le nombre
de coups de feu tirés. L'auteur déclare en outre qu'il n'a pas été prouvé
que les coups de feu ont été tirés par lui et qu'aucun mobile n'a été
avancé pour expliquer les coups de feu ni le meurtre de la victime.
2.5 L'auteur déclare qu'au cours de l'enquête préliminaire, N. W., l'officier
de police chargé de l'affaire, qui venait dans sa cellule presque tous
les jours, et un autre officier de police non identifié l'ont forcé à
signer une déclaration rédigée à l'avance, par laquelle il aurait reconnu
s'être trouvé en compagnie des trois hommes qui ont tiré sur la victime.
Il semble néanmoins que l'accusation n'ait pas tenté de produire ladite
déclaration comme pièce à conviction. Ce n'est que lorsque N. W. (le dernier
témoin à charge) a été appelé pour être interrogé de nouveau que la question
de l'aveu prétendument signé par l'auteur a été soulevée. Le conseil de
l'auteur n'a pas contesté la déposition de N. W. à cet égard.
2.6 En outre, le conseil en appel a fait valoir que c'était à tort que
le tribunal de première instance avait admis ce moyen de preuve qui, selon
lui, était extrêmement préjudiciable aux droits de l'auteur et n'avait
aucune force probante. La cour d'appel a néanmoins rejeté ce moyen d'appel
en ces termes : "L'aveu en l'espèce a fortement corroboré les dépositions
aux fins d'identification faite par des témoins oculaires et sa valeur
probante pouvait être efficace. Il n'a jamais été avancé que la déclaration
faite par l'appelant, après qu'il eut été informé de ses droits, n'était
pas spontanée, et l'appelant ne saurait, après s'être abstenu de contester
la validité de la déclaration en première instance, invoquer maintenant
son caractère prétendument préjudiciable. La cour en conclut que la déposition
de N. W., en ce qui concerne les aveux de l'appelant, était pertinente
et probante et que c'est à bon droit qu'elle a été retenue".
2.7 Lors de l'audience préliminaire et en appel, l'auteur était représenté
par des avocats commis d'office. Il est indiqué dans le formulaire AC
2 ("Particulars of Trial") relatif au procès de première
instance que l'auteur était alors représenté par un avocat engagé à titre
privé. Un cabinet d'avocats de Londres l'a représenté gratuitement devant
la Section judiciaire du Conseil privé.
Teneur de la plainte
3.1 Dans une lettre en date du 22 juin 1992, le conseil note qu'aucune
exécution n'a eu lieu en Jamaïque depuis mars 1988. Le Gouvernement jamaïcain
a également envisagé d'abolir la peine capitale, comme l'ont confirmé
les conseillers juridiques de l'État partie en 1990. Le conseil fait valoir
en outre qu'en vertu des dispositions du projet de loi portant amendement
de la loi relative aux atteintes à la vie et à l'intégrité des personnes,
dont le Parlement jamaïcain était alors saisi, l'auteur bénéficierait
de la libération conditionnelle puisqu'il a fait sept ans de prison et
qu'il n'a pas été reconnu coupable d'un crime entraînant la peine de mort
selon le projet de loia. En conséquence, l'auteur pourrait
raisonnablement s'attendre à bénéficier d'une commutation de peine, et
même à être libéré. Le conseil soutient qu'exécuter l'auteur reviendrait
à le priver arbitrairement de la vie, en violation du paragraphe 1 de
l'article 6 du Pacte et, qu'en l'espèce, la menace incessante d'exécution
constitue une violation de l'article 7 du Pacte.
3.2 Il est en outre allégué que l'article 7 aurait été violé par N. W.,
qui aurait menacé de tuer l'auteur s'il ne passait pas aux aveux. Enfin,
les pressions et l'angoisse constantes résultant de la détention prolongée
dans le quartier des condamnés à mort, ainsi que les conditions de détention
de l'auteur à la prison du district de Sainte-Catherine, constitueraient
en elles-mêmes une violation de l'article 7.
3.3 L'auteur affirme que la police ne l'a pas informé de ses droits avant
interrogatoire. Le conseil souligne que l'auteur a été détenu pendant
deux mois et demi avant d'être présenté à un juge d'instruction. Au cours
de cette période, l'auteur n'a pas bénéficié des services d'un avocat,
ce qui, s'ajoutant au fait que sept mois et demi se sont encore écoulés
avant que l'auteur ne passe en jugement, constitue une violation des paragraphes
3 et 4 de l'article 9 du Pacte.
3.4 L'auteur affirme qu'il est victime d'une violation des paragraphes
1 et 2 a) de l'article 10. Il déclare qu'au cours des 10 mois de détention
provisoire qu'il a passés au poste de police de Brown's Town, il n'a pas
été séparé des condamnés et n'a pas bénéficié d'un traitement différent
correspondant à sa situation. Il affirme en outre qu'il est resté enchaîné
pendant cette période. Il ajoute qu'au cours du procès, il a été frappé
au visage par un policier alors qu'il était reconduit à sa cellule après
l'une des audiences et qu'il a été victime de brutalités gratuites de
la part des gardiens de prison dans le quartier des condamnés à mort.
3.5 L'auteur déclare que, le premier jour du procès, son avocat n'était
pas présent à l'audience. Ce jour-là, il a été représenté par le collaborateur
de son avocat, un certain M. S. Il aurait protesté auprès de M. S. à propos
du choix du président du jury, qui aurait été prévenu contre lui, mais
M. S. n'a formulé aucune objection à ce sujet. Le conseil présente la
copie d'une lettre datée du 22 janvier 1988, adressée à l'auteur par sa
mère, qui semble indiquer que le président du jury avait été soudoyé pour
obtenir la condamnation de l'auteur. En outre, les quatre témoins à charge
auraient nourri des sentiments d'hostilité à l'égard de M. Berry. Ils
auraient appartenu à une bande qui terrorisait les résidents du quartier
où habitait l'auteur et auraient plus d'une fois tenté de le tuer.
3.6 Tout en reconnaissant qu'il n'appartient pas en principe au Comité
d'évaluer les faits et éléments de preuve propres à chaque affaire dont
il est saisi, ni d'examiner les instructions particulières données au
jury par le juge, le conseil constate que les réserves émises par le Comité
à cet égard ont uniquement porté jusqu'à présent sur des instructions
données au jury par un juge. À son avis, dans le cas de l'auteur, la présence
parmi le jury d'une personne de parti pris pose une question qui mérite
d'être examinée par le Comité.
3.7 L'auteur affirme que lors de l'audience préliminaire et en appel,
il n'a pas été représenté par un avocat de son choix et qu'il n'a pas
disposé du temps et des moyens nécessaires à la préparation de sa défense,
contrairement aux dispositions du paragraphe 3 b) de l'article 14 du Pacte.
Il indique que le juge d'instruction n'a désigné un avocat que le jour
même de l'ouverture de l'audience préliminaire. En conséquence, il n'a
disposé que d'une heure et quarante minutes pour s'entretenir avec son
défenseur. Quant à son procès en appel, l'auteur déclare qu'un avocat
a de nouveau été commis d'office sans qu'il ait été consulté et qu'il
ne s'est entretenu avec lui qu'une seule fois pendant 15 minutes, entre
le 21 et le 25 février 1988, quelque quatre mois après que son appel eut
été rejeté. Enfin, il déclare qu'il n'a pas disposé du temps et des moyens
nécessaires pour préparer son procès en première instance. Il affirme
n'avoir rencontré son avocat que trois fois avant le procès, la conversation
n'ayant duré chaque fois que 30 minutes. Au cours du procès, il n'a pu
s'entretenir que quelques fois avec son avocat.
3.8 Le conseil souligne que l'auteur a déposé sa demande d'autorisation
de se pourvoir en appel le 5 février 1985 et que son défenseur a présenté
les moyens supplémentaires d'appel le 20 octobre 1987, la veille seulement
de l'audience de la cour d'appel. Le laps de temps entre le dép_t des
conclusions initiales et la présentation des moyens supplémentaires d'appel
serait dû au fait que l'auteur n'a pas bénéficié de l'assistance d'un
avocat et le retard intervenu dans l'examen de l'appel (plus de deux ans
et demi) constituerait une violation du paragraphe 3 c) de l'article 14
du Pacte.
3.9 L'auteur se plaint de n'avoir pas été autorisé à être présent à l'audience
de la cour d'appel, en violation du paragraphe 3 d) de l'article 14, alors
qu'il avait demandé à y assister. Le conseil note qu'un appelant n'est
pas autorisé à assister à l'audience concernant sa demande d'autorisation
de se pourvoir en appel, mais que, dans le cas de l'auteur, l'audience
tenue pour examiner sa demande à cette fin a été considérée comme une
audience sur l'appel lui-même et que, par conséquent, l'auteur aurait
eu le droit d'y assister. En outre, le conseil déclare que, comme l'auteur
n'a pas eu la possibilité de donner des instructions à son avocat avant
l'audience d'appel et que son défenseur en première instance n'a pas soulevé
les questions concernant le président du jury et les mauvais traitements
qu'il avait subis aux mains de la police, l'auteur n'a pas eu droit à
un recours utile devant une juridiction supérieure, ce qui constitue une
violation du paragraphe 5 de l'article 14. Le conseil rappelle les constatations
du Comité concernant la communication No 248/1987 (Glenford Campbell
c. Jamaïque)b dans lesquelles le Comité a estimé que,
du fait que l'avocat n'avait pas invoqué en première instance les mauvais
traitements subis par l'auteur, que cette négligence avait influé sur
le déroulement de la procédure d'appel et que l'auteur n'avait pas eu
la possibilité de donner des instructions à son avocat au moment de l'appel
ou de se défendre lui-même, on pouvait en conclure que l'auteur avait
été privé du droit d'être dûment représenté lors de la procédure judiciaire
et que les dispositions du paragraphe 3 d) de l'article 14 du Pacte n'avaient
pas été respectées.
3.10 Pour ce qui est du paragraphe 3 e) de l'article 14, l'auteur déclare
qu'au cours du procès, le tribunal lui a refusé le droit de faire interroger
sa mère et trois de ses soeurs en tant que témoins à décharge. Il ajoute
que son conseil n'a pas suivi ses instructions visant à faire citer des
témoins autres que son beau-frère.
3.11 À l'appui de l'allégation selon laquelle M. Berry aurait été contraint
de signer des aveux, en violation du paragraphe 3 g) de l'article 14,
le conseil cite les nombreuses lettres qu'il a adressées aux autorités
jamaïcaines compétentes pour les prier de mettre à sa disposition des
copies des dépositions utilisées lors de l'audience préliminaire ainsi
que le procès-verbal de cette audience. Il précise qu'il souhaitait ainsi
notamment déterminer dans quelle mesure les dépositions faites par les
témoins au cours du procès différaient des déclarations faites lors de
l'audience préliminaire. Le conseil affirme que tous les efforts qu'il
a faits pour obtenir ces documents sont restés vains.
3.12 Enfin, l'auteur affirme que les gardiens de la prison du district
de Sainte-Catherine ont à maintes reprises intercepté sa correspondance,
en violation du paragraphe 1 de l'article 17. Il déclare n'avoir jamais
reçu des livres qui lui avaient été adressés et affirme que des lettres
qu'il avait envoyées par l'entremise du bureau de la prison ne sont jamais
parvenues à leurs destinataires. Il signale à cet égard qu'en mai 1991,
des détenus ont découvert une pièce entière remplie de lettres et de documents
qui étaient envoyés par des condamnés à mort ou qui leur étaient destinés.
L'auteur se serait plaint à ce sujet auprès du médiateur parlementaire,
mais n'a reçu aucune réponse. Ces faits constitueraient une violation
du paragraphe 2 de l'article 17 du Pacte.
3.13 Pour ce qui est de la règle de l'épuisement des recours internes,
il est indiqué que, dans le cas de l'auteur, une action devant la Cour
suprême (constitutionnelle) ne constituerait pas un recours disponible
utile car aucune aide judiciaire n'est accordée à cette fin et l'auteur
lui-même n'a pas les moyens d'engager sur place un avocat qui pourrait
présenter une requête constitutionnelle en son nom.
Observations de l'État partie
4. Dans sa réponse, datée du 18 avril 1989, l'État partie a affirmé que
la communication était irrecevable au motif que tous les recours internes
n'avaient pas été épuisés puisqu'à l'époque l'auteur de la communication
pouvait encore exercer un recours devant la Section judiciaire du Conseil
privé. Le 1er juillet 1992, une nouvelle lettre du conseil de l'auteur,
contenant de nouvelles allégations, a été transmise à l'État partie, lui
donnant la possibilité de formuler des observations sur la recevabilité
des nouveaux arguments. Les observations de l'État partie à cet égard
n'ont été reçues qu'après que le Comité eut déclaré la communication recevable
(voir par. 6.1 ci-dessous).
Décision de recevabilité du Comité
5.1 Au cours de sa quarante-sixième session, le Comité a examiné la question
de la recevabilité de la communication. Il a noté que la demande d'autorisation
spéciale de recours présentée par l'auteur à la Section judiciaire du
Conseil privé avait été rejetée et que l'État partie n'avait, à cette
époque, formulé aucune nouvelle objection quant à la recevabilité de la
communication.
5.2 S'agissant des allégations avancées par l'auteur sur le terrain au
titre de l'article 17, le Comité a estimé qu'elles n'avaient pas été suffisamment
étayées, aux fins de leur recevabilité, et qu'à cet égard, l'auteur ne
pouvait se prétendre victime d'une violation au sens de l'article 2 du
Protocole facultatif.
5.3 Le 16 octobre 1992, le Comité a déclaré la communication recevable
dans la mesure où elle semblait soulever des questions au regard de l'article
6, de l'article 7, des paragraphes 3 et 4 de l'article 9, de l'article
10 et de l'article 14 du Pacte.
Demande de l'État partie visant au réexamen de la recevabilité
et renseignements quant au fond de la communication
6.1 Dans une lettre en date du 26 octobre 1992 (qui n'a été reçue qu'après
que le Comité eut déclaré la communication recevable), l'État partie prétend
que la communication est irrecevable au motif que tous les recours internes
n'ont pas été épuisés. Il affirme que les droits garantis par le Pacte
qui auraient prétendument été violés dans le cas de l'auteur sont identiques
à ceux que consacre la Constitution jamaïcaine. En vertu de l'article
25 de la Constitution, l'auteur aurait la faculté de demander réparation
devant la Cour suprême (constitutionnelle) de la Jamaïque des violations
alléguées de ses droits constitutionnels.
6.2 De plus, s'agissant des allégations de violation des paragraphes
3 et 4 de l'article 9 du Pacte, l'État partie fait valoir qu'à tout moment
au cours de sa détention, l'auteur aurait pu saisir les tribunaux d'une
demande d'habeas corpus, en vue de faire examiner le caractère
raisonnable de sa détention. On ne saurait imputer à l'État partie l'inaction
de l'auteur à l'égard de ce recours.
6.3 L'État partie relève que les griefs de l'auteur au regard du paragraphe
1 de l'article 14 se rapportent à la conduite du procès de première instance,
notamment au choix du jury et aux partis pris des témoins à charge. Il
ajoute que la prétendue violation du paragraphe 3 g) de l'article 14 a
trait à l'authenticité des aveux de l'auteur, ce qui touche aux moyens
de preuve. Se référant à la jurisprudence du Comité, l'État partie affirme
que ces griefs ne relèvent pas de la compétence du Comité.
7.1 Dans ses observations du 1er juillet 1993, l'État partie réaffirme
que la communication devrait être considérée comme irrecevable au motif
que tous les recours internes n'ont pas été épuisés; il sollicite en conséquence
que le Comité réexamine sa décision du 16 octobre 1992. Pour ce qui est
du fond de l'affaire dont est saisi le Comité, l'État partie fait les
remarques suivantes : s'agissant des griefs formulés par l'auteur au regard
du paragraphe 3 b) de l'article 14 du Pacte, il ne ressortirait pas du
dossier soumis au Comité qu'à quelque moment que ce soit au cours de la
procédure, le conseil, ou l'auteur, se soit plaint auprès du tribunal
de première instance ou de la cour d'appel du caractère insuffisant du
temps et des moyens alloués pour la préparation de la défense.
7.2 En ce qui concerne la manière dont l'auteur a été représenté, l'État
partie soutient que tous les faits invoqués par l'auteur sont imputables
à son défenseur qui a déterminé, suivant ses compétences, quelles étaient
les questions importantes pour la conduite de la défense.
7.3 Quant au prétendu déni du droit à être présent aux débats, l'État
partie affirme qu'à aucun moment l'auteur, ou son conseil, n'a indiqué
à la cour d'appel qu'il souhaitait assister à l'audience d'appel.
7.4 Enfin, au sujet de l'allégation de l'auteur selon laquelle le droit
de faire examiner la déclaration de culpabilité et la condamnation par
une juridiction supérieure lui a été refusé, l'État partie soutient que
M. Berry est forclos à faire valoir ce moyen, puisqu'il a exercé ce droit
en saisissant la cour d'appel et en formant un recours devant la Section
judiciaire du Conseil privé.
Observations du conseil
8.1 Dans une lettre en date du 16 septembre 1993, le conseil affirme
qu'en décembre 1992, M. Berry a été avisé que son affaire avait été examinée
par un juge de la cour d'appel en application du paragraphe 2 de l'article
7 de la loi portant amendement de la loi relative aux atteintes à la vie
et à l'intégrité des personnes et que la qualification de meurtre entraînant
la peine de mort avait été appliquée dans son cas conformément au paragraphe
1 f) de l'article 2 de la loi. Aux termes de ce dernier, "tout meurtre
commis par une personne pour la cause ou dans le cadre d'une action terroriste,
c'est-à-dire une action impliquant de la part de cette personne l'emploi
de la violence d'une façon qui, par sa nature et son ampleur, vise à créer
dans le public ou une partie du public un état de peur ... sera qualifié
de meurtre entraînant la peine de mort". Le conseil souligne que
son client n'a été poursuivi et ultérieurement condamné que pour meurtre,
et que le problème du terrorisme n'a jamais été soulevé au cours de la
procédure judiciaire; il prétend que l'adjonction ultérieure du chef de
terrorisme à l'accusation de meurtre portée contre son client viole le
principe du respect de la légalité. Il ajoute que, le 8 janvier 1993,
il a sollicité de la cour d'appel le réexamen de la qualification dans
le cas de M. Berry; cette demande est actuellement pendante devant la
cour d'appelc. Selon le conseil, il y a là une preuve supplémentaire
que l'auteur est victime de violations des articles 6 et 7 de la part
de l'État partie.
8.2 À propos de l'allégation de violation du paragraphe 3 g) de l'article
14 (voir par. 3.11 ci-dessus), le conseil produit une lettre du greffier
de la Cour suprême en date du 7 mai 1993, par laquelle celui-ci l'informe
que les services du Magistrate's Court sont dans l'impossibilité
de retrouver les dépositions faites à l'audience préliminaire dans le
cas de l'auteur. Selon le conseil, l'impuissance de l'État partie à produire
les documents demandés empêche l'auteur d'étayer davantage ses allégations,
à savoir que les témoins à charge étaient de parti pris et qu'il a été
contraint par la police de signer des aveux.
Réexamen de la recevabilité
9.1 Le Comité a pris note des arguments de l'État partie relatifs à la
recevabilité et des renseignements fournis par le conseil en ce qui concerne
la procédure de réexamen de la qualification dans le cas de M. Berry,
qui, les uns et les autres, lui ont été soumis après sa décision de recevabilité.
9.2 Pour ce qui est de l'affirmation de l'État partie selon laquelle
l'auteur a encore la faculté d'exercer des recours constitutionnels, le
Comité rappelle que les recours internes, aux fins du Protocole facultatif,
doivent être disponibles et utiles. Le Comité estime que, en l'absence
d'aide judiciaire, un recours constitutionnel ne constitue pas, dans les
circonstances particulières d'espèce, un recours disponible au sens du
paragraphe 2 b) de l'article 5 du Protocole facultatif, que l'auteur est
tenu d'épuiserd.
9.3 S'agissant de savoir si, comme le prétend le conseil, l'exécution
de l'auteur reviendrait à priver arbitrairement celui-ci de la vie en
violation du paragraphe 1 de l'article 6, et si la "menace incessante
d'exécution" constituerait une violation de l'article 7, le Comité
relève que ces questions sont liées à la qualification des faits commis
par l'auteur au regard de la loi de 1992 portant amendement de la loi
relative aux atteintes à la vie et à l'intégrité des personnes. Il note
en outre qu'une demande aux fins de réexamen de la qualification des faits
est actuellement pendante devant la cour d'appel de la Jamaïque. Dans
les circonstances particulières de l'affaire et en l'absence de toute
information prouvant le contraire, le Comité considère qu'un tel recours
ne saurait être considéré à priori comme dépourvu d'utilité. Compte tenu
de cette nouvelle information, le Comité décide de ne pas poursuivre l'examen
de cette partie de la communication.
9.4 Le Comité modifie donc en partie sa décision concernant la recevabilité
et conclut que cette partie de la communication (voir par. 3.1 ci-dessus)
est irrecevable au regard du paragraphe 2 b) de l'article 5 du Protocole
facultatif.
Examen quant au fond
10. Compte tenu de ce qui précède, le Comité décide de poursuivre son
examen de la communication quant au fond dans la mesure où celle-ci concerne
les allégations restantes au regard de l'article 7 et où elle soulève
des questions sur le terrain des paragraphes 3 et 4 de l'article 9, et
des articles 10 et 14 du Pacte.
11.1 S'agissant des griefs relatifs aux paragraphes 3 et 4 de l'article
9, l'État partie n'a pas contesté que l'auteur a été détenu pendant deux
mois et demi avant d'être traduit devant un juge ou une autre autorité
judiciaire habilitée à statuer sur la légalité de sa détention. L'État
partie s'est borné à affirmer que, durant sa détention, l'auteur aurait
pu solliciter une ordonnance judiciaire d'habeas corpus. Le Comité
relève toutefois l'allégation de l'auteur, à laquelle il n'a pas répondu,
selon laquelle tout au long de cette période il a été privé de l'accès
à un défenseur. Le Comité estime qu'un délai de plus de deux mois constitue
une violation de l'obligation, posée au paragraphe 3 de l'article 9, de
traduire "dans le plus court délai" tout individu arrêté du
chef d'une infraction pénale devant un juge ou une autre autorité habilitée
par la loi à exercer des fonctions judiciaires. Dans ces conditions, le
Comité conclut que le droit conféré à l'auteur par le paragraphe 4 de
l'article 9 a lui aussi été violé puisque l'auteur n'a pas eu la possibilité,
en temps utile, de prendre l'initiative d'un recours devant un tribunal
afin que celui-ci statue sur la légalité de sa détention.
11.2 Le Comité observe que l'État partie n'a pas contesté les griefs
de l'auteur fondés sur l'article 10 du Pacte, concernant la manière dont
il a été traité en détention provisoire ainsi que dans le quartier des
condamnés à mort (voir par. 3.4 ci-dessus). Si le Comité doit accorder
aux éléments d'information fournis par l'auteur la force qu'ils méritent,
il n'en est pas moins tenu d'apprécier si les allégations avancées sont
suffisamment étayées pour lui permettre de conclure à une violation. À
l'exception de l'allégation selon laquelle l'auteur a été victime de brutalités
gratuites dans le quartier des condamnés à mort, laquelle n'est toujours
pas étayée, le Comité constate que les éléments d'information dont il
dispose à propos des conditions de détention provisoire de l'auteur l'autorisent
à conclure que les paragraphes 1 et 2 a) de l'article 10 ont été violés.
En l'absence d'une réponse de l'État partie, le Comité accordera la force
qu'elles méritent aux allégations de l'auteur, selon lesquelles pendant
les 10 mois de détention provisoire qu'il a passés au poste de police
de Brown's Town, il n'a pas été séparé des condamnés, n'a pas bénéficié
d'un traitement différent correspondant à sa situation et est resté enchaîné.
En outre, au cours du procès, l'auteur a été frappé au visage par un policier
alors qu'il était reconduit à sa cellule. De l'avis du Comité, l'auteur
n'a pas été traité conformément aux paragraphes 1 et 2 a) du Pacte. Quant
à l'allégation selon laquelle l'auteur a été victime de brutalités gratuites
dans le quartier des condamnés à mort, le Comité observe qu'aucune précision
supplémentaire n'a été apportée pour l'étayer. Il ne constate en conséquence
aucune violation de l'article 10 à cet égard.
11.3 S'agissant de l'allégation de l'auteur selon laquelle au titre de
l'article 14 du Pacte sa cause n'a pas été entendue équitablement en raison
de la présence dans le jury d'une personne prétendument de parti pris
et de l'emploi d'une preuve à charge qui aurait été obtenue par la contrainte,
le Comité observe que ces questions n'ont pas été soulevées en première
instance. En outre, la minute de l'arrêt de la cour d'appel révèle que
la question du témoignage de l'auteur contre lui-même sans que la police
l'ait informé de ses droits a été soulevée devant le tribunal de première
instance, lorsque N. W. a témoigné que l'auteur avait fait sa déclaration
après avoir été informé par la police de ses droits. Ni le conseil ni
l'auteur n'ont alors prétendu que ce dernier n'avait pas été informé de
ses droits. De l'avis du Comité, on ne saurait imputer à l'État partie
le fait que le représentant de l'auteur se soit abstenu de signaler ces
questions au juge de première instance, ce qui expliquerait l'issue défavorable
du procès puisque l'avocat avait été engagé à titre privé. Le Comité ne
constate en conséquence aucune violation du paragraphe 1 de l'article
14 du Pacte à cet égard.
11.4 Le droit d'un accusé de disposer du temps et des facilités nécessaires
à la préparation de sa défense est une composante essentielle de la garantie
d'un procès équitable et un aspect important du principe de l'égalité
entre les parties. Lorsque la peine de mort est encourue, il va de soi
qu'il faut accorder suffisamment de temps à l'accusé et à son conseil
pour préparer la défense en vue du procès. La détermination de ce que
l'on entend par "suffisamment de temps" passe par une évaluation
des circonstances d'espèce. L'auteur affirme également qu'il n'a pu faire
citer d'autres témoins que son beau-frère. Comme le relève néanmoins le
Comité, il ne ressort nullement du dossier que le conseil ou l'auteur
lui-même aient fait valoir devant le tribunal de première instance que
le temps ou les moyens alloués pour la préparation de la défense avaient
été insuffisants. Si le conseil ou l'auteur estimaient que la défense
n'était pas suffisamment préparée, il leur incombait de solliciter un
renvoi. Rien n'indique non plus que la décision du conseil de ne pas faire
citer d'autres témoins n'était pas fondée sur des considérations professionnelles
ni que, si la comparution en tant que témoins de la mère et des soeurs
de l'auteur avait été demandée, le tribunal l'aurait refusée. En conséquence,
le Comité ne saurait conclure qu'il y a eu violation du paragraphe 3,
alinéas b) et e), de l'article 14 en ce qui concerne le procès de première
instance.
11.5 Pour ce qui est de l'allégation de l'auteur relative au retard intervenu
dans l'examen de l'appel, le Comité observe que, dans sa demande d'autorisation
de se pourvoir devant la cour d'appel, en date du 5 février 1985, l'auteur
indiquait qu'il demandait à la cour de lui assigner un avocat d'office.
Il ressort néanmoins aussi de cette demande que l'auteur a répondu affirmativement
à la question de savoir s'il avait les moyens d'engager lui-même un défenseur.
Sur la base des renseignements dont il dispose, le Comité n'est pas à
même de déterminer si le retard apporté au dép_t des moyens supplémentaires
d'appel était imputable ou non à l'auteur lui-même. Dans ce contexte,
le Comité relève que l'auteur n'a pas indiqué à quelle date il a informé
les autorités judiciaires qu'il n'avait pas les moyens d'engager un avocat
à titre privé, et à quelle date il a appris qu'un conseil avait été commis
d'office pour le défendre.
11.6 Quant aux allégations de l'auteur au titre des paragraphes 3 b),
d) et 5 de l'article 14, concernant la conduite de son appel, le Comité
commence par observer qu'un avocat a été assigné à l'auteur aux fins de
l'appel et que le paragraphe 3 d) de l'article 14 ne donne pas à l'accusé
le droit de choisir le défenseur qui lui est assigné gratuitement. Le
Comité observe par ailleurs que l'État partie n'a pas contesté l'allégation
de l'auteur selon laquelle il n'a pas pu donner d'instruction à son conseil
avant le débat d'appel. Dans la communication No 248/1987 (Glenford
Campbell c. Jamaïque)b, le Comité a estimé que,
du fait que l'avocat n'avait pas soulevé d'objection en première instance
à propos des aveux qui auraient été obtenus par la force, que cette négligence
avait influé sur le déroulement de la procédure d'appel et que l'auteur
n'avait pas eu la possibilité de donner des instructions à son avocat
au moment de l'appel ou de se défendre lui-même, on pouvait en conclure
que l'auteur avait été privé du droit d'être dûment représenté lors de
la procédure judiciaire et que les dispositions du paragraphe 3 d) de
l'article 14 du Pacte n'avaient pas été respectées. Le Comité observe
cependant que, dans la présente affaire, l'auteur n'aurait pas été autorisé,
sauf à pouvoir montrer l'existence de circonstances particulières, à soulever
en appel des questions qui n'avaient pas été soulevées par le conseil
en première instance. Dans ces conditions, et compte tenu du fait que
l'appel a effectivement été examiné par la cour d'appel, le Comité constate
qu'il n'y a pas eu violation des paragraphes 3 b), d) et 5 de l'article
14 du Pacte.
11.7 Pour ce qui est du grief au regard du paragraphe 3 g) de l'article
14, rapproché de l'article 7, le Comité rappelle que le libellé du paragraphe
3 g) de l'article 14 — qui dispose que toute personne a droit à
ne pas être forcée "de témoigner contre elle-même ou de s'avouer
coupable" — doit s'entendre comme l'absence de toute pression
physique ou psychologique, directe ou indirecte, des autorités d'instruction
sur l'accusé, dans le but d'obtenir un aveu. A fortiori est-il inacceptable
de traiter un accusé d'une façon contraire à l'article 7 du Pacte en vue
d'extorquer un aveu. Le Comité observe que, dans la présente affaire,
l'auteur prétend que N. W., l'agent chargé de l'enquête, l'a menacé d'une
arme pour le contraindre à signer une déclaration préétablie. Cette allégation
n'a pas été contestée par l'État partie. Par ailleurs, le Comité constate
que N. W. a témoigné au cours du procès que l'auteur avait fait sa déclaration
après avoir été informé de ses droits par la police. Le Comité observe
qu'en vue de vérifier ces différentes versions, on avait besoin des dépositions
écrites faites et utilisées lors de l'audience préliminaire. Le Comité
observe par ailleurs que le conseil a demandé à maintes occasions à l'État
partie de lui fournir la transcription de l'audience préliminaire, y compris
les dépositions des témoins, et que finalement, après plusieurs rappels,
les autorités judiciaires l'ont informé qu'elles étaient dans l'impossibilité
de les retrouver. L'État partie n'a pas contesté ces allégations et il
y a donc lieu de leur accorder la force qu'elles méritent. À cet égard
par conséquent le Comité constate qu'il y a eu violation du paragraphe
3 g) de l'article 14, ainsi que de l'article 7 du Pacte.
11.8 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la détention prolongée
de M. Berry et les conditions de sa détention dans le quartier des condamnés
à mort constitueraient un traitement cruel, inhumain ou dégradant, le
Comité observe que ces questions n'ont pas été étayées davantage. Le Comité
rappelle sa jurisprudence selon laquelle, lorsqu'ils présentent une communication
en vertu du Protocole facultatif, les auteurs doivent étayer leurs allégations
de violation des droits énoncés dans le Pacte; de simples affirmations
non étayées par des éléments de preuve ne sauraient suffire. En l'espèce,
l'auteur n'a pas démontré qu'il est victime d'une violation par l'État
partie de l'article 7 du Pacte en raison de sa détention prolongée dans
le quartier des condamnés à mort.
12. Le Comité est d'avis que prononcer la peine de mort aux termes de
procédures judiciaires où les dispositions du Pacte n'ont pas été respectées
constitue, si aucun appel ultérieur n'est possible, une violation de l'article
6 du Pacte. Dans le cas présent, si une requête constitutionnelle auprès
de la Cour suprême (constitutionnelle) reste en théorie toujours disponible,
ce ne serait pas un recours disponible au sens du paragraphe 2 b) de l'article
5 du Protocole facultatif pour les raisons énoncées au paragraphe 9.2
ci-dessus. Comme il l'a noté dans son observation générale 6 (16), la
disposition selon laquelle la peine de mort ne peut être prononcée que
selon la législation en vigueur et ne doit pas être en contradiction avec
les dispositions du Pacte implique que "les garanties d'ordre procédural
prescrites dans le Pacte doivent être observées, y compris le droit à
un jugement équitable rendu par un tribunal indépendant, la présomption
d'innocence, les garanties minima de la défense et le droit de recourir
à une instance supérieure"e. On peut par conséquent conclure
que la condamnation à mort définitive a été prononcée en violation des
prescriptions de l'article 14 et que, de ce fait, le droit protégé par
l'article 6 du Pacte a été violé.
13. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu du paragraphe
4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, estime que les faits dont il
est saisi font apparaître des violations de l'article 6, des paragraphes
3 et 4 de l'article 9, des paragraphes 1 et 2 a) de l'article 10, et du
paragraphe 3 g) de l'article 14, ainsi que de l'article 7 du Pacte.
14. Le Comité est d'avis que M. Albert Berry doit pouvoir disposer d'un
recours utile entraînant sa mise en liberté. Il prie l'État partie de
lui fournir, dans un délai de 90 jours, des renseignements sur toutes
mesures qu'il aura prises en rapport avec les constatations du Comité.
[Texte établi en anglais (version originale) et traduit en espagnol et
français.]
Notes
a Le 25 septembre 1992, le sénat a adopté la loi de 1992
portant amendement de la loi relative aux atteintes à la vie et à l'intégrité
des personnes. Celle-ci prévoit que les actes commis par des personnes
condamnées à la peine capitale peuvent être qualifiés de meurtres entraînant
la peine de mort ou de meurtres n'entraînant pas la peine de mort. La
première qualification rend obligatoire l'exécution de la peine de mort;
la seconde permet la commutation de la peine capitale en emprisonnement
à perpétuité. Dans ce dernier cas, le tribunal peut décider d'accorder
une libération conditionnelle à l'issue d'une période d'au moins sept
ans. En décembre 1992, la procédure de qualification (confiée à un magistrat
unique de la cour d'appel) a commencé; contrairement aux prévisions du
conseil, l'infraction dont M. Berry a été déclaré coupable a été qualifiée
de crime entraînant la peine capitale.
b Voir Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-septième
session, Supplément No 40 (A/47/40), annexe IX.D, constatations adoptées
à la quarante-quatrième session, le 30 mars 1992, par. 6.6.
c La procédure de réexamen en vertu de la loi est actuellement
suspendue dans l'attente de l'issue d'un recours constitutionnel formé
dans une autre affaire aux fins de contester la constitutionnalité de
la procédure de qualification instituée par la loi.
d Voir aussi les constatations du Comité dans les communications
Nos 230/1987 (Raphael Henry c. Jamaïque) et 283/1988 (Aston
Little c. Jamaïque), adoptées le 1er novembre 1991; Documents
officiels de l'Assemblée générale, quarante-septième session, Supplément
No 40 (A/47/40), annexes IX.B et J, par. 7.1 et suivants.
e Documents officiels de l'Assemblée générale, trente-septième
session, Supplément No 40 (A/37/40), annexe V, observation générale
No 6(16), par. 7.