Comité des droits de l'homme
Quarante-sixième session
ANNEXE
Constatations du Comité des droits de l'homme au titre du paragraphe
4 de
l'article 5 du Protocole Facultatif se rapportant au Pacte International
relatif aux Droits Civils et Politiques
- Quarante-sixième session -
Communications Nos 406/1990 et 426/1990*
Présentées par : Lahcen B.M. Oulajin et Mohamed Kaiss
[représentés par un conseil]
Au nom de : Les auteurs
Etat partie intéressé : Pays-Bas
Dates des communications : 24 avril 1990 et 22 août 1990
Le Comité des droits de l'homme, créé en vertu de l'article 28
du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 23 octobre 1992,
Ayant achevé l'examen des communications Nos 406/1990 et 426/1990,
présentées au Comité des droits de l'homme respectivement par M. Lahcen
B. M. Oulajin et M. Mohamed Kaiss, conformément au Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Ayant pris en considération toutes les informations écrites qui
lui ont été fournies par les auteurs des communications, leur conseil
et l'Etat partie,
Adopte ses constatations au titre du paragraphe 4 de l'article
5 du Protocole facultatif Le texte d'une opinion individuelle
formulée par MM. Kirt Herndl, Rein Müllerson, Birame N'Diaye et Waleed
Sadi est joint aux présentes constatations..
1. Les auteurs des communications sont Lahcen Oulajin et Mohamed Kaiss,
ressortissants marocains nés, le premier, le 1er juillet 1942, et le deuxième,
le 7 juillet 1950, et résidant tous deux actuellement à Alkmaar, aux Pays-Bas.
Ils se prétendent victimes d'une violation, par les Pays-Bas, des articles
17 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Ils sont représentés par un conseil.
Les faits présentés
2.1 L'épouse de M. Oulajin et leurs deux enfants vivent au Maroc. Le
19 octobre 1981, le frère de l'auteur est mort, laissant quatre enfants
nés, respectivement, en 1970, 1973, 1976 et 1979. Par la suite, l'épouse
de l'auteur a pris ses neveux à sa charge, au Maroc, avec le consentement
de leur mère.
2.2 L'épouse de M. Kaiss et leur enfant vivent au Maroc. Le 13 juillet
1979, le père de l'auteur est mort, laissant deux jeunes enfants, nés
respectivement en 1971 et 1974. Par la suite, l'auteur a pris la responsabilité
de l'éducation de ces enfants, qui ont été recueillis par la famille de
l'auteur au Maroc.
2.3 Les auteurs, qui affirment supporter seuls l'entretien desdits membres
de leur famille, ont demandé à bénéficier de prestations au titre de la
loi néerlandaise sur les allocations familiales (Algemene Kinderbijslagwet),
affirmant que ces enfants étaient des enfants recueillis et pris en chargea.
Par lettres datées respectivement du 7 mai 1985 et du 2 mai 1984, le Conseil
du travail (Raad van Arbeid) d'Alkmaar a fait savoir aux auteurs
que, s'ils avaient droit à des prestations pour leurs propres enfants,
ils ne pouvaient en recevoir pour leurs frère et soeur et leurs neveux.
Le Conseil ajoutait que ces enfants ne pouvaient être considérés comme
des enfants recueillis et pris en charge au sens de la loi sur les allocations
familiales, du fait que les auteurs résidaient aux Pays-Bas et ne pouvaient
intervenir dans leur éducation, comme l'exigeaient les dispositions du
paragraphe 5 de l'article 7 de la loi.
2.4 L'un et l'autre auteurs ont fait appel de cette décision devant le
Conseil d'appel (Raad van Beroep) de Haarlem. Ce dernier a rejeté
ces recours, respectivement, le 19 février et le 6 mai 1986. Les auteurs
ont alors fait appel devant le Conseil central d'appel (Centrale Raad
van Beroep), en faisant notamment valoir que, faute d'argent, il leur
était devenu impossible de subvenir aux besoins des enfants qu'ils avaient
recueillis et pris en charge et que leur vie familiale en pâtissait; les
auteurs affirmaient constituer avec lesdits enfants une cellule familiale
au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits
de l'homme et des libertés fondamentales. Ils précisaient qu'exiger d'eux
qu'ils interviennent activement dans l'éducation de ces enfants équivaudrait
à de la discrimination, car il serait difficile, pour des travailleurs
migrants, de satisfaire à cette exigence. Ils ajoutaient que cette condition
n'était pas requise dans le cas de leurs propres enfants.
2.5 Par décision du 4 mars 1987, le Conseil central d'appel a rejeté
ces recours. Le Conseil appuyait notamment cette décision sur le fait
qu'au sujet de l'éducation d'enfants recueillis et pris en charge, le
demandeur devait prouver l'existence de liens étroits entre ces enfants
et lui-même pour pouvoir bénéficier de prestations familiales. Le Conseil
considérait qu'il ne s'agissait pas de situations similaires traitées
inégalement, et qu'il n'y avait donc pas de discrimination. En soutenant
qu'il devait exister une relation étroite et exclusive entre les enfants
et la personne demandant des allocations familiales, le Conseil estimait
que cette relation étroite était réputée exister quand il s'agissait des
propres enfants du demandeur, alors qu'elle devait être rendue plausible
dans le cas d'enfants recueillis et pris en charge.
2.6 Les auteurs en ont appelé à la Commission européenne des droits de
l'homme en invoquant les articles 8 (cf. art. 17 du Pacte) et 14 (cf.
art. 26 du Pacte) de la Convention européenne de sauvegarde des droits
de l'homme et des libertés fondamentales. Par décision du 6 mars 1989,
la Commission a conclu que leurs communications étaient irrecevables ratione
materiae, la Convention ne s'étendant pas au droit aux allocations
familiales. En particulier, l'article 8 ne pouvait être interprété comme
obligeant un Etat à verser pareilles prestations. Le droit aux allocations
familiales était un droit de sécurité sociale, qui n'entrait pas dans
le champ d'application de la Convention. Quant à la discrimination alléguée,
la Commission réaffirmait que l'article 14 de la Convention européenne
n'avait pas d'existence indépendante, mais portait seulement sur les droits
et obligations reconnus dans la Convention.
La plainte
3.1 Les auteurs affirment que les autorités néerlandaises ont violé l'article
26 du Pacte. Ils se réfèrent à l'Observation générale du Comité des droits
de l'homme relative à l'article 26, où il est dit notamment que la non-discrimination
est un principe fondamental et général en matière de protection des droits
de l'homme. Les auteurs soutiennent qu'une distinction inadmissible est
faite dans leur cas entre "enfants propres" et "enfants
recueillis et pris en charge", qui appartiennent tous à la même famille
au Maroc.
3.2 Les auteurs font observer qu'en fait, les différents enfants vivent
dans les mêmes conditions, et qu'en réalité, les uns et les autres ont
les mêmes parents. Les autorités néerlandaises versent des allocations
familiales pour les enfants par le sang séparés de leurs parents et résidant
à l'étranger, que le parent résidant aux Pays-Bas intervienne ou non dans
leur éducation. Les auteurs estiment donc injuste que des allocations
soient refusées pour les enfants qu'ils ont recueillis et pris en charge
pour la seule raison qu'eux-mêmes ne peuvent pas intervenir activement
dans leur éducation. Selon eux, on a "établi une distinction"
qui ne repose pas sur des critères "raisonnables et objectifs".
3.3 Les auteurs font observer que, dans la décision d'attribution de
prestations, les "critères occidentaux" ne sont pas les seuls
qui doivent être pris en compte. C'est conformément à la tradition marocaine
qu'ils ont recueilli ces proches dans leur famille.
3.4 Les auteurs affirment en outre qu'il y a eu violation de l'article
17 du Pacte : actuellement ch_meurs aux Pays-Bas, ils sont tributaires
d'une allocation qui leur est versée conformément à la loi sur le régime
général de la sécurité sociale. Le montant de cette allocation correspond
au minimum social. Les auteurs ont absolument besoin des allocations familiales
pour subvenir aux besoins de leur famille au Maroc. Leur refuser des allocations
familiales pour les enfants qu'ils ont recueillis et pris en charge revient
en fait à "les empêcher de mener une vie de famille" et constitue
une violation des droits que leur garantit l'article 17.
Considérations et décisions du Comité quant à la recevabilité
4.1 Le Comité a examiné la recevabilité de ces communications respectivement
à ses quarante et unième et quarante-deuxième sessions. Il a noté que
l'Etat partie n'avait pas élevé d'objection au sujet de la recevabilité,
confirmant que les auteurs avaient épuisé tous les recours internes. Il
a noté aussi que les faits soumis par les auteurs ne soulevaient pas de
question relevant de l'article 17 du Pacte, et que cet aspect de la communication
était donc irrecevable ratione materiae en vertu de l'article 3
du Protocole facultatif.
4.2 En ce qui concerne les allégations des auteurs selon lesquelles ceux-ci
étaient victimes de discrimination, le Comité a pris note de ce que les
intéressés affirmaient que la distinction qui était faite, dans la loi
sur les allocations familiales, entre les enfants par le sang et les enfants
recueillis et pris en charge n'était pas fondée sur des critères raisonnables
et objectifs, et il a décidé d'examiner cette question à la lumière des
observations de l'Etat partie quant à son bien-fondé.
4.3 Par décision du 23 mars 1991, le Comité des droits de l'homme a déclaré
que la communication de M. Oulajin était recevable comme pouvant soulever
des questions relevant de l'article 26 du Pacte. Par décision du 4 juillet
1991, il a déclaré de même recevable la communication de M. Kaiss. Le
4 juillet 1991, le Comité a décidé de joindre l'examen des deux communications.
Précisions apportées par l'Etat partie et observations de l'auteur
à leur sujet
5.1 Le 30 mars 1992, l'Etat partie a expliqué que, conformément à la
loi néerlandaise sur les allocations familiales, les personnes qui résident
aux Pays-Bas bénéficient, quelle que soit leur nationalité, de versements
destinés à les aider à subvenir aux besoins de leurs enfants mineurs.
Sous réserve de certaines conditions, ces personnes peuvent recevoir des
allocations non seulement pour leurs propres enfants mais aussi pour les
enfants qu'ils ont recueillis et pris en charge. Il faut pour cela que
les parents a) subviennent aux besoins de l'enfant recueilli et pris en
charge, et b) l'élèvent comme s'il s'agissait de leur propre enfant.
5.2 L'Etat partie affirme que les allégations de discrimination formulées
par les auteurs soulèvent deux questions :
1) Savoir si la distinction entre les enfants propres et les enfants
recueillis et pris en charge constitue une violation des dispositions
de l'article 26 du Pacte;
2) Savoir si les règles concernant le droit aux allocations familiales
pour les enfants recueillis et pris en charge qui sont appliquées aux
Pays-Bas ont pour conséquence de défavoriser injustement les ressortissants
étrangers résidant aux Pays-Bas.
5.3 Sur le premier point, l'Etat partie répond que, pour avoir droit
à des allocations familiales au titre d'un enfant recueilli et pris en
charge, l'intéressé doit élever ledit enfant d'une manière qui soit comparable
à la façon dont les parents élèvent normalement leurs propres enfants.
Cette condition n'est pas requise en ce qui concerne les propres enfants
de l'intéressé. L'Etat partie affirme que cette distinction n'est pas
contraire à l'article 26 du Pacte; il soutient que les règles en question
doivent permettre de déterminer, d'après des critères objectifs, si le
lien entre le parent nourricier et l'enfant qu'il a recueilli et pris
en charge est suffisamment étroit pour qu'il convienne de verser une allocation
au titre de cet enfant au même titre que s'il s'agissait de l'enfant propre
du parent nourricier.
5.4 Sur le deuxième point, l'Etat partie affirme que rien n'indique que
cette réglementation affecte les travailleurs migrants plus que les ressortissants
néerlandais. Il soutient que les conditions auxquelles la loi subordonne
le versement d'allocations pour des enfants recueillis et pris en charge
sont appliquées strictement, quels que soient la nationalité du demandeur
ou le lieu de résidence des enfants recueillis et pris en charge. Il affirme
que la jurisprudence montre que les ressortissants néerlandais qui résident
aux Pays-Bas sont eux aussi considérés comme n'ayant pas droit à des allocations
au titre des enfants qu'ils ont recueillis et pris en charge si ces derniers
résident à l'étranger. De plus, si l'un des deux parents ou les deux parents
sont en vie, on considère en principe que le parent biologique conserve
des liens avec l'enfant, de sorte que dans ce cas, en règle générale,
le parent nourricier ne satisfait pas aux conditions de la loi relative
aux allocations familiales.
5.5 L'Etat partie affirme en outre que, même si les travailleurs migrants
sont proportionnellement moins nombreux que les ressortissants néerlandais
à remplir les conditions auxquelles est subordonné le versement des allocations
familiales pour enfants recueillis et pris en charge, il n'en découle
pas nécessairement une discrimination au sens de l'article 26 du Pacte.
Il rappelle à cet égard, la décision rendue par le Comité au sujet de
la communication No 212/1986 P.P.C. c. Pays-Basb,
dans laquelle le Comité concluait que le champ d'application de l'article
26 ne s'étendait pas aux différences de résultat que pouvait donner l'application
de règles communes sur l'attribution d'allocations.
5.6 En conclusion, l'Etat partie fait observer que les règlements considérés
constituent un moyen nécessaire et approprié d'atteindre les objectifs
de la loi sur les allocations familiales, qui sont de contribuer financièrement
à l'entretien des enfants avec lesquels l'intéressé a des relations de
parenté étroites et exclusives, et qu'ils n'entraînent pas de discrimination
au sens de l'article 26 du Pacte.
6.1 Commentant les observations de l'Etat partie, le conseil réaffirme
que la distinction entre les enfants propres et les enfants recueillis
et pris en charge qui est prévue dans la loi relative aux allocations
familiales est discriminatoire. Il affirme que les enfants que les auteurs
ont recueillis et pris en charge vivent exactement dans les mêmes conditions
que les propres enfants des auteurs. Il se fonde à ce sujet, sur l'article
24 du Pacte, qui dispose que tout enfant, sans discrimination aucune,
notamment quant à la naissance, a droit, de la part de sa famille, de
la société et de l'Etat, aux mesures de protection qu'exige sa condition
de mineur. Selon le conseil, aucune distinction ne peut être faite entre
les enfants propres des auteurs et les enfants que les auteurs ont recueillis
et pris en charge en ce qui concerne le caractère intense et exclusif
des relations existant entre eux.
6.2 Le conseil affirme en outre qu'il est évident que cette distinction
a plus de conséquences pour les salariés étrangers travaillant aux Pays-Bas
que pour les résidents néerlandais, les premiers préférant souvent laisser
leur famille dans leur pays d'origine alors que la question ne se pose
pas pour les seconds. Il affirme à ce sujet, que l'Etat partie ne tient
pas compte du fait que les Pays-Bas doivent être considérés comme un pays
d'immigration.
Examen du bien-fondé de la demande
7.1 Le Comité des droits de l'homme a examiné les présentes communications
à la lumière de tous les renseignements qui lui avaient été communiqués
par les parties, conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l'article
5 du Protocole facultatif.
7.2 Le Comité doit dire si les auteurs sont victimes d'une violation
des dispositions de l'article 26 du Pacte en raison du fait que les autorités
néerlandaises refusent de verser des allocations familiales au titre de
certains membres de la famille des auteurs qui seraient à la charge de
ces derniers.
7.3 Selon la jurisprudence constante du Comité, bien que le Pacte international
relatif aux droits civils et politiques n'oblige pas les Etats parties
à adopter une législation en matière de sécurité sociale, ils doivent,
s'ils le font, veiller à ce que cette législation et son application soient
conformes aux dispositions de l'article 26 du Pacte. Le principe de non-discrimination
et d'égalité devant la loi exige que toute distinction en matière de droit
aux prestations repose sur des critères raisonnables et objectifsc.
7.4 En ce qui concerne la loi sur les allocations familiales, l'Etat
partie affirme qu'il existe des différences objectives entre les propres
enfants d'une personne et les enfants recueillis et pris en charge par
une personne, et que ces différences justifient un traitement différent
aux fins de l'application de cette loi. Le Comité considère que la distinction
est objective et qu'il reste à savoir si elle est raisonnable. Considérant
qu'il est peut-être inévitable que l'octroi de prestations soit assorti
de certaines limitations, le Comité s'est demandé si la distinction établie
entre les enfants propres et les enfants recueillis et pris en charge
établie dans la loi sur les allocations familiales était déraisonnable,
en particulier s'il était déraisonnable d'exiger qu'un parent nourricier
intervienne dans l'éducation des enfants qu'il avait recueillis et pris
en charge pour lui octroyer des allocations. A la lumière des explications
données par l'Etat partie, le Comité estime que la distinction établie
dans la loi sur les allocations familiales n'est pas incompatible avec
l'article 26 du Pacte.
7.5 La distinction établie dans la loi sur les allocations familiales
entre les propres enfants d'une personne et les enfants recueillis et
pris en charge par une personne exclut l'octroi d'allocations au titre
des enfants recueillis et pris en charge qui ne vivent pas avec le parent
nourricier. A cet égard, les auteurs affirment que l'application de cette
loi est, en pratique, un cas de discrimination à l'égard des travailleurs
migrants puisqu'elle pèse plus lourdement sur les travailleurs migrants
que sur les ressortissants néerlandais. Le Comité note que les auteurs
n'ont présenté aucun élément concret à l'appui de leurs dires et remarque,
en outre, que la loi sur les allocations familiales ne fait aucune distinction
entre ressortissants néerlandais et non-ressortissants tels que travailleurs
migrants. Le Comité considère que la portée de l'article 26 du Pacte ne
s'étend pas aux différences résultant de l'égale application, pour l'octroi
de prestations, de règles communes.
8. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu du paragraphe 4
de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, constate que les faits à lui
soumis ne font pas apparaître qu'il y ait eu violation d'une disposition
quelconque du Pacte.
Notes
a Aux fins de la présente décision, l'enfant recueilli et
pris en charge s'entend de l'enfant qui est élevé par des personnes autres
que ses parents biologiques ou adoptifs.
b Déclarée irrecevable le 24 mars 1988 (par. 6.2).
c Voir Broeks c. Pays-Bas, communication No
172/1984, et Zwaan-de Vries c. Pays-Bas, communication No
182/1984, constatations adoptées le 9 avril 1987, par. 12.4; Vos
c. Pays-Bas, communication No 218/1986, constatations adoptées
le 29 mars 1989, par. 11.3; Pauger c. Autriche, communication
No 415/190, constatations adoptées le 26 mars 1992, par. 7.2; Sprenger
c. Pays-Bas, communication No 395/1990, constatations adoptées
le 31 mars 1992, par. 7.2.
APPENDICE*
Opinion individuelle présentée par MM. Kurt Herndl, Rein
Müllerson, Birame N'Diaye et Waleed Sadi, conformément
au paragraphe 3 de l'article 94 du règlement intérieur du
Comité
Nous nous rangeons au point de vue du Comité lorsqu'il constate que
les faits à lui soumis ne font pas apparaître qu'il y ait eu violation
de l'article 26 du Pacte. Tout en renvoyant à l'opinion individuelle jointe
à la décision concernant Sprenger c. Pays-Basa
(communication No 395/1990), nous estimons approprié de développer quelque
peu le raisonnement du Comité tel qu'il apparaît dans ces constatations
et dans les constatations du Comité concernant les communications Nos
172/1984, Broeks c. Pays-Bas et 182/1984, Zwaan-de Vries
c. Pays-Basb.
Il est évident que si l'article 26 du Pacte postule un droit autonome
à la non-discrimination, la mise en oeuvre de ce droit peut prendre des
formes différentes, selon la nature du droit auquel le principe de non-discrimination
est appliqué.
En ce qui concerne l'application de l'article 26 du Pacte dans le domaine
des droits économiques et sociaux, il est évident que la législation relative
à la sécurité sociale, qui vise à atteindre des objectifs de justice sociale,
doit nécessairement faire des distinctions. Il appartient au corps législatif
de chaque pays, qui est le mieux à même de connaître les besoins socio-économiques
de la société intéressée, de s'efforcer de réaliser la justice sociale
dans le contexte concret. A moins que les distinctions faites ne soient
manifestement discriminatoires ou arbitraires, il n'appartient pas au
Comité de réévaluer des données socio-économiques complexes et de substituer
son jugement à celui du corps législatif des Etats parties.
De plus, il nous semble essentiel de garder le sens des proportions.
Dans les affaires présentes, nous notons que les auteurs demandent des
allocations familiales non seulement pour leurs propres enfants —
auquel cas ils y ont droit en vertu de la législation des Pays-Bas —
mais aussi pour des frères et soeurs, neveux et nièces, dont ils affirment
avoir accepté la responsabilité et qu'ils considèrent par conséquent comme
personnes à charge. Sur la base des informations soumises au Comité, pareilles
exigences semblent aller à l'encontre d'un juste sens des proportions,
et le fait que le gouvernement refuse de les satisfaire ne peut être considéré
comme déraisonnable, compte tenu des limitations budgétaires qui existent
dans tout système de sécurité sociale. Les Etats parties au Pacte peuvent,
certes, vouloir étendre le bénéfice de prestations sociales à d'aussi
vastes catégories de personnes à charge, mais l'article 26 du Pacte ne
leur en fait pas obligation.
a Constatations adoptées le 31 mars 1992 (quarante-quatrième
session).
b Constatations adoptées le 9 avril 1987 (vingt-neuvième
session).
[Texte établi en anglais (version originale) et traduit en espagnol,
en français et en russe.]