Comité des droits de l'homme
Quarante-sixième session
ANNEXE
Décisions du Comité des droits de l'homme déclarant irrecevables
des communications présentées en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques
- Quarante-sixième session -
Communication No 427/1990
Présentée par : H. H. (nom supprimé)
Au nom de : L'auteur
Etat partie : Autriche
Date de la communication : 20 septembre 1990 (date de la lettre
initiale)
Le Comité des droits de l'homme, créé en vertu de l'article 28
du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 22 octobre 1992,
Adopte la décision ci-après :
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication (datée du 20 septembre 1990) est H. H.,
citoyen autrichien domicilié à Vienne. Il affirme être victime de violations,
par l'Autriche, des articles 7, 17, 23 et 26 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques. Le Protocole facultatif est entré en
vigueur pour l'Autriche le 10 mars 1988.
Les faits présentés
2.1 L'auteur est professeur de biomécanique à l'Université de Vienne.
Depuis 1986, il cherche à faire construire une maison à E., en Basse-Autriche
(Niederösterreich); le maire d'E. aurait usé de ses pouvoirs administratifs
pour l'empêcher d'obtenir un permis de construire.
2.2 Le maire d'E. aurait, depuis 1986, adressé à l'auteur plusieurs citations,
avis et décisions, dont beaucoup invoquaient des dispositions du code
du bâtiment et de la construction de Basse-Autriche (Niederösterreichische
Bauordnung), dans le but de l'importuner. Les autorités administratives
de Basse-Autriche et les tribunaux ont par la suite jugé ces citations
et décisions contraires à la loi. L'auteur soutient qu'il a dû investir
énormément de temps et d'argent pour s'assurer les services d'avocat nécessaires
pour repousser les attaques du maire.
2.3 Selon l'auteur, les faits sont les suivants. Le 14 mars 1988, le
maire d'E. a ordonné par arrêté à l'auteur de payer une importante somme
d'argent (Aufschliessungsbeitrag) en contrepartie de l'autorisation
de regrouper deux terrains à bâtir. Trois conseillers juridiques de l'administration
locale auraient expliqué par lettre au maire que son arrêté n'était pas
fondé en droit. Passant outre à cet avis, celui-ci a engagé une procédure
au terme de laquelle une fraction importante du traitement de l'auteur
a été saisie et virée à un compte de la commune.
2.4 Le 6 juillet 1990, la Cour administrative suprême d'Autriche (Verwaltungsgerichtshof)
a donné gain de cause à l'auteur et confirmé que les mesures prises par
le maire n'étaient pas fondées en droit. La somme d'argent prise à l'auteur
devait lui être rendue.
2.5 L'auteur déclare que la "situation insupportable" résultant
des mesures prises par le maire contre lui a eu pour effet de l'empêcher
sérieusement de poursuivre normalement ses activités professionnelles,
de participer à des colloques scientifiques et de publier ses travaux.
En effet, explique-t-il, depuis 1986, il a passé plus de 600 heures à
rédiger "un nombre incalculable de recours et de lettres" pour
défendre ses droits, ce qui a entraîné pour lui une perte financière de
près de 90 000 dollars des Etats-Unis, pour laquelle il estime être en
droit d'obtenir une indemnisation.
2.6 L'auteur déclare en outre avoir demandé au Gouverneur de la province
de Basse-Autriche et au Vice-Chancelier de la République d'ouvrir une
enquête sur le comportement du maire d'E. Or, ceux-ci l'ont informé qu'ils
n'avaient pas compétence pour ce faire, eu égard à l'autonomie reconnue
aux municipalités (Gemeindeautonomie) en Autriche. L'auteur soutient
qu'après ces démarches il a épuisé les recours internes qui lui étaient
ouverts.
La plainte
3.1 D'après l'auteur, la procédure engagée par le maire d'E. a causé
un "préjudice irréparable" à sa réputation à l'Université de
Vienne, de nombreux départements universitaires, le Doyen de sa faculté,
le Recteur de l'Université et certains de ses collègues ayant été mêlés
à la "procédure dégradante" engagée contre lui ou ayant été
au courant de celle-ci. Il estime que les "attaques illégales"
du maire constituent une violation du paragraphe 1 de l'article 17 du
Pacte.
3.2 L'auteur affirme en outre que le "harcèlement et la torture
mentale constants" auxquels le maire l'a soumis depuis 1986 ont gravement
porté atteinte à la santé, à la sécurité et au bien-être de lui-même et
de sa famille, ce qui constitue une violation de l'article 7 et du paragraphe
1 de l'article 23 du Pacte.
Observations de l'Etat partie et réponses de l'auteur
4. Dans ses observations datées du 24 septembre 1991, l'Etat partie affirme
que la communication de l'auteur est irrecevable. Selon l'Etat partie,
il a été remédié à toutes les actions illégales du maire; l'auteur n'a
pas étayé ses allégations selon lesquelles il est toujours victime d'une
violation des articles 7, 17, 23 et 26 du Pacte. L'Etat partie soutient
en outre que l'auteur n'a pas épuisé les recours au pénal et les recours
constitutionnels.
5.1 Dans ses commentaires, l'auteur conteste l'affirmation de l'Etat
partie selon laquelle les recours au pénal et les recours constitutionnels
ne sont pas tous épuisés. Il déclare que le 29 août 1988 et le 21 septembre
1990, il a porté plainte au pénal contre le maire pour abus de pouvoir
dans l'exercice de ses fonctions; à deux reprises, le ministère public
a refusé d'engager des poursuites pénales contre le maire. L'auteur joint
une copie des deux notifications l'informant du rejet de ses plaintes.
Il affirme en outre qu'il a porté plainte auprès des autorités compétentes
de Basse-Autriche le 28 mai 1990 pour violation du principe d'égalité
inscrit dans la Constitution, plainte qui a été rejetée le 22 mars 1991.
5.2 L'auteur affirme qu'il souffre toujours des conséquences des actes
illégaux commis intentionnellement par le maire, actes qui, selon l'auteur,
équivalaient à un traitement inhumain et dégradant. Il déclare en outre
que le remède apporté à ces illégalités, c'est-à-dire l'annulation des
décisions du maire, est insuffisant parce qu'il n'a pas été indemnisé
pour le préjudice causé à sa réputation et pour le temps et l'argent qu'il
a dépensés pour faire appel desdites décisions.
Délibérations du Comité et questions dont il est saisi
6.1 Avant d'examiner une plainte contenue dans une communication, le
Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son
règlement intérieur, décider si la communication est ou non recevable
en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
6.2 Le Comité considère que l'auteur n'a pas suffisamment étayé pour
justifier une décision de recevabilité son affirmation selon laquelle
il est victime de violations, par l'Etat partie, des articles 7, 17, 23
et 26 du Pacte. Le Comité note en outre que les allégations de l'auteur
concernent des décisions prises par le maire d'E. qui ont par la suite
été déclarées nulles par des autorités supérieures ou par des tribunaux.
Le Comité conclut donc que l'auteur a présenté une communication qui ne
satisfait pas aux dispositions de l'article 2 du Protocole facultatif.
6.3 Dans la mesure où il ressort que l'auteur demande à être indemnisé
pour le préjudice causé à sa réputation et pour le temps et l'argent qu'il
a dépensés pour faire appel des décisions du maire, le Comité note que
l'auteur n'a pas engagé de poursuites civiles contre les personnes ou
les entités qui, selon lui, étaient responsables de ce préjudice. Le Comité
conclut donc que, de ce point de vue, l'auteur n'a pas épuisé les recours
internes dont il dispose.
7. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide :
a) Que la communication est irrecevable en vertu de l'article 2 et du
paragraphe 2 b) de l'article 5 du Protocole facultatif;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'Etat partie et à l'auteur
de la communication.
[Texte établi en anglais (version originale) et traduit en espagnol,
français et russe.]