Comité des droits de l'homme
Quarante-neuvième session
ANNEXE
Constatations du Comité des droits de l'homme au
titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte international
- Quarante-neuvième session -
Communication No. 468/1991
Présentée par : Angel N. Oló Bahamonde
Au nom de : L'auteur
État partie : Guinée équatoriale
Date de la communication : 11 juin 1991 (date de la lettre initiale)
Le Comité des droits de l'homme, institué conformément à l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 20 octobre 1993,
Ayant achevé l'examen de la communication No 468/1991, présentée
au Comité par M. Angel N. Oló Bahamonde en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui
ont été fournies par l'auteur de la communication et par l'État partie,
Adopte les constatations suivantes au titre du paragraphe 4 de
l'article 5 du Protocole facultatif.
Rappel des faits présentés par l'auteur
1. De nationalité équato-guinéenne, l'auteur de la communication, Angel
N. Oló Bahamonde, né en 1944, est propriétaire terrien, ingénieur des
mines et ancien fonctionnaire. Jusqu'à l'été de 1991, il résidait à Malabo
(Guinée équatoriale); en septembre 1991, il a fui le pays et s'est réfugié
en Espagne. Il réside actuellement à Luanco (Espagne). Il affirme être
victime, de la part des autorités de la Guinée équatoriale, de violations
des articles 6 (par. 1), 9, 12, 14, 16, 17, 19, 20 (par. 2), 25, 26 et
27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en
même temps que de son article 2.
2.1 Le 4 mars 1986, le passeport de l'auteur a été confisqué à l'aéroport
de Malabo, et le 26 mars 1986, il l'était à nouveau à l'aéroport de Libreville
(Gabon), sur ordre, en chaque cas, selon lui, du président Obiang de la
Guinée équatoriale. Du 26 mai au 17 juin 1987, l'auteur a été détenu sur
ordre du Gouverneur de Bioko. Certaines de ses terres ont été confisquées
en octobre 1987; l'auteur s'en est plaint aux autorités et directement
au président Obiang, mais en vain. Un peu plus tard, 22,2 tonnes de cacao
provenant de ses plantations étaient confisquées sur ordre du Premier
Ministre, et ses protestations et son recours du 28 février 1988 à ce
sujet ont été purement et simplement ignorés. Une partie de ses cultures
aurait été détruite par les militaires en 1990 et 1991, et aucune suite
n'aurait été donnée non plus à ses demandes d'indemnisation.
2.2 Le 16 janvier 1991, le président Obiang a accordé à l'auteur une
entrevue personnelle à l'occasion de laquelle celui-ci lui a exposé ses
griefs et remis copie du dossier de son affaire, et notamment des plaintes
qu'il lui avait précédemment adressées. Les dommages que l'auteur dit
avoir subis comprendraient l'expropriation de plusieurs de ses fermes,
en vertu du décret 125/1990 du 13 novembre 1990, la destruction de cultures
de maïs et de soja d'une valeur supérieure à 5 millions de francs CFA,
et l'exploitation d'une zone forestière d'une valeur de 5 millions de
francs CFA lui appartenant. Enfin, des projets de développement industriel
et de prospection pétrolière, qu'il avait mis au point pour le gouvernement
et qui sont évalués à quelque 835 millions de francs CFA, ont été mis
en oeuvre sans qu'il reçoive la moindre rémunération pour ses services.
2.3 Selon l'auteur, il n'y a pas de recours internes utiles à épuiser
dans son pays, ni même à exercer, étant donné que le président Obiang
a la haute main sur le pouvoir judiciaire à tous les niveaux.
Teneur de la plainte
3.1 L'auteur se plaint que lui-même et d'autres personnes qui, comme
lui, ne partagent pas les idées du parti dirigeant du président Obiang
ou n'adhèrent pas à ce parti, ou qui n'appartiennent pas au moins à son
clan (le clan Mongomo), font l'objet à des degrés divers de discrimination,
manoeuvres d'intimidation et de persécutions. L'auteur soutient, en particulier,
avoir été victime de persécutions systématiques de la part du Premier
Ministre, du Vice-Premier Ministre, du Gouverneur de Bioko et du Ministre
des relations extérieures, qui ont tous, par l'intermédiaire de leurs
services respectifs, proféré des menaces contre lui, essentiellement en
raison de son opposition déclarée au régime en place. Il soutient en outre
que les ambassadeurs de Guinée équatoriale en Espagne, en France et au
Gabon ont reçu pour instructions de "lui rendre la vie difficile"
lorsqu'il voyage à l'étranger.
3.2 L'auteur affirme que sa détention de mai à juin 1987 était arbitraire,
qu'aucune inculpation ne lui a été notifiée et qu'il n'a jamais été présenté
à un juge ou à un officier de justice durant toute cette période.
3.3 Il affirme également avoir été empêché de voyager librement dans
son pays et de le quitter à son gré.
Observations de l'État partie et commentaires de l'auteur
4.1 L'État partie relève que l'auteur n'a pas épuisé les recours internes
disponibles puisqu'il n'a saisi aucun tribunal local, civil ou administratif.
Il ajoute, sans autre précision, que l'affirmation de l'auteur selon laquelle
les organes judiciaires de la Guinée équatoriale sont manipulés par le
gouvernement et le président Obiang est sans fondement.
4.2 L'État partie affirme que l'auteur pouvait invoquer devant les juridictions
nationales, les lois et règlements ci-après, que les tribunaux sont tenus
d'appliquer :
a) La loi fondamentale de la Guinée équatoriale, du 15 août 1982;
b) La loi No 10/1984 sur l'organisation de la justice;
c) Le décret No 28/1980, du 11 novembre 1980, régissant la procédure
à suivre devant les juridictions administratives;
d) Le décret No 4/1980, du 3 avril 1980, réglementant l'application
subsidiaire des lois et règlements espagnols anciens restés applicables
en Guinée équatoriale jusqu'au 12 octobre 1968.
L'État partie n'indique pas quel est le lien entre ces renseignements
et les circonstances propres au cas de l'auteur.
5.1 Dans ses commentaires, l'auteur conteste les arguments de l'État
partie et envoie copie des documents attestant les nombreuses démarches,
administratives, judiciaires et autres, qu'il a faites pour obtenir réparation,
ajoutant que toutes les voies de recours qui, selon l'État partie, lui
sont ouvertes, ont été systématiquement bloquées par les autorités et
par le Président de la République en personne. Il soutient, à cet égard,
que les tribunaux ne peuvent pas agir impartialement ni en toute indépendance
en Guinée équatoriale, puisque tous les juges et magistrats sont désignés
directement par le président Obiang et que le président de la cour d'appel
est lui-même membre des forces de sécurité présidentielles.
5.2 L'auteur soutient avoir reçu des menaces de mort depuis qu'il a quitté
la Guinée équatoriale. Il affirme que les services de sécurité de Guinée
équatoriale ont reçu l'ordre de l'éliminer, au besoin en Espagne. À ce
propos, il fait valoir que son départ de Malabo n'a été possible qu'avec
la protection et l'aide d'un Allemand. En outre, tous les biens qu'il
avait laissés en Guinée équatoriale auraient été systématiquement détruits
ou expropriés depuis le 29 septembre 1991.
La décision du Comité sur la recevabilité
6.1 À sa quarante-quatrième session, en mars 1992, le Comité a examiné
la question de la recevabilité de la communication. Il a pris acte de
la thèse de l'État partie, à savoir, que des recours internes étaient
accessibles à l'auteur, ainsi que de la contestation par l'auteur de cette
affirmation. Il a rappelé qu'il ressort implicitement de l'article 91
de son règlement intérieur et du paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole
facultatif qu'un État partie au Pacte doit porter à la connaissance du
Comité tous les renseignements dont il dispose, ce qui comprend, au stade
où celui-ci doit décider de la recevabilité d'une communication, des renseignements
détaillés sur les recours qui sont ouverts, dans les circonstances propres
à leur cas, aux personnes qui se disent victimes de violations de leurs
droits. Considérant que l'État partie n'a pas rattaché ses observations
aux circonstances propres au cas de l'auteur, et vu la très complète documentation
soumise par celui-ci à l'appui de son assertion qu'il a cherché à utiliser
les voies de recours prévues par les lois de l'État partie, le Comité
a constaté que l'auteur avait rempli les conditions prescrites au paragraphe
2 b) de l'article 5 du Protocole facultatif.
6.2 Pour ce qui est des allégations formulées au titre des articles 16,
17, 19, 20 (par. 2), 25 et 27 du Pacte, le Comité a considéré que l'auteur
ne les avait pas suffisamment étayées aux fins de la recevabilité. De
même, il a noté que l'auteur n'avait pas fourni suffisamment d'éléments
d'appréciation à l'appui du grief qu'il avait articulé au titre du paragraphe
1 de l'article 6, d'où il a conclu qu'à cet égard, celui-ci n'avait donc
pas fait valoir une prétention au sens de l'article 2 du Protocole facultatif.
6.3 Le 25 mars 1992, le Comité a déclaré la communication recevable dans
la mesure où elle paraissait soulever des questions relevant des articles
9 (par. 1 et 3), 12 (par. 1 et 2), 14 (par. 1) et 26 du Pacte.
Nouvelles observations de l'État partie et commentaires de l'auteur
7.1 Dans une communication du 30 juillet 1992, l'État partie réaffirme
que sa précédente communication au sujet de la recevabilité de l'affaire
était "suffisamment détaillée, honnête et fidèle à la vérité sur
cette question". Il admet que sa version ne saurait être conciliée
avec celle de l'auteur.
7.2 L'État partie indique qu'il n'a rien à ajouter en fait d'éclaircissements
ou de documentation et suggère que si le Comité veut chercher à se faire
une idée plus claire des allégations de l'auteur, il devrait procéder
à une enquête in situ sur les "conclusions fondées de l'État
partie et les allégations de l'auteur". L'État partie se déclare
disposé à faciliter une mission d'enquête du Comité et à fournir toutes
les garanties nécessaires.
7.3 Dans une autre réponse datée du 30 juin 1993, l'État partie rejette
sommairement toutes les allégations de l'auteur, qu'il déclare dénuées
de fondement, et indique que M. Bahamonde souffre d'un "complexe
de persécution" ("... obsenionado por su manía persecutoria").
Il affirme que loin d'avoir été harcelé et persécuté, l'auteur devait
au président Obiang lui-même d'avoir occupé des postes élevés et d'avoir
été promu au sein de la fonction publique de Guinée équatoriale et qu'il
a quitté ses fonctions de son propre gré. En conséquence, l'État partie
affirme qu'il ne doit rien à l'auteur en matière d'indemnisation et déclare
qu'au contraire il pourrait fort bien poursuivre l'auteur pour diffamation,
abus de fonctions et trahison.
7.4 L'État partie affirme que la déclaration de l'auteur selon laquelle
la répression politique serait systématique en Guinée équatoriale et que
le système de gouvernement serait antidémocratique est dénuée de fondement,
de même que son affirmation selon laquelle l'administration de la justice
serait aux mains de l'exécutif et que l'appareil judiciaire ne tiendrait
aucun compte, par exemple, des garanties prévues par la loi. Au contraire,
plus de 13 partis politiques ont été légalement reconnus en mars 1993
et il semble que ces derniers exercent leurs activités sans aucune restriction.
Dans ces conditions, l'État partie demande au Comité de rejeter les allégations
de l'auteur qui constituent un abus du droit de présenter des communications,
comme il est indiqué à l'article 3 du Protocole facultatif.
Examen de l'affaire quant au fond
8.1 Le Comité a pris note des observations de l'État partie rejetant
sommairement les allégations de l'auteur et invitant le Comité à vérifier
in situ qu'il n'y a eu aucune violation du Pacte.
8.2 Pour ce qui est de la proposition de l'État partie tendant à ce que
le Comité enquête sur place en Guinée équatoriale sur les allégations
de l'auteur, le Comité rappelle que, conformément au paragraphe 1 de l'article
5 du Protocole facultatif, il examine les communications "en tenant
compte de toutes les informations écrites qui lui sont soumises par le
particulier et par l'État partie intéressé". En l'espèce, le Comité
ne peut que formuler ses constatations compte tenu des renseignements
écrits qu'il a reçus. Conformément au paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole
facultatif, l'État partie est tenu de procéder, de bonne foi et dans les
délais impartis, à une enquête approfondie sur toutes les violations du
Pacte alléguées à son encontre et de communiquer par écrit au Comité toutes
les informations dont il dispose. L'État partie ne s'est pas acquitté
de cette obligation; en particulier, il na pas répondu aux allégations
de fond de l'auteur concernant les dispositions des articles 9, 12, 14
ou 26, dispositions au titre desquelles la communication a été déclarée
recevable. Il a choisi plutôt de rejeter globalement, purement et simplement,
les allégations de l'auteur en les déclarant dénuées de fondement. En
conséquence, toute l'importance voulue doit être accordée aux allégations
de l'auteur, dans la mesure où elles ont été étayées.
9.1 En ce qui concerne l'allégation de l'auteur selon laquelle il a été
arbitrairement arrêté et détenu du 27 mai au 17 juin 1986, le Comité note
que l'État partie n'a pas contesté cette affirmation et s'est contenté
d'indiquer que l'auteur aurait pu exercer des recours judiciaires. Dans
ces conditions, le Comité estime que l'auteur a étayé ses affirmations
et conclut que ce dernier a été arbitrairement arrêté et détenu, en violation
du paragraphe 1 de l'article 9. Il conclut en outre que l'auteur n'a pas
été traduit dans le plus court délai devant un juge ou une autre autorité
habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires et qu'en conséquence
l'État partie ne s'est pas acquitté de ses obligations en vertu du paragraphe
3 de l'article 9.
9.2 À propos de l'allégation de l'auteur selon laquelle il a été victime
à plusieurs reprises de harcèlements, de mesures d'intimidation et de
menaces de la part d'hommes politiques haut placés et de leurs services,
le Comité constate que l'État partie a réfuté cette allégation de façon
globale, sans examiner les griefs dûment étayés de l'auteur à l'égard
de plusieurs membres du gouvernement du Président Obiang Nguema. La première
phrase du paragraphe 1 de l'article 9 garantit à chacun le droit à la
liberté et à la sécurité de sa personne. Le Comité a déjà eu l'occasion
d'expliquer que ce droit peut aussi être invoqué dans d'autres contextes
que l'arrestation et la détention et qu'une interprétation de l'article
9 qui autoriserait un État partie à ignorer les menaces qui pèsent sur
la sécurité de personnes non détenues relevant de leur juridiction priverait
les garanties prévues par le Pacte de toute efficacitéa. En
l'espèce, le Comité conclut que l'État partie n'a pas assuré le droit
de M. Oló Bahamonde à la sécurité de sa personne, en violation des dispositions
du paragraphe 1 de l'article 9 du Pacte.
9.3 L'auteur a affirmé, et l'État partie n'a pas nié, que son passeport
lui avait été confisqué à deux reprises en mars 1986 et qu'il avait été
privé du droit de quitter librement son pays. De l'avis du Comité, cela
constitue une violation des dispositions des paragraphes 1 et 2 de l'article
12 du Pacte.
9.4 L'auteur a soutenu que malgré plusieurs tentatives pour obtenir réparation
en justice devant les tribunaux de Guinée équatoriale, toutes ses démarches
étaient restées vaines. Ce grief a été réfuté sommairement par l'État
partie, qui a fait valoir que l'auteur aurait pu se prévaloir d'une législation
spécifique devant les tribunaux, sans cependant relier son argument aux
circonstances de l'affaire. Le Comité observe que la notion d'égalité
devant les tribunaux et cours de justice englobe l'accès même à la justice
et qu'une situation dans laquelle les tentatives d'un particulier pour
saisir les juridictions compétentes de ses griefs sont systématiquement
contrecarrées est contraire aux garanties prévues au paragraphe 1 de l'article
14 du Pacte. Dans ce contexte, le Comité a aussi relevé l'argument de
l'auteur suivant lequel le Président de l'État partie a la haute main
sur le pouvoir judiciaire en Guinée équatoriale. Le Comité considère qu'une
situation dans laquelle les fonctions et les attributions du pouvoir judiciaire
et du pouvoir exécutif ne peuvent être clairement distinguées ou dans
laquelle le second est en mesure de contrôler ou de diriger le premier
est incompatible avec le principe d'un tribunal indépendant et impartial
au sens du paragraphe 1 de l'article 14 du Pacte.
9.5 Enfin, sur la base des renseignements qui lui ont été communiqués,
le Comité conclut que M. Oló Bahamonde a été victime de discrimination
en raison de ses opinions politiques, de ses critiques et de son opposition
ouvertement déclarées à l'égard du gouvernement et du parti politique
au pouvoir, en violation de l'article 26 du Pacte.
10. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu des dispositions
du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, estime que
les faits qui lui ont été exposés révèlent des violations des paragraphes
1 et 3 de l'article 9, des paragraphes 1 et 2 de l'article 12, du paragraphe
1 de l'article 14 et de l'article 26 du Pacte.
11. En vertu de l'article 2 du Pacte, l'État partie est tenu d'offrir
à M. Oló Bahamonde un recours approprié. Le Comité demande instamment
à l'État partie de garantir la sécurité de sa personne, de lui restituer
les biens qui lui ont été confisqués ou de lui accorder une indemnité
appropriée, et qu'il soit porté remède sans délai à la discrimination
dont il a fait l'objet.
12. Le Comité souhaite recevoir, dans un délai de 90 jours, des renseignements
sur toutes mesures que l'État partie aura prises comme suite à ses constatations.
[Texte adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français.]
Note
a Documents officiels de l'Assemblée générale, quarante-cinquième
session, Supplément No 40 (A/45/40), annexe IX.D, communication No
195/1985 (Delgado Páez c. Colombie), constatations adoptées
le 12 juillet 1990, paragraphes 5.5 et 5.6; et ibid., quarante-huitième
session, Supplément No 40 (A/48/40), annexe XII.I, communication No
314/1988 (Bwalya c. Zambie), constatations adoptées le 14
juillet 1993, par. 6.4.