Comité des droits de l'homme
Quarante-septième session
ANNEXE
Décisions du Comité des droits de l'homme déclarant irrecevables
des communications présentées en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques
- Quarante-septième session -
Communication No 499/1992
Présentée par : K. L. B.-W. (nom supprimé)
Au nom de : L'auteur
Etat partie intéressé : Australie
Date de la communication : 15 novembre 1991 (date de la lettre
initiale)
Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 30 mars 1993,
Adopte la décision ci-après :
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication (datée du 15 novembre 1991) est Mme K.
L. B.-W., citoyenne australienne née le 13 février 1942 et résidant actuellement
à Londres (Angleterre). Elle affirme être victime d'une violation par
l'Australie des articles 6, paragraphe 1; 7; 9, paragraphes 1, 4 et 5;
10, paragraphe 1; 16; 17, paragraphes 1 et 2; et 26; ainsi que, indirectement,
de l'article 2, paragraphes 2 et 3, du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques. Le Protocole facultatif est entré en vigueur
pour l'Australie le 25 décembre 1991.
Les faits présentés
2.1 L'auteur déclare qu'elle était enceinte en 1970 de son deuxième enfant
et qu'elle souffrait de troubles cardiaques, peut-être liés à son état
mental, car elle passait par une période de tension dans sa vie conjugale.
On l'a adressée à un psychiatre, le docteur H. B., qui exerçait à l'hôpital
privé de Chelmsford, dans l'Etat de Nouvelle-Galles du Sud (Australie).
Elle affirme que les symptômes physiques dont elle se plaignait n'ont
jamais été pris au sérieux, bien qu'un examen ultérieur eût démontré que
ces symptômes étaient dus à une forme de diabète.
2.2 En avril 1970, l'auteur a perdu connaissance après avoir emmené son
fils à l'école. Elle affirme s'être réveillée sept heures plus tard dans
le cabinet du psychiatre, attachée à un électrocardiographe. Cette nuit-là,
elle a été admise à l'hôpital privé de Chelmsford. Elle n'a signé aucune
fiche d'admission et on lui aurait administré une injection de penthotal
qui lui aurait fait perdre conscience.
2.3 L'auteur affirme qu'on l'a soumise à un traitement par électrochocs
tout en lui faisant subir une cure de sommeil sans l'alimenter, en lui
administrant des doses de médicaments qui dépassaient les limites autorisées
par la loi et sans lui donner des myorelaxants. Elle déclare avoir été
retenue à l'hôpital contre sa volonté et avoir été molestée sexuellement
par le psychiatre et brutalisée par les infirmiers. Personne ne s'est
jamais occupé de ses problèmes physiques. Au bout de trois semaines, l'hôpital
l'a laissée sortir après avoir été menacé par sa mère de poursuites judiciaires.
2.4 Le deuxième fils de l'auteur est né le 25 juillet 1970. L'auteur
affirme que la santé de son fils a toujours été précaire et l'est encore.
Après l'avoir examiné à fond lorsqu'il avait 13 ans, les docteurs auraient
découvert notamment que son système nerveux et ses tissus musculaires
avaient souffert du fait des courants électriques qui les avaient traversés
à un stade vital de leur développement. Selon l'auteur, son fils aurait
besoin de plusieurse années de physiothérapie pour que ses tissus musculaires
atteignent ne serait-ce qu'un stade raisonnable de développement.
2.5 L'auteur fournit également des renseignements indiquant que le Gouvernement
a mené en 1989 une enquête sur les abus commis à l'hôpital privé de Chelmsford.
Les résultats de cette enquête montrent notamment qu'il y avait eu 48
décès liés à la narcothérapie; que le docteur H. B. avait fait preuve
de négligence et d'un comportement psychopathique à l'égard de ses patients;
que les patients étaient mal soignés et mal nourris; et que le Ministère
de la santé n'avait pas supervisé l'hôpital avec assez de soin. La Commission
royale, qui avait effectué l'enquête, a recommandé que les médecins en
cause soient poursuivis.
2.6 L'auteur admet qu'elle n'a pas épuisé des recours internes mais fait
valoir que la procédure de recours interne se prolongerait au-delà des
délais raisonnables, au sens du paragraphe 2 de l'article 5 du Protocole
facultatif. Elle déclare que le docteur H. B. s'est suicidé en 1985, qu'aucun
des autres médecins n'a été poursuivi et qu'ils exercent encore. Elle
affirme que des actions ont été engagées par certaines des personnes victimes
des fautes médicales commises à Chelmsford, mais sans résultat, et que
ces actions sont en cours depuis plus de 10 ans. Elle estime que les frais
de justice s'élèvent à 250 000 livres par action et qu'aucune victime
ne peut payer une telle somme.
2.7 L'auteur affirme que la profession médicale représente en Australie
une force politique puissante, qui empêche les victimes d'obtenir réparation,
soit au moyen d'une action en justice, soit au moyen d'une indemnité accordée
à titre gracieux par le Gouvernement. Elle soutient également qu'en raison
du temps qui s'est écoulé, une grande partie des éléments de preuve a
disparu et beaucoup de témoins sont morts ou sont devenus séniles. Elle
fait observer que son affaire remonte maintenant à 21 ans et que le temps
écoulé depuis a, de toute évidence, fortement limité toute possibilité
d'obtenir une indemnisation raisonnable.
2.8 L'auteur dit s'être adressée au tribunal compétent pour évaluer les
indemnités à verser aux victimes de crimes violents. Mais aucun des médecins
en cause n'a été encore condamné, et l'auteur n'espère pas obtenir réparation
par le biais de ce tribunal.
2.9 L'auteur dit que le Gouvernement de l'Etat de Nouvelle-Galles du
Sud devrait verser des indemnités aux victimes mais qu'il refuse de le
faire. Elle reconnaît que le 21 décembre 1991, l'Assemblée législative
a adopté une motion prévoyant l'ouverture d'un crédit de 10 millions de
livres pour indemniser 200 des 1 700 victimes des fautes médicales commises
à Chelmsford. L'auteur affirme toutefois que cette mesure ne constitue
pas une réparation efficace parce que le montant n'est pas suffisant et
qu'il est difficile de savoir qui aurait droit à une indemnité.
La plainte
3. L'auteur soutient que le fait que le Gouvernement de la Nouvelle-Galles
du Sud ne lui ait pas accordé une indemnité convenable pour les préjudices
physiques qu'elle avait subis constitue une violation par l'Australie
des articles 6, paragraphe 1; 7; 9, paragraphes 1, 4 et 5; 10, paragraphe
1; 16; 17, paragraphes 1 et 2; et 26; ainsi que, indirectement, de l'article
2, paragraphes 2 et 3, du Pacte international relatif aux droits civils
et politiques.
Délibérations du Comité et questions dont il est saisi
4.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité
des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement
intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du
Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
4.2 Le Comité rappelle que le Protocole facultatif est entré en vigueur
pour l'Australie le 25 décembre 1991. Il note que le Protocole facultatif
ne peut être appliqué rétroactivement et que, par conséquent, le Comité
ne peut ratione temporis examiner des faits qui se sont produits
avant le 25 décembre 1991, à moins que ces faits ne se soient poursuivis
après l'entrée en vigueur du Protocole facultatif ou qu'ils n'aient eu
des effets qui constituent en soi des violations du Pacte. Par conséquent,
le Comité conclut qu'il ne peut ratione temporis examiner les allégations
de l'auteur.
5. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide :
a) Que la communication est irrecevable;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'auteur et, pour information,
à l'Etat partie.
[Texte établi en anglais (version originale) et traduit en espagnol et
en français.]