Comité des droits de l'homme
Quarante-huitième session
ANNEXE
Décisions du Comité des droits de l'homme déclarant irrecevables
des communications présentées en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques
- Quarante-huitième session -
Communication No 501/1992
Présentée par : J. H. W. (nom supprimé)
Au nom de : L'auteur
Etat partie : Pays-Bas
Date de la communication : 5 mai 1992
Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 16 juillet 1993,
Adopte la décision ci-après :
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication, datée du 5 mai 1992, est J. H. W., citoyen
néerlandais, né le 3 octobre 1919, demeurant actuellement à Wassenaar
(Pays-Bas). Il déclare être victime d'une violation par les Pays-Bas de
l'article 26 et du paragraphe 3 de l'article 2 du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques. Il est représenté par un conseil.
Les faits présentés
2.1 L'auteur déclare qu'au titre de la loi générale sur les allocations
familiales, des contributions sont levées sur la même base que les imp_ts
sur les salaires et sur les revenus. Ces contributions servent à financer
les allocations à verser aux parents en vertu de la loi pour aider à l'entretien
de leurs enfants. Elles sont dues jusqu'à l'âge de 65 ans, que l'on soit
ou non, à un moment quelconque, candidat au bénéfice des dispositions
de la loi. Le décret royal portant application du paragraphe 2 de l'article
25 de la loi, en date du 27 février 1980, avait prévu un cas d'exonération,
celui des femmes de plus de 45 ans célibataires sans enfant. L'exonération
était fondée sur la conjoncture qu'au-delà de cet âge, les femmes n'auront
plus d'enfants. Elle ne s'appliquait pas aux hommes de plus de 45 ans
célibataires sans enfant. Elle a été annulée en 1989.
2.2 Le 30 août 1986, l'auteur a reçu un avis de recouvrement de contributions
au titre de plusieurs lois relatives à la sécurité sociale, dont la loi
sur les allocations familiales, pour la période allant du 1er janvier
au 3 octobre 1984. Sur ses protestations, l'inspecteur des imp_ts a décidé
de réduire le montant de sa contribution. Il lui restait toutefois une
certaine somme à payer (10 160 florins au total). L'auteur a fait appel
de la décision de l'inspecteur des imp_ts devant la Chambre fiscale de
la cour d'appel (Belastingkamer van het Gerechtshof) à La Haye,
en invoquant notamment l'article 26 du Pacte. Par jugement rendu le 1er
mars 1990, la cour a rejeté l'appel. L'auteur a ultérieurement fait appel
devant la Cour suprême (Hoge Raad), qui l'a débouté le 11 décembre
1991. La Cour suprême considérait que la distinction faite dans la loi
était raisonnable, compte tenu des différences physiques entre hommes
et femmes.
La plainte
3.1 L'auteur se déclare victime d'une discrimination fondée sur le sexe,
puisqu'on lui a refusé l'exonération à laquelle il aurait eu droit s'il
avait été une femme. Il faudrait que la distinction entre les hommes et
les femmes faite dans ladite loi ne repose sur aucun motif objectif, raisonnable
et proportionné. Il fait état à cet égard d'une déclaration faite par
le Gouvernement néerlandais en 1988, selon laquelle l'exonération accordée
aux femmes exclusivement n'était plus acceptable, étant donné l'évolution
de la société actuelle. L'auteur estime que cela ne l'était pas davantage
en 1984. Il affirme que le Pacte doit être interprété à la lumière de
la situation actuelle, et que le point de vue qui prévalait au moment
où la loi a été adoptée ne peut être déterminant en l'espèce. Il renvoie
aux Observations du Comité afférentes à la communication No 172/1984 (Broeks
c. Pays-Bas) et aux décisions rendues par les tribunaux néerlandais.
3.2 Par ailleurs, l'auteur déclare qu'il n'est pas juste de supputer
que les femmes de plus de 45 ans n'auront plus d'enfants, et mentionne
l'article de la loi sur les allocations familiales qui stipule qu'un demandeur
peut recevoir des allocations pour des enfants adoptifs. Il va plus loin
en déclarant que, même fondée sur des données objectives montrant que
la probabilité d'avoir des enfants après 45 ans est moins grande pour
les femmes que pour les hommes, la distinction ne se justifie pas pour
autant. Selon lui, cette faible différence de probabilités ne justifiait
pas une distinction aussi absolue. Il fait observer que selon les statistiques,
un homme de plus de 45 ans n'a pas plus de quelques chances sur 1 000
d'être père. Il conclut donc que le principe de la nécessaire proportionnalité
entre la distinction et l'objet de l'exonération est en défaut.
Observations de l'Etat partie
4. Par une communication datée du 4 septembre 1992, l'Etat partie reconnaît
que l'auteur a épuisé les recours internes disponibles. Il ne s'oppose
pas à la recevabilité de la communication.
Délibérations du Comité et questions dont il est saisi
5.1 Avant d'examiner toute plainte contenue dans une communication, le
Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son
règlement intérieur, décider si la communication est ou n'est pas recevable
en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
5.2 Le Comité note que l'Etat partie ne s'oppose pas à la recevabilité
de la communication. Toutefois, il est du devoir du Comité de s'assurer
que toutes les conditions de recevabilité énoncées dans le Protocole facultatif
ont été réunies. A cet égard, le Comité note que l'Etat partie a adopté,
en 1989, des mesures pour supprimer l'exonération dont il est question
dans la présente communication. Le Comité estime, étant donné que la législation
relative à la sécurité sociale et son application suivent généralement
avec quelque retard l'évolution socio-économique, et que l'objectif de
l'exonération supprimée n'était pas, en son temps, considéré comme discriminatoire,
que la question soulevée par l'auteur est discutable et que celui-ci n'est
pas fondé à invoquer l'article 2 du Protocole facultatif.
6. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide :
a) Que la communication est irrecevable en vertu de l'article 2 du Protocole
facultatif;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'Etat partie, à l'auteur
de la communication et à son conseil.
[Texte établi en anglais (version originale) et traduit en espagnol et
en français.]