Comité des droits de l'homme
Quarante-neuvième session
ANNEXE
Décisions du Comité des droits de l'homme déclarant irrecevables
des communications présentées en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques
- Quarante-neuvième session -
Communication No 544/1993
Présentée par : K. J. L. [nom supprimé]
Au nom de : L'auteur
État partie : Finlande
Date de la communication : 27 février 1993 (date de la lettre
initiale)
Le Comité des droits de l'homme, institué en application de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 3 novembre 1993,
Adopte la décision ci-après :
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication est K. J. L, citoyen finlandais, né en
août 1921, résidant à Kymi (Finlande). Il se déclare victime de violations
des articles 2, 14, 17 et 26 du Pacte international relatif aux droits
civils et politiques.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 L'auteur, se référant à la construction d'un chemin privé, allègue
qu'il y a eu des irrégularités au stade de l'élaboration du projet et
pendant les travaux. L'affaire a commencé pendant l'été 1979, lorsque
le géomètre de l'administration des domaines a délivré le permis No 106
706 pour la construction d'un chemin dans la commune de Manthyarju. Ce
permis obligeait l'auteur à céder une parcelle de terrain en vue de la
construction d'un chemin privé. K. J. L. soutient que ce permis a été
délivré et suivi d'effet dans des conditions illégales et qu'il a été
porté atteinte, à maintes reprises, aux lois et dispositions réglementaires
applicables.
2.2 L'auteur soutient que l'indemnité qui lui a été versée pour la parcelle
cédée ne représentait qu'une fraction de la somme qui aurait dû légitimement
lui revenir. En conséquence, il a saisi le Tribunal foncier ("maaoikeus"
en finnois), se plaignant de la manière dont les levés avaient été effectués
sur le terrain où le chemin devait être construit et du tracé qui avait
été fait dudit chemin. En janvier 1981, le tribunal, par trois voix contre
deux, a débouté l'auteur, lequel soutient que les "avocats professionnels"a
qui y siégeaient s'étaient prononcés en sa faveur alors que les autres
membres du tribunal, n'appartenant pas — semblerait-il — à
la magistrature, dont le géomètre des domaines, s'étaient prononcés contre
lui.
2.3 L'auteur fait ressortir plusieurs vices de procédure. Il invoque
l'article 174 de la loi régissant le morcellement des terres ("jakolaki"
en finnois) qui énonce dans le détail la procédure à suivre pour l'exécution
des permis de construction de routes. Selon lui, cette procédure n'aurait
pas été respectée. Or, il est consigné dans le registre foncier, à la
date du 5 juin 1981, que l'exécution du permis s'était faite dans les
règles.
2.4 L'auteur a fait appel de cette décision mais, le 15 mai 1981, la
Cour suprême de Finlande lui a refusé l'autorisation de présenter un recours.
2.5 Au début de 1982, les limites du lit du chemin ont été officiellement
marquées sur le terrain de l'auteur. Ce dernier affirme que ce marquage
aurait dû être effectué plus d'une année auparavant, au moment des premiers
levés. Il soutient une fois de plus que le géomètre des domaines n'a pas
respecté la réglementation applicable. Il ajoute que, dans cette affaire,
des membres du tribunal foncier ont fait à maintes reprises des déclarations
fallacieuses ou incorrectes qui ont fait que la police, la Chancellerie
de justice, le médiateur parlementaire, entre autres, ont été amenés à
croire que l'ensemble du processus — établissement des plans et
marquage — s'était déroulé dans la légalité.
2.6 Le 3 juin 1982, les travaux de construction ont commencé et, selon
l'auteur, il y aurait eu, là encore, de nombreuses irrégularités. Les
demandes d'aide adressées par l'auteur à la police sont restées sans réponse.
Aux fins de remédier aux irrégularités qui entachaient le permis initial,
un nouvel arrêté (No 112 559 9 du 13 novembre 1982) aurait été pris pour
qu'il soit procédé à de nouveaux levés. L'auteur affirme que cette décision
a eu pour seul effet de le priver de ce qu'il appelle son "droit
légitime de passage". Ultérieurement, plusieurs années après, semblerait-il,
et à la suite d'une nouvelle plainte déposée par l'auteur, la Chancellerie
de justice avait proposé plusieurs modifications au permis initial. De
l'avis de l'auteur, les nouveaux levés (No 114 970 8) effectués le 11
mai 1988 ne corrigeaient en aucune façon les premières erreurs et ne résolvaient
rien quant au tracé du chemin sur son terrain.
2.7 L'auteur note qu'après s'être vu refuser par la Cour suprême l'autorisation
d'interjeter appel, il s'était adressé au Chancelier de justice pour obtenir
réparation. Ledit chancelier aurait instruit l'affaire pendant plus de
trois ans et l'auteur aurait été notifié que, dans l'intervalle, "il
ne pouvait présenter de recours à aucune autre instance".
2.8 À une date non précisée, l'auteur saisissait de nouveau le Tribunal
foncier pour lui demander d'annuler son jugement initial de 1981. Le 17
janvier 1990, le Tribunal foncier confirmait sa décision; le 4 décembre
1990, la Cour suprême rejetait l'autre appel de l'auteur au motif qu'il
n'avait pas été en mesure d'"étayer son appel sur de nouveaux motifs
susceptibles de justifier l'annulation du jugement du Tribunal foncier".
L'auteur fait grief à la Cour suprême de ne pas avoir motivé sa décision.
Teneur de la plainte
3. L'auteur soutient que l'ensemble de la procédure a été pour lui, au
fil des années, la cause de grandes "souffrances morales" et
que toute la procédure judiciaire a été partiale et inéquitable. Il soutient
que les faits exposés ci-dessus, dans la mesure où ils sont dus à l'action
des autorités et des tribunaux, constituent des violations de ses droits
en vertu des articles 2, 14, 17 et 26 du Pacte et de l'article 12 du Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Il
estime qu'un dédommagement calculé sur la base de 20 000 markka par an
à compter de 1979 serait approprié.
Délibérations du Comité
4.1 Avant d'examiner toute plainte contenue dans une communication, le
Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son
règlement intérieur, déterminer si cette communication est recevable en
vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
4.2 Le Comité note que les griefs de l'auteur portent essentiellement
sur une violation alléguée de son droit à la propriété, lequel droit ne
relève pas du Pacte. En conséquence, le Comité n'ayant compétence que
pour examiner les allégations de violations de l'un quelconque des droits
protégés par le Pacte, les allégations de l'auteur concernant l'illégalité
de la construction d'un chemin sur son terrain ne sont pas recevables
ratione materiae, en vertu de l'article 3 du Protocole facultatif,
du fait qu'elles sont incompatibles avec les dispositions du Pacte.
4.3 En ce qui concerne l'allégation de l'auteur selon laquelle les décisions
prises à son encontre auraient été arbitraires et partiales, aux niveaux
administratif et judiciaire, le Comité note qu'elles se rapportent essentiellement
à l'évaluation d'une situation de fait complexe par les autorités et les
tribunaux finlandais. Par principe, il appartient aux tribunaux de l'État
partie et non pas au Comité d'évaluer les faits et les preuves concernant
une affaire donnée, sauf s'il peut être établi que l'évaluation des preuves
par les tribunaux est arbitraire ou que l'obligation d'impartialité n'a
manifestement pas été remplie. Or, rien dans les renseignements dont le
Comité a été saisi n'indique que la procédure a été entachée de tels défauts.
En conséquence, le Comité conclut que cette partie de la communication
est également irrecevable du fait de son incompatibilité avec les dispositions
du Pacte, conformément à l'article 3 du Protocole facultatif.
4.4 Enfin, en ce qui concerne les allégations de l'auteur faisant état
d'un traitement discriminatoire et de violations de droits en vertu de
l'article 17 du Pacte, le Comité considère qu'elles n'ont pas été suffisamment
étayées, aux fins de la recevabilité. En conséquence, la communication
de l'auteur ne relève pas du Pacte au sens de l'article 2 du Protocole
facultatif.
5. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide :
a) Que la communication est irrecevable en vertu des articles 2 et 3
du Protocole facultatif;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'auteur de la communication
ainsi qu'à l'État partie, pour information.
[Texte adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français.]
Note
a L'auteur semble se référer aux magistrats.