Comité des droits de l'homme
Quarante-neuvième session
ANNEXE
Décisions du Comité des droits de l'homme déclarant irrecevables
des communications présentées en vertu du Protocole facultatif
se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques
- Quarante-neuvième session -
Communication No 548/1993
Présentée par : R. E. de B. [nom supprimé; représenté par un conseil]
Au nom de : L'auteur
État partie : Pays-Bas
Date de la communication : 15 avril 1993 (date de la lettre initiale)
Le Comité des droits de l'homme, institué en application de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 3 novembre 1993,
Adopte la décision ci-après :
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication est R. E. d. B., citoyen néerlandais
né le 26 juin 1952, résidant actuellement à Leeuwarden (Pays-Bas). Il
affirme être victime d'une violation de l'article 26 du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques. Il est représenté par un conseil.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 L'auteur, qui souffre de troubles mentaux, vit dans une maison de
santé depuis le 17 août 1971. Il est devenu majeur le 26 juin 1973; jusqu'à
cette date, ses parents étaient ses représentants légaux. Le 15 décembre
1987, un tuteur a été désigné. L'auteur déclare qu'entre le 26 juin 1973
et le 15 décembre 1987, il était tributaire de la bonne volonté d'autrui
pour la protection et la défense de ses droits.
2.2 L'auteur se rend, le week-end, dans la maison familiale; ces visites
seraient d'une importance capitale pour son bien-être mental et physique.
Elles entraînent des frais, de voyage et d'hébergement. Le 2 juillet 1987,
l'auteur, représenté par ses parents, a demandé à être admis au bénéfice
des allocations prévues par la loi sur la sécurité sociale (Algemene
Bijstandswet), afin d'être dédommagé de ces frais. Le 24 novembre
1987, la municipalité de Ferwederadeel a accordé à l'auteur des allocations
d'un montant de 260,69 florins néerlandais par mois, à compter de la date
de sa demande, c'est-à-dire du 2 juillet 1987.
2.3 L'auteur a demandé que cette décision soit réexaminée au motif que
ces allocations auraient dû lui être accordées, avec effet rétroactif,
à compter du 17 août 1971. Le 1er mars 1988, la municipalité a confirmé
sa décision. L'auteur a formé un recours devant les autorités provinciales
de la Frise, qui l'ont débouté le 2 novembre 1988. Le 3 octobre 1990,
la Division du contentieux administratif du Conseil d'État (Raad van State,
Afdeling Geschillen van Bestuur) a rejeté un deuxième recours formé par
l'auteur.
2.4 La Division du contentieux administratif du Conseil a estimé qu'aux
termes de la loi sur la sécurité sociale, aucune allocation ne pouvait
être accordée pour une période antérieure à la date de la demande et qu'il
incombait au requérant de faire valoir ses droits en temps voulu. Seules
des circonstances extraordinaires pouvaient justifier une exception à
cette règle. Rien ne le justifiait en l'espèce. Comme la loi permettait
qu'une personne fasse valoir le droit d'une autre à une allocation, le
Conseil a estimé que les parents de l'auteur auraient pu en faire la demande
plus tôt en son nom.
2.5 Le Conseil a en outre noté qu'au début de son séjour dans la maison
de repos, l'auteur était encore mineur et était donc représenté légalement
par ses parents. Il a en outre relevé que d'après le dossier, les parents
de l'auteur avaient bel et bien veillé à ses intérêts jusqu'à la désignation
d'un tuteur. De ce fait, le Conseil a constaté qu'il ne s'était pas avéré
nécessaire que la municipalité lui accordât une allocation de sa propre
initiative. Il a rejeté l'affirmation de l'auteur selon laquelle l'article
26 du Pacte avait été violé en l'espèce.
Teneur de la plainte
3.1 L'auteur affirme que, comme il n'avait pas de représentant légal
du 26 juin 1973 au 15 décembre 1987, il n'avait pas été en mesure de déposer
une demande d'allocations en vertu de la loi sur la sécurité sociale;
il fait ainsi valoir des circonstances spéciales en faveur de sa demande
d'allocations avec effet rétroactif. Il affirme que dans son cas, le refus
de lui accorder rétroactivement des allocations revient à une violation
de l'article 26 du Pacte, dans la mesure où une discrimination de fait
s'exerce à l'égard de ceux qui, comme lui, sont atteints de troubles mentaux
et sont donc incapables de veiller à leurs propres intérêts.
3.2 À la lumière de ces considérations, l'auteur affirme que l'État devrait
faciliter la jouissance des droits sociaux. Selon lui, les autorités néerlandaises
auraient dû lui accorder des allocations de leur propre initiative, car
elles étaient au courant de sa situation particulière.
Délibérations du Comité
4.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité
des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement
intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du
Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
4.2 L'auteur se dit victime d'une violation de l'article 26 du Pacte,
parce qu'on ne lui a pas accordé des allocations de sécurité sociale rétroactivement;
il affirme que, bien qu'il n'ait pas demandé plus tôt à être admis au
bénéfice d'allocations, l'État partie aurait dû les lui accorder de sa
propre initiative. Le Comité relève que la législation néerlandaise ne
prévoit pas l'octroi d'allocations avec effet rétroactif en vertu de la
loi sur la sécurité sociale et que la Division du contentieux administratif
du Conseil d'État a estimé qu'il n'existait pas de circonstances extraordinaires
justifiant une exception, attendu que les parents de l'auteur auraient
pu présenter une demande d'allocations en son nom.
4.3 Le Comité note que l'auteur n'a pas établi, aux fins de la recevabilité,
qu'on lui avait refusé des allocations avec effet rétroactif pour l'un
des motifs prévus à l'article 26 du Pacte ni que les dispositions de la
loi sur la sécurité sociale avaient été appliquées, dans son cas, de manière
discriminatoire. En conséquence, le Comité estime que la communication
est irrecevable en vertu de l'article 2 du Protocole facultatif.
5. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide :
a) Que la communication est irrecevable en vertu de l'article 2 du Protocole
facultatif;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'auteur et à son conseil
et, pour information, à l'État partie.
[Texte établi en anglais (version originale), en espagnol et en français.]