Communication No 607/1994
Présentée par : Michael Adams (représenté par M. Saul Lehrfreund
du cabinet Simons Muirhead and Burton)
Au nom de : L'auteur
Etat partie : Jamaïque
Date de la communication : 1er novembre 1994 (date de la lettre
initiale)
Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 30 octobre 1996,
Ayant achevé l'examen de la communication No 607/1994, présentée
au Comité des droits de l'homme par M. Michael Adams, en vertu du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils
et politiques,
Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui
ont été communiquées par l'auteur de la communication et l'Etat partie,
Adopte les constatations suivantes :
Constatations au titre du paragraphe 4 de l'article 5
du Protocole facultatif
1. L'auteur de la communication est Michael Adams, citoyen jamaïcain,
qui, au moment où il a présenté sa plainte, se trouvait à la prison du
district de St. Catherine (Jamaïque) où il attendait d'être exécuté. Il
affirme être victime de violations par la Jamaïque de l'article 7, du
paragraphe 1 de l'article 10 et des paragraphes 1, 2, 3 b) et e) de l'article
14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il
est représenté par un conseil. Sa peine a été commuée le 14 novembre 1994.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 L'auteur a été reconnu coupable de meurtre par la Home Circuit
Court de Kingston le 7 mars 1991 et condamné à mort. Il a demandé
une autorisation de former recours de la condamnation et de la peine;
le 24 février 1992, la Cour d'appel de la Jamaïque a traité la demande
d'autorisation de recours comme s'il s'agissait de l'appel proprement
dit et a débouté l'auteur. Le 4 novembre 1993, sa demande d'autorisation
spéciale de former recours auprès de la section judiciaire du Conseil
privé a été rejetée. Il considère donc que tous les recours internes ont
été épuisés. Le 14 novembre 1994, le crime pour lequel l'auteur avait
été condamné a été classé dans la catégorie des infractions n'emportant
pas la peine capitale.
2.2 L'auteur a été condamné pour complicité active dans l'exécution d'un
projet commun. La thèse de l'accusation était que, le 3 mai 1990, l'auteur
avait incité un homme non identifié (celui qui avait tiré) avec lequel
apparemment il travaillait, à tirer sur un garde chargé de la sécurité,
dénommé Charles Wilson. Toutefois, cet homme avait tué une autre personne,
Alvin Scarlett.
2.3 Le 3 mai 1990 au matin, M. Wilson était de garde à la grille d'entrée
de la décharge d'une usine de mise en bouteilles, sur la route de Spanish
Town à Kingston. Vers 8 heures, il avait laissé passer deux camions venant
de l'enceinte de l'usine en direction de la décharge. Plusieurs hommes
étaient montés dans le premier camion. Au procès, Charles Wilson a déclaré
qu'il avait vu deux hommes assis à c_té de la cl_ture de la décharge,
et que l'un d'entre eux était l'auteur. Celui-ci avait suivi à pied le
deuxième camion jusqu'à la décharge. Un quart d'heure plus tard, le deuxième
camion était retourné avec à son bord Alvin Scarlett, un certain Carlton
McKie et l'auteur; il s'était arrêté devant la grille de l'usine et les
trois hommes avaient déchargé quelques palettes. Le camion avait alors
pénétré lentement dans l'enceinte de l'usine et M. Wilson commençait à
refermer la grille quand il avait entendu un coup de feu et avait ressenti
une douleur à la main. Il avait alors vu l'autre homme - celui qui était
assis à c_té de la barrière en compagnie de l'auteur - braquer une arme
à feu sur lui. M. Wilson n'avait pas pu tirer sa propre arme à cause de
sa blessure à la main. Il a déclaré avoir vu l'auteur, jusqu'alors hors
de sa vue, faire le tour du camion et l'avoir entendu dire à l'homme qui
portait l'arme : "On a tiré sur le garde, viens, on va prendre son
arme" ("Shot the guard boy, let we get his gun"). M. Wilson
s'était alors enfui et l'auteur et celui qui portait l'arme se seraient
mis à le poursuivre. Pendant la course il avait entendu trois autres coups
de feu. Les deux hommes avaient renoncé à le poursuivre et il les avait
vus courir vers la décharge.
2.4 M. Wilson a déclaré qu'il avait déjà rencontré l'auteur trois ans
auparavant quand il travaillait comme garde dans une biscuiterie et que
l'auteur lui demandait régulièrement des biscuits. Il l'avait vu une fois
à la décharge mais ne lui avait pas parlé.
2.5 Carlton McKie a témoigné que pendant qu'il déchargeait les palettes,
il avait vu un homme tirer sur le garde et Alvin Scarlett, qui était debout
à l'arrière du camion, tomber à la renverse. Il avait alors vu l'auteur
de l'autre c_té du camion et l'avait vu, en compagnie de celui qui avait
tiré, se mettre à poursuivre le garde puis obliquer vers la décharge.
M. McKie a ajouté qu'il connaissait l'auteur depuis une année environ
et qu'il le voyait souvent à la décharge.
2.6 Blandford Davis, l'inspecteur du poste de police de Hunts Bay chargé
de l'enquête, a témoigné que le 4 mai 1990 il avait reçu un mandat d'arrêt
contre l'auteur; le 4 juin 1990 il avait vu celui-ci au poste de police
et l'avait arrêté pour le meurtre d'Alvin Scarlett. Après son arrestation,
l'auteur s'était déclaré innocent.
2.7 La thèse de la défense reposait sur une déclaration sous serment
faite par l'auteur. Il a nié s'être trouvé à c_té de la cl_ture en compagnie
d'un autre homme, affirmant qu'il était descendu à la décharge avec un
groupe de personnes et que, alors qu'ils approchaient de l'usine de mise
en bouteilles, le camion s'apprêtait à franchir la grille, et qu'il était
monté dedans avec six autres hommes. Quand le camion était revenu de la
décharge, lui-même et M. Scarlett, qu'il connaissait depuis quatre ans,
avaient commencé à décharger les palettes. L'auteur a déclaré avoir entendu
un coup de feu alors qu'il se trouvait de l'autre c_té du camion et ne
pouvait pas voir M. Wilson; il était incapable de dire d'où venait le
coup de feu. Il a ajouté qu'il s'était mis à courir ainsi que d'autres,
qu'il n'avait adressé la parole à personne et qu'il ne savait pas si quelqu'un
courait devant lui. Il avait entendu plusieurs autres coups de feu et
était rentré chez lui le plus vite possible. Plus tard, il était retourné
à l'usine de mise en bouteilles pour récupérer les palettes; il avait
appris qu'Alvin Scarlett avait été tué. L'auteur a nié avoir jamais dit
"On a tiré sur le garde, viens, on va prendre son arme" et avoir
poursuivi Charles Wilson; il a déclaré qu'il avait déjà vu M. Wilson dans
l'enceinte de l'usine de mise en bouteilles avant le 3 mai 1990 mais a
nié l'avoir jamais vu à la biscuiterie.
2.8 Il ressort des minutes du procès que M. Wilson avait tout d'abord
affirmé dans une déclaration écrite à la police que l'auteur avait crié
"On a tiré sur le garde, viens, on va prendre son arme", déclaration
qu'il n'avait pas répétée lors de l'enquête préliminaire devant la Gun
Court mais qu'il avait réitérée pendant le procès quand l'avocat général
avait procédé à l'interrogatoire principal. Il apparaît de plus que l'avocat
de l'auteur (qui ne l'avait pas représenté lors de l'enquête préliminaire)
n'avait pas connaissance de la déclaration écrite et que, quand il avait
procédé au contre-interrogatoire de M. Wilson, il avait contesté que l'auteur
ait jamais prononcé ces mots. Lors du deuxième interrogatoire, l'avocat
général avait montré à l'avocat de l'auteur la déclaration écrite faite
à la police, en demandant au juge de l'accepter en tant que preuve; invoquant
la jurisprudence, il avait fait valoir que dans le cas où une déclaration
faite par un témoin lors de l'interrogatoire principal est contestée au
motif qu'il s'agit d'une invention récente, l'accusation peut produire
une déclaration écrite faite précédemment, de façon à montrer que les
propos ont bien été tenus. L'avocat de l'auteur a objecté à la recevabilité
de la déclaration écrite en tant que preuve, disant qu'il s'agissait d'une
preuve produite dans l'intérêt du témoin, qui ne servait qu'à corroborer
son propre témoignage. Néanmoins le juge a accepté la déclaration en tant
que preuve à seule fin de réfuter l'allégation d'invention récente.
Teneur de la plainte
3.1 Le conseil fait valoir que le fait de ne pas avoir porté cette déclaration
à la connaissance de l'avocat de la défense avant le procès constitue
une violation des droits conférés aux paragraphes 1, 2, 3 b) et e) de
l'article 14 du Pacte.
3.2 A cet égard, le conseil cite un passage d'une lettre reçue de l'ancien
avocat de l'auteur à la Jamaïque, disant : "Je crois que ce qui a
fait basculer les choses au désavantage de Michael Adams c'est la déclaration
du témoin Wilson qui avait dit à la police que l'auteur avait crié : 'Tire
sur le garde, viens, on va lui prendre son arme' ('Shoot the guard boy
mek we get fi him gun'). Wilson n'avait rien dit de tel à l'enquête préliminaire.
C'était une différence essentielle et cette déclaration aurait dû être
portée à la connaissance de la défense pour que le procès soit équitable.
Si l'avocat avait été informé de cette déclaration, il aurait mené différemment
le contre-interrogatoire de Charles Wilson. Dans ces conditions, le procès
d'Adams a-t-il été équitable ?"
3.3 Le conseil rappelle l'Observation générale sur l'article 14 du Pacte
où le Comité souligne au sujet du droit de l'accusé de disposer du temps
et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, que : "[...]
les facilités doivent comprendre l'accès aux documents et autres éléments
de preuve dont l'accusé a besoin pour préparer sa défense". D'après
le conseil, bien que l'avocat de l'auteur à la Jamaïque ait affirmé qu'il
avait eu assez de temps pour préparer la défense et qu'il avait pu procéder
au contre-interrogatoire des témoins dans les mêmes conditions que l'accusation,
les choses se sont passées différemment en ce qui concerne le témoin Wilson.
Le conseil réaffirme que, si la déclaration avait été connue de la défense,
le contre-interrogatoire du témoin aurait été différent et que, par conséquent,
l'auteur n'a pas bénéficié des facilités nécessaires à la préparation
de sa défense comme il est garanti au paragraphe 3 b) de l'article 14.
Il ajoute que, faute d'avoir pris connaissance de la déclaration, la suite
du contre-interrogatoire par l'avocat n'a pas été aussi efficace qu'elle
aurait dû l'être et a été limitée par le juge, ce qui entraîne une violation
du paragraphe 3 e) de l'article 14. La défense n'a donc pas été en mesure
de réfuter les allégations du témoin, contrairement aux prescriptions
du paragraphe 2 de l'article 14 et, par conséquent, l'auteur s'est vu
dénier le droit à un procès équitable garanti au paragraphe 1 de l'article
14.
3.4 A l'appui de ces allégations, le conseil renvoie aux constatations
du Comité au sujet de la communication No 283/1988 (Alston Little
c. Jamaïque), et à une déclaration sous serment recueillie par
Mme Shelagh Anne Simmons, qui avait rendu visite à M. Adams, à la prison
de St. Catherine entre le 29 août et le 5 septembre 1994, dans laquelle
l'auteur indique ceci : "J'ai dit à mon avocat, [...], que j'avais
des témoins qui voulaient bien déposer en ma faveur, mais il a dit que
l'accusation avait si peu de preuves contre moi qu'il n'y aurait pas besoin
de témoin. Les témoins étaient des gens qui étaient avec moi sur les lieux
du crime. [...] Ils peuvent vérifier que je n'ai jamais participé à ce
meurtre. Les témoins, c'est Alfred Campbell [...], un homme que je connais
sous le nom de 'Willy' [...], et une fille appelée 'Reenie' [...]."
Le conseil fait valoir que, si l'avocat avait eu connaissance de la déclaration
faite par M. Wilson à la police, il aurait probablement appelé à la barre
les témoins cités par l'auteur. Pour cette raison, il affirme que la violation
du droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation
de sa défense s'est accompagnée d'une violation du paragraphe 3 e) de
l'article 14, étant donné que l'auteur n'a pas pu obtenir la déposition
de témoins à décharge.
3.5 Il ressort des déclarations sous serment datées du 10 septembre 1994,
faites par les trois témoins cités par l'auteur qu'ils ont tous, à diverses
reprises, essayé de faire des déclarations à la police, plus précisément
à l'inspecteur chargé de l'enquête, mais qu'on les en aurait "dissuadés".
A cet égard, se référant à un arrêt récent de la cour d'appel du Royaume-Uni
/ Dans l'affaire Ivan Fergus (1994) 98 Cr App R, la
cour d'appel a statué que la non-application par la police des instructions
données par le parquet (Crown Prosecution Service), qui avait ordonné
de recueillir les dépositions de témoins devant étayer l'alibi de l'accusé,
avait contribué à créer un déni de justice., le conseil affirme que, même
si le Département des poursuites ou l'avocat de l'auteur n'avait pas demandé
expressément que les trois témoins précités soient entendus, le policier
chargé de l'enquête était tenu d'enquêter et de prendre les dépositions
des témoins à décharge qui se présentaient. Le refus de la police jamaïcaine,
et en particulier de l'inspecteur chargé de l'enquête, de recueillir les
déclarations des témoins qui pouvaient étayer l'alibi de l'auteur, constitue,
d'après le conseil, une violation des paragraphes 1 et 2 de l'article
14 du Pacte.
3.6 En outre, selon le conseil, dans son récapitulatif préalable aux
délibérations du jury, le juge du fond a induit le jury en erreur en ce
qui concerne la position à adopter au sujet des éléments présentés à titre
de preuve, ce qui a représenté un déni de justice. Le conseil fait valoir
qu'en autorisant l'accusation à présenter à titre de preuve la déclaration
faite par Charles Wilson à la police, le juge a inévitablement amené le
jury à rendre un verdict de culpabilité. Quand il a donné les instructions
concernant la déclaration du témoin, le juge n'a pas précisé qu'il ne
s'agissait pas de déterminer si les propos cités ("Shot the guard
boy, let we get his gun") étaient vrais, mais que cette observation
servait simplement à établir la crédibilité de M. Wilson en tant que témoin.
De plus, le juge a effectivement demandé au jury de ne pas se demander
si M. Wilson pouvait s'être trompé. Il a effectivement dit au jury que,
s'il considérait que ces propos avaient bien été tenus, il ne pouvait
pas ne pas conclure que l'auteur avait eu l'intention de participer au
projet commun, quand l'homme qui portait l'arme avait tiré sur Alvin Scarlett.
De surcroît, dans son récapitulatif, le juge a déformé plusieurs fois
la phrase, disant "Shoot the guard boy..." (c'est-à-dire l'impératif
: "Tire sur le garde") et non "Shot the guard boy..."
(le participe passé : "On a tiré sur le garde"), comme M. Wilson
l'avait dit au tribunal et dans sa déclaration à la police. Le conseil
souligne que le juge a ainsi détourné le témoignage et a incité le jury
à interpréter une constatation comme s'il s'agissait d'un ordre.
3.7 D'après le conseil, l'auteur est victime d'une violation de l'article
7 et du paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte, en raison des sévices infligés
par la police après son arrestation. L'auteur affirme qu'il a passé environ
six mois en détention provisoire sur inculpation d'utilisation d'une arme
à feu avant d'être inculpé de meurtre. Après son arrestation, il a tout
d'abord été détenu au poste de police de Spanish Town, puis a été transféré
au poste de police de Hunts Bay, où, affirme-t-il : "J'ai été frappé
au dos, à la poitrine, au cou et sur la plante des pieds par les policiers,
c'est-à-dire Bobby Williams, R. Scott et l'inspecteur Davis, qui dirigeait
les opérations; après, j'avais du sang dans les urines et j'étais en état
de choc nerveux. Ils m'ont passé à tabac pendant deux semaines, deux fois
par jour. La police a toujours refusé que je reçoive des visites et des
soins médicaux. [...] Chaque fois que les policiers partaient à la recherche
de gens qui, d'après eux, avaient commis le crime et qu'ils revenaient
sans les avoir trouvés, j'avais droit à un passage à tabac parce qu'ils
voulaient que je leur donne des renseignements que je n'avais pas. J'ai
parlé à mon avocat de ces traitements, mais personne n'a rien fait".
3.8 Les allégations de brutalités policières semblent corroborées par
le témoignage de la tante de l'auteur, Janet Gayle, qui a dit dans sa
déclaration écrite sous serment datée du 10 septembre 1994 : "J'ai
rendu visite à Michael au poste de police et il m'a dit que chaque fois
qu'il était interrogé [...], il clamait son innocence et alors il était
passé à tabac par les enquêteurs. Il m'a dit qu'il était roué de coups
au moins trois ou quatre fois par semaine. J'ai vu qu'il avait des plaies
ouvertes et des cicatrices. Michael m'a dit qu'après un passage à tabac,
il s'était évanoui et avait été conduit chez un médecin puis ramené au
poste de police". Elle a déclaré qu'elle ne pensait pas que l'avocat
qui avait représenté l'auteur au procès était au courant de ces brutalités.
Elle a également indiqué : "Michael n'a jamais eu de crise d'épilepsie
avant sa détention, quand on l'a passé à tabac. Je crois que c'est un
an après le procès que les médecins ont trouvé qu'il souffrait d'épilepsie.
Michael m'a dit que la première fois qu'il s'était évanoui c'était après
le premier passage à tabac, au poste de police de Spanish Town. Il m'a
dit qu'il avait eu des évanouissements en prison. En général c'est quand
il avait reçu des coups qu'il s'évanouissait, en prison. Une fois, je
suis allée le voir en prison mais j'étais en retard et l'heure des visites
était passée. Alors je suis allée rendre visite à un ami qui était à l'h_pital
de Spanish Town et, à ma grande surprise, j'y ai trouvé Michael et j'ai
vu avec horreur qu'il avait une blessure ouverte à la tête et perdait
son sang. [...] Actuellement, Michael prend des médicaments pour l'épilepsie
et dès qu'il arrête les médicaments il a des crises. Maintenant il ne
peut plus s'en passer. [...] Je crois que ce sont les séances de coups
qui déclenchent les crises d'épilepsie". Janet Gayle parle des brutalités
commises au poste de police de Spanish Town, mais l'auteur a confirmé
que les passages à tabac avaient eu lieu au poste de police de Hunts Bay
et non pas à celui de Spanish Town.
3.9 Dans une lettre du 18 février 1994 adressée à son conseil de Londres,
l'auteur explique : "Plusieurs fois, la police [...] est venue me
chercher dans la cellule et m'a amené dans la salle des policiers; [on]
m'a frappée avec des morceaux de bois de 5 cm sur 10 cm, des tuyaux en
fer et le manche d'une pioche. J'ai eu plusieurs plaies à la tête, les
bras et les jambes enflés. Il y a eu des lésions internes puisque j'avais
beaucoup de sang dans les urines et chaque fois que je toussais, je crachais
du sang. J'ai eu plusieurs plaies sur le dos. Ils m'ont aussi frappé sur
la plante des pieds. Comme j'étais resté enfermé pendant plus d'un mois
sans pouvoir parler à qui que ce soit, je n'avais pu parler des passages
à tabac à personne avant d'aller au tribunal et au tribunal je n'ai pas
eu le droit d'ouvrir la bouche de tout le procès".
3.10 De plus, le 19 juillet 1993, Mme Simmons, militante des droits de
l'homme originaire d'Angleterre, a fait un rapport au Conseil des droits
de l'homme de la Jamaïque au nom de l'auteur, où elle indiquait que le
24 juin 1993, il avait été violemment agressé par un gardien de la prison
du district de St. Catherine, ce qui lui avait valu de passer trois jours
et demi à l'h_pital de Spanish Town pour des blessures à la tête.
3.11 Le 20 juillet 1993, le conseil a présenté au nom de l'auteur une
plainte au médiateur parlementaire de la Jamaïque, lui demandant d'ouvrir
une enquête sur cet incident. Il a également demandé au Conseil des droits
de l'homme de la Jamaïque de veiller à ce que le médiateur procède bien
à cette enquête. Le 4 août 1993, le Bureau du médiateur a informé le conseil
que "la plainte serait examinée avec la plus grande diligence".
Le 3 février et le 5 juillet 1994, le conseil s'est enquis auprès du médiateur
de l'issue des enquêtes éventuelles. Il dit n'avoir toujours pas reçu
de réponse du Bureau du médiateur. De plus, le coordonnateur du Conseil
des droits de l'homme de la Jamaïque a adressé le 1er octobre 1993 une
demande d'action urgente au Directeur de l'Organisation mondiale contre
la torture. Le père Brian Massie, aum_nier de la prison du district de
St. Catherine, a de son c_té écrit au Directeur de la prison le 23 juillet
1993, pour lui demander de faire une enquête sur les mauvais traitements
qui auraient été infligés à l'auteur et de présenter un bref rapport lors
de la réunion du conseil des visites. Le 30 mars 1994, le père Massie
a pris contact avec le conseil pour lui expliquer que rien de concret
n'avait été fait.
3.12 Dans sa déclaration écrite sous serment, Mme Simmons signale que
chacune de ses visites à l'auteur s'est passée en présence d'un gardien
et que l'auteur lui a dit avoir peur de répondre à ses questions concernant
les brutalités infligées par les gardiens de prison, par crainte de représailles.
Mme Simmons ajoute qu'un jour elle a elle-même essuyé pendant une demi-heure
des humiliations de la part du Directeur et de certains membres de son
personnel et qu'ils ont limité ses visites. Le coordonnateur du Conseil
des droits de l'homme de la Jamaïque a alors proposé de parler du problème
au Directeur de l'administration pénitentiaire mais l'auteur a préféré
en rester là car il craignait les représailles des gardiens. D'après le
conseil, les conditions prescrites dans l'Ensemble de règles minima de
l'ONU pour le traitement des détenus n'ont pas été satisfaites pendant
la détention de l'auteur au poste de police de Hunts Bay et à la prison
du district de St. Catherine, et les sévices qu'il a subis le 24 juin
1993, l'insuffisance des soins reçus ainsi que la crainte perpétuelle
de représailles représentent des violations de l'article 7 et du paragraphe
1 de l'article 10 du Pacte.
3.13 Le conseil souligne que l'auteur est resté dans le quartier des
condamnés à mort pendant trois ans et sept mois avant que sa peine ne
soit commuée en emprisonnement à vie, à la suite du processus de requalification
des infractions pénales. Il se réfère à la décision prise par la section
judiciaire du Conseil privé dans l'affaire Pratt et Morgan
/ Earl Pratt et Ivan Morgan c. Attorney-General of Jamaica;
dossier d'appel No 10 de 1993, décision rendue par le Conseil privé le
2 novembre 1993., où la section judiciaire indique notamment qu'il devrait
être possible pour l'Etat partie d'achever tout le processus des appels
internes en deux ans environ. Le conseil fait valoir que la longueur de
la procédure dans le cas de l'auteur, contraint de vivre dans la hantise
de l'exécution, constitue une violation de l'article 7 et du paragraphe
1 de l'article 10.
3.14 Enfin, le conseil cite les conclusions d'une délégation d'Amnesty
International qui a visité la prison du district de St. Catherine en novembre
1993. Cette délégation a constaté notamment que le nombre de détenus était
plus de deux fois supérieur à la capacité d'hébergement de la prison,
construite au XIXe siècle, et que les services assurés par l'Etat étaient
plus qu'insuffisants : pas de matelas ni d'autre literie ou meuble dans
les cellules; pas d'installations sanitaires dans les cellules; plomberie
cassée, tas d'immondices et absence de tout-à-l'égout; pas de lumière
électrique dans les cellules, uniquement des trous d'aération laissant
entrer la lumière du jour; quasiment aucune possibilité de travailler
pour les détenus; pas de médecin attaché à la prison, de sorte que les
soins médicaux sont généralement donnés par les gardiens qui reçoivent
une formation très réduite. Le conseil signale que ces conditions générales
ont eu sur l'auteur une incidence particulière : confiné dans sa cellule
22 heures par jour, il passait la plupart du temps isolé des autres détenus,
n'ayant rien à faire pour s'occuper. La plupart du temps, il restait dans
une obscurité forcée. Alors qu'il se plaignait de douleurs dans la poitrine
et de ne rien digérer, au 29 août 1994 il n'avait toujours pas vu de médecin.
Les conditions dans lesquelles l'auteur est resté détenu à la prison du
district de St. Catherine sont qualifiées de traitement cruel, inhumain
et dégradant au sens de l'article 7 et du paragraphe 1 de l'article 10
du Pacte.
Renseignements et observations communiqués par l'Etat partie au
sujet de la recevabilité et commentaires de l'auteur
4.1 Dans une communication datée du 1er juin 1995, l'Etat partie n'aborde
pas expressément la question de la recevabilité et formule des observations
sur le fond de l'affaire.
4.2 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle le fait de ne pas
avoir fait connaître la déclaration faite par M. Wilson à la police constituait
une violation de l'alinéa b) du paragraphe 3 de l'article 14 du Pacte,
l'Etat partie fait valoir que le conseil aurait pu exiger que les témoins
à décharge viennent déposer au procès et qu'il n'avait donc pas été laissé
sans moyens de protéger les intérêts de son client. Il fait en outre valoir
que ce sont là des questions relatives à l'administration des preuves,
sur lesquelles il appartient plut_t, selon la jurisprudence même du Comité,
aux juridictions d'appel de se prononcer.
4.3 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle l'auteur n'avait pas
pu procéder au contre-interrogatoire des témoins dans les mêmes conditions
que l'accusation, l'Etat partie renvoie aux observations communiquées
par l'avocat de l'auteur à la Jamaïque au conseil à Londres et soutient
que l'opinion exprimée par le premier apporte la preuve des événements
qui se sont produits, ce qui dément l'allégation de violation de l'alinéa
b) du paragraphe 3 de l'article 14.
4.4 L'Etat partie nie qu'il y ait eu violation de l'alinéa e) du paragraphe
3 de l'article 14 du Pacte. L'auteur disposait, en effet, de témoins à
décharge et aurait pu décider de les faire comparaître.
4.5 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle le juge du fond aurait
induit le jury en erreur, l'Etat partie soutient qu'il s'agit là d'une
question d'appréciation des faits et des éléments de preuve au sujet de
laquelle il appartient aux juridictions d'appel et non au Comité de se
prononcer.
4.6 En ce qui concerne les allégations de sévices infligés par la police
à l'auteur après son arrestation, l'Etat partie fait valoir qu'il est
significatif que M. Adams n'ait pas porté ces faits à l'attention de son
conseil et que la tante de l'auteur admet qu'il a été conduit chez un
médecin. En ce qui concerne l'allégation de sévices que l'auteur aurait
subis en prison, l'Etat partie informe qu'il va faire une enquête et qu'il
en portera les résultats à la connaissance du Comité dès qu'ils seront
connus. Le Comité n'avait pas reçu d'autres informations au 1er mars 1996.
4.7 En ce qui concerne l'allégation relative au "syndrome du quartier
des condamnés à mort", l'Etat partie soutient qu'on ne saurait invoquer
la décision du Conseil privé dans l'affaire Earl Pratt and Ivan Morgan
c. Attorney-General of Jamaica pour affirmer que l'incarcération
dans le quartier des condamnés à mort pendant un certain temps constitue
un traitement cruel et inhumain. Chaque cas doit être jugé selon les faits
qui lui sont propres, conformément aux règles de droit applicables. A
l'appui de son argument, l'Etat partie rappelle que, dans ses considérations
relatives à l'affaire Pratt et Morgan, le Comité a estimé que les lenteurs
de la procédure judiciaire ne constituaient pas en soi un traitement cruel,
inhumain ou dégradant.
5.1 Dans ses commentaires, le conseil réaffirme que son client est victime
de violations des paragraphes 1, 2, 3 b) et e) de l'article 14 du Pacte.
Il considère que le fait de ne pas avoir porté la déclaration à la connaissance
de la défense a privé l'auteur de la possibilité d'interroger des témoins
dans les mêmes conditions que l'accusation en lui enlevant la possibilité
de réfuter l'allégation et en le privant effectivement d'un procès équitable.
En ce qui concerne l'existence de témoins à décharge, ils ont été "intimidés"
par l'inspecteur chargé de l'enquête; par conséquent, contrairement à
ce qu'affirme l'Etat partie, l'auteur ne disposait pas de ces témoins.
5.2 Le conseil note que l'Etat partie ne nie pas que l'auteur ait été
victime de brutalités pendant sa détention avant jugement et à la prison
du district de St. Catherine.
Considérations relatives à la recevabilité et examen quant au fond
6.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité
des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement
intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du
Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
6.2 Le Comité constate que la demande d'autorisation de recours formulée
par l'auteur ayant été rejetée par la section judiciaire du Conseil privé,
le 4 novembre 1993, l'auteur a épuisé les recours internes aux fins de
l'application du Protocole facultatif. Il note que l'Etat partie n'a pas
expressément abordé la question de la recevabilité de l'affaire et a formulé
des observations sur le fond. Le Comité rappelle que le Protocole facultatif
prévoit, au paragraphe 2 de son article 4, que l'Etat partie soumet par
écrit des observations sur le fond dans les six mois. Le Comité réitère
que ce délai peut être écourté, dans l'intérêt de la justice, si tel est
le souhait de l'Etat partie. Le Comité note en outre que le Conseil ne
s'oppose pas à ce que l'on examine à ce stade l'affaire quant au fond.
6.3 En ce qui concerne les allégations relatives aux irrégularités du
procès, en particulier l'allégation selon laquelle le juge aurait donné
au jury des instructions impropres au sujet de l'appréciation des éléments
de preuve, tels que la déclaration faite par M. Wilson à la police, le
Comité rappelle qu'il appartient généralement aux juridictions des Etats
parties au Pacte d'apprécier les faits et les éléments de preuve dans
un cas d'espèce; de même, il appartient aux juridictions d'appel et non
au Comité d'examiner les instructions données par le juge aux jurés dans
un procès devant jury, sauf s'il peut être établi que les instructions
données au jury sont manifestement arbitraires, ou ont représenté un déni
de justice, ou que le juge a manifestement violé son obligation d'impartialité.
Il ne ressort pas des allégations de l'auteur que les instructions du
juge aient été entachées de telles irrégularités. En conséquence, cette
partie de la communication, étant incompatible avec les dispositions du
Pacte, est irrecevable conformément à l'article 3 du Protocole facultatif.
7. En ce qui concerne les autres allégations de l'auteur, le Comité décide
que l'affaire est recevable et procède, sans plus attendre, à un examen
du fond des allégations à la lumière de toutes les informations que les
parties lui ont communiquées par écrit, conformément au paragraphe 1 de
l'article 5 du Protocole facultatif.
8.1 En ce qui concerne l'allégation de l'auteur selon laquelle la durée
de sa détention dans le quartier des condamnés à mort constitue une violation
des articles 7 et 10 du Pacte, le Comité estime, conformément à sa jurisprudence,
que la détention dans le quartier des condamnés à mort ne constitue pas
en soi un traitement cruel, inhumain ou dégradant en violation de l'article
7 du Pacte, en l'absence d'autres circonstances impérieuses /
Voir les constatations du Comité au sujet de la communication No 588/1994
(Errol Johnson c. Jamaïque), adoptées le 22 mars 1996 (par.
8.2 et 8.5).. Le Comité constate que l'auteur n'a pas montré en quoi la
durée de sa détention dans le quartier des condamnés à mort l'avait affecté
au point de soulever une question au titre des articles 7 et 10 du Pacte.
S'il est souhaitable que les procédures d'appel soient menées de la manière
la plus diligente possible, dans le cas d'espèce, le Comité conclut qu'un
délai de trois ans et sept mois ne constitue pas une violation de l'article
7 et du paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte.
8.2 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle l'auteur aurait été
victime de mauvais traitements, le Comité considère que la question comporte
deux aspects distincts : les brutalités que l'auteur aurait subies pendant
la détention avant jugement et celles qu'il aurait subies ensuite à la
prison du district de St. Catherine. En ce qui concerne les mauvais traitements
infligés pendant la détention avant jugement, le Comité note que l'Etat
partie n'en a pas nié l'existence, mais a simplement déclaré que l'auteur
avait reçu des soins médicaux. En ce qui concerne les brutalités dont
l'auteur aurait été victime à la prison du district de St. Catherine,
le Comité note que l'auteur a formulé des allégations très précises et
les a portées à la connaissance du médiateur parlementaire de la Jamaïque
et du Conseil des droits de l'homme de la Jamaïque dans une plainte dont
il les a saisis. L'Etat partie a promis d'ouvrir une enquête sur ces allégations,
mais il n'en a pas communiqué les résultats au Comité près de 10 mois
après s'être engagé à le faire. Dans ces conditions, le Comité estime
que les allégations concernant le traitement que l'auteur a subi aussi
bien durant sa détention avant jugement qu'à la prison de St. Catherine
sont fondées et conclut que l'article 7 et le paragraphe 1 de l'article
10 du Pacte ont été violés.
8.3 L'auteur affirme que les paragraphes 1, 2, 3 b) et e) de l'article
14 ont été violés du fait qu'en s'abstenant de l'informer de la déclaration
faite par M. Wilson à la police, l'accusation ne lui a pas donné la possibilité
de procéder au contre-interrogatoire des témoins dans les mêmes conditions
que l'accusation et, partant, ne lui a pas permis de bénéficier des facilités
nécessaires pour la préparation de sa défense. Le Comité note, toutefois,
que bien que le conseil ait objecté à la recevabilité de la déclaration
en tant que preuve, il n'a pas demandé de suspension d'audience ni même
réclamé une copie de la déclaration. Le Comité considère par conséquent
que l'allégation n'est pas fondée et que, par conséquent, les dispositions
correspondantes du Pacte n'ont pas été violées.
8.4 L'auteur soutient que les témoins à décharge ayant été "dissuadés"
par la police, il n'a pas pu obtenir qu'ils comparaissent et soient interrogés
dans les mêmes conditions que les témoins à charge. L'Etat partie n'a
pas expliqué pourquoi il n'avait pas été recueilli de déposition auprès
de trois témoins qui pouvaient étayer l'alibi de l'auteur et qui avaient
indiqué à diverses reprises qu'ils étaient disposés à témoigner en sa
faveur, comme l'attestent les déclarations écrites sous serment signées
par les intéressés. Le Comité considère, cependant, qu'étant donné qu'il
y avait des personnes pour témoigner en faveur de l'auteur, c'était au
conseil qu'il appartenait de décider s'il fallait ou non les appeler à
la barre. Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle il n'appartient
pas au Comité de mettre en cause les choix du conseil à moins qu'il ne
soit manifeste que sa conduite était incompatible avec l'intérêt de la
justice. Dans le cas présent, il n'y a aucune raison de penser que le
conseil n'a pas fait ce qui lui paraissait le mieux. Dans ces conditions,
le Comité estime que les faits dont il est saisi ne font apparaître aucune
violation du Pacte.
9. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu du paragraphe 4
de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, estime que les faits dont il
est saisi font apparaître une violation de l'article 7 et du paragraphe
1 de l'article 10 du Pacte.
10. En vertu du paragraphe 3 a) de l'article 2 du Pacte, l'auteur a droit
à un recours utile, entraînant son dédommagement.
11. Etant donné qu'en adhérant au Protocole facultatif, l'Etat partie
a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s'il y avait
eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l'article 2 du Pacte,
il s'est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire
et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer
un recours utile et exécutoire lorsqu'une violation a été établie, le
Comité souhaite recevoir de l'Etat partie, dans un délai de 90 jours,
des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations.
______________
* Conformément à l'article 85 du règlement intérieur du Comité, M. Laurel
Francis, un des membres du Comité, n'a pas participé à l'examen de la
communication.
[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra
ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel
présenté par le Comité à l'Assemblée générale.]