Présentée par: M. Robert Collins
Au nom de: L'auteur
État partie: Australie
Date de la communication: 14 septembre 1999 (communication initiale)
Le Comité des droits de l'homme, institué en application de l'article
28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
Réuni le 29 octobre 2002,
Adopte la décision ci-après:
Décision concernant la recevabilité
1. L'auteur de la communication est M. Robert Collins, de nationalité australienne,
qui est actuellement en détention en Australie du Sud. Il se déclare victime
d'une violation par l'Australie de l'article 10, paragraphes 1 et 2 a), du
Pacte. Il n'est pas représenté par un conseil.
Rappel des faits présentés par l'auteur
2.1 Du 26 avril 1994 au 21 avril 1997, l'auteur a été détenu à la maison
d'arrêt d'Adélaïde. Du 26 avril 1994 au 18 janvier 1995, bien qu'il ne soit
que prévenu (1), l'auteur a été incarcéré avec des condamnés. L'auteur
n'a pas dû cohabiter avec un condamné pendant cette période en vertu du
système de «double occupation des cellules», (2) mais il a dû partager
les installations pénitentiaires avec des condamnés. Du 18 janvier 1995
au 29 mars 1996, il a joui d'un «double statut», à savoir celui de détenu
condamné pour une infraction et de prévenu au titre d'une autre infraction.
Du 29 mars 1996 au 21 avril 1997, l'auteur a été détenu en tant que condamné.
2.2 Le 13 février 1997, l'auteur a intenté une action devant la Cour suprême
de l'Australie méridionale contre le Gouvernement de cet État. Il affirmait
que le système de double occupation des cellules, qui était appliqué à la
maison d'arrêt d'Adélaïde, était contraire aux normes internationales et
que cela favorisait, selon lui, les agressions sexuelles sur les détenus,
les agressions contre le personnel pénitentiaire et la propagation des maladies
contagieuses, outre le fait que des non-fumeurs devaient cohabiter avec
des fumeurs. Il demandait que la Cour suprême déclare que l'administration
pénitentiaire avait violé les droits de l'homme (3).
2.3 Le 21 avril 1997, l'auteur a été transféré à la prison de Mobilong où
il a été détenu jusqu'en novembre 1997 en tant que condamné. Il a été inculpé
d'une autre infraction au cours de cette période. En novembre 1997, il a
été transféré à la prison de Yatala, où il est resté jusqu'en novembre 1999
avec le double statut de condamné et de prévenu.
2.4 Le 25 juin 1999, la Cour suprême a rendu une décision rejetant l'allégation
de l'auteur selon laquelle l'administration pénitentiaire avait violé l'Ensemble
de règles minima pour le traitement des détenus à la maison d'arrêt d'Adélaïde
ainsi que l'article 10, paragraphes 1 et 2, du Pacte, lequel, a-t-elle confirmé,
faisait bien partie du droit interne (4). Toutefois, le juge
a considéré que l'État de l'Australie méridionale n'était pas lié par la
loi sur la Commission des droits de l'homme et de l'égalité des chances
à laquelle le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
est annexé, étant donné que l'article 6 de cette loi exclut son application
directe au niveau de l'État. Il a également estimé que la loi sur les décisions
administratives de 1995, promulguée en Australie méridionale, ôte tout espoir
légitime que les décisions administratives se conforment aux dispositions
de traités, conventions ou pactes internationaux. En outre, il a décidé
de ne pas publier de déclaration dans cette affaire étant donné qu'il ne
serait pas possible ou pas pratique de remédier concrètement au problème,
car cela signifierait nécessairement la suppression du système de double
occupation des cellules et obligerait donc à construire un nouvel établissement
pénitentiaire. De l'avis du juge, les tribunaux ne pouvaient pas dire au
Gouvernement comment il devait dépenser son argent.
2.5 En novembre 1999, l'auteur a été transféré au Centre de détention provisoire
d'Adélaïde où il a été détenu en tant que prévenu et condamné jusqu'en mai
2000. Il a été ensuite transféré à la prison de Yatala, où il a eu le double
statut de prévenu et de condamné jusqu'en août 2000. Depuis cette date,
il y est détenu en tant que condamné.
2.6 L'auteur donne des informations générales sur les établissements pénitentiaires
de l'Australie méridionale. Par exemple, il indique qu'à la maison d'arrêt
d'Adélaïde, le nombre des détenus est passé de 166 à 240 en raison du système
de double occupation des cellules, qu'il n'y a pas d'aération naturelle
et très peu de lumière naturelle dans les cellules, dont les occupants se
voient limités dans leurs mouvements et dans l'accès à de l'air frais. À
la prison de Yatala, dit-il, bien que tout un étage soit réservé actuellement
aux prévenus, ces derniers se «mêlent» aux autres détenus et ne bénéficient
pas de «conditions spéciales de détention». Ils ont simplement droit à un
coup de téléphone de 10 minutes par jour, qu'ils doivent réserver la veille.
Teneur de la plainte
3.1 L'auteur affirme qu'en raison du système de double occupation des cellules
individuelles appliqué dans les établissements pénitentiaires de l'Australie
méridionale, en particulier à la maison d'arrêt d'Adélaïde, ses droits en
vertu du paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte ont été violés. Il soumet
à cet égard au Comité diverses plaintes, qui sont celles qu'il a déjà présentées
à la Cour suprême, au sujet des effets néfastes du partage de cellule, à
savoir une augmentation du nombre d'agressions, y compris d'agressions sexuelles,
une diminution de la qualité de vie et du sentiment de sécurité, l'obligation
pour des non-fumeurs de cohabiter avec des fumeurs, le placement dans la
même cellule de personnes souffrant de maladies contagieuses avec des personnes
en bonne santé et le fait de devoir aller aux toilettes dans la cellule
à un mètre de la couchette inférieure et devant l'autre occupant. Bien que
l'auteur n'ait pas eu à partager une cellule pendant son incarcération à
la maison d'arrêt d'Adélaïde, il affirme avoir subi un stress en raison
des effets que ce système de double occupation des cellules avait sur les
détenus de cet établissement en général.
3.2 L'auteur affirme également que le fait d'avoir été détenu en tant que
prévenu dans les mêmes installations que des condamnés, du 26 avril 1994
au 18 janvier 1995, constitue une violation du paragraphe 2 a) de l'article
10 du Pacte (5). Il dit en outre que pendant la période où
il avait le double statut de prévenu et de condamné, il aurait dû aussi
avoir le droit d'être séparé des autres détenus.
Observations de l'État partie sur la recevabilité et le fond de
la communication
4.1 Par une note verbale datée de février 2001, l'État partie a présenté
ses observations sur la recevabilité et le fond de la communication. En
ce qui concerne le premier point, il affirme que la communication est irrecevable
dans la mesure où l'auteur ne remplit pas les critères énoncés à l'article
premier du Protocole facultatif, n'a pas épuisé les recours internes et
n'est pas fondé à se déclarer victime d'une violation du Pacte. L'État partie
fait observer que dans l'action qu'il a intentée devant la Cour suprême
de l'Australie méridionale, l'auteur a demandé que celle-ci déclare que
l'État de l'Australie méridionale, par l'intermédiaire de l'administration
pénitentiaire, avait violé le Pacte international relatif aux droits civils
et politiques et qu'il soit indiqué dans cette déclaration si et dans quelle
mesure le Pacte avait été incorporé au droit interne et avait force obligatoire
pour l'État de l'Australie méridionale. L'auteur n'a pas affirmé dans le
cadre de cette action qu'il était victime d'une violation quelconque de
l'article 10 du Pacte.
4.2 L'État partie fait observer que dans sa communication, l'auteur n'a
pas étayé l'allégation selon laquelle il avait été victime d'une violation
quelconque de l'article 10. En fait, il donne des informations sur certains
établissements pénitentiaires de l'Australie méridionale et signale un certain
nombre d'incidents qui se seraient produits dans ces établissements mais
qui ne le concernent pas et n'ont aucun rapport avec sa propre situation.
L'État partie se réfère à la jurisprudence du Comité (6) sur l'interprétation
de l'article premier du Protocole facultatif d'où il ressort que l'auteur
d'une communication doit démontrer qu'il/elle est victime de violations
présumées du Pacte. L'État partie fait observer que l'auteur n'a pas prétendu
être personnellement victime d'une quelconque violation. En conséquence,
l'État partie considère que le Comité ne peut formuler d'opinion sur des
violations du droit dans l'abstrait et qu'il devrait donc déclarer la communication
irrecevable.
4.3 En outre, l'État partie fait valoir que la communication est irrecevable
puisque les recours internes n'ont pas été épuisés comme l'exige l'article
2 du Protocole facultatif. D'après l'État partie, l'auteur aurait pu se
pourvoir devant la Cour suprême siégeant en formation plénière de l'Australie
méridionale. Bien que le délai fixé pour former un tel pourvoi ait expiré,
l'auteur a encore la possibilité de déposer une demande de prolongation
de ce délai pour se pourvoir devant la Cour. L'auteur pourrait également
demander l'autorisation de former recours à la High Court d'Australie
au cas où un pourvoi devant la Cour suprême siégeant en formation plénière
de l'Australie méridionale n'aboutirait pas ou si sa demande de prolongation
du délai fixé pour se pourvoir devant la Cour suprême de l'Australie méridionale
était rejetée.
4.4 L'État partie estime que l'auteur n'est pas fondé à invoquer le Pacte.
En ce qui concerne sa plainte selon laquelle il n'a pas été séparé des condamnés
pendant sa détention provisoire, l'État partie rappelle sa réserve au paragraphe
2 a) et b) de l'article 10. Il souligne qu'aucune objection n'a été formulée
par d'autres États parties au Pacte et reçue par le Secrétaire général à
la réserve de l'Australie à l'article 10. Il fait valoir que cette réserve
est conforme aux directives du Comité concernant les réserves énoncées dans
l'Observation générale nº 24 (7). En outre, il se réfère au
paragraphe 3 de l'article 19 de la Convention de Vienne sur le droit des
traités qui dispose que si une réserve n'est pas interdite par le traité
considéré ou relève de la catégorie des réserves déterminées autorisées,
un État peut formuler une réserve pour autant qu'elle ne soit pas incompatible
avec l'objet et le but du traité. Le Pacte n'interdit pas les réserves en
général ni ne mentionne aucun type de réserves autorisées. Pour ces raisons,
l'État partie considère que l'auteur n'est pas fondé à se déclarer victime
d'une violation de cet article du Pacte.
4.5 S'agissant du fond de la communication et dans le cas où le Comité jugerait
recevables les plaintes relatives au système de double occupation des cellules,
l'État partie estime que ces allégations ne sont pas fondées étant donné
que l'auteur n'a pas indiqué en quoi la façon dont il avait été traité dans
les prisons de l'Australie méridionale constituait une violation du paragraphe
1 de l'article 10 du Pacte. Bien qu'il ait fait mention de certaines des
conséquences de ce système dans l'action qu'il a intentée contre l'Australie
méridionale, l'auteur n'indique pas en quoi cela équivaudrait à une violation
du paragraphe 1 de l'article 10. En fait, il n'a pas dit qu'il avait partagé
une cellule avec un autre détenu. Il ressort cependant des registres de
l'administration pénitentiaire que l'auteur a été placé temporairement dans
la cellule d'un autre détenu pendant un mois, en décembre 1997, à la prison
de Yatala, après quoi il a été transféré dans une cellule individuelle (8).
4.6 Pour ce qui est de l'Ensemble de règles minima pour le traitement des
détenus, l'État partie renvoie aux débats qui ont eu lieu lors de la rédaction
du Pacte et rappelle qu'il avait été dit à l'époque qu'il n'était pas souhaitable
de lier formellement l'Ensemble de règles à cet article parce que le Comité
ne les avait pas examinées ni étudiées en détail et que certaines de ces
règles risquaient d'être contraires à l'esprit et à la lettre du texte en
cours d'élaboration. L'État partie fait valoir par conséquent que même si
les Règles peuvent être prises en compte pour déterminer les normes correspondant
à des conditions de détention humaines, elles ne constituent pas un code
et que les États parties ne sont pas non plus tenus d'y adhérer pour satisfaire
aux exigences du Pacte. Il signale en outre que ces règles n'ont pas force
de loi en Australie.
4.7 L'État partie se réfère à la règle 9 1) de l'Ensemble de règles minima
pour le traitement des détenus selon laquelle «les cellules ou chambres
destinées à l'isolement nocturne ne doivent être occupées que par un seul
détenu», et note qu'une exception peut être faite à cette règle en cas de
surpeuplement temporaire. Il fait observer qu'en Australie, l'administration
pénitentiaire n'a recours au système de la double occupation des cellules
que dans les cas où il n'y a pas de cellule individuelle disponible. La
population carcérale aurait diminué au cours des dernières années en dépit
de prévisions antérieures selon lesquelles elle augmenterait. En raison
des fluctuations de la population carcérale, il est difficile de déterminer
s'il faut construire de nouvelles installations, à un coût conséquent pour
les contribuables, compte tenu en particulier des délais de construction.
La double occupation des cellules disponibles devient alors nécessaire pour
tenir compte des fluctuations de la population carcérale. Le Gouvernement
australien fait observer toutefois que même si l'on a recours à ce système
dans les prisons de l'Australie méridionale, c'est uniquement à titre temporaire
en fonction des fluctuations de la population carcérale.
4.8 L'État partie se réfère à nouveau à la décision de la Cour suprême dans
laquelle le juge citait certains des propos de l'auteur qui avait dit notamment:
«il n'y a pas de respect de la dignité humaine lorsqu'un détenu est obligé
d'aller aux toilettes à un mètre de celui qui occupe la couchette inférieure
dans la même cellule et devant lui». L'État partie fait observer qu'il n'est
pas rare que des personnes du même sexe partagent des installations accueillant
un grand nombre de personnes. Se référant à la jurisprudence du Comité,
(9) il dit que l'on ne pourrait raisonnablement affirmer que les
conditions dans lesquelles l'auteur se plaint d'avoir été incarcéré répondent
aux critères du traitement inhumain ou du non-respect de la dignité inhérente
à la personne humaine. À cet égard, l'État partie fait état des types de
conditions de détention et de traitement des détenus dont le Comité a considéré
dans de précédentes affaires qu'ils constituaient une violation du paragraphe
1 de l'article 10 du Pacte, notamment la détention au secret, le manque
d'hygiène, l'insuffisance d'exercice et de nourriture et les brutalités
de la part du personnel pénitentiaire (10). De l'avis de l'État
partie, les conditions de détention à propos desquelles le Comité a conclu
à une violation du paragraphe 1 de l'article 10 sont nettement plus pénibles
que celles décrites par l'auteur dans sa plainte.
Commentaires de l'auteur
5.1 L'auteur répond aux observations de l'État partie concernant la recevabilité
en affirmant qu'il a épuisé les recours internes. Selon lui, le juge de
la Cour suprême de l'Australie méridionale avait dit que «l'autorisation
de former un recours ne lui serait pas accordée à cause de la législation
promulguée par les gouvernements concernés». Il ajoute qu'il ne souhaitait
pas faire perdre du temps aux tribunaux en formant un recours sur une question
qui ne pouvait pas être tranchée en sa faveur à cause d'une législation
qui empêchait expressément l'application du droit international. Il dit
également qu'une requête présentée à la Commission des droits de l'homme
et de l'égalité des chances a été rejetée.
5.2 En réponse aux observations de l'État partie concernant le fond, l'auteur
renvoie à nouveau à la décision de la Cour suprême de l'Australie méridionale
dont la teneur est exposée dans ses grandes lignes au paragraphe 2.4. Il
affirme que le fait de mettre deux détenus dans une cellule conçue pour
un seul est contraire au paragraphe 1 de l'article 10, étant donné que cela
signifie qu'un détenu doit dormir dans la même pièce qu'un autre détenu,
qu'il risque de faire l'objet de harcèlement sexuel et de «pressions», qu'il
est obligé d'utiliser la toilette devant l'autre occupant de la cellule
et à un mètre de sa couchette et de regarder lorsque celui-ci l'utilise,
et qu'il doit peut-être cohabiter avec un condamné. Dans une lettre ultérieure,
il confirme qu'à la prison de Yatala, il a dû partager la cellule d'un autre
détenu (11) et utiliser la toilette devant ce dernier.
5.3 S'agissant de la réserve de l'État partie au paragraphe 2 de l'article
10 du Pacte, l'auteur dit que celle-ci a été «invalidée» par le fait que
le Pacte international relatif aux droits civils et politiques a été annexé
à la loi de 1986 sur la Commission des droits de l'homme et de l'égalité
des chances sans qu'il soit fait aucune mention de la réserve émise.
5.4 L'auteur explique ensuite en détail pourquoi il estime que l'État de
l'Australie méridionale est lié par le Pacte international relatif aux droits
civils et politiques et qu'il est tenu d'appliquer l'Ensemble de règles
minima pour le traitement des détenus, et regrette que l'État partie n'ait
pas mentionné la loi de 1995 sur les décisions administratives (Effet des
instruments internationaux) (SA) et d'autres textes de loi nationaux.
Observations supplémentaires de l'État partie
6.1 En réponse aux commentaires de l'auteur, l'État partie fait observer
que la décision du juge de la Cour suprême de l'Australie méridionale ne
détermine pas les questions relevant du droit international et que ses vues
ne devraient pas remplacer celles du Comité.
6.2 En ce qui concerne les principes énoncés aux paragraphes 1 et 2 de l'article
10 du Pacte, l'État partie indique que les dispositions et les termes du
Pacte ont un sens qui leur est propre et diffère de celui qu'ils ont en
droit interne (12). Les conclusions auxquelles un tribunal
national pourrait aboutir à propos des termes «humanité» et «dignité inhérente
à la personne humaine» ne sauraient remplacer l'appréciation indépendante
du Comité. Le fait que le juge ne s'est pas référé à des constatations antérieures
du Comité donne à penser qu'il n'a pas fondé sa décision sur le sens donné
aux mots en question en droit international. Selon l'État partie, lorsque
les conclusions du tribunal sont replacées dans leur contexte, il apparaît
clairement que le juge a assimilé l'absence d'observation stricte de l'Ensemble
de règles minima pour le traitement des détenus à une violation du paragraphe
1 de l'article 10. Mais, dit-il, même si ces règles peuvent être prises
en compte pour déterminer les normes correspondant à des conditions de détention
humaines, elles ne constituent pas un code. Le fait de ne pas y adhérer
ne peut en soi amener à conclure qu'un détenu n'a pas été traité avec humanité
et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.
6.3 De l'avis de l'État partie, la loi de 1995 sur les décisions administratives
(Effet des instruments internationaux) (SA) est sans rapport avec les allégations
de violation de l'article 10; cette loi ne modifie les décisions et les
procédures administratives appliquées en vertu du droit de l'État de l'Australie
méridionale que dans la mesure où l'instrument international concerné a
été incorporé au droit interne. En conséquence, si un instrument international
ne fait pas encore partie du droit australien, on ne peut s'attendre légitimement
à ce qu'une autorité prenne une décision qui soit strictement conforme à
cet instrument.
6.4 L'État partie fait observer que le fait que le Pacte international relatif
aux droits civils et politiques est annexé à un texte législatif ne modifie
en aucune façon les réserves de l'Australie au Pacte. L'affirmation de l'auteur
n'est étayée par aucune règle de droit international.
6.5 L'État partie fait également observer que l'auteur consacre une large
partie de ses commentaires à l'examen de la relation entre le droit international
et le droit australien. Il traite en particulier du recours par les tribunaux
au droit international pour interpréter la common law. À son avis,
une discussion abstraite de la pratique judiciaire australienne ne sert
à rien pour déterminer si l'allégation de violation de l'article 10 est
fondée en l'espèce.
Délibérations du Comité
Examen de la recevabilité
7.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité
des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement
intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte.
7.2 Le Comité s'est assuré, comme il est tenu de le faire par le paragraphe
2 a) de l'article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n'était
pas en cours d'examen devant une autre instance internationale d'enquête
ou de règlement.
7.3 En ce qui concerne l'obligation d'épuisement des recours internes énoncée
au paragraphe 2 b) de l'article 5 du Protocole facultatif, le Comité note
que si dans la communication qu'il a présentée au Comité l'auteur s'est
plaint d'une violation de ses propres droits, dans l'action qu'il a intentée
devant les tribunaux de l'Australie méridionale, il a formulé des allégations
générales sur les conditions de détention. Le Comité observe en particulier
que l'auteur n'a jamais prétendu devant les juridictions australiennes qu'il
avait personnellement subi en prison un traitement qui serait contraire
aux dispositions de l'article 10 du Pacte ou à toutes autres dispositions
comparables du droit interne. Le Comité estime par conséquent que l'auteur
n'a pas épuisé les recours internes et que la communication est donc irrecevable.
8. En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide:
a) Que la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 b) de
l'article 5 du Protocole facultatif;
b) Que la présente décision sera communiquée à l'auteur et à l'État partie.
_____________________
[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra
aussi ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel
du Comité à l'Assemblée générale.]
* Les membres dont le nom suit ont pris part à l'examen de la communication:
M. Nisuke Ando, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, M. Louis Henkin,
M. Ahmed Tawfik Khalil, M. Eckart Klein, M. David Kretzmer, M. Rafael Rivas
Posada, Sir Nigel Rodley, M. Martin Scheinin, M. Hipólito Solari Yrigoyen
et M. Maxwell Yalden.
Notes
1. Détenu en attente de jugement qui n'a pas encore été condamné.
2. Lorsqu'un détenu doit partager une cellule, conçue pour une seule personne,
avec un autre détenu.
3. Il ressort de la documentation soumise par l'auteur que celui-ci ne
prétendait pas avoir subi personnellement l'un quelconque de ces effets
négatifs; il dénonçait cette situation de manière générale. Selon le texte
de la décision, l'auteur demandait qu'il soit reconnu dans une déclaration
que l'État de l'Australie méridionale était tenu par la loi de traiter les
prisonniers détenus dans le territoire de l'État conformément à l'Ensemble
de règles minima pour le traitement des détenus et que, dans la mesure où
l'État de l'Australie méridionale contraignait des prisonniers à
occuper à deux des cellules prévues pour une seule personne, le défendeur
enfreignait les règles applicables. L'auteur a mentionné les effets nocifs
de la «double occupation des cellules» à la maison d'arrêt d'Adelaïde, mais
n'a pas parlé de sa propre situation. L'auteur a également demandé l'établissement
d'une déclaration reconnaissant que l'État de l'Australie méridionale, par
l'entremise de ses services correctionnels, avait «porté atteinte aux droits
de l'homme énoncés dans les articles du Pacte», mais là encore n'a pas fait
état de sa situation personnelle.
4. Le Pacte a été incorporé sous forme d'annexe à la loi sur la Commission
des droits de l'homme et de l'égalité des chances.
5. L'État partie a formulé la réserve suivante à l'article 10 du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques: «En ce qui concerne
le paragraphe 2 a), le principe de la séparation est accepté en tant qu'objectif
à réaliser progressivement. Pour ce qui est du paragraphe 2 a) et de la
seconde phrase du paragraphe 3, l'obligation de procéder à une séparation
n'est acceptée que dans la mesure où les autorités compétentes considèrent
une telle séparation avantageuse pour les jeunes délinquants et les adultes
en cause.». L'État partie a ratifié le Pacte international relatif aux droits
civils et politiques, le 13 août 1980.
6. JH c. Canada (communication nº 187/1985), constatations
adoptées le 12 avril 1985; Lovelace c. Canada (communication
nº 24/1977), constatations adoptées le 30 juillet 1981 et ARS c.
Canada (communication nº 91/1980), constatations adoptées le 28 octobre
1991.
7. HRI/GEN/1/Rev.4.
8. [À ce moment-là, l'auteur avait le double statut de prévenu et de condamné.]
9. L'État partie se réfère à l'affaire Lloyd Grant c. Jamaïque
(communication nº 353/1988), constatations adoptées le 31 mars 1994; Berry
c. Jamaïque (communication nº 330/1988), constatations adoptées le
7 avril 1994; Griffin c. Espagne (communication nº 493/1992),
constatations adoptées le 4 avril 1995 et Champagnie, Palmer
et Chisholm c. Jamaïque (communication nº 445/1991), constatations
adoptées le 18 juillet 1994.
10. L'État partie se réfère à de nombreuses décisions antérieures du Comité,
notamment dans certaines des affaires concernant l'Uruguay: Alberto Altesor
c. Uruguay (communication no 10/1977), constatations adoptées le
29 mars 1982 et Hiber Conteris c. Uruguay (communication no
139/1983), constatations adoptées le 16 mars 1983, ainsi que dans les affaires
suivantes: Soogrim c. Trinité-et-Tobago (communication no
362/1989), constatations adoptées le 8 avril 1993, Luyeye Magana ex-Philibert
c. Zaïre (communication no 90/1981), constatations adoptées le 21
juillet 1983 et Dieter Wolf c. Panama (communication no 289/1988),
constatations adoptées le 26 mars 1992.
11. Il ne précise pas pendant combien de temps.
12. L'État partie se réfère à l'affaire Gordon C. Van Duzen c. Canada
(communication no 50/1979), constatations adoptées le 7 avril 1982.