Distr.
GENERALE
CCPR/C/79/Add.1
25 septembre 1992
FRANCAIS
Original : ANGLAIS
1. Le Comité a examiné le rapport initial de l'Algérie (CCPR/C/62/Add.1) lors de ses 1125ème et 1128ème séances les 25 et 27 mars 1992, et adopté * les observations finales ci-après :
A. Introduction
2. Le Comité note que le dialogue avec la délégation algérienne a été particulièrement constructif, cette dernière s'étant efforcée de répondre avec franchise aux questions des membres sans chercher à dissimuler les difficultés. Il remercie l'Etat partie, par l'intermédiaire de son représentant, pour son bon rapport qui a été présenté dans les délais prévus. Ledit rapport comprend des informations détaillées sur les textes législatifs et réglementaires relatifs à la mise en oeuvre des dispositions du Pacte. Le Comité regrette néanmoins que le rapport contienne peu d'informations portant sur l'application concrète des normes relatives aux droits de l'homme.
Il regrette également que le rapport n'indique pas quels sont les facteurs et difficultés qui entravent la mise en oeuvre de ces dernières. Enfin, il constate avec regret que le rapport, ayant été présenté le 5 avril 1991, n'a pu faire référence aux états d'urgence, dont le Secrétaire général a reçu notification respectivement le 19 juin 1991 et le 13 février 1992.b
B. Aspects positifs
3. Le Comité note avec satisfaction que l'Algérie a ratifié plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, en particulier le Pacte relatif aux droits civils et politiques et le premier protocole facultatif s'y rapportant, ou y a adhéré, et a fait la déclaration prévue à l'article 41 du Pacte. De surcroît, l'Algérie a inclus différentes dispositions se rapportant aux droits de l'homme dans sa Constitution et amendé plusieurs textes législatifs afin de tenir compte des normes internationales relatives aux droits de l'homme. Le Comité accueille aussi avec satisfaction la création d'un ministère des droits de l'homme, qui sera remplacé plus tard par un organe national de contrôle relatif aux droits de l'homme.
C. Facteurs et difficultés entravant l'application du Pacte
4. Le Comité note qu'à la date de la présentation du rapport, l'Algérie se trouvait dans une phase de transition vers la démocratie. Depuis lors, l'Algérie a été confrontée à d'importantes difficultés qui ont entraîné la suspension de ce processus. Les autorités algériennes ont de ce fait envisagé les voies et moyens qui leur semblaient appropriés pour empêcher des forces qu'elles jugeaient hostiles à la démocratie de profiter du processus démocratique pour y porter atteinte. Parmi les mesures adoptées à cet égard figurent la proclamation de deux états d'urgence et l'interruption du processus électoral.
D. Principaux sujets de préoccupation
5. Le Comité exprime sa préoccupation concernant la suspension du processus démocratique et, de manière générale, le blocage des mécanismes démocratiques. Il s'inquiète du nombre élevé d'arrestations (8 800) et de l'usage abusif des armes à feu par les membres des forces de l'ordre pour disperser des manifestations. Le Comité émet des doutes en ce qui concerne le respect des droits de la défense, en particulier devant les tribunaux militaires, les possibilités réelles de mise en oeuvre du droit à un procès équitable, les nombreux cas de torture et de mauvais traitements qui ont été portés à sa connaissance, ainsi que les restrictions apportées à la liberté d'opinion et d'expression et à la liberté de la presse. Le Comité considère en outre qu'à la lumière de la disposition de l'article 6 obligeant les Etats parties qui n'ont pas aboli la peine de mort à la réserver aux crimes les plus graves, des crimes de nature économique ne peuvent pas être sanctionnés par la peine de mort.
6. Le Comité déplore également les nombreux cas de discrimination à l'égard des femmes et le fait que les minorités, notamment berbères, ne soient pas reconnues.
E. Suggestions et recommandations
7. Le Comité recommande à l'Algérie de mettre fin, dès que possible, à la situation d'exception prévalant dans le pays et de permettre à tous les mécanismes démocratiques de recommencer à fonctionner dans des conditions d'équité et de liberté. Il attire l'attention de l'Etat partie sur le fait que le Pacte ne permet pas, même en situation d'urgence, de déroger à certains droits et que, par conséquent, les excès commis en ce qui concerne notamment le droit à la vie, la torture et le droit à la liberté de conscience et d'expression constituent des violations du Pacte auxquelles il convient de mettre fin. Le Comité espère que l'Etat partie fera une évaluation de la mise en oeuvre des dispositions du Pacte depuis la rédaction du rapport et voudrait être tenu au courant de toute évolution de la situation et de tout développement futur en la matière.