University of Minnesota


Lignes Directrices Du Cad Sur Les Conflits, La Paix Et La Coop�ration Pour Le D�veloppement 1997


TABLE DES MATI�RES

PR�FACE

LIGNES DIRECTRICES DU CAD POUR LES CONFLITS, LA PAIX ET LA COOPERATION POUR LE DEVELOPPEMENT

I. Comprendre les conflits violents et leurs liens avec le d�veloppement

A. La pr�vention des conflits � objectif majeur du d�veloppement
B. Un cadre d'analyse des conflits
Encadr� 1. D�finition et �ch�ances
a) Les conditions structurelles
b) Les facteurs acc�l�rants ou d�clenchants
c) Les diff�rentes phases et la dynamique des conflits
C. Les sources de conflits et leurs liens avec le d�veloppement
a) Les difficult�s rencontr�es dans la gestion de transitions et changements rapides
b) Le creusement des in�galit�s socio-�conomiques
c) L'exploitation des diff�rences ethniques et autres
d) La concurrence pour l'acc�s aux ressources
Encadr� 2. Ins�curit� de l'environnement et conflit
e) Le legs de la violence
D. Initiatives ext�rieures pour soutenir la pr�vention des conflits et la consolidation de la paix
a) Formulation de strat�gies coh�rentes de pr�vention des conflits et de consolidation de la paix
b) Orientations pour le soutien ext�rieur en situation de conflit
i) En situations de tensions sous-jacentes
ii) En situations de tensions croissantes
iii) En situations de conflit violent
iv) En p�riode transitoire de paix fragile et apr�s les conflits
E. L'alerte pr�coce
a) Les moyens n�cessaires � l'alerte pr�coce
b) R�duire l'�cart entre l'alerte pr�coce et l'action pr�ventive
F. R�les particuliers de la coop�ration pour le d�veloppement

II. Coordination au sein de la communaut� internationale et sur le terrain

A. Principes de base
B. Adapter la coordination de l'aide aux pays en crise
C. Les bases d'une coordination efficace entre les donneurs
a) Un cadre strat�gique commun pour l'aide
Encadr� 3. Un cadre strat�gique pour l'aide : liste illustrative de points � aborder (1)
b) Des ressources et des proc�dures souples
Encadr� 4. Strat�gie internationale de mobilisation de ressources : l'exp�rience du Cambodge
c) Direction d'un chef de file parmi les acteurs internationaux
d) M�canismes de consultation op�rationnelle
e) Affectation de ressources aux activit�s de coordination
D. Partenariats et r�partition des t�ches
Encadr� 5. Coordination de l'aide humanitaire en Angola
E. Meilleures pratiques recens�es
F. Orientations � l'intention des donneurs
Encadr� 6. Coordination entre les organismes multilat�raux

III. De l'aide humanitaire au d�veloppement: les d�fis � relever

A. L'aide ext�rieure dans les situations de conflit
B. Enseignements de l'exp�rience
C. Lier secours et d�veloppement
D. Meilleures pratiques recens�es
a) Durant la phase de planification
b) Face aux b�n�ficiaires et aux institutions locales
c) Face aux organismes partenaires
E. Orientations � l'intention des donneurs
Encadr� 7. Code de conduite pour les secours lors de catastrophes � l'intention du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et des ONG

IV. Les fondements de la paix et de la r�conciliation : la bonne gestion des affaires publiques et la soci�t� civile

A. Principes de base
B. Les bases de la construction de la paix et la r�conciliation
a) Le respect des droits de l'homme
b) Processus participatifs
i) La participation
Encadr� 8. La d�centralisation
ii) Les processus d�mocratiques
c) Renforcement des institutions publiques
d) Renforcement des syst�mes de s�curit� et de justice
i) Syst�mes judiciaires
Encadr� 9. Soutien au syst�me de justice criminelle au Cambodge
ii) R�forme du secteur de la s�curit�
iii) Formation en mati�re de droits de l'homme
C. Renforcement de la soci�t� civile pour la construction de la paix et de la r�conciliation
a) Soutien � certaines institutions traditionnelles
b) Encouragement du dialogue et de la coop�ration dans les soci�t�s divis�es
i) Relations intercommunautaires
Encadr� 10. Le r�le des femmes dans le processus de transition en Sierra Leone
ii) M�diation et n�gociation
Encadr� 11. D�veloppement des capacit�s de consolidation de la paix et de r�conciliation en Afrique du Sud
iii) Education et formation inter-culturelles
c) Action en faveur de la libert� et de l'accessibilit� de l'information
Encadr� 12. Le r�le d'�ducateur social des m�dias en Somalie
D. Orientation � l'intention des donneurs

V. Aide au rel�vement apr�s un conflit : les priorit�s op�rationnelles

A. Vue d'ensemble
B. R�tablir une capacit� de gestion �conomique
a) Questions principales et besoins prioritaires
b) Recommandations
Encadr� 13. La gestion �conomique : besoins prioritaires en mati�re d'assistance technique
C. Domaines prioritaires de soutien
a) R�tablir la s�curit� int�rieure et l'Etat de droit
b) L�gitimer les institutions de l'Etat
c) Soutenir la r�emergence de la soci�t� civile
d) Am�liorer la s�curit� alimentaire et les services sociaux
e) D�velopper les capacit�s administratives
D. R�int�gration des populations d�racin�es
a) Principes et consid�rations � prendre en compte
b) Programmes de reconstruction et de r�int�gration au niveau local
i) Principales caract�ristiques des programmes
ii) Principales composantes des programmes
c) Quelques enseignements de l'exp�rience
d) Acteurs et partenariats
e) Meilleures pratiques recens�es
f) Orientations � l'intention des donneurs
E. D�mobilisation et r�insertion sociale des anciens combattants
a) Principes et consid�rations � prendre en compte
Encadr� 14. L'op�ration "Flamme de la paix" au Mali
b) Besoins et domaines de coop�ration
i) Cantonnement et lib�ration
Encadr� 15. Les enfants soldats
ii) R�insertion et r�int�gration
Encadr� 16. D�mobilisation et r�insertion en Ouganda et en Ethiopie
c) Quelques enseignements de l'exp�rience
Encadr� 17. Faut-il verser une prime pour la restitution des fusils ?
d) Dispositifs institutionnels
e) Meilleures pratiques recens�es
f) Orientations � l'intention des donneurs
F. Elimination des mines terrestres
a) Principes et consid�rations � prendre en compte
b) Besoins et domaines de coop�ration
Encadr� 18. Co�ts compar�s du minage et du d�minage
Encadr� 19. Munitions non explos�es
c) Quelques enseignements de l'exp�rience
d) Partenariats et acteurs
e) Meilleures pratiques recens�es
f) Orientations � l'intention des donneurs

VI. Approches r�gionales de pr�vention des conflits et de construction de la paix

A. Principes et approches
B. Dimension r�gionale des conflits
a) Les conflits inter-�tats et l'instabilit� r�gionale
Encadr� 20. R�ponses aux initiatives locales � Contr�le des armes en Afrique de l'Ouest
b) L'impact des populations de r�fugi�s sur les pays d'accueil
Encadr� 21. Fournir des moyens d'existence aux r�fugi�s afghans dans les zones d'accueil au Pakistan
C. Meilleures pratiques recens�es
a) M�canismes r�gionaux pour la pr�vention des conflits et la construction de la paix
b) Gestion des ressources naturelles communes et pr�vention des conflits
D. Orientations � l'intention des donneurs
Encadr� 22. La r�gion du M�kong --Risques de conflits et potentiel de coop�ration

PR�FACE

A la r�union � haut niveau du Comit� d'aide au d�veloppement (CAD) tenue les 3 et 4 mai 1995, les Ministres de la coop�ration au d�veloppement et les responsables des organismes d'aide se sont pench�s sur la n�cessit� croissante pour la coop�ration pour le d�veloppement de contribuer plus activement � la pr�vention des conflits et, apr�s les conflits, au rel�vement et � la reconstruction et sur les opportunit�s de plus en plus nombreuses qui s'offrent dans ce domaine.

Le Comit� a d�cid� de lancer un programme de travail visant � tirer les enseignements de l'exp�rience acquise concernant les liens entre les conflits, la paix et la coop�ration pour le d�veloppement, � rechercher des moyens d'am�liorer l'efficacit� et la coh�rence des efforts d�ploy�s par ses Membres dans ces domaines, et � formuler des orientations pratiques destin�es � faciliter la conception et la mise en oeuvre de programmes d'aide dans ces domaines complexes et encore peu familiers.

Un Groupe d'�tude sp�cial du CAD �tabli � cet effet a commenc� ses travaux en octobre 1995. Ce Groupe d'�tude s'est appuy� principalement sur l'exp�rience op�rationnelle des organismes de coop�ration pour le d�veloppement et sur les connaissances et l'exp�rience de terrain de sp�cialistes ext�rieurs et de praticiens et � en outre �t� guid� par les nombreux travaux de recherche en cours dans ces domaines.

Les sujets abord�s dans les diff�rents chapitres ont tous �t� s�lectionn�s en raison de l'importance particuli�re qu'ils rev�tent pour la conception et la mise en oeuvre de la coop�ration pour le d�veloppement, � l'appui la pr�vention des conflits et de la reconstruction apr�s les conflits. Ils vont de questions d'ordre g�n�ral, notamment dans le domaine de l'aide � la pr�vention des conflits � des sujets d'ordre beaucoup plus pratique et op�rationnel, particuli�rement en ce qui concerne l'aide au redressement apr�s un conflit.

Bien que ces lignes directrices portent principalement sur le r�le de la coop�ration pour le d�veloppement dans ces domaines, certaines des questions abord�es concernent des domaines plus larges de l'aide et de la coop�ration internationales. Cette perspective plus int�gr�e devrait contribuer � promouvoir une plus grande coh�rence et une meilleure coordination m�me si, en fin de compte, les r�gles et proc�dures r�gissant l'affectation des fonds d'aide au d�veloppement d�termineront les limites dans lesquelles ils pourront �tre utilis�s pour mettre en oeuvre ces lignes directrices.

Chaque section conclut par des recommandations sp�cifiques � l'intention des donneurs, qui peuvent, globalement constituer une sorte de r�sum� des points essentiels � aborder. Cependant, les analyses plus d�taill�es qui les pr�c�dent devraient �tre utiles � ceux qui sont plus directement int�ress�s par les sujets abord�s.

Etant donn� l'�volution rapide des d�fis et connaissances dans les domaines concern�s, il est entendu que les lignes directrices pour les conflits, la paix et la coop�ration pour le d�veloppement ne sont pas d�finitives. De nombreux points importants restent � examiner et le CAD poursuivra ses travaux � cet effet. En outre, les questions d�j� abord�es exigent d'�tre constamment r�examin�es au vu des nouvelles le�ons de l'exp�rience, c'est pourquoi les informations en retour et les suggestions sont encourag�es et seront int�gr�es dans des lignes directrices actualis�es.

1. Ont particip� aux travaux: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Etats-Unis, Finlande, France, Irlande, Italie, Japon, Norv�ge, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Su�de et Suisse, ainsi que des repr�sentants de la Banque mondiale, de la Communaut� Europ�enne, du Fonds mon�taire international (FMI) et du Programme des Nations Unies pour le d�veloppement (PNUD). Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les R�fugi�s (UNHCR) et le D�partement des affaires humanitaires des Nations Unies (UNDHA) ont �galement �t� invit�es � participer aux travaux.

LIGNES DIRECTRICES DU CAD POUR LES CONFLITS, LA PAIX ET LA COOPERATION POUR LE DEVELOPPEMENT

I. Comprendre les conflits violents et leurs liens avec le d�veloppement A. La pr�vention des conflits � objectif majeur du d�veloppement 1. Les conflits violents sont d�sormais beaucoup plus souvent internes qu'inter-�tats. Ils surviennent surtout dans les pays en d�veloppement, dont beaucoup continuent d'�tre en proie p�riodiquement � des violences civiles, et leurs principales victimes se trouvent parmi les civils. Outre les morts et les destructions, ces conflits laissent derri�re eux des blessures sociales, politiques et psychologiques profondes et durables. Ils peuvent annihiler des d�cennies de progr�s �conomique et entraver le d�veloppement futur.

2. Les conflits sociaux et politiques sont in�vitables dans un processus de d�veloppement socio-�conomique. Bien que le d�clin �conomique prolong� puisse �tre une source de conflit, il est �vident que la croissance �conomique en elle m�me n'emp�che pas l'apparition de conflits et peut m�me susciter ou intensifier les tensions au sein de la soci�t�. Le risque que ces tensions se transforment en confrontations ouvertes et en conflits violents constitue cependant un obstacle majeur au d�veloppement durable, centr� sur l'�tre humain. Le d�veloppement durable doit par cons�quent �tre �tay� par des institutions capables de g�rer les tensions socio-politiques et �viter leur escalade vers la violence.

3. Travailler dans des pays d�chir�s par la guerre ou particuli�rement expos�s aux conflits a toujours fait partie des activit�s de coop�ration pour le d�veloppement. Aider une soci�t� � se donner les moyens de g�rer les tensions et contentieux sans violence est un aspect essentiel de l'action en faveur du d�veloppement. S'il est parfois difficile � articuler et � analyser, cet objectif de "consolidation de la paix" doit �tre la cl� de vo�te de toute strat�gie et de tout programme de coop�ration pour le d�veloppement. Les organismes d'aide peuvent �galement jouer un r�le de catalyseur en favorisant une large participation des diff�rents groupes sociaux aux processus de discussion et de n�gociation. Les femmes et les associations f�minines doivent �tre invit�es � participer aux efforts de pr�vention des conflits et de construction de la paix. Elles exercent souvent une influence consid�rable et peuvent faire pression sur les parties en conflit pour les inciter � la n�gociation. Elles peuvent en outre contribuer � la recherche de solutions pacifiques aux conflits.

4. Les efforts de coop�ration pour le d�veloppement doivent chercher � cr�er un environnement de "stabilit� structurelle", base d'un d�veloppement durable. Un environnement de stabilit� structurelle se caract�rise par l'existence de structures sociales et politiques repr�sentatives et dynamiques, capables de g�rer le changement et de r�soudre les conflits sans recourir � la violence. C'est l� l'un des fondements essentiels sur lequel peuvent se construire la paix sociale, le respect des droits de l'homme et des obligations qui en d�coulent, l'acc�s �quitable aux ressources et par la m�me le d�veloppement durable. Le renforcement du d�veloppement �conomique en est souvent l'une des bases essentielles, sinon indispensable.

5. Tout en concentrant son action sur les domaines dans lesquels elle poss�de un avantage comparatif, la coop�ration pour le d�veloppement peut aussi compl�ter les autres instruments de politique �trang�re y compris diplomatiques, militaires et �conomiques pour renforcer les possibilit�s de paix et de d�veloppement. A long terme, elle peut contribuer � att�nuer les causes des conflits et aider � mettre en place des institutions permettant de g�rer et r�soudre les litiges et disputes de fa�on pacifique. L'aide au d�veloppement et l'aide humanitaire peuvent aussi aider � consolider des processus de paix fragiles en aidant � la r�conciliation sociale, au d�veloppement politique et � la reconstruction mat�rielle.

6. Avec leur connaissance des conditions locales, les organismes de d�veloppement peuvent souvent apporter des informations et des �clairages particuliers sur les causes de conflit. Cependant, il nous appara�t clairement que l'aide humanitaire ne peut pas se substituer � une volont� politique et � un engagement durable de la part de la communaut� internationale pour soutenir la paix. La coop�ration pour le d�veloppement doit aussi �tre davantage prendre en compte le contexte politique.

B. Un cadre d'analyse des conflits 7. Les causes de conflit sont diverses et imbriqu�es. Il est donc difficile de d�limiter clairement et de mesurer exactement l'influence des diff�rents facteurs. Ceux-ci peuvent aller d'une situation sociale d�stabilisante, se caract�risant par d'extr�mes disparit�s sociales ou des ph�nom�nes d'exclusion, � l'absence de m�canismes de conciliation pacifique, des int�r�ts des divers groupes de la soci�t�. Une compr�hension globale et �tendue des conditions n�cessaires pour que l'�tat et de la soci�t� civile puissent coop�rer de mani�re satisfaisante est indispensable pour comprendre les origines et la dynamique des conflits violents. Des capacit�s locales de r�solution de conflit peuvent d�j� �tre en place. En leur apportant un soutien, dans la mesure du possible, on peut contribuer � renforcer les possibilit�s de paix et de d�veloppement.

Encadr� 1. D�finition et �ch�ances La pr�vention des conflits fait r�f�rence ici aux mesures qui peuvent �tre prises � court terme pour r�duire les tensions manifestes et emp�cher des conflits violents d'�clater ou de se reproduire.

La consolidation de la paix et de la r�conciliation englobe l'ensemble des mesures � long terme pour soutenir la mise en place de structures politiques, socio-�conomiques et culturelles viables et capables de traiter les causes fondamentales des conflits, ainsi que d'autres initiatives visant � instaurer les conditions n�cessaires � la paix et � la stabilit� durables. Ces activit�s visent �galement � promouvoir l'int�gration de groupes en conflit avec la soci�t�, ou marginalis�s, leur permettant un acc�s �quitable au processus de d�cisions politiques, aux r�seaux sociaux, aux ressources �conomiques et � l'information. Elles peuvent �tre mises en oeuvre dans toutes les phases d'un conflit.

Le concept de "stabilit� structurelle" englobe plusieurs objectifs �troitement imbriqu�s et qui se renforcent mutuellement : paix sociale, respect de l'�tat de droit et des droit de l'homme, d�veloppement social et �conomique, gr�ce � des structures politques dynamiques et repr�sentatives capables de g�rer le changement et de r�soudre les disputes sans qu'ils ne puissent donner lieu � des conflits violents.

Par op�ration de secours d'urgence on entend l'aide imm�diate de survie aux victimes civiles des crises et conflits violents. La plupart des op�rations de secours sont lanc�es tr�s rapidement et durent peu de temps, leurs objectifs devant g�n�ralement �tre r�alis�s en moins d'un an. Le but principal est de sauver des vies. Les apports ext�rieurs en financement et en personnel sont souvent dominants. Les op�rations de secours les plus complexes sont celles qui d�coulent de conflits civils prolong�s.

Les op�rations de rel�vement chevauchent souvent les op�rations de secours. Le d�lai fix� pour la r�alisation des objectifs est g�n�ralement de deux ans. Le but principal est d'initier la reconstruction d'infrastructures nationales et locales et de pr�server des moyens d'existence. La prise en charge des b�n�ficiaires par eux-m�mes �tant de premi�re importance, la gestion des programmes est progressivement confi�e aux autorit�s locales. Des m�canismes de r�cup�ration des co�ts peuvent �tre instaur�s, de m�me que des programmes de cr�ation d'emplois et des cr�dits tournants. Dans des situations d'instabilit� persistante, la pr�vention des catastrophes futures (consistant � essayer d'�viter que la situation d'urgence se reproduise) et l'att�nuation de leurs cons�quences sont d'autres aspects essentiels des efforts de rel�vement.

Les op�rations de d�veloppement ont des objectifs � longue �ch�ance, g�n�ralement plus de deux ans, et pr�supposent des conditions de s�curit� et une administration d�di�e � la poursuite d'objectifs et strat�gies nationaux, en partenariat avec des acteurs externes. Elles impliquent normalement des �tudes de faisabilit� et un examen pr�alable des projets, y compris de leurs taux de rentabilit� �conomique, des �tudes d'impact environnemental et une analyse sociale (y compris en ce qui concerne la place des femmes). La participation des b�n�ficiaires et des pouvoirs publics locaux est indispensable.

Il importe d'observer que les op�rations de secours d'urgence, de reconstruction et de d�veloppement ne sont pas n�cessairement s�quentielles mais sont souvent men�es en parall�le. Ces diff�rentes formes d'aide peuvent �tre class�es selon leurs objectifs imm�diats et leur dur�e plut�t que selon une s�quence logique ou chronologique suppos�e commencer par les secours pour aller jusqu'au d�veloppement mais qui correspond rarement � la r�alit�. Cela dit, si l'on ne veille pas � ce que ces op�rations soient structur�es de fa�on � se renforcer mutuellement, elles risquent au contraire de se nuire. 8. Les th�ories qui cherchent � expliquer les causes des conflits arm�s et les conditions dans lesquelles ils �clatent distinguent en g�n�ral les facteurs structurels d'une part et les facteurs acc�l�rants ou d�clenchants de l'autre.

a) Les conditions structurelles 9. Les conditions structurelles qu'il faut consid�rer sur le long terme, sont celles qui cr�ent un climat propice � un conflit violent, sans pour autant en rendre l'�clatement in�vitable. Il s'agit de facteurs politiques, sociaux et �conomiques qui sont imbriqu�s tels que : la densit� de population, le niveau et r�partition des richesses et des chances ; l'�tat de la base de ressources, la structure et la composition ethnique de la soci�t� et les fondements historiques des relations entre groupes. Certains types d'organisation socio-�conomique peuvent porter en eux les germes d'un conflit. C'est ainsi que les soci�t�s tr�s stratifi�es o� un groupe politiquement dominant contr�le l'appareil gouvernemental, l'acc�s aux richesses, � l'instruction et au statut social sont souvent extr�mement vuln�rables.

b) Les facteurs acc�l�rants ou d�clenchants 10. Les facteurs acc�l�rants ou d�clenchants sont les �v�nements, actions et d�cisions qui suscitent l'escalade de la violence. Les facteurs d�clenchants d�pendant essentiellement du contexte propre � un pays, il n'est pas possible d'en faire une liste type. Ce sont par exemple : le d�clin �conomique, un affaiblissement de la coh�sion interne de l'Etat ; des changements de mains au niveau du pouvoir central, notamment de l'arm�e ; un changement soudain de la r�partition interne des pouvoirs, notamment l'acc�s au gouvernement et aux privil�ges ; des importations d'armes (l�g�res) ; des interventions d'Etats voisins, de puissances r�gionales et d'organisations r�gionales ; et des mouvements de populations et de capitaux � grande �chelle.

c) Les diff�rentes phases et la dynamique des conflits 11. Un conflit n'est pas un �tat de choses statique et immuable mais un processus dynamique. On peut distinguer diff�rentes phases, mais qui ne suivent pas n�cessairement un chemin s�quentiel ou pr�visible. C'est la conjonction des facteurs qui d�terminera l'aggravation ou l'apaisement d'un conflit. Aussi le passage d'une phase � une autre n'est il pas n�cessairement d�clench� par un �v�nement ou un facteur unique au moment pr�cis de la transition. Bien que les causes d�clenchantes et aggravantes des conflits soient h�t�rog�nes, presque toutes les crises peuvent se subdiviser en quatre grandes phases difficiles � dissocier :

-situations de tensions sous-jacentes ; -situations de tensions croissantes ; -phases d'�clatement du conflit et de confrontation ouverte ; -phases fragiles de transition apr�s-conflit.

12. En th�orie, un cycle conflictuel peut se d�finir par les phases suivantes : paix-conflit-r�conciliation. En pratique, cependant, la situation est bien plus complexe. Il est souvent tr�s difficile de d�finir le moment o� l'on passe de la paix ou de la normalit� au conflit ou inversement. Il est rare d'assister � une progression claire d'une situation de paix � des tensions socio-politiques aigu�s qui culminent en un conflit violent avant de s'apaiser. Il peut arriver, par ailleurs, qu'une partie du pays soit en paix tandis que dans d'autres gronde un conflit latent qui �clate p�riodiquement. De nombreux pays se caract�risent par une situation de paix et de conflit � la fois. Cette situation peut durer des ann�es, voire des d�cennies.

C. Les sources de conflits et leurs liens avec le d�veloppement 13. D'une fa�on g�n�rale, une soci�t� dot�e d'une base solide et �quilibr�e de ressources sociales et �conomiques, et caract�ris�e par un indice �lev� de d�veloppement humain, a les capacit�s de g�rer les tensions avec moins de risques d'effondrement institutionnel et social qu'une soci�t� marqu�e par des conditions de d�veloppement d�stabilisantes telles qu'une pauvret� g�n�ralis�e et d'extr�mes disparit�s socio-�conomiques, l'absence syst�matique d'opportunit�s, et l'impossibilit� de recours � des institutions cr�dibles aptes � r�soudre les contentieux. En l'absence de capacit� de ce genre, les facteurs suivants peuvent provoquer des conflits ou contribuer � leur d�clenchement :

a) Les difficult�s rencontr�es dans la gestion de transitions et changements rapides 14. Les processus de changement profond entra�nent souvent des fractures sociales et politiques. L'absence d'opportunit�s de participer � la soci�t� civile, aux processus politiques et au march� du travail peut contribuer � affaiblir la coh�sion sociale et fragiliser les structures traditionnelles d'autorit�. Le changement peut m�me parfois entra�ner une perte d'identit� culturelle et le d�racinement ou la marginalisation de communaut�s. Les transitions �conomiques et politiques engendrent aussi des tensions, surtout lorsque l'�quilibre du pouvoir change, au profit de certains groupes et au d�triment d'autres. Des luttes pour le pouvoir peuvent aussi �clater entre des groupes participant au processus de d�veloppement mais concurrents, m�me lorsqu'ils profitent tous de la prosp�rit� �conomique. Les processus de transition de la p�riode de d�colonisation, la transformation actuelle d'Etats autoritaires en Etats plus participatifs et l'�volution des anciennes �conomies planifi�es en sont autant d'exemples.

b) Le creusement des in�galit�s socio-�conomiques 15. Une croissance �conomique d�s�quilibr�e et une r�partition in�gale de ses fruits peuvent aussi contribuer � accro�tre les tensions. Elles peuvent d�ranger les sch�mas �tablis de production et de distribution des revenus et de la richesse. Les ressources et les avantages qui en d�coulent peuvent parfois ne profiter qu'aux groupes qui tiennent en main l'appareil d'Etat. C'est ainsi que peuvent se trouver marginalis�s les groupes vuln�rables et les r�gions les moins dynamiques laiss�es de c�t�. Ce ph�nom�ne est particuli�rement grave lorsqu'il s'accompagne d'un sentiment croissant d'injustice et que les dispositifs institutionnels pour y rem�dier font d�faut, comme c'est souvent le cas parmi les populations urbaines en forte croissance.

c) L'exploitation des diff�rences ethniques et autres 16. Les diff�rences ethniques, religieuses et culturelles sont rarement en elles-m�mes des sources de conflit. Dans un climat de tensions tr�s vives dues � des conflits socio-politiques, elles offrent cependant un terrain fertile � l'exploitation politique. Parmi les facteurs pouvant favoriser ce genre de polarisation, on trouve : les bouleversements �conomiques, sociaux et politiques d�coulant d'un d�veloppement d�s�quilibr� ; l'h�ritage des fronti�res coloniales ; la fragilit� ou l'ill�gitimit� des structures de l'Etat ; l'assimilation forc�e des minorit�s ; les aspirations � une plus grande autonomie de groupes ethniques concentr�s dans certains territoires. d) La concurrence pour l'acc�s aux ressources 17. La concurrence pour l'acc�s � des ressources communes peut, en l'absence de m�canismes politiques pour la g�rer, contribuer � cr�er des tensions. Une insuffisance de ressources en eau et en terres productives aux niveaux local et r�gional (parfois dues � l'accroissement rapide de la densit� de population), les changements de r�gime foncier, la d�gradation de l'environnement ou des conflits r�gionaux, peuvent donner lieu � des conflits au sujet de la gestion, la distribution et la r�partition des ressources. Lorsque ces conflits concernent des ressources transnationales, ils peuvent m�me menacer la stabilit� des pays voisins, voire de toute une r�gion.

Encadr� 2. Ins�curit� de l'environnement et conflit Il appara�t de plus en plus que la s�curit� environnementale peut �tre un facteur important de contentieux et tensions. La d�gradation de l'environnement, en engendrant la pauvret� et des d�placements massifs de population, peut, combin�e � d'autres facteurs, contribuer � pr�cipiter ou aggraver un conflit violent, aussi bien local qu'international.

Dans les pays en d�veloppement, les principales menaces qui p�sent sur l'environnement sont la d�gradation des terres agricoles, la croissance d�mographique et l'�puisement de ressources telles que le bois de feu, les terres � p�turages et l'eau potable. Souvent, ces ph�nom�nes dus � l'homme se conjuguent � l'action des �l�ments naturels et la renforcent : c'est le cas par exemple lorsque l'effet des crues est aggrav� par le d�boisement et l'ass�chement des terres humides. Il y a ins�curit� de l'environnement lorsque les �cosyst�mes ne sont plus en mesure d'assurer les moyens d'existence des populations qui les habitent.

Il peut s'ensuivre de vastes mouvements de population. Or, les migrations se font souvent vers des r�gions o� l'environnement est encore plus fragile ou sujet aux catastrophes naturelles, instaurant ainsi un cercle vicieux de d�placement, de d�gradation de l'environnement et de red�placement. On estime que jusqu'ici ce ph�nom�ne a touch� au moins 25 millions de personnes, et que ce nombre va encore cro�tre. C'est ainsi que la concurrence pour acc�der � des ressources naturelles de plus en plus insuffisantes et l'in�galit� de leur distribution peuvent contribuer � engendrer des conflits locaux ou r�gionaux.

Pr�venir ou att�nuer la plupart des formes d'ins�curit� de l'environnement dues � l'homme est possible, mais pour pouvoir formuler des strat�gies de pr�vention appropri�es il va falloir mieux en conna�tre les multiples facettes.

e) Le legs de la violence

18. La violence et les d�g�ts qu'elle inflige contribuent directement � accentuer la polarisation de la soci�t�. Elle aggrave les ph�nom�nes d'ins�curit�, de haine, de repr�sailles et de vengeance qui ne font que renforcer la tradition de conflit entre les groupes. Outre qu'elle entrave le progr�s �conomique, elle peut contribuer � aggraver la vuln�rabilit� de certains groupes � des conditions d�favorables et aboutir dans les cas extr�mes � des crises humanitaires de grande ampleur. L'exploitation des facteurs ethniques, religieux et culturels qui l'accompagne a tendance � favoriser la perp�tuation du conflit m�me lorsque la situation �conomique g�n�rale s'am�liore. Un autre legs des conflits violents prolong�s, l'existence de stocks d'armement (notamment d'armes l�g�res) en abondance et facilement disponibles, peut contribuer aux conflits en augmentant la propension au recours � la violence.

D. Initiatives ext�rieures pour soutenir la pr�vention des conflits et la consolidation de la paix

a) Formulation de strat�gies coh�rentes de pr�vention des conflits et de consolidation de la paix

19. Un conflit est un processus dynamique. Cependant, son d�roulement peut �tre influenc� par des interventions internationales. Les approches visant � la pr�vention des conflits et � la consolidation de la paix doivent �tre globales, coh�rentes et int�gr�es et s'attaquer aux causes profondes des conflits. Cela n�cessite une coop�ration �troite entre tous les secteurs de la politique ext�rieure (diplomatique, militaire, commercial et coop�ration pour le d�veloppement) tout en exploitant leurs avantages comparatifs respectifs, afin d'assurer la coh�rence et la coordination. Les strat�gies de pr�vention des conflits doivent aussi tenir compte de l'�ventuelle dimension internationale. Les pays voisins et r�gionaux, le syst�me des Nations Unies et les organisations r�gionales et d'autres �tats peuvent �galement avoir, chacun pour sa part, des r�les essentiels � jouer, si tant est qu'ils jouissent de la confiance des pays concern�s.

20. La coh�rence des politiques et des moyens doit �tre un objectif important aussi bien pour les gouvernements que pour les syst�mes internationaux ou multilat�raux. Au niveau national, elle n�cessite une coh�rence entre les acteurs des domaines politique, �conomique, diplomatique, militaire et humanitaire, et ceux de la coop�ration pour le d�veloppement. Si cet objectif de coh�rence est souvent difficile � atteindre au niveau national, par exemple lorsque des ventes d'armes risquent de nuire aux objectifs de s�curit� r�gionale ou de respect des droits de l'homme, la difficult� est encore plus grande � l'�chelon international. Le manque de coh�rence des politiques men�es par les Etats en mati�re de conflits et de d�veloppement peut �tre d� � de r�elles diff�rences de priorit�s nationales, d'approches du r�glement des conflits ou de points de vue divergents quant � leurs causes fondamentales, mais il peut aussi r�sulter d'un manque de coordination entre les acteurs.

21. Le r�le � long terme de la coop�ration pour le d�veloppement pour aider � cr�er des structures et des m�canismes de pr�vention et de r�glement des conflits ne doit �tre consid�r� que comme un facteur parmi d'autres. Le plus souvent, la perspective � long terme de la coop�ration pour le d�veloppement limite son utilisation comme un exp�dient � court terme. Les programmes de coop�ration pour le d�veloppement ne peuvent pour autant faire abstraction des facteurs de conflits potentiels. Dans tous les cas, pour �tre constructives, les interventions des organismes ext�rieurs n�cessiteront un grand sens politique. Etant donn� que les programmes de d�veloppement risquent eux-m�mes d'avoir dans certains cas des cons�quences d�stabilisantes, il est indispensable de les passer au crible de fa�on � �viter qu'ils ne contribuent � aggraver des tensions existantes dans les pays ou les r�gions sensibles.

b) Orientations pour le soutien ext�rieur en situation de conflit

i) En situations de tensions sous-jacentes

22. M�me en temps de paix relative, des conditions structurelles d�favorables peuvent, avec le temps, rendre un pays vuln�rable au risque d'�clatement d'un conflit violent. Des actions visibles, s'attaquant aux causes profondes des tensions sociales et bas�es sur des m�canismes appropri�s d'alerte pr�coce, d'analyse de l'information ainsi que transmission rapide des signaux d'alerte, sont essentielles. De telles actions pourraient, par exemple, viser � am�liorer la r�partition et la gestion des ressources naturelles, � r�duire la pauvret�, � cibler la politique sociale de fa�on � permettre un d�veloppement participatif, � promouvoir la bonne gestion des affaires publiques, l'instruction civique et le respect des droits de l'homme. Elles doivent �galement viser � limiter le trafic et la diffusion d'armements, et en particulier d'armes l�g�res, et soutenir des mesures renfor�ant la capacit� des groupes de population menac�s par la crise � se prendre en charge ainsi qu'� favoriser la cr�ation de structures de dialogue et de m�diation. Il est en outre n�cessaire d'examiner avec attention les ph�nom�nes de division sociale afin d'�laborer des moyens appropri�s pour y rem�dier.

ii) En situations de tensions croissantes

23. Lorsque les conditions de crise dans une soci�t� commencent � se manifester au grand jour (par exemple par des troubles sociaux, une opposition arm�e, des manifestations de masse, etc.), des mesures de pr�vention de la crise doivent �tre envisag�es et mises en oeuvre rapidement. Des mesures appropri�es peuvent en effet s'opposer � ce qui pourrait susciter une confrontation ouverte d�bouchant sur une violence g�n�ralis�e. Sous la rubrique "action pr�ventive", on dispose d'un large �ventail de moyens de m�diation et de r�glement des conflits. A ce stade, il devient particuli�rement important de surveiller et d'emp�cher l'accumulation de r�serves d'armes par les parties en conflit. Bien que des mesures imm�diates soient n�cessaires pour apaiser la crise, il importe de poursuivre et peut-�tre m�me d'intensifier les efforts � long terme de consolidation de la paix. Les initiatives de pr�vention et de r�solution des conflits et de construction de la paix devront �tre eux �troitement coordonn�s afin d'appuyer efficacement d'autres initiatives. Comme dans le cas de situations de tensions sous-jacentes, ces activit�s doivent s'attaquer aux racines du conflit pour avoir le maximum d'effet.

iii) En situations de conflit violent

24. En p�riode de conflit violent et de confrontation, on a g�n�ralement recours � la diplomatie pr�ventive et � des mesures militaires pour temp�rer les conflits, mettre fin aux hostilit�s et entamer des n�gociations de paix. L'aide humanitaire et, lorsque c'est possible, la poursuite des activit�s de d�veloppement, doivent venir � l'appui de ces mesures. Une collaboration est parfois n�cessaire pour obtenir un cessez-le-feu permettant l'acheminement de l'aide humanitaire aux victimes de la guerre et aux personnes d�plac�es. L'acheminement et la distribution d'aide humanitaire suppose une coop�ration et une compr�hension suffisante de toutes les parties au conflit. Les n�gociations avec les parties en guerre sur le d�ploiement des forces de maintien de la paix et l'organisation de l'aide humanitaire peuvent en m�me temps ouvrir la voie � d'autres initiatives diplomatiques visant � mettre fin au conflit, moyennant une coordination �troite entre les organisations impliqu�es dans les domaines de la politique de s�curit�, la diplomatie, l'aide humanitaire et la coop�ration pour le d�veloppement.

iv) En p�riode transitoire de paix fragile et apr�s les conflits

25. Outre des activit�s de reconstruction et de r�habilitation, des initiatives de r�tablissement de la paix et de r�glement du conflit doivent �tre men�es, afin d'assurer le succ�s des n�gociations de paix. Le processus de r�conciliation exige avant tout le r�tablissement de la s�curit� et de l'�tat de droit. Lorsqu'un conflit a �t� marqu� par des violences extr�mes tels des massacres � grande �chelle ou m�me des g�nocides, des efforts concert�s seront n�cessaires pour surmonter les traumatismes sociaux durables en r�sultant, promouvoir la r�conciliation et pr�venir une reprise du conflit. C'est par des mesures coordonn�es dans les domaines suivants que l'on y parviendra le mieux : d�militarisation du conflit, comprenant le d�sarmement et la d�mobilisation des combattants ; le d�minage et la r�forme des forces arm�es ; la r�int�gration des populations d�racin�es ; la r�conciliation entre les parties en conflit et la mise en place de m�canismes de r�glement pacifique des conflits et enfin, la reconstruction �conomique, sociale, politique et �cologique � long terme, pour aider � rem�dier aux facteurs structurels qui ont �t� � la racine du conflit. Ainsi, la p�riode de transition apr�s un conflit pr�sente des occasions de s'attaquer aux causes structurelles de conflit, abord�es plus haut sous la rubrique "en situation de tensions sous-jacentes".

E. L'alerte pr�coce

a) Les moyens n�cessaires � l'alerte pr�coce

26. L'alerte pr�coce a trait � la surveillance des signes avant-coureurs de conflit potentiel, de mont�e de la violence et de menaces de catastrophes humanitaires. Sur la base de cette analyse, l'alerte pr�coce peut aider � stimuler une action pr�ventive. Diff�rents types d'alerte pr�coce s'attachent � surveiller ces signaux � plus ou moins long terme. La capacit� de d�tecter, de surveiller, d'analyser les causes chroniques sous-jacentes de conflit est indispensable � une pr�vention efficace.

27. Se basant sur les efforts d�j� entrepris au niveau international, la surveillance syst�matique des signes avant-coureurs de conflits potentiels peut aider � identifier les zones � risques suffisamment t�t pour permettre des r�ponses efficaces. Il s'agit de s�lectionner, surveiller et analyser des indicateurs politiques, sociaux et �conomiques essentiels tels que : d�penses militaires, �volution du partage du pouvoir, situation des droits de l'homme, relations inter-ethniques, mouvements de population, disparit�s �conomiques et sociales, fonctionnement et accessibilit� des services essentiels, libert� et pluralit� de la presse, soutien ext�rieur � des groupes extr�mistes.

28. Les r�seaux permettant l'alerte pr�coce, la surveillance et l'analyse m�ritent d'�tre encourag�s. Ils doivent �tre constitu�s d'individus et d'organisations capables d'avertir en temps voulu les responsables politiques des menaces de conflit, et suffisamment cr�dibles pour les inciter � intervenir. Dans ces r�seaux, les institutions r�gionales et sous-r�gionales impliqu�es dans la pr�vention des conflits m�ritent souvent un soutien particulier en vue de les encourager et de renforcer leur capacit� d'alerte pr�coce. Elles sont aussi susceptibles de participer de fa�on constructive � des consultations et � des n�gociations informelles, ainsi qu'� des missions d'investigation.

29. La collecte et le suivi de l'information sur les risques de conflit doivent au maximum faire appel au personnel sur le terrain et aux partenaires locaux qui connaissent bien la situation sur place. Cela exige une �troite coordination et la mise en commun des informations entre donneurs (notamment en ce qui concerne les solutions � long terme de probl�mes particuliers) et entre gouvernements, organisations internationales et ONG. Cela permettra de compl�ter les donn�es quantitatives affin�es par l'analyse et l'interpr�tation des signaux "qualitatifs".

30. Des m�canismes d'alerte pr�coce efficaces doivent pouvoir fournir des analyses pluridisciplinaires int�gr�es qui anticipent les questions et besoins des d�cideurs. Ils doivent expliquer de fa�on pr�cise ce qui peut se passer si la situation continue � se d�grader, ainsi que les liens entre les divers facteurs en jeu. Il est indispensable d'avoir conscience de cette complexit� si l'on veut �viter des r�ponses erron�es, consistant par exemple � consid�rer un facteur donn� comme la cause exclusive du conflit, en n�gligeant les interrelations complexes dont il d�coule. Il faut donc, en envoyant un signal d'alerte pr�coce, avoir une id�e claire des outils dont on dispose pour aider � pr�venir un conflit violent et du d�lai dans lequel il faut agir. Il peut aussi �tre utile de pr�senter des choix politiques pr�cis ou au moins d'indiquer une s�rie d'actions possibles d�coulant de l'analyse. Par ailleurs, la formulation de diff�rents sc�narios peut rendre la masse d'informations plus facile � utiliser tout en am�liorant la capacit� de r�agir plus rapidement aux signes avant-coureurs d'accroissement des tensions dans les zones de violence potentielle.

b) R�duire l'�cart entre l'alerte pr�coce et l'action pr�ventive

31. Il est difficile d'attirer l'attention sur les signes avant-coureurs d'un conflit potentiel tr�s longtemps � l'avance. Lorsqu'un conflit devient imminent, il est souvent difficile d'arriver � un accord sur les actions � entreprendre. Jusqu'ici, les efforts d�ploy�s au niveau international pour �tablir et faire usage de m�canismes efficaces d'alerte pr�coce (particuli�rement en ce qui concerne l'alerte � tr�s long terme) n'ont gu�re �t� couronn�s de succ�s. La faute en est en partie au fait que l'information fournie par les pr�visions et les analyses est d'une qualit� insuffisante, pas assez accessible et trop tardive. Il est �vident que le manque de moyens d'analyse et l'absence d'un cadre analytique permettant l'analyse des informations et la d�termination de l'influence relative des facteurs politiques, sociaux et �conomiques cr�ent des goulets d'�tranglement. Par ailleurs, il existe une certaine tendance � surveiller les facteurs d�clenchants au lieu des facteurs structurels, plus difficiles � analyser. Or, � trop se focaliser sur les facteurs d�clenchants une escalade vers la violence, on risque de n�gliger des questions relatives � la pr�vention � long terme.

32. M�me lorsque des informations et des analyses pr�cises sont fournies aux d�cideurs, il n'y a souvent pas de r�action. Pour que l'information donne lieu � une action, une volont� politique suffisante est indispensable. Ainsi, un m�canisme d'alerte pr�coce, pour �tre utile, doit contribuer � susciter la volont� politique et la capacit� d'agir au niveau national et international, y compris au niveau des donneurs, ce qui peut alors aider � mobiliser les moyens n�cessaires pour r�agir en temps voulu. Les instruments disponibles pour l'assistance multilat�rale ou bilat�rale pr�ventive comprennent le dialogue politique, y compris dans le cadre de groupes consultatifs; les sanctions; des d�marches en faveur du processus de paix et des actions visant � enrayer un conflit. L'optimisation de la capacit� d'agir en temps voulu et de l'efficacit� des mesures prises suppose un renforcement de la coordination et de la coop�ration ; la mise en place de proc�dures d'urgence (assorties de lignes directrices pour la coordination) et la rationalisation des proc�dures budg�taires existantes en vue du financement des activit�s pr�ventives.

33. Les m�dias et l'opinion peuvent peser en faveur d'un soutien politique de l'action humanitaire ; les m�dias ont d'ailleurs aussi leur r�le � jouer pour informer le public sur les causes sous-jacentes des conflits arm�s et les urgences humanitaires qui en d�coulent. Il faut sensibiliser l'opinion internationale � l'importance des probl�mes chroniques qui cr�ent les conditions d'un conflit. Toutefois, le caract�re parfois incons�quent, voire contradictoire des int�r�ts et de l'influence des m�dias et de l'opinion peut inciter � adopter une approche ad hoc de la pr�vention des conflits, au d�triment d'actions et d'initiatives plus coh�rentes et plus soutenues.

F. R�les particuliers de la coop�ration pour le d�veloppement

34. Un objectif central de l'aide doit �tre d'am�liorer le climat politique et social g�n�ral dans les pays partenaires. Il s'agit pour cela d'appuyer des mesures visant � renforcer la l�gitimit� et l'efficacit� de l'Etat et l'�mergence d'une soci�t� civile vigoureuse. De tels efforts doivent faciliter la r�alisation d'un consensus sur les grandes questions �conomiques, sociales et politiques. L'aide � la d�mocratisation, � la mise en place de m�canismes de participation au syst�me politique et � l'instauration de l'Etat de droit peuvent �tre autant d'�l�ments d'une strat�gie facilitant l'int�gration des individus et des groupes dans la soci�t�, renfor�ant leur participation et �vitant qu'ils se marginalisent et aient recours � la violence.

35. Au niveau des communaut�s, les donneurs peuvent contribuer � faciliter les n�gociations et les processus de r�conciliation, surtout l� o� l'Etat est faible et o� de vastes secteurs ou r�gions sont hors du contr�le du gouvernement central. Ce type d'aide, dont l'objectif premier est le r�tablissement de la paix et la r�conciliation, doit viser � renforcer des r�seaux et des structures sociales ou institutionnelles qui puissent servir d'�l�ments stabilisateurs et compl�ter les efforts d�ploy�s � l'�chelon national. Cela peut comprendre un soutien au d�veloppement d'organismes sociaux servant d'interm�diaire (ONG locales, associations professionnelles, commissions multi-ethniques, organisations f�minines) et pour aider les groupes marginalis�s � acc�der plus facilement au syst�me judiciaire, � l'administration et aux m�dias. Les donneurs se doivent cependant d'�tre r�alistes et de reconna�tre que certains gouvernements pourront percevoir de tels groupes et r�seaux sociaux et institutionnels comme des menaces, et r�agir en cons�quence.

36. Lorsqu'un pays est en crise, les efforts ext�rieurs pour contribuer � pr�venir les conflits et � instaurer la paix peuvent rencontrer une opposition consid�rable de la part des acteurs locaux, au nom de la souverainet� nationale. Les interventions ext�rieures peuvent aussi �tre consid�r�es par les parties en conflit comme favorisant l'une d'entre elles. Dans des situations politiquement instables de ce genre, ou lorsqu'une situation est sur le point d'�clater, le r�le et l'impact potentiel des initiatives de coop�ration pour le d�veloppement mises en oeuvre par l'interm�diaire des autorit�s en place doivent �tre examin�s de pr�s. La poursuite en p�riode de guerre civile de programmes de d�veloppement con�us durant la p�riode pr�c�dant le conflit peut s'av�rer probl�matique. La protection des civils et des personnels des organismes d'aide est d'une importance primordiale, si l'on veut que l'aide apporte une contribution constructive avant, pendant et apr�s le conflit.

37. Les activit�s en faveur de la paix doivent �tre intensifi�es lorsqu'�clate un conflit violent, en vue de renforcer les autres efforts d�ploy�s. La phase de consolidation � l'issue du conflit peut �tre particuli�rement fragile et instable. S'attaquer au risque que le conflit reprenne suppose une connaissance approfondie et compl�te de ses causes profondes et de son contexte. Les mesures visant � rem�dier aux cons�quences de la guerre, telles les programmes de reconstruction doivent en m�me temps viser � pr�venir de nouvelles crises et le retour des affrontements violents.

38. La dynamique des conflits internes fait qu'il est difficile de distinguer clairement o� se termine la violence et o� commencent les conditions d'une paix v�ritable. Il faut par cons�quent s'efforcer d'identifier, autant que possible, les caract�ristiques particuli�res aux diff�rentes phases des conflits, afin d'aider les agences de d�veloppement � s'accorder sur l'analyse de la situation dans laquelle se trouve un pays donn�. Les organismes de coop�ration pour le d�veloppement doivent aussi savoir op�rer dans des conditions incertaines et instables et �tre capables de rep�rer les possibilit�s d'accompagner les processus de d�veloppement m�me en temps de crise. Ils doivent �tre pr�ts � saisir les chances de r�glement du conflit et pr�voir les op�rations de reconstruction. Cependant, le risque d'�chec lorsque le contexte op�rationnel est aussi incertain doit �tre pris en compte.

39. Dans la formulation de strat�gies de coop�ration pour le d�veloppement dans des situations de conflit, les principes suivants doivent �tre pris en compte :

-La coop�ration pour le d�veloppement doit s'attacher � favoriser des conditions de stabilit� d�mocratique structurelle, base d'un d�veloppement durable.
-Les donneurs doivent s'employer � d�velopper les moyens dont ils disposent pour analyser le contexte socio-politique dans lequel ils fournissent leur aide.
-Le jugement qui doit �tre port� sur l'importance relative de s'attaquer explicitement aux causes profondes des conflits dans le cadre de strat�gies de coop�ration pour le d�veloppement doit �tre bas� sur une analyse d�taill�e.
-Le cas �ch�ant, cela doit conduire � l'�tude de possibilit�s d'actions pr�ventives. De telles actions doivent chercher � d�velopper les capacit�s des pays et acteurs partenaires � s'attaquer aux causes profondes des conflits et � d�velopper les institutions et m�canismes n�cessaires pour faciliter la conciliation des int�r�ts divergents et la gestion pacifique des contentieux socio-politiques.
-La coop�ration pour le d�veloppement n'est que l'un des instruments de la politique �trang�re : les m�canismes pour la coordination des diff�rents instruments (militaires, politiques, coop�ration pour le d�veloppement, commerciaux) dont disposent les pays donneurs doivent �tre renforc�s.
-De m�me, une plus grande coh�rence entre les composantes politique, militaire et de coop�ration pour le d�veloppement au sein du syst�me multilat�ral doit �tre encourag�e.

II. Coordination au sein de la communaut� internationale et sur le terrain

A. Principes de base

40. Les pays en d�veloppement eux-m�mes sont responsables de leur d�veloppement. L'aide ext�rieure doit mettre � profit les capacit�s, les ressources et les initiatives nationales, et non s'y substituer. L'un des principes de base de la coop�ration pour le d�veloppement est que l'int�gration de l'aide ext�rieure dans l'action nationale rel�ve de la responsabilit� du pays partenaire. Le pr�sent recueil de lignes directrices est, en lui-m�me, un instrument qui vise, par essence, � une meilleure coordination des actions en faveur d'objectifs communs, auxquels le pays concern� doit adh�rer pleinement. Telle est l'une des principales pr�occupations des strat�gies �tablies par le CAD dans Le r�le de la coop�ration pour le d�veloppement � l'aube du XXI�me si�cle, OCDE, 1996.

41. Il existe un large accord sur les principales finalit�s de la coordination de l'aide : les ressources doivent �tre achemin�es avec autant d'efficacit� et d'efficience que le permet la situation au niveau local ; les contributions des nombreux acteurs en pr�sence doivent �tre compl�mentaires et distribu�es conform�ment aux priorit�s et aux politiques locales. En outre, l'aide ext�rieure doit �tre g�r�e de fa�on � all�ger le fardeau qui p�se sur les pays partenaires au lieu d'ajouter encore � leurs propres probl�mes de coordination.

42. Compte tenu du caract�re volontaire de la coordination de l'aide, son succ�s sera � la mesure de la valeur ajout�e qu'elle conf�re aux activit�s des diff�rents donneurs et agences concern�s. Cette "valeur ajout�e" induite par la coordination peut prendre la forme d'une �valuation ind�pendante des besoins, d'un meilleur acc�s � l'information ou de la conduite de n�gociations diplomatiques pour le compte de l'ensemble des donneurs, afin d'assurer l'acc�s aux victimes et la s�curit� de la travers�e des zones de conflit.

43. Le caract�re volontaire de la coordination de l'aide fait aussi qu'elle est fondamentalement diff�rente de la "gestion", qui implique un contr�le sensiblement plus important des divers �l�ments en pr�sence. Une bonne coordination n'implique pas qu'il faille faire entrer de force toutes les activit�s dans un m�me moule. La diversit� des strat�gies, et notamment l'exp�rimentation de nouvelles m�thodes peut contribuer � la coordination.

B. Adapter la coordination de l'aide aux pays en crise

44. Dans les pays particuli�rement expos�s aux conflits, notamment dans des situations de tensions croissantes, il est particuli�rement important que les donneurs adoptent des approches communes. Or cela est difficile vu le grand nombre d'associations humanitaires ou d'organismes d'aide au d�veloppement qui interviennent dans les situations d'urgence. Les donneurs augmentent souvent leurs contributions lorsque survient une catastrophe, ce qui se traduit souvent par une pr�sence accrue sur le terrain. De nombreuses ONG internationales entreprennent des op�rations sur le terrain et les ONG nationales d�veloppent leurs activit�s. Dans ces conditions, les institutions des Nations unies ont un r�le d�terminant � jouer au nom de la communaut� internationale.

45. En cas de conflit violent, le gouvernement d'un pays peut ne pas �tre en mesure de d�finir et d'exprimer les priorit�s nationales et de coordonner l'aide des donneurs. Dans certains cas extr�mes, l'effondrement d'une autorit� centrale peut aboutir � des situations o� diff�rentes factions exercent de fait leur autorit� sur certaines parties du territoire national. Dans de telles situations, l'acheminement des secours dans les zones �chappant au contr�le du gouvernement exige g�n�ralement des n�gociations avec des forces non gouvernementales, voire antigouvernementales, impliqu�es dans le conflit. Comme soulign� au Chapitre I, l'aide ext�rieure peut �tre consid�r�e par les parties au conflit comme favorable � l'une d'entre elles.

46. Dans les situations d'apr�s-conflit, un r�glement n�goci� devra �tablir un compromis entre des positions et des int�r�ts rivaux quant � la structure politique future. En attendant l'aboutissement des n�gociations de paix, il se peut qu'il y ait une grande incertitude quant � la structure de pouvoir qui en ressortira.

47. Si, en g�n�ral, les repr�sentants des principales parties au conflit prennent part � l'�laboration des plans de reconstruction � l'issue du conflit, notamment dans le cadre de n�gociations de paix, la communaut� internationale peut �tre oblig�e de prendre davantage d'initiatives qu'en temps normal pour identifier les priorit�s et veiller � ce que les ressources correspondent aux besoins pr�visibles.

48. Dans de telles situations, les donneurs et les organismes d'ex�cution doivent s'efforcer de travailler avec les repr�sentants des parties en pr�sence aux niveaux national, r�gional et local, plut�t que de d�finir eux-m�mes les priorit�s. M�me lorsque les parties en conflit participent � un r�glement n�goci�, les donneurs et organismes d'ex�cution doivent s'efforcer de coop�rer avec des acteurs repr�sentatifs � tous les niveaux. Cela met les multiples organismes concern�s (institutions des Nations Unies, donneurs bilat�raux, institutions financi�res multilat�rales, organisations r�gionales, et ONG locales et internationales) devant une responsabilit� toute particuli�re, qui est de coordonner leurs programmes et de veiller � ce que l'aide d'urgence vienne renforcer et compl�ter les efforts � long terme de coop�ration pour le d�veloppement.

C. Les bases d'une coordination efficace entre les donneurs

49. Dans la pratique, la coordination de l'aide repose sur cinq �l�ments :

a) un cadre strat�gique commun ;
b) l'acc�s en temps voulu � des ressources permettant une mise en oeuvre souple ;
c) la direction d'un chef de file ;
d) des m�canismes de consultation et d'�change d'information sur le terrain et
e) la disponibilit� de ressources express�ment affect�es � des objectifs de coordination.

50. M�me lorsque ces exigences sont satisfaites, la coordination peut �tre rendue difficile par des divergences de vues quant � la coordination ou aux mandats des organismes chefs de file, et par la n�cessit� pour les institutions et organisations participantes de c�der une part de leur ind�pendance et d'accepter le consensus implicite de toute coordination ayant un sens. Pour r�ussir, la coordination exige de la discipline de la part de tous les participants.

a) Un cadre strat�gique commun pour l'aide 51. La coordination doit se fonder sur un large consensus entre les principaux acteurs quant � la fa�on dont leurs actions et initiatives respectives contribueront � la r�alisation d'objectifs partag�s. La participation locale doit �galement �tre encourag�e au maximum. Comme l'aide ext�rieure ne saurait �tre dissoci�e du contexte politique local, national et international, ce consensus doit reposer sur une compr�hension profonde des causes et de la dynamique du conflit (en particulier sur "l'�conomie politique de la guerre") afin d'�viter toute r�percussion contre-productive de l'aide ext�rieure. La dimension r�gionale des conflits, tant quant � leurs causes qu'� leurs cons�quences potentielles doit �tre prise en compte.

Encadr� 3. Un cadre strat�gique pour l'aide : liste illustrative de points � aborder (1) Un cadre strat�gique exprime le raisonnement sur lequel se fonde le programme d'aide d'urgence et de redressement. Il d�finit les facteurs politiques, �conomiques et sociaux sous-jacents et fournit le contexte et la logique permettant une affectation rationnelle de toutes les ressources consacr�es aux secours, � la reconstruction et au d�veloppement. Les cadres strat�giques repr�sentent � la fois un processus d'�tablissement d'un consensus et un produit et sont �labor�s en concertation avec le gouvernement et les autres partenaires locaux, les principaux donneurs bilat�raux et les institutions de financement internationales. Ils doivent r�pondre aux questions suivantes :

Analyse de la situation -Quel est le contexte politique, �conomique, social et de s�curit� ? -Quelles sont les implications des �v�nements r�cents, par exemple le retour en grand nombre de personnes d�plac�es ?
-Quelle est la r�ponse du gouvernement � ces �v�nements sur le plan des politiques, de la gestion des affaires publiques, des institutions et de la gestion �conomique ?
-Quels sont les param�tres macro-�conomiques ? -Quelles sont les ressources financi�res nationales et ext�rieures disponibles ?

Evaluation des risques -Des syst�mes politiques en mesure de supporter les tensions et les contraintes de la transition vers la paix peuvent-ils �tre mis en oeuvre ?
-Les conditions de s�curit� suffiront elles a cr�er un environnement permettant de commencer la reconstruction ?
-L'assistance ext�rieure pourra-t-elle aider � surmonter les s�quelles du conflit violent et mettre en route un processus conduisant � une soci�t� plus juste, plus humaine et plus productive ? R�ponse du programme
-Quels sont les objectifs du programme, imm�diats et � long terme ?
-Quelles sont les principales composantes du programme visant � la r�solution du conflit, � la r�conciliation et au redressement qui n�cessitent un soutien ext�rieur (par exemple r�int�gration et reconstruction, renforcement des capacit�s de gestion des affaires publiques et du syst�me judiciaire) ?
-Un plan a-t-il �t� �tabli pour la poursuite de ces objectifs ?
(y compris la mise en place d'un "filet de s�curit�" couvrant les besoins �l�mentaires tels la nourriture, l'eau, le logement, les m�dicaments, la fourniture de services �l�mentaires, dans les secteurs de la sant� et l'�ducation, et autres services sociaux, et la r�habilitation d'infrastructures ; soutien � la reprise des activit�s �conomiques permettant d'assurer durablement des moyens d'existence aux populations ; le renforcement des capacit�s de gestion et d'administration au niveau des communaut�s) ?
-Une analyse des besoins respectifs des hommes et des femmes a-t-elle �t� r�alis�e dans le cadre des programmes essentiels tels ceux concernant la r�forme des institutions de s�curit�, la r�conciliation nationale et le renforcement des capacit�s administratives ?
-Comment les ressources n�cessaires seront-elles allou�es � chacun de ces objectifs prioritaires ?

Conditions du succ�s

-Quelles sont les conditions indispensables � la r�ussite de l'ex�cution du programme ?
-Quelle est la capacit� des groupes et communaut�s � l'�chelon local d'identifier leurs besoins et d'y faire face ?
-Le r�le des femmes dans la r�conciliation et la reconstruction a-t-il �t� pris en compte explicitement ?
-Existe-t-il une coordination efficace entre les acteurs nationaux et internationaux ?
-Comment peut-on concilier les besoins � court et � long terme et �viter la d�pendance ?
-Les modalit�s de fin du soutien direct ont-elles �t� �tablies pour toutes les formes d'aide ?
-Des ressources ont-elles �t� pr�vues pour financer les co�ts r�currents ?

1. La formulation de cadres strat�giques d'assistance concerne essentiellement le cas de pays se relevant de crise ou de conflit violent. Des approches similaires mais se concentrant sur les questions de pr�vention des conflits n'ont pas encore �t� d�velopp�es de fa�on rigoureuse.

52. A partir de ce consensus, les donneurs doivent s'efforcer d'�laborer une strat�gie commune d�finissant le contenu et les priorit�s du programme ainsi que les r�les de d�cision ou d'ex�cution qui incombent aux diff�rents acteurs en fonction de leurs avantages comparatifs. Cette strat�gie, qui est fonction de la situation et du moment, doit �tre d�finie � haut niveau comme �tant l'approche qui doit servir de base au dialogue avec les partenaires sur le terrain.

53. Fond�e sur une analyse commune des besoins les plus urgents de rel�vement politique, �conomique, administratif ou social, ce cadre strat�gique peut servir de guide pour d�terminer les priorit�s des affectations de ressources aux diff�rents secteurs et zones g�ographiques, r�partir le travail entre les acteurs et d�finir les approches communes des principaux axes d'intervention. Par d�finition, ce n'est pas une liste de projets mais plut�t un instrument dynamique permettant d'organiser la transition entre les secours d'urgence et l'aide au rel�vement � plus long terme.

54. Ce cadre strat�gique doit aussi pouvoir faciliter le retrait progressif de l'aide humanitaire et �viter de cr�er des d�pendances durables et faire en sorte que les apports d'aide � plus long terme se fassent dans le contexte d'un plan rationnel de stabilisation macro-�conomique. Cet aspect est analys� de fa�on plus d�taill�e au chapitre V.

b) Des ressources et des proc�dures souples

55. Le fait de disposer de moyens conjuguant de fa�on souple les �l�ments et les caract�ristiques des secours d'urgence et du d�veloppement peut contribuer pour beaucoup � assurer une aide efficace dans des contextes instables. Les pays sortant d'une crise ou d'un conflit se trouvent g�n�ralement au bord de la faillite et ont besoin d'une injection imm�diate de cr�dits pour pouvoir assurer les services essentiels et �viter l'aggravation de la d�stabilisation �conomique.

56. Les proc�dures de planification, de programmation et de versement doivent permettre de r�agir en temps voulu � l'�volution des circonstances et tenir compte des contraintes exceptionnelles auxquelles sont confront�s en mati�re de ressources humaines beaucoup de pays qui sortent d'une crise. Il est tout aussi indispensable de pouvoir exercer une certaine souplesse quant aux domaines et aux activit�s qui peuvent b�n�ficier d'une aide, en fonction des besoins et des priorit�s sp�cifiques des pays en crise ou en voie de rel�vement, afin d'�tablir un �quilibre entre les besoins humanitaires imm�diats et les exigences � plus long terme de la reconstruction et du r�tablissement de la paix. Il faut aussi que les donneurs honorent leurs engagements en temps voulu.

57. Les organismes donneurs doivent faire preuve de souplesse dans le choix des instruments de collecte de fonds ce qui doit �tre refl�t� dans la fa�on dont les appels de fonds communs et autres actions concert�es entre donneurs (tables-rondes, groupes consultatifs) sont organis�s. En d�finissant pr�cis�ment la logique et les besoins en moyens financiers des programmes de construction de la paix et de reconstruction, ce cadre strat�gique peut contribuer � guider les donneurs dans leurs d�cisions concernant l'affectation des ressources allou�es � l'aide.

Encadr� 4. Strat�gie internationale de mobilisation de ressources : l'exp�rience du Cambodge

La guerre civile au Cambodge aura dur� 13 ans avant que la signature en octobre 1991 d'un accord de paix par les factions et pays concern�s (Accords de Paris) ne permette d'aboutir � un cessez-le-feu ouvrant la voie � un processus global de paix.

Les Accords de Paris ont �galement amen� la communaut� internationale � accro�tre son aide au Cambodge. Les pays et organisations internationales ayant particip� � la Conf�rence minist�rielle sur la r�habilitation et la reconstruction du Cambodge, qui s'est tenue � Tokyo en juin 1992, se sont engag�s � verser un total de 880 millions de dollars am�ricains. Ils ont en outre d�cid� de cr�er un Comit� international pour la reconstruction du Cambodge (CIRC), charg� de coordonner l'aide � moyen terme et � long terme fournie au Cambodge � l'appui de la reconstruction. Trois r�unions du CIRC ont eu lieu, en septembre 1993, mars 1994 et mars 1995, avec pour r�sultat des engagements d'un total de 1 079 millions de dollars am�ricains. Gr�ce au volume total de l'APD provenant des Membres du CAD et d'institutions internationales comme le FMI et l'IDA, l'assistance financi�re que re�oit le Cambodge a pris sa pleine ampleur depuis 1994.

Le CIRC a non seulement prouv� son efficacit� en tant qu'�l�ment essentiel de la coordination de l'aide internationale, mais a aussi jou� un r�le de catalyseur pour mobiliser des ressources � l'appui de l'aide au Cambodge. L'un des principaux facteurs ayant contribu� � la relative r�ussite du processus de paix au Cambodge a �t� la concr�tisation et la mise en oeuvre de l'aide promise par les pays concern�s. Elle a permis une stabilisation progressive de la vie quotidienne du peuple cambodgien.

En 1996-97, l'aide internationale au Cambodge est entr�e dans une nouvelle phase. La mission du CIRC a �t� relay�e par le Groupe consultatif en faveur du Cambodge. La premi�re r�union du Groupe consultatif s'est tenue en juillet 1996 � Tokyo sous la pr�sidence conjointe de la Banque mondiale et du Japon. Le montant total des engagements annonc�s � la r�union, soit 501 millions de dollars am�ricains, �tait presque �quivalent au montant des besoins en ressources ext�rieures des autorit�s cambodgiennes pour la m�me ann�e.

c) Direction d'un chef de file parmi les acteurs internationaux

58. Dans le cadre d'approches ax�es sur le renforcement de la participation, la responsabilit� et les capacit�s des acteurs locaux, un m�canisme peut s'av�rer n�cessaire pour susciter un consensus de la part des partenaires ext�rieurs autour d'une strat�gie commune et en assurer le respect. On peut par exemple, envisager la d�signation d'une autorit� ind�pendante charg�e de contr�ler l'observation par les donneurs des principes arr�t�s d'un commun accord.

59. L'exp�rience tend � montrer que la coordination de l'aide technique et financi�re gagnent � �tre plac�s sous la direction d'une agence bilat�rale ou multilat�rale jug�e cr�dible par les donneurs et les b�n�ficiaires de l'aide. Diff�rents organismes et diff�rents donneurs ont assum� ce r�le et il para�t souhaitable de maintenir la m�me souplesse dans l'exercice de cette fonction. L'agence "chef de file" est responsable de la bonne diffusion des informations dans la situation de d�sordre qui risque de r�gner pendant ou au lendemain de la crise. C'est l� quelque chose d'essentiel si l'on veut assurer que les diverses activit�s financ�es par les donneurs soient compatibles avec les principes d�finis d'un commun accord et qu'elles se renforcent mutuellement.

60. Outre l'absence de parti-pris � l'�gard des principales bellig�rants, un certain nombre de crit�res doivent pr�sider au choix d'une agence ou donneur chef de file :

-l'engagement d'assumer le r�le de chef de file et l'acceptation des risques correspondants, et notamment celui de devoir prendre des d�cisions qui peuvent ne pas �tre favorablement accueillies par l'opinion publique du pays donneur ;
-la connaissance des facteurs culturels, historiques, ethniques et linguistiques en jeu dans le pays ou la r�gion ;
-une exp�rience pr�alable de l'apport d'une aide effective dans les situations de crise ;
-la capacit� de mobiliser rapidement un personnel qualifi� et exp�riment� ;
-la capacit� de mobiliser d'importantes ressources financi�res.

d) M�canismes de consultation op�rationnelle

61. Dans le cadre d'une strat�gie arr�t�e d'un commun accord, la coordination au niveau op�rationnel exige que soient clairement d�finies les relations entre le si�ge et le personnel pr�sent sur le terrain et que suffisamment de responsabilit�s administratives et financi�res soient d�l�gu�es � celui-ci pour qu'il puisse faire face � l'�volution de la situation. Certains organismes pourraient devoir proc�der � une bien plus grande d�centralisation des responsabilit�s et s'assurer les services de personnel de terrain sp�cialement recrut� et form�.

62. Le processus de consolidation de la paix doit �tre appuy� par des initiatives au niveau des communaut�s locales. Les m�canismes de coordination de l'aide au lendemain d'un conflit doivent donc �tre aussi d�centralis�s que le permettent les circonstances, et impliquer les capacit�s et institutions nationales, r�gionales et locales. A l'�chelon local, le nombre d'acteurs est g�n�ralement moins �lev� que dans la capitale, de sorte que les repr�sentants de l'ensemble des organisations en pr�sence peuvent se r�unir r�guli�rement. Cela contribue � l'efficacit� de la coordination.

63. On n'insistera jamais trop sur l'importance de disposer d'une base d'informations commune et de partager une m�me analyse de la situation et de son �volution. De nombreux probl�mes de coordination r�sultent des diff�rences de perception entre les divers acteurs qui sont source de divergences d'opinion quant aux cons�quences potentielles des interventions.

64. Toutes les parties doivent �tre encourag�es � mettre en commun les informations concernant l'�volution de la situation tant au plan socio-politique que du point de vue de la s�curit�, ainsi que les progr�s accomplis dans l'ex�cution des programmes et des mesures prises � cet �gard par le gouvernement. Chaque acteur devrait disposer d'informations sur tous les facteurs qui entrent en jeu, y compris l'aide dispens�e par les autres organismes donneurs, afin de prendre des d�cisions en toute connaissance de cause. Les informations recueillies sur le terrain concernant les effets, les d�fauts ou les incoh�rences des programmes doivent �tre communiqu�es aux hauts responsables sur le terrain et au si�ge.

65. Les organisations et organismes concern�s ne peuvent tous participer directement aux r�unions de l'organe de coordination. Lorsque le nombre des ONG est important, elles devraient �tre encourag�es � cr�er leurs propres structures de coordination pour les repr�senter dans le cadre de m�canismes de coordination et d'�change d'informations plus larges.

66. L'important volume de ressources mobilis�es pour les secours et la reconstruction fait qu'il est essentiel de mettre en place un instrument moderne pour suivre syst�matiquement les flux d'aide. Il est � cet �gard urgent d'�tablir des d�finitions communes des �l�ments de la nomenclature correspondante : d�clarations d'intention, annonces de contribution, engagements pr�visionnels, engagements de d�pense et versements. L'utilisation des m�mes termes dans des acceptions diff�rentes peut �tre source de confusion sur le terrain comme au si�ge et contrarier les efforts pour constituer des bases de donn�es communes.

e) Affectation de ressources aux activit�s de coordination

67. La coordination n�cessite des ressources. Les institutions des Nations Unies qui ont, de par leur mandat, des attributions g�n�rales en mati�re de coordination ne peuvent g�n�ralement pas financer les d�penses au titre de la coordination sur leurs budgets administratifs ordinaires. Ils en sont par cons�quent r�duits � financer leurs activit�s de coordination au moyen des ressources destin�es aux projets ou de celles d�coulant d'appels sp�ciaux � la communaut� des donneurs. Dans un petit nombre de cas, les co�ts de coordination ont �t� couverts par les budgets de maintien de la paix vot�s par l'Assembl�e g�n�rale. Le manque de pr�visibilit� de ces diverses m�thodes de mobilisation de ressources pour les besoins de la coordination a souvent abouti � des situations de grave p�nurie de moyens financiers, � de fausses �conomies, et � des inefficacit�s.

D. Partenariats et r�partition des t�ches

68. Les institutions des Nations Unies et les autres organisations multilat�rales sont souvent appel�s � assumer un large �ventail de responsabilit�s, en particulier dans le domaine de la coordination et de la direction des efforts, en mati�re de coop�ration internationale dans le cadre des op�rations de secours et de l'aide au d�veloppement. C'est l� une reconnaissance du fait que la coordination de l'aide ext�rieure est mieux assur�e par un organisme r�put� sans parti-pris et capable dans le m�me temps d'incarner la volont� collective de la communaut� internationale. Lorsque ces organisations ne sont pas jug�es � m�me d'assumer ce r�le de coordination, d'autres m�canismes de coordination peuvent �tre mis en place comme mentionn� plus haut.

69. Les ONG jouent souvent un r�le important pendant et apr�s les situations de crise. Leur seul nombre, la diversit� de leurs mandats et la disparit� des moyens de fonctionnement dont elles disposent font que la coordination est essentielle pour assurer la coh�rence de leurs efforts conjugu�s. En l'absence de m�canismes de coordination efficaces entre les ONG, les mandats et les m�thodes de collecte de fonds de certaines ONG peuvent d�tourner l'aide de la satisfaction effective des besoins jug�s prioritaires par le gouvernement partenaire, les Nations Unies ou des donneurs bilat�raux. Les donneurs qui s'en remettent aux ONG pour acheminer leur aide doivent s'assurer que les organisations qu'ils financent ont la capacit� de remplir les fonctions qui leurs sont assign�es et se conforment aux politiques, aux programmes et aux r�gles de conduite arr�t�s d'un commun accord.

70. L'acheminement de l'aide humanitaire au cours de conflits arm�s impose de faire face � des situations particuli�rement difficiles et dangereuses. Les ONG jouent un r�le principal dans l'acheminement de l'aide et les institutions sp�cialis�es des Nations Unies ont tr�s souvent recours � leurs services dans le cadre de partenariat. Etant souvent les premi�res � entreprendre des op�rations de secours, elles se heurtent � des d�fis particuliers. Les conditions extr�mement difficiles dans lesquelles les op�rations humanitaires sont men�es, pour sauver le maximum de vies humaines, peuvent nuire � l'�valuation des besoins et aux efforts de coordination. Cela doit �tre pris en compte lorsqu'on �value les performances des ONG. Encadr� 5. Coordination de l'aide humanitaire en Angola L'Angola a sombr� une nouvelle fois dans la guerre civile en octobre 1992, apr�s seulement dix-huit mois de paix. En l'espace de quelques ann�es, environ quatre millions d'Angolais se sont retrouv�s dans une situation exigeant des secours d'urgence. Ce chiffre a pratiquement doubl� entre 1993 et 1994. De violents affrontements ont eu lieu dans tout le pays. L'�conomie s'est effondr�e, les travaux agricoles se sont interrompus, les relations commerciales ont �t� boulevers�es, les services sociaux ont cess� de fonctionner et les familles ont �t� s�par�es. La reprise des combats et la crise humanitaire qui en est r�sult� a pris par surprise la plupart des organisations humanitaires.

En mars 1993, le gouvernement, qui n'avait plus acc�s � la plus grande partie du territoire, a demand� aux Nations Unies de l'aider � faire face � la crise humanitaire montante. Les principaux donneurs et ONG ont appel� � la mise en place d'un m�canisme de coordination des secours humanitaires, ce qui a conduit � la cr�ation par le D�partement des Affaires humanitaires des Nations Unies de l'Unidade de Coordenac�o para Assist�ncia Humanitaria (UCAH).

Coordination et non pas intervention

Uniquement cr��e � des fins de coordination, l'UCAH n'�tait pas charg�e de la mise en oeuvre des programmes, ce qui lui a permis de jouer un r�le de premier plan dans l'�valuation des besoins humanitaires des populations victimes de la guerre. Dans l'accomplissement de cette mission, l'UCAH a pu s'appuyer sur l'exp�rience du personnel d�tach� aupr�s d'elle par les principaux organismes des Nations Unies en Angola.

En d�finissant les r�les et les responsabilit�s des divers organismes impliqu�s, l'UCAH a pu cr�er des conditions de coop�ration acceptables: les organismes des Nations Unies se concentreraient sur les probl�mes d'ensemble tels que la logistique ou la s�curit�, alors que les ONG pr�sentes sur le terrain se focaliseraient sur les probl�mes plus circonscrits tels que la distribution de vivres dans les villes et les villages.

Etant politiquement neutre et ind�pendante, au plan op�rationnel, de la Mission de v�rification des Nations Unies, l'UCAH a pu en outre engager des n�gociations tant avec le gouvernement angolais qu'avec les rebelles de l'UNITA (Uniao Nacional para a Independencia Total de Angola) afin de rep�rer les populations ayant le plus besoin d'aide et garantir la s�curit� des convois d' aide humanitaire.

En termes pratiques, la coordination comprenait les �l�ments suivants : L'�change d'informations entre les donneurs bilat�raux, les organismes des Nations Unies et les ONG participant aux secours d'urgence a comport� la pr�paration de bulletins hebdomadaires r�capitulant les principaux �v�nements li�s aux divers programmes humanitaires en cours; de notes de synth�se sur la situation dans les principales villes et provinces ; de rapports d'�valuation de la situation et des besoins ; ainsi que de rapports sp�ciaux sur les probl�mes rencontr�s dans certains domaines tels que l'agriculture et la nutrition.

Consultations r�guli�res avec les donneurs bilat�raux et les ONG en vue d'examiner des probl�mes et des programmes sp�cifiques, l'�valuation des besoins sur le terrain et la coordination et la mobilisation des ressources n�cessaires pour y r�pondre. L'UCAH a apport� aux ONG une aide en mati�re de communications et de transports et a soutenu leurs efforts de mobilisation de ressources financi�res en les associant aux appels de fonds.

Evaluations conjointes des besoins, conjointement avec le gouvernement ou l'UNITA, ainsi qu'avec des donneurs bilat�raux, des organismes des Nations Unies et des ONG nationales et internationales. Il convient de noter que l'UCAH a �t� en mesure d'obtenir la coop�ration de l'UNITA en d�pit des sanctions impos�es � son encontre par le Conseil de s�curit� des Nations Unies � la suite de la reprise des hostilit�s.

Liaison entre les op�rations de secours et le d�veloppement � long terme L'UCAH a compris qu'il �tait n�cessaire de d�finir les actions de secours en fonction des imp�ratifs � long terme de la reconstruction et du d�veloppement. En f�vrier 1994, lorsque les perspectives d'aboutissement des n�gociations de paix se sont am�lior�es, l'UCAH a insist� sur la n�cessit� que les donneurs bilat�raux, les organismes des Nations Unies et les ONG planifient la reconstruction et le redressement du pays � l'issue du conflit. Les priorit�s �taient la r�int�gration des personnes d�plac�es et des anciens combattants et le d�minage.

E. Meilleures pratiques recens�es

71. Les donneurs et les organismes d'ex�cution ont int�r�t � coop�rer pour faire en sorte que : -les conditions pr�alables d'une bonne coordination soient r�unies et que des ressources financi�res suffisantes soient fournies � cet effet ;

-dans toute la mesure du possible et s'il y a lieu, le gouvernement soit encourag� � prendre la direction du processus de coordination ;
-les organismes gouvernementaux b�n�ficient de l'assistance technique requise pour pouvoir assumer les fonctions de gestion de l'urgence.

72. Les efforts de coordination doivent chercher � promouvoir la coh�rence des actions des diff�rents donneurs et agences d'aide au service des principaux objectifs communs. Quels que soient les m�canismes de coordination mis en place, ils ne doivent pas entraver les initiatives de r�ponses rapides ni l'innovation de la part de donneurs individuels. Dans le cadre d'approches strat�giques communes, les diff�rents acteurs doivent formuler et mener leurs actions selon leurs avantages comparatifs. L'absence de soutien des efforts de l'organe de coordination ou l'indiff�rence � son �gard peuvent cependant nuire � son efficacit�. Un soutien actif peut �tre apport� sous plusieurs formes, par exemple :

-en faisant volontairement passer au second plan les int�r�ts � exclusifs � afin de soutenir les programmes et les politiques de nature consensuelle pr�conis�s par l'organe de coordination ;
-en simplifiant les r�gles et proc�dures de programmation et de d�caissement;
-en restant dans les limites de la strat�gie commune d�finie conjointement par les donneurs et les b�n�ficiaires ;
-en apportant une contribution aux fonds d'affectation sp�ciale cr��s par l'organe de coordination pour assurer la mise en oeuvre des politiques et des programmes d�finis d'un commun accord ;
-en collaborant � la collecte d'informations afin que des donn�es compl�tes sur les programmes d'aide en cours puissent �tre r�unies ;
-en proposant de d�tacher du personnel aupr�s de l'organe de coordination et en participant activement aux efforts de coordination.

73. Pour une meilleure coordination des actions des ONG, les donneurs et les partenaires (y compris les institutions des Nations Unies) qui contribuent � leur financement devraient :

-D�finir les principes communs qui r�giront le financement de diff�rents types d'op�rations et d'activit�s. Ces principes pourraient notamment porter sur des �l�ments tels que le financement des frais g�n�raux et des d�penses de fonctionnement.
-Veiller � la transparence du financement qu'ils apportent aux activit�s des ONG afin d'�viter lacunes et doubles emplois.
-Etablir des crit�res de supervision et de contr�le des activit�s des ONG financ�es sur fonds publics conform�ment aux normes de r�sultat d�finies d'un commun accord et aux principes humanitaires de base. L'examen des r�sultats ne doit pas se limiter aux questions d'efficience et d'efficacit� par rapport aux co�ts mais doit �galement couvrir les aspects relatifs au respect de la strat�gie commune d�finie par les donneurs.
-Encourager et soutenir les activit�s des ONG locales, en renfor�ant leur capacit� � travailler en r�seau avec les organisations internationales soeurs.
-Les ONG et les autres organismes fournissant des services dans des situations de conflit et apr�s un conflit devraient veiller � assurer la participation appropri�e des femmes parmi leur personnel afin d'�tre en mesure de communiquer de fa�on satisfaisante avec les populations vis�es et d'acheminer l'aide avec efficacit�.

F. Orientations � l'intention des donneurs

74. Toutes les parties concern�es doivent donner leur appui � l'organe de coordination, l'assister dans ses efforts de collecte et de traitement de l'information, et r�pondre � autant que faire se peut � � ses invitations � une action commune.

75. Les responsables des programmes et le personnel d'ex�cution sur le terrain sont les mieux plac�s pour observer et juger quelles sont les mesures qui donnent effectivement des r�sultats et pour identifier les synergies ou les chevauchements entre les diff�rents programmes. La coordination sur le terrain exige des m�canismes sp�ciaux pour d�finir d'un commun accord les principales r�gles de coordination et les moyens de les traduire dans la pratique.

76. Les ONG sont souvent tenues de respecter les principes d'impartialit� et d'ind�pendance dans la fourniture d'aide. Des interventions apparemment impartiales peuvent cependant contribuer � aggraver les tensions et ainsi aller � l'encontre des objectifs et des principes g�n�raux collectivement d�finis par les donneurs. C'est aux donneurs qu'il incombe de s'assurer que les organisations dont ils financent les programmes respectent bien les politiques recommand�es. Les gouvernements bailleurs de fonds doivent �tre pr�ts � se montrer fermes, en cas de besoin pour assurer le respect de la politique convenue s'ils veulent que la coordination ne soit pas compromise.

77. Gr�ce � leur connaissance de la situation locale et aux ressources humaines dont elles disposent, les ONG locales et des autres entit�s de la soci�t� civile ont souvent un avantage comparatif en ce qui concerne la fourniture d'aide dans un certain nombre de domaines. Ceux-ci comprennent le d�veloppement communautaire, la gestion des diff�rends au niveau local, le redressement �conomique et social � l'issue d'une crise et la r�conciliation au lendemain d'un conflit et, de fa�on plus g�n�rale, le renforcement des capacit�s de gestion des catastrophes. Elles mettent souvent davantage l'accent sur la n�cessit� que l'aide s'inscrive dans la dur�e que les organisations ext�rieures au pays. Les ONG locales, qu'elles soient ind�pendantes ou affili�es � une ONG ext�rieure au pays, doivent �tre invit�es � participer aux m�canismes op�rationnels et de coordination et elles doivent �tre trait�es en partenaires � part enti�re.

78. Imm�diatement apr�s une crise, il peut y avoir une p�riode d'incertitude quant � l'organisme qui assurera la coordination ou tiendra le r�le de chef de file. Plusieurs organismes peuvent remplir les conditions requises et �tre dispos�s � assumer cette fonction. Cela met en �vidence la n�cessit� d'un m�canisme permettant d'assigner d'autorit� cette responsabilit� dans les plus brefs d�lais afin de r�duire au minimum les risques de controverses institutionnelles. Il pourrait s'av�rer n�cessaire d'y ajouter des m�canismes et des proc�dures favorisant la r�solution rapide des divergences d'opinion.

79. Les ambassades poss�dent d'ordinaire une bonne connaissance des divers probl�mes qui se posent au niveau de l'action et du financement, du fait de leur participation � d'autres r�seaux de coordination au sein du pays, aux r�unions des groupes consultatifs sous l'�gide de la Banque mondiale ou aux tables rondes pr�sid�es par le gouvernement du pays concern� et par le PNUD. Elles devraient donc, de par leur exp�rience et leurs connaissances, �tre bien plac� pour influer sur le processus de coordination et pour int�grer les activit�s bilat�rales dans le programme d'ensemble. Ces r�seaux de coordination au niveau de pays devraient aussi tenir compte de la dimension r�gionale des questions qu'ils traitent.

Encadr� 6. Coordination entre les organismes multilat�raux En 1991, l'Assembl�e g�n�rale des Nations Unies a cr�� et plac� sous l'autorit� d'un Coordonnateur des secours d'urgence un D�partement des Affaires humanitaires auquel il est clairement donn� pour mandat d'assumer un r�le directeur dans la coordination de l'aide d'urgence dans les pays en crise. Le D�partement des Affaires humanitaires s'appuie sur le soutien et l'avantage comparatif des autres organismes des Nations Unies susceptibles d'apporter une contribution technique ou sp�cialis�e � ce processus. Les acteurs suivants ont un mandat et des responsabilit�s officiels en mati�re de protection et d'aide humanitaires :

-le Coordinateur de secours d'urgence du D�partement des Affaires humanitaires des Nations Unies en ce qui concerne la coordination g�n�rale des secours humanitaires � travers le syst�me de coordinateurs r�sidents des Nations Unies ;
-le Coordonnateur � l'�chelon national des activit�s d'aide humanitaire des Nations Unies, lequel est, � quelques rares exceptions pr�s, le Coordonnateur r�sident des Nations Unies pour les op�rations de d�veloppement;
-le Haut Commissariat des Nations Unies pour les r�fugi�s (HCR), s'agissant des besoins des r�fugi�s et des personnes en situation similaire ;
-le Programme alimentaire mondial (PAM), concernant la fourniture d'aide alimentaire ;
-l'UNICEF, en ce qui concerne les besoins des femmes et des enfants ;
-l'Organisation internationale des migrations (OIM), pour les flux migratoires ;
-le CICR et la F�d�ration internationale des soci�t�s de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, en ce qui concerne les activit�s g�n�rales de secours. Dans la plupart des crises humanitaires, la fourniture d'aide d'urgence se conjugue � des efforts de reconstruction et de d�veloppement. Les organisations humanitaires doivent s'assurer que les op�rations de secours ne nuisent pas aux objectifs � long terme des initiatives de d�veloppement. Au niveau multilat�ral, ces pr�occupations rel�vent de la comp�tence :
-du PNUD, qui traite de l'ensemble des probl�mes de d�veloppement ;
-du FMI et de la Banque mondiale, qui donnent des avis sur le cadre macro-�conomique ; -des institutions sp�cialis�es et autres programmes des Nations Unies, chacun dans sa sph�re d'activit�s, lesquels entretiennent des relations de coop�ration dans le cadre du r�seau de Coordonnateurs r�sidents des Nations Unies. Compte tenu de la fr�quente conjugaison des interventions d'urgence et des actions d'aide au d�veloppement, le D�partement des Affaires humanitaires et le PNUD se sont efforc�s d'�tablir des relations de travail �troites et structur�es. La compl�mentarit� de leurs mandats devrait leur permettre de contribuer � regrouper les diff�rentes composantes du programme dans des appels de fonds communs et � cr�er un consensus parmi les organismes d'aide sur les questions ayant une incidence sur le programme.

Au niveau du pays, le coordonnateur r�sident des Nations Unies constitue d'ordinaire une � �quipe de gestion des situations de catastrophe � et assure pour le compte du D�partement des Affaires humanitaires la coordination de l'aide humanitaire fournie par le syst�me des Nations Unies, en saisissant toutes les occasions de faciliter la transition entre les op�rations de secours et l'aide au d�veloppement.

Dans certains pays, des op�rations de maintien de la paix d'une dur�e limit�e sont d�cid�es par le Conseil de s�curit�, ce qui donne aux Nations Unies de nouvelles responsabilit�s dans le domaine politique et militaire. Toutes ces activit�s sont alors coordonn�es par le Repr�sentant sp�cial du Secr�taire g�n�ral, auquel les organismes et les institutions sp�cialis�es des Nations Unies impliqu�s sont invit�s � pr�ter leur concours.

80. Une certaine rivalit� peut appara�tre sur le terrain lorsque les organismes d'ex�cution entrent en comp�tition pour obtenir des ressources et le soutien des donneurs. Les donneurs doivent �tre conscients de cette forme de concurrence, car elle peut avoir des effets n�fastes sur la coordination et l'efficacit� de l'aide. La transparence des diverses sources de financement des activit�s des ONG peut grandement faciliter la coordination.

81. La cr�ation de comit�s ou de groupes de travail sectoriels responsables de l'articulation des politiques et des programmes propres � chaque secteur, dans un cadre strat�gique d�fini d'un commun accord, peut contribuer � une bonne coordination. Si ces comit�s ne peuvent �tre plac�s sous l'autorit� du gouvernement h�te, ils doivent � tout le moins compter sur sa participation active. Les donneurs et les organismes d'ex�cution peuvent alors prendre part aux comit�s qui pr�sentent pour eux un int�r�t particulier. Il est �galement possible de confier la direction de chaque comit� � un organisme donneur sp�cifique.

82. Les co�ts, tant financiers qu'en personnel, impos�s par la coordination doivent �tre explicitement reconnus et pris en compte lors de la formulation des programmes d'aide et de l'�tablissement des budgets correspondants. Si les ressources affect�es aux fonctions de coordination sont insuffisantes, la coordination peut en souffrir d'autant, causant toutes sortes d'inefficacit�s.

III. De l'aide humanitaire au d�veloppement: les d�fis � relever

A. L'aide ext�rieure dans les situations de conflit

83. Dans les situations d'urgence complexes, l'aide ext�rieure injecte des ressources substantielles dans un contexte de grande p�nurie, o� la ma�trise des ressources est un objectif important pour les parties en conflit. Si l'on consid�re souvent que l'aide est un levier puissant pour la consolidation de la paix et la r�conciliation, elle peut aussi avoir l'effet contraire et aggraver les rivalit�s en faisant monter les enjeux de la lutte pour le pouvoir politique. Dans des situations de conflit ouvert, le droit � l'aide humanitaire doit �tre maintenu. En m�me temps, les donneurs doivent �tre conscients de ce que m�me si l'aide se veut �quitable, elle est souvent per�ue comme �tant destin�e, bien au contraire, � favoriser l'une des parties en conflit. Ainsi, l'aide ext�rieure peut contribuer � nourrir les tensions, soit indirectement, soit suite � des manipulations d�lib�r�es de la part de partenaires locaux participant � sa distribution.

84. Bien qu'en mati�re humanitaire, le principe d'impartialit� ne soit pas contest�, il est parfois tr�s difficile de le traduire en termes op�rationnels dans des situations de conflit. Dans les situations marqu�es par la violation syst�matique des droits de l'homme, la purification ethnique, le g�nocide et autres crimes de guerre, l'absence de parti-pris vis-�-vis des parties en conflit, dans le cadre de crit�res humanitaires clairement formul�s et respect�s, peut s'av�rer un meilleur guide, bien qu'il soit �galement difficile � mettre en pratique. Le respect de ce principe suppose que l'aide ext�rieure soit distribu�e de sorte qu'aucune des parties en conflit ne puisse en tirer un avantage politique ou militaire. Cela implique donc que l'aide ext�rieure soit per�ue par les bellig�rants comme �tant distribu�e de fa�on �quitable.

85. Etant donn� le contexte politique dans lequel s'ins�re in�vitablement l'aide humanitaire, l'exp�rience montre que les organismes d'aide doivent �viter en particulier les situations suivantes :

-Les parties en guerre peuvent essayer de monopoliser l'acc�s aux ressources de l'aide humanitaire, en particulier alimentaire, pour en tirer une force politique suppl�mentaire. Elles peuvent aussi en tirer profit indirectement en vendant des fournitures humanitaires vol�es.
-L'aide humanitaire peut contribuer indirectement � prolonger le conflit en permettant aux bellig�rants, aussi bien gouvernement en place que mouvements d'opposition, de se d�rober � l'obligation de r�pondre aux besoins urgents des populations civiles et de rechercher des solutions politiques au conflit.
-Les programmes qui aboutissent � mieux traiter les r�fugi�s rapatri�s que les personnes d�plac�es � l'int�rieur de leur propre pays et les autres groupes touch�s par le conflit peuvent susciter des tensions entre ces diff�rents groupes.

86. Lorsque l'hostilit� est de longue date, il faut souvent n�gocier avec les parties en conflit pour obtenir la s�curit� de passage des secours humanitaires. Cela peut �tre l'occasion de convaincre les antagonistes de l'�quit� des interventions d'aide ext�rieure et en fin de compte mettre les donneurs en meilleure situation pour contribuer � la solution du conflit. Inversement, la pratique qui consiste � offrir de l'argent aux bellig�rants pour s'assurer l'acc�s aux populations qui attendent des secours peut contribuer directement � donner autorit� et l�gitimit� � ceux qui ont recours � la violence. La pratique de n�gocier l'acc�s des secours humanitaires peut aussi conduire � la diversion d'une grande partie de l'aide et � la d�tourner des populations les plus n�cessiteuses.

87. Il importe par ailleurs de ne pas cr�er chez les b�n�ficiaires de l'aide une situation de d�pendance. Les objectifs � court terme et � long terme des op�rations de secours peuvent �tre contradictoires, ce qui est efficace pour sauver des vies peut dans certains cas rendre plus difficiles les solutions � plus long terme. Trois exemples suffisent � le montrer :

-Une politique de distribution gratuite de semences et d'outils agricoles aux paysans apr�s une p�riode de conflit violent peut contribuer � att�nuer les p�nuries alimentaires au cours des premi�res campagnes agricoles post�rieures � la crise. Elle peut cependant �galement contribuer � cr�er une d�pendance des agriculteurs si elle est continu�e au del� de cette p�riode, de sorte que lesdits agriculteurs se mettent � consid�rer ces distributions gratuites comme allant de soi, r�duisant d'autant leur �pargne et leurs investissements. Qui plus est, la distribution gratuite d'intrants agricoles aux paysans qui cultivent des terres occup�es sans titre peut contribuer � l�gitimer cette situation de fait, semant les germes de conflits futurs lorsque les v�ritables propri�taires reviendront r�clamer leur bien. Les consid�rations � court terme, telles la n�cessit� urgente de relancer la production agricole et la charge administrative qu'imposerait le recouvrement du co�t des intrants aupr�s des b�n�ficiaires, peuvent par cons�quent aller � l'encontre des objectifs � long terme, qui sont de promouvoir la prise en charge des individus par eux-m�mes et la r�conciliation.
-Si les regroupements de population peuvent, du point de vue logistique, faciliter l'acheminement des secours, ils peuvent aussi favoriser la d�pendance en �loignant ces populations de leurs moyens d'existences habituels et contribuer � affaiblir la coh�sion sociale.
-L'aide humanitaire d'urgence peut avoir pour effet d'affaiblir sensiblement les structures administratives locales qui sont souvent court-circuit�es par des ONG mieux �quip�es pour assurer ce service. La r�duction de la vuln�rabilit� et l'am�lioration de la capacit� de r�pondre � l'urgence dans l'avenir impliquent l'�tablissement progressif d'institutions locales comp�tentes. Si un large recours � des �quipes de sp�cialistes expatri�s, peut �tre in�vitable au d�part, il est imp�ratif de se fixer pour objectif prioritaire de passer rapidement le relais aux institutions locales.

88. Pour �viter de tomber dans ces pi�ges, une compr�hension parfaite de la dynamique locale, nationale, r�gionale et internationale du conflit est indispensable. Il faut en outre exercer un suivi �troit de l'aide ext�rieure, afin de d�tecteur toute r�percussion n�gative et de mettre les forces politiques au service de la paix et d'une r�conciliation durable. Cela implique notamment d'examiner les avantages que certains groupes tirent du conflit et de sa p�rennisation (sur le plan du statut, des gains mat�riels, des conditions d'existence, du soutien politique, de l'identit� individuelle et collective) et de d�terminer quels sont les obstacles politiques qui se dressent sur le chemin de la paix.

89. L'impact social de l'aide sur les diff�rents groupes b�n�ficiaires doit �tre examin�. Les hommes et les femmes ont des besoins mat�riels et sociaux diff�rents, et qui peuvent par ailleurs �tre profond�ment modifi�s par les conflits violents. L'ins�curit� et les d�placements forc�s peuvent avoir pour cons�quences des changements importants en ce qui concerne l'acc�s aux ressources essentielles telles que la terre, la main-d'oeuvre, les outils et les intrants agricoles. Les relations sociales peuvent aussi se trouver profond�ment modifi�es par de nouvelles distributions des r�les entre hommes et femmes, et l'�rosion des valeurs traditionnelles. En analysant et en prenant en compte de fa�on explicite les diff�rentes vuln�rabilit�s des hommes et des femmes, les strat�gies de secours d urgence et de r�habilitation peuvent renforcer leur impact et am�liorer leur rapport co�t-efficacit�.

90. Les sp�cificit�s li�es au sexe devraient �tre un facteur primordial dans la distribution des ressources dans le contexte des secours d'urgence et de l'aide au d�veloppement. La distribution de vivres aux hommes, par exemple, peut porter atteinte au r�le des femmes dans la gestion de la consommation alimentaire des m�nages, avec des cons�quences socio-�conomiques durables. En tant que fournisseurs importants de ressources, les organismes d'aide peuvent souvent contribuer au d�veloppement de nouveaux r�les pour les hommes et les femmes, l� o� c'est appropri�, et � favoriser l'�mergence de nouveaux r�seaux de relations sociales.

91. La recherche de solution � la question de savoir si cette distribution doit se faire par l'interm�diaire des structures communautaires, aux chefs de m�nage ou directement aux individus, doit commencer par la compr�hension de ses effets sur les relations hommes-femmes. L'analyse de la place respective des hommes et des femmes dans la soci�t� est n�cessaire pour d�terminer les diff�rences entre ces deux groupes de population sous l'angle de la vuln�rabilit� aux crises, de la capacit� � les affronter et des strat�gies adopt�es pour y faire face. Elle peut �galement aider � mettre en lumi�re l'in�galit� des rapports de force sous-jacents � l'organisation sociale afin de faire en sorte que les femmes ne soient pas encore plus marginalis�es par les op�rations de secours.

92. Donner aux femmes une influence sur les d�cisions est un �l�ment cl� d'une approche tenant en compte les statuts respectifs des hommes et des femmes. Il faut pour cela du personnel form� en la mati�re, pour comprendre les types de relations qui existent entre hommes et femmes et d�terminer les m�thodes d'examen pr�alable des programmes qui permettront de d�tecter les vuln�rabilit�s propres � chaque sexe et de d�finir les r�ponses � y apporter. Il faudra rechercher d�s le d�but du processus de consultation les moyens de faire en sorte que les femmes soient repr�sent�es dans les institutions locales. Consulter tout le monde n'est pas toujours possible en p�riode de crise aigu�. Il importe par cons�quent de mettre en place le plus t�t possible des m�canismes permettant � tous les acteurs d'avoir voix au chapitre lors des prises de d�cisions.

B. Enseignements de l'exp�rience

93. En p�riode de crise, les fortes pressions exerc�es par les m�dias et l'opinion publique dans les pays donneurs en faveur d'une r�action rapide pour secourir le plus grand nombre de victimes possible peuvent se traduire par des apports d'aide sur une grande �chelle. Compte tenu de l'imp�ratif humanitaire de r�pondre rapidement et efficacement aux besoins des victimes, c'est souvent la seule solution possible. Bien que la sympathie du public et l'intervention des m�dias aident � mobiliser les ressources n�cessaires aux op�rations de secours, elles ne sont pas obligatoirement propices � des d�cisions r�fl�chies concernant les formes d'intervention les plus appropri�es. Des ONG inexp�riment�es peuvent nuire aux efforts d'acteurs d�j� en place, et l'attention des m�dias peut m�me influer sur la formulation des programmes d'aide et cr�er des distorsions dans l'�valuation des priorit�s en mati�re de fourniture d'aide, voire les entraver.

94. Les agences et ONG sp�cialis�es dans les secours en cas de catastrophe ont rendu des services consid�rables dans de nombreuses situations d'urgences. Elles se sont efforc�es principalement de sauver des vies et de soulager des souffrances, consacrant moins d'attention aux besoins � long terme des b�n�ficiaires. Une planification � plus long terme doit �tre mise en oeuvre d�s la phase initiale des op�rations de secours, afin d'aider les b�n�ficiaires � retrouver leur autonomie et d'�viter de cr�er des situations de d�pendance vis-�-vis de l'aide externe Etant souvent les premi�res sur le terrain, les ONG sont souvent conduites � d�cider, par d�faut, des crit�res et r�gles � appliquer dans la distribution de l'aide humanitaire. Leurs interventions initiales peuvent ainsi d�terminer le cours des programmes ult�rieurs. Au d�but des crises, l'absence de principe et r�gle op�rationnelle pour guider les actions humanitaires est une v�ritable carence qu'il ne faut pas ignorer.

95. Les secours humanitaires qui ne s'accompagnent pas de plans d'aide � plus long terme peuvent �galement contribuer � affaiblir l'administration locale. Dans les situations de crise, les structures locales, souvent d�j� fragiles, peuvent �tre totalement d�pass�es si les organismes internationaux d'aide humanitaire mettent en place des syst�mes parall�les pour acheminer et distribuer les secours. Le vide administratif que cr�e par la suite le d�part de ces organismes entrave les efforts de redressement.

C. Lier secours et d�veloppement

96. Pour les besoins de l'analyse, on a souvent d�crit le passage d'une situation d'urgence � la phase de d�veloppement � long terme comme un continuum. Or, ce n'est pas ce qui se passe dans la r�alit� o� les choses ne suivent pas un sch�ma, une chronologie ou un ordre �tablis. En temps de crise, les secours d'urgence, les activit�s de reconstruction et l'aide au d�veloppement coexistent avec d'innombrables interactions. Le probl�me est de surpasser les distinctions fonctionnelles entre les divers organismes et de ne pas se borner � coordonner les objectifs de secours d'urgence, de reconstruction et de d�veloppement, mais de les int�grer dans une strat�gie � long terme.

97. Les p�riodes de crise prolong�es sont l'occasion de r�aliser des investissements visant � accro�tre la capacit� de faire face aux crises, surtout parmi les groupes les plus vuln�rables. Ainsi, la constitution de stocks de semences et alimentaires d'urgence au niveau des collectivit�s de base, peut contribuer directement � limiter les risques de d�placement massif de populations lors des catastrophes, et � r�duire ainsi l'impact des urgences humanitaires et les besoins en secours. Dans la pratique, cependant, si chacun reconna�t l'importance de la pr�paration aux catastrophes dans les strat�gies de d�veloppement durable, les affectations de ressources ne suivent pas et ne repr�sentent g�n�ralement qu'une petite fraction des cr�dits consacr�s aux interventions humanitaires.

98. Il est souvent possible de concilier les besoins � court et � long terme et de faire simultan�ment face aux besoins dans le domaine des secours, d'une meilleure pr�paration aux catastrophes, et du d�veloppement. Un projet type "vivres contre travail" visant � reconstruire les infrastructures collectives peut ainsi permettre :

-de dispenser des secours par la distribution de rations alimentaires (urgence) ;
-de fournir des possibilit�s d'emploi et des comp�tences professionnelles valables, notamment aux soldats r�cemment d�mobilis�s (reconstruction) ;
-de reconstruire une �cole d�truite (reconstruction) ;
-de contribuer � cr�er les capacit�s nationales requises pour administrer des projets similaires dans les situations d'urgence futures (pr�paration) ;
-d'aider � faire en sorte que l'enseignement primaire ne soit pas interrompu outre mesure (d�veloppement).

99. L'aide d'urgence peut aussi faire appel aux institutions et aux march�s locaux pour assurer la fourniture des secours. Les r�seaux d'entreprises continuent souvent de fonctionner malgr� les troubles de l'ordre public et ils peuvent �tre mis � profit pour la distribution des produits de premi�re n�cessit� en zone rurale et l'acheminement des productions exc�dentaires depuis l'exploitation jusqu'au march�. Lorsque les r�seaux commerciaux ruraux ont totalement disparu, leur reconstitution pose un probl�me majeur, surtout si les secours prennent essentiellement la forme de distributions gratuites de vivres et d'autres biens.

100. Un moyen particuli�rement constructif d'assurer la liaison entre l'aide humanitaire et les interventions ax�es sur le d�veloppement consiste � faire un inventaire syst�matique des �quipements collectifs et des moyens de production des districts et des r�gions touch�s par la crise. Une base de donn�es d�taill�es, enregistrant les r�sultats des efforts de reconstruction d�ploy�s au niveau du district par les organismes publics d'aide, les ONG, et les entreprises priv�es peut �tre tr�s utile. Il apporte une pleine connaissance de la situation et permet de d�tecter des signes avant-coureurs d'un risque de retour � une situation de crise qui mettent en �vidence la n�cessit� d'une action pr�ventive et peut aider � l'�valuation de l'impact de l'assistance fournie. Si les r�sultats en sont partag�s avec les donneurs, un tel inventaire peut constituer un instrument pr�cieux pour la collecte de fonds et pour la coordination op�rationnelle.

D. Meilleures pratiques recens�es

a) Durant la phase de planification

-Toutes les situations d'urgence complexes sont diff�rentes et des strat�gies sp�cifiques doivent �tre d�finies pour chaque crise. Une profonde compr�hension de la situation locale est essentielle.
-Limiter l'ampleur et la dur�e des interventions d'urgence au strict minimum et pr�voir tr�s t�t les op�rations � r�aliser apr�s la crise initiale.
-Cesser le plus t�t possible l'acheminement en parall�le des secours et de l'aide au rel�vement.
-Mesurer le risque que les op�rations d'aide humanitaire et de d�veloppement puissent contribuer � prolonger la crise en cr�ant un �tat de d�pendance chez des groupes importants de b�n�ficiaires et en fournissant des moyens mat�riels que les parties en conflit utilisent � leur profit.

b) Face aux b�n�ficiaires et aux institutions locales

-Aider les institutions locales � prendre en charge au plus t�t la gestion des op�rations d'aide. Eviter de fournir des ressources financi�res excessives aux structures locales, afin de ne pas cr�er des attentes auxquelles il ne serait pas possible de r�pondre durablement. Introduire, des proc�dures efficaces de contr�le, au travers par exemple d'un syst�me de double signature pour les comptes recueillant les sommes provenant du remboursement des co�ts. Mettre l'accent sur la n�cessit� que le processus de renforcement des capacit�s locales parte de la base pour aller vers le sommet.
-Consulter l'ensemble des b�n�ficiaires et les informer par avance des changements importants de politique, tels que le remplacement de l'aide alimentaire gratuite par des projets "vivres contre travail" et par des politiques de recouvrement des co�ts. -Prendre syst�matiquement en compte les incidences des op�rations de secours et des projets de reconstruction sur la situation respective des hommes et des femmes dans la soci�t�, et en particulier aux besoins sp�cifiques des femmes, surtout lorsqu'elles sont chefs de famille monoparentale. Dans la mesure du possible, s'efforcer de d�velopper simultan�ment les strat�gies respectives des hommes et des femmes en s'adaptant aux situations de crise.

c) Face aux organismes partenaires

-Adopter un code de conduite d�crivant les comportements admis, en particulier concernant les contacts et la coop�ration avec les fractions impliqu�es dans une guerre civile. Il est essentiel d'observer une stricte impartialit�. Le paiement de ces factions en �change de "services de protection" ne saurait se justifier car il ne ferait qu'encourager ces factions � entretenir un climat d'ins�curit� et � ran�onner l'aide humanitaire.
-Mettre en place des m�canismes efficaces d'�change d'informations entre les organismes sur le terrain et au si�ge. Passer des accords de mise en commun des moyens logistiques afin de r�duire les co�ts et de limiter les risques de d�tournement de l'aide par les parties en conflit.

E. Orientations � l'intention des donneurs

101. Les conflits ont souvent pour objet le contr�le des ressources et il faut admettre que l'apport de ressources dans un contexte de crise ou de conflit entra�ne, dans une certaine mesure, une participation � ce conflit. Cette observation s'applique tant � l'aide humanitaire qu'� la coop�ration pour le d�veloppement. Le risque existe donc non seulement que l'aide soit per�ue comme �tant partiale vis-�-vis de certaines des parties en conflits, mais aussi qu'elle soit d�tourn�e par les bellig�rants. L'aide de secours et l'aide pour le d�veloppement � plus long terme ont donc, dans de telles circonstances, un impact politique ind�niable.

102. L'impact politique de l'aide doit �tre explicitement pris en consid�ration. Les secours humanitaires et l'aide au d�veloppement peuvent conf�rer des pouvoirs aux organisations locales participant � leur distribution et mettre en question d'autres structures �conomiques et sociales. Les combattants peuvent �galement d�tourner l'aide, alimentaire ou autre, pour en tirer des gains commerciaux ou pour en faire un instrument de pouvoir. Les organismes d'aide peuvent par cons�quent se voir accuser de prendre parti (en fournissant des vivres � l'ennemi) et contribuer indirectement � prolonger la crise. C'est un aspect qui doit �tre explicitement pris en compte dans les programmes de gestion des crises.

103. Une analyse soigneuse du contexte social est indispensable lorsque les secours, notamment alimentaires, sont distribu�s par l'interm�diaire des organisations locales. Une telle analyse peut contribuer � r�duire au minimum les risques d'injustice dans la distribution et � �viter de renforcer toutes formes d'exploitation existantes. Les sp�cificit�s li�es au sexe doivent faire l'objet d'une attention toute particuli�re. Il est n�cessaire de prendre en compte de fa�on explicite les r�les, besoins et potentiels particuliers des femmes, de d�velopper des approches tenant compte de la place des femmes au sein des m�nages, de la soci�t� et de l'�conomie ; de rendre les projets et l'aide accessibles aux femmes; de faire appel � du personnel form� en la mati�re et d' assurer un bon ciblage des b�n�ficiaires � travers des m�thodes de planification de projet flexibles et participatives.

104. Les organisations ind�pendantes et les ONG doivent �tre encourag�es � analyser les incidences socio-�conomiques potentielles de l'aide qu'elles distribuent et � �tablir des normes destin�es � r�gir leurs activit�s dans le cadre des op�rations cons�cutives � un conflit. Celles-ci pourraient se conformer � des principes commun�ment admis tels que ceux d�finis par le Code de conduite pour les secours lors de catastrophes � l'intention du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

105. Le passage d'une situation d'urgence � la phase de d�veloppement � long terme ne suit pas sch�ma, chronologie ou un ordre �tabli. La distinction entre "secours d'urgence" et "aide au d�veloppement" � plus long terme, n'est pas toujours propice � la bonne planification du soutien � apporter aux pays en crise. De ce fait, les fronti�res institutionnelles, budg�taires et fonctionnelles entre les secours, la reconstruction et la coop�ration pour le d�veloppement peuvent aboutir � des contradictions, ou des lacunes et faire obstacle � la coordination. L'int�gration de la planification du secours d'urgence et de l'aide au d�veloppement dans le contexte de strat�gies � long terme visant � promouvoir la prise en charge des individus par eux-m�mes est un d�fi majeur.

106. Le r�le de l'aide au d�veloppement dans la pr�vention des conflits ou l'att�nuation de leurs cons�quences doit �tre examin� de fa�on syst�matique. Dans les zones o� les risques de guerre civile sont �lev�s, l'aide doit s'attacher � rem�dier aux causes profondes de la violence, avant qu'elle n'�clate. Dans ce contexte, le concept de vuln�rabilit� est important pour identifier les groupes les plus menac�s.

Encadr� 7. Code de conduite pour les secours lors de catastrophes � l'intention du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et des ONG Le Code de conduite pour les secours lors de catastrophes, dont la r�daction a �t� achev�e en 1994 par le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et les principales ONG, vise � d�finir des r�gles de conduite et � garantir l'ind�pendance, l'efficacit� et l'impact des op�rations d'aide humanitaire. Les principes �labor�s � l'intention des ONG participant aux programmes de secours en cas de catastrophe sont notamment les suivants :

-l'imp�ratif humanitaire passe en premier ; l'aide est dispens�e ind�pendamment de la race, des croyances ou de la nationalit� des b�n�ficiaires et sans discrimination d'aucune sorte ;
-les priorit�s en mati�re d'aide sont exclusivement d�finies en fonction des besoins ; l'aide ne doit pas �tre utilis�e pour promouvoir une opinion politique ou religieuse particuli�re ;
-les ONG doivent s'attacher � ne pas �tre un instrument de la politique �trang�re de leurs gouvernements ; elles doivent respecter la culture et les coutumes locales ;
-les ONG doivent s'efforcer de r�pondre aux catastrophes en s'appuyant sur les capacit�s locales ;
-il est imp�ratif de trouver les moyens d'associer les b�n�ficiaires des programmes � la gestion des secours ;
-les secours doivent viser dans la toute mesure du possible � r�duire la vuln�rabilit� future aux catastrophes et � r�pondre aux besoins essentiels ;
-les ONG sont responsables devant les b�n�ficiaires comme devant les donneurs.

107. Le rep�rage de "syndromes de d�pendance" est une t�che essentielle des organismes d'aide nationaux et internationaux. Une �valuation soigneuse des besoins bas�e sur une connaissance pr�cise des ressources disponibles sur place est �galement n�cessaire pour bien juger de l'aide requise, aussi bien en qualit� qu'en quantit�.

108. Pour ne pas cr�er de d�pendance � l'�gard de l'aide, il est essentiel d'�viter de fausser le jeu du march�, surtout dans le secteur de la production alimentaire. La distribution gratuite de vivres peut s'av�rer pr�judiciable � long terme pour les producteurs locaux de denr�es alimentaires. Il est par cons�quent important de surveiller l'impact des secours sur l'offre de denr�es alimentaires et sur le m�canisme des prix. Au d�but de chaque crise et parall�lement aux op�rations de secours, les donneurs doivent s'efforcer d'assurer la protection et/ ou la fourniture de moyens de production favorisant le d�veloppement, tels que b�tail, semences et outils.

109. Lorsque l'administration locale est inexistante, il pourrait �tre fait appel � d'autres structures ou ONG locales. Si celles-ci n'ont pas les capacit�s n�cessaires, elles pourraient �tre form�es par des ONG internationales. Il faut dans ce cas prendre soin que les niveaux de salaires offerts par les organismes d'aide ne soient pas de nature � d�baucher le personnel qualifi� de l'administration locale. Cela n�cessite une politique de recrutement et de r�mun�ration des personnels nationaux pour les programmes de secours humanitaires, accept�e et appliqu�e par tous les donneurs.

110. Une d�pendance trop grande � l'�gard des ONG internationales risque d'entraver ou d'emp�cher le d�veloppement des capacit�s nationales n�cessaires pour assumer une gestion efficace des affaires publiques. Elle peut �galement faire obstacle au d�veloppement dans les collectivit�s locales des capacit�s de r�solution des probl�mes et de gestion de leurs propres affaires. Il convient d'inciter les ONG internationales � �tablir des liens structur�s avec les ONG nationales et locales --qu'elles travaillent avec des hommes ou des femmes --dans le but de d�velopper des capacit�s parmi toutes les sections de la population.

IV. Les fondements de la paix et de la r�conciliation : la bonne gestion des affaires publiques et la soci�t� civile

A. Principes de base

111. La "construction de la paix" suppose � la fois des mesures de pr�vention des conflits sur le long terme et des r�ponses plus imm�diates avant, pendant et apr�s les conflits. Elle repose sur un esprit de tol�rance et de r�conciliation et cherche en m�me temps � le promouvoir. La reconnaissance par tous les secteurs de la soci�t� de la l�gitimit� de l'Etat et de la cr�dibilit� des institutions gouvernementales est essentielle pour susciter un tel esprit. Lorsque les droits fondamentaux de chaque individu sont respect�s, lorsque la soci�t� est r�gie par le droit et lorsque les citoyens ordinaires sont associ�s au processus politique, le recours � la violence pour provoquer un changement politique est �videmment moins probable. Il est clair que les efforts d�ploy�s pour soutenir la participation, la d�mocratisation et le r�tablissement de la paix par le renforcement des institutions correspondent � des objectifs �troitement li�s.

112. Dans les pays divis�s par un conflit intergroupes, certains �l�ments de la soci�t� civile peuvent �tre en mesure de jouer un r�le important en exer�ant une m�diation entre les groupes, en favorisant le dialogue et la r�conciliation. Les conditions d'ins�curit�, parfois aggrav�es par l'exploitation des diff�rences ethniques, religieuses et culturelles, contribuent � cr�er un climat de profonde m�fiance dans la soci�t�. Cependant, la violence du conflit socio-politique elle-m�me peut aussi susciter l'�mergence d'institutions et d'acteurs nouveaux qui se consacrent sp�cialement � la cause de la paix. Il peut s'agir de r�seaux de d�fense des droits de l'homme, de groupes pacifistes et de m�dias ind�pendants. D'autres �l�ments de stabilisation ou "des porte-parole de la paix" peuvent se rencontrer parmi les chefs religieux et des personnalit�s locales, les autorit�s traditionnelles, les syndicats et les associations professionnelles.

113. Lorsqu'il y a carence de l'Etat ou lorsque certaines r�gions d'un pays se trouvent sous le contr�le d'autorit�s non gouvernementales ou antigouvernementales, des m�canismes �tablis au niveau local ne relevant pas de l'Etat peuvent �tre le moyen le plus efficace de construire la paix et de g�rer le conflit. S'il faut bien admettre que tous les �l�ments de la soci�t� civile n'oeuvrent pas n�cessairement en faveur de la paix, une soci�t� peut, m�me en temps de crise, se construire des valeurs et des objectifs communs. En recherchant et en aidant au sein des communaut�s les principaux acteurs et m�canismes favorables � la paix et � la r�conciliation et en veillant � ne pas soutenir, par inadvertance les forces de la guerre, les donneurs peuvent apporter une contribution efficace � la paix.

B. Les bases de la construction de la paix et la r�conciliation

114. Etant donn� leur caract�re d�licat et complexe, les programmes d'aide ax�s sur la gestion des affaires publiques exigent aussi bien de la part des donneurs que de la part des pays b�n�ficiaires un engagement politique ferme et durable. Ces programmes doivent sans rel�che mettre l'accent sur le renforcement des propres capacit�s de bonne gestion des affaires publiques par les pays partenaires. Aider � affermir la volont� de r�forme dans les pays partenaires implique souvent de mener avec eux un dialogue sur les politiques � suivre et de leur offrir des incitations. Les Orientations du CAD sur le d�veloppement participatif et la bonne gestion des affaires publiques (s�rie des lignes directrices sur la coop�ration pour le d�veloppement, OCDE 1995) repr�sentent � cet �gard un cadre d'action bien adapt�. Lorsqu'ils discutent avec les gouvernements des pays b�n�ficiaires de la conception des programmes de coop�ration pour le d�veloppement, les pays donneurs peuvent, sans faire de pros�lytisme ni minimiser la complexit� de la chose, souligner sans cesse la n�cessit� d'une bonne gestion des affaires publiques, du respect du droit et en particulier des droits de l'homme, et du d�veloppement d'une soci�t� civile forte si l'on veut parvenir � une stabilit� durable.

115. Toutes les composantes d'une soci�t� civile vigoureuse ne sont pas n�cessairement r�solues � parvenir � un large consensus. Or, pour construire la paix et instaurer un d�veloppement durable il est fondamental qu'une soci�t� puisse construire et renforcer des valeurs et des objectifs communs et que les individus soient capables et d�sireux de s'int�grer pleinement � cette soci�t�. A terme, les donneurs peuvent aider � r�unir ces conditions, notamment par des activit�s visant �:

-soutenir les structures gouvernementales et d'autres organisations, y compris les milieux d'affaires, qui sont en mesure de cr�er ou d'entretenir des r�seaux sociaux et des associations qui favorisent la participation et l'int�gration � la soci�t� ou qui soutiennent ou encouragent des valeurs communes (programmes culturels, sports, etc.) ;
-favoriser l'acc�s � l'information gr�ce � l'�ducation et � des institutions telles que bureaux de conseils aux citoyens, m�dias locaux, etc. ;
-apporter un appui aux ONG locales et aux organisations communautaires pour les aider � am�liorer leur capacit� de r�pondre aux besoins de leurs mandants.

116. Bien que les Membres du CAD privil�gient d'ordinaire les mesures de soutien positif, ils peuvent �tre amen�s � recourir � la persuasion et au dialogue lorsqu'ils s'efforcent, avec les gouvernements de certains pays qui sont leurs partenaires, de prendre des mesures constructives pour am�liorer la gestion des affaires publiques. Des crit�res de politique g�n�rale, visant � promouvoir la d�mocratie, l'Etat de droit, le respect des droits de l'homme et la bonne gestion des affaires publiques, devront �tre incorpor�s dans une gamme plus large de programmes d'aide au d�veloppement dans ce domaine.

117. Les principes les plus fondamentaux de la pratique d�mocratique doivent rencontrer l'adh�sion du secteur public et de l'ensemble de la soci�t� civile. La d�mocratisation est un processus complexe, progressif et participatif par lequel les citoyens, la soci�t� civile et l'Etat instaurent un ensemble de normes, de valeurs et d'institutions qui organisent leurs rapports dans des conditions de r�gularit�, de repr�sentativit� et d'�quit�. Les activit�s de coop�ration pour le d�veloppement visant � am�liorer la gestion des affaires publiques et � renforcer la participation doivent s'inscrire sur le long terme et s'appuyer sur des strat�gies coh�rentes appliqu�es de fa�on homog�ne par les diff�rents donneurs et les organisations multilat�rales. Cela suppose une coordination efficace entre tous les acteurs qui interviennent dans la conception et l'ex�cution des programmes.

118. La strat�gie de l'aide en mati�re de bonne gestion des affaires publiques doit s'adapter aux circonstances. Ainsi, face � un Etat autoritaire ou semi-autoritaire, les possibilit�s d'un dialogue constructif risquent d'�tre extr�mement restreintes, et les donneurs peuvent �tre oblig�s de limiter leur aide aux secteurs non gouvernementaux pr�ts � la r�forme. Pour les pays en voie de d�mocratisation, l'aide peut �tre ax�e sur le renforcement des acteurs de la soci�t� civile et des processus d�mocratiques. Les donneurs doivent aussi se garder de ne pas pr�cipiter l'instabilit� politique et �conomique par l'introduction trop soudaine d'institutions d�mocratiques.

a) Le respect des droits de l'homme

119. Les libert�s fondamentales qui doivent �tre prot�g�es par la loi sont indispensables � des relations saines entre l'Etat et la soci�t� civile.

120. Les Membres du CAD se doivent de soutenir les principes internationaux �nonc�s dans la Charte des Nations Unies et �labor�s dans la D�claration universelle des droits de l'homme de 1948, et la D�claration de Vienne de 1994. Ils doivent aussi respecter les dispositions des Conventions internationales et r�gionales auxquelles ils ont adh�r�, telles que la Convention pour la pr�vention et la r�pression du crime de g�nocide (1948), la Convention des Nations Unies sur l'�limination de toutes les formes de discrimination � l'�gard des femmes (1979), Les Conventions de la Croix-Rouge (Gen�ve 1949) dans le domaine du droit humanitaire et les Protocoles additionnels de 1977 qui visent � prot�ger les non-combattants et les victimes des conflits arm�s, ainsi que la Convention relative au statut des r�fugi�s (Gen�ve 1951). Plus g�n�ralement, la coop�ration pour le d�veloppement, l'aide humanitaire et le dialogue sur les politiques doivent promouvoir et soutenir explicitement les droits de l'homme et les libert�s fondamentales reconnus au plan international.

121. Les groupes d'int�r�t non gouvernementaux actifs peuvent jouer un r�le important de relais des initiatives des donneurs dans le domaine des droits de l'homme, en donnant des informations sur la situation des droits de l'homme dans un pays donn� et en constituant une base de d�fense des droits de l'homme vis-�-vis des gouvernements et de l'opinion publique. De m�me, il peut �tre int�ressant de cibler des groupes qui d�fendent ou repr�sentent les victimes d'injustices ou d'abus de pouvoir (par exemple des groupes f�minins, des coop�ratives d'agriculteurs). L'aide achemin�e par l'interm�diaire des ONG internationales b�n�ficie de l'influence, du professionnalisme et de la neutralit� qui caract�risent ces organisations et les groupes locaux de d�fense des droits de l'homme peuvent, en s'associant � des organisations internationales respect�es, b�n�ficier d'une certaine protection et d'une capacit� accrue.

122. L'aide des donneurs dans ce domaine doit faire partie d'une action plus g�n�rale visant � promouvoir un d�veloppement juste et durable et � permettre aux groupes les plus vuln�rables et d�favoris�s de la soci�t� d'avoir une meilleure connaissance de leur droits en tant que personne ainsi que de leurs droits et devoirs de citoyen en particulier. L'action visant � renforcer l'Etat de droit et le respect des droits de l'homme devra se concentrer sur les structures et processus d'�laboration et d'interpr�tation de la loi et de la politique sociale (parlements et tribunaux), ainsi que sur ceux qui les mettent en oeuvre et les font appliquer (administrations, forces de police, forces arm�es). L'exp�rience montre que c'est lorsqu'elles sont int�gr�es dans une strat�gie globale que ces interventions ont le plus d'efficacit� et non lorsqu'elles ont lieu isol�ment.

b) Processus participatifs i) La participation

123. Favoriser la participation populaire � la d�finition des priorit�s de la gestion des affaires publiques est indispensable � la consolidation de la paix. La participation renforce la soci�t� civile et l'�conomie en permettant aux individus, aux communaut�s et aux organisations de n�gocier avec les institutions et les administrations, leur donnant ainsi la possibilit� d'influer sur la politique des pouvoirs publics et de la contr�ler. La participation favorise aussi le traitement pacifique des conflits d'int�r�ts. La mise en place des conditions propices � la participation et l'instauration des capacit�s institutionnelles n�cessaires � des interactions constructives entre la soci�t� civile et les pouvoirs publics est donc indispensable � la construction d'une paix durable.

Encadr� 8. La d�centralisation La d�centralisation peut stimuler la participation locale et r�gionale aux d�cisions et am�liorer ainsi la transparence et la l�gitimit� de l'action des pouvoirs publics. Elle peut permettre une r�ponse plus adapt�e de la part de l'Etat et r�duire ainsi les tensions qui pourraient conduire � des conflits violents.

Cependant, si la d�centralisation est per�ue comme modifiant la distribution des ressources, du revenu ou des possibilit�s d'emploi, au d�triment de certains groupes ethniques ou religieux, cela risque de mobiliser des oppositions politiques. C'est ainsi que la d�centralisation peut aggraver les tendances s�paratistes et r�gionalistes et leurs manifestations violentes.

Les pouvoirs centraux, dont la volont� de d�centralisation est n�cessaire pour entreprendre une r�forme, peuvent y voir une menace � leur autorit�. C'est pourquoi le renforcement des autorit�s locales exige de bien conna�tre la structure des incitations qui s'offrent aux dirigeants politiques � l'�chelon tant central que local.

124. Les donneurs peuvent apporter une aide dans les domaines suivants :

-la fourniture d'une assistance technique et de conseils sp�cialis�s dans le domaine de la politique de d�centralisation (mise en place de structures d�centralis�es de planification et d'administration) ;
-la clarification des responsabilit�s fonctionnelles respectives des diff�rents �chelons de l'administration. Cela comprend la mise en place de syst�mes permettant de r�partir les recettes fiscales et les responsabilit�s correspondantes ;
-le renforcement des capacit�s organisationnelles des instances repr�sentatives interm�diaires, notamment les assembl�es r�gionales et conseils locaux ;
-le renforcement de la repr�sentation des groupes marginalis�s dans la fonction publique.

125. Dans le contexte des projets visant � fournir des services sociaux de base tels que l'�ducation, la sant� et les infrastructures, les donneurs peuvent aussi jouer un r�le important en aidant � faire en sorte que ces services soient accessibles � tous les secteurs de la soci�t� et en particulier aux groupes marginalis�s.

ii) Les processus d�mocratiques

126. La d�mocratisation permet aux citoyens de faire conna�tre au gouvernement leurs besoins et int�r�ts ainsi que de prot�ger les droits et int�r�ts des groupes marginalis�s et des plus vuln�rables. Un syst�me d�mocratique comporte aussi des m�canismes de r�glement pacifique des conflits, y compris ceux relatifs � la r�partition des pouvoirs politique et �conomique, et des m�canismes pour le transfert des responsabilit�s politiques. En soutenant et en consolidant les institutions d�mocratiques, les donneurs peuvent contribuer � l'instauration de la paix et de la stabilit�.

127. A partir de l'exp�rience acquise, la liste qui suit sugg�re les grands axes d'une politique de renforcement de la d�mocratisation ayant pour objectifs directs la pr�vention des conflits et la consolidation de la paix :

-Soutien aux initiatives de r�forme de la constitution d'un pays, par exemple en donnant des conseils aux gouvernements sur les questions constitutionnelles et l�gislatives.
-Soutien au renforcement d'institutions politiques repr�sentatives, y compris les partis politiques au sens large du terme.
-Soutien aux syst�mes l�gislatifs et processus �lectoraux, y compris l'information des �lecteurs quant � leurs droits, la surveillance et l'analyse des consultations �lectorales et la r�forme des lois �lectorales.
-Soutien � l'organisation et la surveillance des �lections et des r�f�rendums. Il importe que ce type d'aide comporte un volet de renforcement des capacit�s, de fa�on qu'un pays puisse se doter de l'ensemble des comp�tences n�cessaires pour l'organisation et la surveillance de ses processus �lectoraux.
-Soutien pour la mise en place et le contr�le d'autres institutions d�mocratiques (par exemple les cours de justice, les organes l�gislatifs et l'ex�cutif).

c) Renforcement des institutions publiques 128. Les institutions publiques sont l'instrument par lequel le gouvernement met en oeuvre sa politique. La partialit� et la corruption des institutions charg�es de g�rer les ressources publiques et les services sociaux portent directement atteinte � la cr�dibilit� de l'Etat, ce qui risque d'encourager les groupes marginalis�s � recourir � la force et � la violence pour provoquer le changement.

129. Un Etat qui semble � premi�re vue disposer de moyens consid�rables peut en r�alit� �tre mal �quip� pour remplir ses fonctions essentielles. Certaines institutions publiques peuvent m�me ne pas �tre repr�sentatives ni responsables, ou m�me �tre per�ues comme �tant des instruments enti�rement aux mains de certaines �lites. C'est pourquoi aider � renforcer la capacit� des institutions � remplir leurs fonctions essentielles avec efficacit� et impartialit� peut �tre un �l�ment important de l'action en faveur de la paix.

130. Les donneurs peuvent apporter une aide dans les domaines suivants :

-Soutien � l'ex�cutif pour l'aider � am�liorer l'efficience des services publics et favoriser la transparence, une gestion rationnelle et l'�radication de la corruption. L'aide doit s'adresser aux institutions v�ritablement engag�es dans la r�forme.
-Soutien � la fonction publique afin d'am�liorer l'impartialit� et l'accessibilit� des institutions et d'aider � �liminer les discriminations et le favoritisme.
-Renforcement du contr�le des institutions civiles sur les affaires politiques et �conomiques et sur les forces arm�es, (y compris la ma�trise des budgets et d�penses militaires).

d) Renforcement des syst�mes de s�curit� et de justice

131. Pour �tre efficaces, les syst�mes de justice et de s�curit� doivent reconna�tre et prot�ger les droits de l'individu et �tre accessibles � tous. Ils doivent �tre impartiaux et ind�pendants du pouvoir politique. Des syst�mes inefficaces risquent d'encourager les citoyens � faire la loi eux-m�mes. Comme les �l�ments des syst�mes de justice et de s�curit� peuvent avoir un r�le important � jouer dans la pr�vention des conflits, l'aide internationale dans ces secteurs peut aussi �tre un �l�ment tr�s d�terminant des strat�gies du d�veloppement.

132. Pour que l'aide porte ses fruits dans ce genre de domaine, le gouvernement b�n�ficiaire doit �tre dispos� � reconna�tre que des syst�mes judiciaire efficaces sont n�cessaires et utiles pour la bonne gestion des affaires publiques en g�n�ral, la stabilit� et l'harmonie sociale et la bonne gestion de l'�conomie. Un dialogue avec les gouvernements partenaires peut �tre n�cessaire pour les convaincre des avantages des normes de droit et justice sanctionn�s internationalement. Les syst�mes judiciaires et de s�curit� sont la responsabilit� de l'Etat et le fondement de la souverainet� du pays. L'action � entreprendre ne doit pas porter atteinte au monopole de l'Etat en mati�re d'exercice de la force et de l'autorit�, mais au contraire le renforcer dans le cadre fix� par la loi.

133. Pour maximiser l'efficacit� de leurs interventions, les donneurs doivent avoir une connaissance approfondie des comp�tences, de l'histoire et de la culture aussi bien de leur organisme d'aide que du pays en g�n�ral, afin de pouvoir optimiser le ciblage de l'aide. Il importe aussi qu'ils fassent appel aux connaissances et aux comp�tences des responsables dans toute une gamme de secteurs, notamment les affaires �trang�res, la d�fense et la coop�ration pour le d�veloppement.

i) Syst�mes judiciaires

134. Un syst�me juridique stable et fiable est indispensable � la d�mocratisation, � la bonne gestion des affaires publiques et au respect des droits de l'homme. L'absence d'un syst�me judiciaire impartial peut d�clencher des frustrations propres � poser de s�rieux obstacles � la consolidation de la paix et � la pr�vention des conflits. Un syst�me judiciaire per�u comme impr�visible arbitraire ou inaccessible peut susciter des r�sistances au sein de la soci�t� et des confrontations avec l'Etat qui aboutissent � la r�pression. C'est pourquoi tous les efforts visant � renforcer les moyens de consolidation de la paix et de pr�vention des conflits avec l'aide de la coop�ration pour le d�veloppement sont dans une certaine mesure conditionn�s par l'environnement juridique dans lequel ils sont entrepris. Le maintien de la loi et de l'ordre doit s'accompagner d'un engagement des pouvoirs publics � r�pondre aux besoins fondamentaux des citoyens et � prot�ger leurs droits fondamentaux.

135. Les donneurs doivent prendre l'initiative d'aider � mettre au point et � maintenir des m�canismes qui assurent le respect des droits fondamentaux, garantissent aux communaut�s un acc�s �quitable aux services juridiques et judiciaires et contribuent � faciliter le r�glement pacifique des conflits. Les donneurs peuvent aider � d�samorcer les tensions en assurant un soutien visant � garantir l'acc�s de tous les individus et groupes d'une soci�t� aux moyens d'arbitrage juridiques, aux processus de d�cisions informels et � toutes les possibilit�s de compromis.

136. Si de nombreuses soci�t�s traditionnelles conservent des codes de conduite sociale complexes et efficaces, ceux-ci ne permettent pas toujours de satisfaire aux exigences d'une soci�t� ouverte. Il ne faut toutefois jamais n�gliger les avantages et l'efficacit� des syst�mes traditionnels. Les donneurs doivent se montrer ouverts aux initiatives locales visant � renforcer des structures traditionnelles telles que tribunaux de village et chefferies traditionnelles.

Encadr� 9. Soutien au syst�me de justice criminelle au Cambodge Au Cambodge, une succession de gouvernements r�pressifs a abouti � la destruction quasi totale du syst�me juridique formel. En outre, la dislocation g�n�ralis�e des collectivit�s s'est traduite par la d�sint�gration de nombreux m�canismes traditionnels d'arbitrage. Le pays s'est donc trouv� d�pourvu de moyens efficaces de r�glement des litiges et de protection des droits de l'homme. L'absence de loi et d'ordre constitue un obstacle consid�rable pour la r�forme d�mocratique et le d�veloppement �conomique g�n�ral. C'est ainsi que l'incapacit� des syst�mes existants � g�rer efficacement les proc�dures d'enqu�te, de jugement et d'emprisonnement a abouti � l'incarc�ration et la d�tention de petits d�linquants aux c�t�s de criminels endurcis, parfois pendant des mois avant que leurs dossiers puissent �tre trait�s. Ils sont litt�ralement "�gar�s" dans le syst�me.

La disparition de toute m�moire institutionnelle relative aux syst�mes judiciaires et aux proc�dures juridiques fondamentales a conduit un donneur � entreprendre en 1994 et 1995 une s�rie de missions d'�tude ayant pour principaux objectifs de recueillir des informations sur l'�tat de ce secteur et de d�terminer les domaines o� une aide pourrait �tre apport�e. Des �quipes de sp�cialistes ont eu des entretiens d�taill�s avec des repr�sentants des minist�res cambodgiens int�ress�s, de hauts responsables des institutions judiciaires, p�nitentiaires et de police, les autres donneurs et ONG pr�sents dans ce secteur.

Le projet propose l'introduction de r�formes dans les institutions p�nitentiaires, judiciaires et de police de la capitale, Phnom Penh, et de quatre capitales provinciales. Cela permettra de tester et d'affiner les proc�dures et les pratiques et d'avoir ainsi des mod�les pour la r�forme institutionnelle dans tout le pays. Lors de l'�tude du projet, il est apparu qu'il serait important de prendre un certain nombre d'initiatives compl�mentaires, notamment :

-une �tude des m�canismes communautaires de justice qui pourraient compl�ter les services assur�s par le syst�me formel; et -la mise au point de sanctions non p�nales appropri�es pour �viter le risque d'une augmentation excessive de la population carc�rale qui pourrait d�couler d'une administration plus ferme de la justice criminelle. Cet examen approfondi du syst�me existant a eu pour cons�quence impr�vue de susciter diverses r�formes d'initiative locale, surtout dans le secteur carc�ral. Ce sont essentiellement les �changes d'informations qui ont eu lieu entre les fonctionnaires cambodgiens et les �quipes venues en mission pour pr�parer le projet qui ont permis ce r�sultat.

137. Les mesures de soutien doivent se concentrer sur :

-les institutions juridiques et judiciaires officielles --tribunaux, m�diateurs, commissions de r�forme des lois, forces de police civiles et services p�nitentiaires ;
-les structures et groupes communautaires traditionnels charg�s de faire appliquer la loi et de r�gler les litiges ;
-les autres organismes op�rant dans des domaines qui comportent des risques de conflit au sein de la communaut�, comme par exemple la gestion des ressources ;
-l'am�lioration de l'acc�s aux syst�mes judiciaires pour les individus et les groupes, et en particulier ceux qui sont marginalis�s.

138. Etant donn� le caract�re complexe et d�licat de beaucoup d'aspects du d�veloppement dans le secteur juridique et judiciaire, les interventions doivent �tre con�ues de mani�re souple. Les organismes d'aide doivent s'efforcer de mettre sur pied des projets novateurs permettant d'aborder cette t�che selon diverses modalit�s, notamment :

-des projets visant � cr�er des liens entre les institutions formelles et informelles, jouant un r�le dans les domaines juridique et judiciaire, afin de favoriser une meilleure adh�sion de la communaut� aux initiatives en la mati�re (compl�tant ainsi l'approche plus traditionnelle qui consiste � renforcer exclusivement les institutions formelles) ;
-une aide � la surveillance des violations des droits de l'homme ;
-une aide � une formation professionnelle pour les juristes et les responsables politiques.

ii) R�forme du secteur de la s�curit�

139. Les conditions d'un conflit socio-politique peuvent souvent contribuer � accro�tre le pouvoir et l'ind�pendance des formes arm�es et de la police par rapport aux autorit�s civiles et � la population. Il peut �tre important pour la paix de r�former les forces de s�curit� de fa�on � les rendre plus comptables de leurs actes, � rendre leur conduite plus professionnelle et � renforcer le contr�le exerc� par le pouvoir civil. En associant les efforts dans ce domaine � des activit�s destin�es � renforcer les syst�mes juridiques et la soci�t� civile dans son ensemble, on peut favoriser l'instauration d'un d�bat solidement �tay� et une plus large participation � ces processus.

140. Le soutien international peut s'exercer dans les domaines suivants :

a) formation des dirigeants civils aux questions de s�curit�, notamment pour le suivi du comportement, des performances et de l'efficacit�/ co�t des forces de s�curit� ;
b) cr�ation d'un m�diateur ind�pendant, de commissions civiles et autres moyens de supervision civile des forces de s�curit� ;
c) formation de la police et des forces arm�es se concentrant sur les fonctions qui leur sont propres dans une soci�t� d�mocratique et leur aptitude � faire respecter les r�gles de conduite et de d�ontologie ;
d) soutien � la r�forme des syst�mes d'enseignement militaire.

141. La possibilit� pour les donneurs de soutenir ces activit�s avec des fonds de coop�ration pour le d�veloppement d�pendra des r�gles et proc�dures des Membres. Cependant, des r�sultats positifs peuvent d�couler d'une coop�ration �troite entre la coop�ration pour le d�veloppement et d'autres formes d'assistance internationale. Il ne faut jamais oublier que la r�ussite des efforts de r�forme du secteur de la s�curit� d�pend en grande partie de l'existence d'un syst�me judiciaire capable d'instruire et de punir les abus et les fautes. Autrement dit, les syst�mes de s�curit� et de justice sont intimement li�s.

iii) Formation en mati�re de droits de l'homme

142. Le r�le des militaires �volue rapidement dans de nombreux pays. Les forces de d�fense et de s�curit� sont de plus en plus utilis�es � des op�rations de police int�rieure, aux secours en cas de catastrophe et � la pr�vention. Si certaines forces arm�es ont peut-�tre �t� form�es aux principes fondamentaux du droit humanitaire, peu ont re�u une formation appropri�e sur les droits de l'homme en g�n�ral. Or, cette formation est indispensable si l'on veut que ces groupes aient un comportement convenable dans les conflits int�rieurs. En tant que repr�sentants de la communaut� internationale, les forces de maintien de la paix doivent �tre pr�par�es et soumises aux crit�res les plus stricts � cet �gard.

143. La formation en mati�re de droits de l'homme, qui doit �videmment �tre adapt�e � la culture du pays peut contribuer � assurer de bonnes relations avec les populations civiles. Elle doit �tre adapt�e � la situation particuli�re du pays mais doit aussi reposer sur les principes reconnus au niveau international qu'�noncent les conventions internationales sur les droits de l'homme. Comme par ailleurs, chacun le sait, ce sont souvent les femmes qui supportent l'essentiel des cons�quences des conflits, aussi bien sur le plan familial que sur le plan social, il convient de faire une place particuli�re dans la formation en mati�re de droits de l'homme aux probl�mes et aux difficult�s qui leur sont propres.

144. En plus de la formation, un soutien logistique peut �tre n�cessaire pour fournir le mat�riel qui permettra � l'organisme b�n�ficiaire d'exercer ses fonctions. Cette activit� peut cependant pr�senter des aspects d�licats. Il faut examiner avec soin les risques d'un mauvais usage de l'aide. Ainsi, l'�quipement destin� � la police, qui est tout � fait utile s'il est employ� � bon escient, risque plus d'�tre employ� abusivement que les �quipements destin�s � la plupart des autres secteurs.

145. Respecter et promouvoir les droits de l'homme doit faire partie des principes fondamentaux des syst�mes de justice et de r�glement des litiges. Les donneurs peuvent contribuer au renforcement des institutions et � la formation du personnel appel� � jouer un r�le dans la protection des droits de l'homme et la gestion des conflits. Les candidats tout d�sign�s sont les militaires, les policiers, les magistrats, les professions juridiques et parajuridiques et le personnel p�nitentiaire. D'autres groupes pourraient tirer avantage de ce genre de formation : les dirigeants des collectivit�s et les �ducateurs.

C. Renforcement de la soci�t� civile pour la construction de la paix et de la r�conciliation 146. Les institutions de la soci�t� civile jouent un r�le capital de repr�sentation des diff�rents groupes d'int�r�ts de la soci�t�, mais lorsqu'elles sont confront�es � une r�sistance ou � des processus d'accommodement inad�quats, il peut en d�couler une aggravation des tensions, de l'oppression et de la violence. Il faut donc que le soutien � la soci�t� civile ait pour objectif d'aider � concilier les int�r�ts des diff�rents groupes � plus long terme. La "diplomatie du citoyen", � divers niveaux, peut apporter des capacit�s essentielles pour cette r�conciliation.

147. Dans les r�gions de violence latente ou d�clar�e, les acteurs de la soci�t� civile peuvent �tre emp�ch�s par des intimidations et des attaques de jouer un r�le dans la consolidation de la paix. Les r�seaux d'information et de communication peuvent �tre particuli�rement vuln�rables. Les divisions entre les groupes peuvent aussi �tre aggrav�es et des efforts sp�ciaux sont souvent n�cessaires pour assurer la protection des droits des individus appartenant � des minorit�s. Cependant, les m�mes conditions peuvent aussi susciter l'�mergence d'institutions et d'acteurs nouveaux, tels que r�seaux de d�fense des droits de l'homme et groupes de militants pacifistes. Dans certains cas, il peut aussi y avoir r�surgence de formes d'autorit� et de techniques traditionnelles de gestion et de r�glement des conflits.

148. Tout en recherchant les sources de conciliation qui peuvent exister dans la soci�t�, les organismes d'aide doivent �tre conscients du risque que leur action en faveur de structures sociales et d'autorit�s particuli�res soit mal comprise ou mal interpr�t�e. Certains groupes traditionnels peuvent �tre �litistes et oppressifs, et certaines ONG ou autres groupes locaux peuvent �tre les instruments des factions en conflit. Il faut donc soumettre ces autres agents de conciliation au m�me examen critique que les institutions "partenaires" officielles, et tirer parti de leurs aspects les plus positifs.

149. Les diff�rents domaines o� les donneurs peuvent apporter un soutien appartiennent � trois grandes cat�gories :

a) soutien � certaines institutions traditionnelles ;
b) encouragement d'un dialogue inter-culturel et de la coop�ration dans les soci�t�s divis�es et
c) action en faveur de la libert� et de l'accessibilit� de l'information pour tous les membres de la soci�t�.

a) Soutien � certaines institutions traditionnelles

150. Les autorit�s et m�canismes traditionnels sont souvent des syst�mes et des institutions qui se sont fa�onn�s au fil du temps, pour aider � g�rer les tensions entre groupes et la r�partition des ressources naturelles. Il arrive que les m�canismes informels de r�glement des litiges et les autorit�s traditionnelles exercent une influence consid�rable sur les dirigeants politiques nationaux, m�me si cette influence n'est pas toujours visible.

151. Lorsque l'Etat n'a pas d'autorit�, les structures traditionnelles ont souvent une grande influence sur les collectivit�s et peuvent constituer des m�canismes indispensables � la construction d'une paix v�ritable. Il existe d'ailleurs de nombreux cas o� les m�canismes traditionnels et informels de consolidation de la paix ont repris apr�s l'effondrement des autorit�s de l'Etat, leur r�le au profit des collectivit�s locales.

152. Les efforts d�ploy�s par les donneurs pour soutenir les initiatives traditionnelles de consolidation de la paix doivent chercher � s'appuyer sur des acteurs comme les anciens de la communaut�, les chefs religieux et les conseils tribaux, qui contribuent de fa�on importante et constructive au r�tablissement de la paix et � la r�conciliation.

153. Soutenir l'instauration d'un espace politique dans lequel les groupes autochtones peuvent concevoir leurs propres solutions aux probl�mes est particuli�rement difficile. Cela exige un engagement de longue dur�e vis-�-vis des structures et processus traditionnels de gestion des conflits ; une parfaite connaissance des facteurs culturels propres � contribuer � la pr�vention et au r�glement des conflits ; enfin, la volont� d'instaurer avec les partenaires locaux des relations de confiance bas�es sur une pr�sence ancienne et importante dans le pays.

b) Encouragement du dialogue et de la coop�ration dans les soci�t�s divis�es

i) Relations intercommunautaires

154. Dans les soci�t�s divis�es, les efforts en vue de favoriser les relations intercommunautaires sous forme de commerce, d'�changes d'information et de dialogue peuvent jouer un r�le important pour d�samorcer les tensions, abattre des barri�res sociales anciennes et favoriser la tol�rance et la compr�hension. La constitution de r�seaux de confiance ne contribue pas seulement � la construction de la soci�t� mais aussi � celle du capital social qui peut aider � emp�cher de nouvelles flamb�es de la violence.

155. Le soutien des donneurs peut s'exercer dans les domaines suivants : programmes d'aide � la compr�hension interculturelle, de promotion du multilinguisme et de l'expression culturelle des minorit�s et des populations autochtones et d'identification de l'h�ritage, des valeurs et des objectifs communs aux diff�rents groupes sociaux. Cette aide doit commencer par favoriser des r�seaux et organismes sociaux ou institutionnels capables d'�tre des �l�ments stabilisateurs dans la soci�t�.

156. Dans les soci�t�s menac�es de conflit ou d�j� d�chir�es par la guerre, les donneurs peuvent entreprendre, dans un but sp�cifique de r�conciliation, des actions tendant � construire des liens entre groupes rivaux. Il peut s'agir :

-d'inclure dans le travail normal de secours et de reconstruction des mesures visant � faciliter la r�conciliation des groupes en conflit au sein d'une soci�t�, par exemple des programmes d'insertion dans la vie sociale et �conomique normale des �l�ments potentiellement d�stabilisants (anciens combattants, jeunes, etc.) ;
-d'aider � restaurer la confiance au sein des collectivit�s en apportant un soutien � des "noyaux de stabilisation" au sein des communaut�s (comit�s multi-ethniques, organisations f�minines, etc.) ou en distribuant des ressources par leur interm�diaire.

157. Parmi les groupes cibles importants � cet �gard on peut citer les coop�ratives d'exploitants agricoles, les organismes de jeunesse et autres associations sp�cifiques � caract�re multiculturel.

158. Les femmes peuvent remplir un r�le particulier de m�diation aussi bien dans le dialogue pr�ventif que dans les n�gociations de paix et les strat�gies de reconstruction et apporter leurs perceptions et exp�riences particuli�res aux efforts de construction de la paix et de r�conciliation. Dans bien des cas, les organisations f�minines peuvent aider � emp�cher des conflits ou � mettre fin aux hostilit�s en menant des n�gociations informelles, en constituant des groupes de pression, en organisant campagnes ou manifestations. Les femmes ont souvent moins d'inhibitions et plus de poids que les hommes appel�s au combat, lorsqu'il s'agit de protester contre les conflits arm�s et de militer pour la paix.

159. Comme l'affirme la plate-forme d'action de la Conf�rence de P�kin (1995), les femmes doivent se voir garantir l'�galit� des chances pour participer aux instances de discussion et aux activit�s en faveur de la paix. Les agences de coop�ration doivent s'attacher � �laborer des strat�gies efficientes pour permettre aux femmes de jouer un r�le plus actif dans la pr�paration d'un avenir pacifique et viable pour leur pays, en leur donnant les moyens de gagner en assurance, en autorit�, en comp�tences de n�gociation, etc.

Encadr� 10. Le r�le des femmes dans le processus de transition en Sierra Leone En 1994, les associations f�minines en Sierra Leone ont commenc� leur concertation en vue de d�finir leur contribution � la conf�rence de P�kin. C'est au cours de ce processus qu'elles se sont mises d'accord sur la n�cessit� de s'organiser pour apporter leur soutien au processus de paix et prendre une part active dans la transition de leur pays vers la d�mocratie.

Les groupes de femmes � Free Town se sont ainsi mobilis�s en faveur de la paix et ont vu dans le processus d'�lections d�mocratiques l'un des moyens d'y parvenir. Elles ont oeuvr� pour que les rebelles acceptent de participer aux n�gociations de paix et des groupes de femmes se sont aussi organis�s pour parcourir la campagne et pour les exhorter � d�poser les armes. L'une de ces exp�ditions s'est m�me sold�e par un massacre, le projet ayant �t� d�couvert par les militaires.

Malgr� ces difficult�s, les associations f�minines ont pers�v�r� dans leurs efforts, parvenant � mobiliser un large soutien en faveur d'�lections d�mocratiques parmi les organisations syndicales, les groupements d'enseignants et autres associations repr�sentatives de la soci�t� civile et traditionnelle. De nombreuses tentatives d'intimidation (� travers des attaques violentes et autres violations des droits de l'homme) tant de la part des militaires que des rebelles, n'ont pu envoyer cette dynamique de paix et le processus d�mocratique a pu �tre men� � son terme et le gouvernement militaire remplac� par un gouvernement civil.

Paradoxalement, tout en oeuvrant pour la paix, les organisations f�minines n'ont pas pu � s'assurer une repr�sentation sur les listes �lectorales. En d�pit de leur engagement actif dans le processus de paix, la plupart des femmes n'�taient pas pr�tes � participer aux �lections en tant que candidates � des postes politiques. Ainsi, deux femmes seulement ont �t� �lues au parlement et deux autres ont acc�d� � des postes minist�riels, l'une charg�e de la condition f�minine et de l'enfant, et l'autre du tourisme et de la culture.

160. Les donneurs peuvent aussi fournir une aide aux groupes et r�seaux de militants locaux et nationaux ou aux organisations religieuses qui oeuvrent en faveur de la paix entre les groupes en contribuant � la mise en place d'instances de discussion et de concertation afin d'encourager le dialogue entre les membres des communaut�s en conflit.

161. Le raisonnement sur lequel se fondent ces approches est que les relations constructives instaur�es au plan personnel ou professionnel peuvent avoir un effet multiplicateur au niveau de la soci�t� dans son ensemble. Les potentiels r�gionaux de r�seaux culturels et l'impact socioculturel et psychologique des activit�s culturelles repr�sentent aussi des �l�ments de poids.

ii) M�diation et n�gociation

162. En renfor�ant les comp�tences en mati�re d'arbitrage, de m�diation, de n�gociation et de r�conciliation, les organismes de d�veloppement peuvent aider � augmenter les chances de faire reconna�tre par les acteurs eux-m�mes l'opportunit� et la l�gitimit� des strat�gies de pr�vention, de gestion et de r�glement des conflits.

Encadr� 11. D�veloppement des capacit�s de consolidation de la paix et de r�conciliation en Afrique du Sud

A l'�poque de l'apartheid, lorsque la coop�ration inter-�tat �tait impossible les organismes de d�veloppement ont financ� en Afrique du Sud, toute une gamme de projets mis sur pied par les ONG dans le but sp�cifique d'aider les sud-africains en exil et les militants anti-apartheid � se doter des capacit�s de n�gocier une transition pacifique et de participer comme citoyens � part enti�re � la vie d'un pays d�livr� de l'apartheid.

Ces projets comprenaient des s�minaires de formation de dirigeants syndicaux, parmi lesquels des s�minaires sp�cifiquement destin�s aux femmes ; des formations dans les domaines de la gestion et de l'organisation ; la mise en place d'un vaste r�seau de commissions jouissant d'une autorit� reconnue pour surveiller l'activit� politique et aider � ma�triser les risques de violence ; enfin, des activit�s visant � renforcer l'efficacit� et la capacit� institutionnelle des mouvements civiques.

Depuis la fin de l'apartheid, les programmes de formation et d'�changes � financement international s'adressant aux fonctionnaires et dirigeants de communaut�s continuent de les aider � d�velopper leurs capacit�s de d�fendre sur la sc�ne politique les int�r�ts qu'ils repr�sentent, et � mieux conna�tre les structures et le fonctionnement des institutions. Ce genre d'activit� n'est pas limit� � l'Afrique du Sud : on en trouve des exemples en Asie du Sud, en Am�rique centrale et ailleurs --souvent dans le cadre de programmes ax�s sur la bonne gestion des affaires publiques et le renforcement institutionnel.

163. Les programmes de formation doivent renforcer les comp�tences n�cessaires dans le domaine de l'arbitrage, de la m�diation, de la n�gociation et de la r�conciliation et cultiver la capacit� de participer � la restructuration de la soci�t�, de l'�conomie et des institutions politiques. Ils doivent �tre ax�s sur des groupes ou individus, en particulier des femmes en mesure de jouer des r�les d�terminants dans l'�volution vers un avenir plus juste et plus �quitable.

164. Les projets de d�veloppement qui portent sur des questions aussi concr�tes que la gestion des ressources en terres ou en eau, la sant� et les transports, peuvent aussi offrir de vastes perspectives de coop�ration intercommunautaire. En r�unissant des sp�cialistes de groupes oppos�s pour ouvrir un dialogue sur leurs int�r�ts communs, ils peuvent aboutir � cr�er des conditions qui permettent aux parties de trouver des solutions communes � des probl�mes et � des difficult�s socio-�conomiques. Au-del� de leur effet concret sur le plan du d�veloppement, ces projets ont un effet plus g�n�ral d'instauration d'un climat de confiance dans la soci�t�, en permettant aux diff�rents groupes de mieux identifier leurs objectifs communs et en favorisant un d�veloppement v�ritablement participatif.

165. Les organismes de d�veloppement peuvent aussi aider les initiatives de d�veloppement express�ment con�ues pour faciliter la discussion et le dialogue entre les membres des communaut�s en conflit. Les projets de ce type encouragent des contacts constructifs entre l'individu et l'organisation communautaire dans les r�gions particuli�rement expos�es aux conflits, afin d'abattre des barri�res sociales anciennes et de cr�er un contexte favorable � la consolidation de la paix. Ces projets peuvent souvent concerner des groupes vuln�rables comme les enfants et les m�res des deux c�t�s d'un conflit.

iii) Education et formation inter-culturelles

166. Dans le cadre du soutien � l'�ducation et � des m�canismes alternatifs de r�solution des diff�rends, les organismes de d�veloppement ont un r�le crucial mais d�licat � jouer pour favoriser des solutions non violentes aux conflits intergroupes et rompre le cercle vicieux des antagonismes d'ordre ethnique, culturel et sectaire. Ils peuvent notamment aider � l'�tablissement de programmes et de manuels impartiaux et contribuer ainsi � entretenir et � diffuser des valeurs communes telles que la tol�rance et le pluralisme, ou fournir une aide sp�cifique pour soutenir des actions "d'�ducation � la paix" destin�es � mieux faire comprendre les origines et l'histoire des relations au sein de la soci�t� et � favoriser la coop�ration et la r�conciliation entre groupes. Les moyens consid�rables que la coop�ration pour le d�veloppement affecte aujourd'hui � l'�ducation dans de nombreux pays, doivent mettre les donneurs en bonne position pour jouer un r�le � cet �gard.

167. L'impact qu'une scolarit� perturb�e peut avoir sur les enfants se trouvant t�moins de brutalit�s et de la d�sagr�gation des structures sociales et morales peut contribuer � accro�tre l'instabilit� sociale. Cela peut nuire � l'apprentissage des m�canismes permettant de g�rer les conflits sans avoir recours � la violence et de savoir comment entretenir des relations pacifiques au sein des communaut�s religieuses et ethniques, et donc renforcer les relations conflictuelles intergroupes h�rit�es du pass�.

c) Action en faveur de la libert� et de l'accessibilit� de l'information

168. L'importance de la libert� de la presse pour encourager les tendances d�mocratiques et le respect des droits de l'homme et des droits civiques est incontestable. Inversement, la diffusion d'informations d�lib�r�ment d�form�es ou tendancieuses peut alimenter les tensions dans des contextes politiquement et socialement instables. Les m�dias et les sources d'information ont des moyens exceptionnels d'influencer les populations dans les situations o� il y a risque de conflit, et ils ont un r�le crucial � jouer pour encourager le dialogue dans les soci�t�s divis�es. Les m�dias sous contr�le ont souvent �t� utilis�s par les bellig�rants pour aiguiser la haine, diffuser la propagande et d�former les �v�nements afin de renforcer leur position. En p�riode de crise, la simplicit� d'acc�s � une information libre, honn�te et compl�te peut faire beaucoup pour apaiser les tensions.

169. Les tensions et les violences localis�es sont souvent dues autant � une mauvaise information et � des malentendus qu'� des divergences r�elles. Les circuits locaux de communication et d'acc�s � l'information sur les �v�nements qui se passent ailleurs dans la soci�t� peuvent aider � emp�cher ces malentendus � d�g�n�rer en conflits violents. Par la diffusion de comptes rendus de la situation � la fois honn�tes (exposant les divers points de vue), exacts (ne se contentant pas de rapporter les �v�nements mais aussi le contexte) et complets (expliquant les processus et objectifs qui sont � la base des positions prises), les m�dias peuvent contribuer � d�samorcer les conflits potentiels.

170. Dans leur r�le d'�ducation sociale, les m�dias peuvent, en assurant une couverture non partisane des faits, s'attaquer � de nombreux probl�mes sociaux qui pr�occupent leur public et aider � att�nuer les tensions et � instaurer un climat de confiance entre les divers secteurs de la soci�t�. Souvent, les informations importantes ont trait � la sant�, � l'alphab�tisme, � l'agriculture et � l'environnement. Dans les zones de conflit, elles peuvent aussi �tre �largies � des questions comme le danger des mines antipersonnel, les traumatismes de la guerre, les conventions de Gen�ve sur le traitement des prisonniers, des bless�s et des civils, l'�volution des n�gociations de paix et le progr�s des processus de d�mobilisation et la recherche des personnes disparues. Les m�dias ind�pendants peuvent se faire les porte-parole des d�favoris�s et servir d'instruments de surveillance et de moyens de responsabiliser les dirigeants vis-�-vis du public. Dans les processus de consolidation de la paix, ils peuvent aussi faire en sorte que chacun des adversaires entende les arguments de l'autre, ouvrant ainsi des voies de communication l� o� elles n'auraient gu�re d'autres chances d'exister.

171. Dans leurs efforts pour renforcer la capacit� des m�dias en tant que moyens d'informer les acteurs sociaux et politiques, les bailleurs de fonds doivent tenir compte de l'identit� du public cibl� et de ses traditions culturelles afin de d�cider du choix des m�dias et de la programmation des �missions en cons�quence. Tout cela est particuli�rement important dans les zones de conflit o� il y a peu de chances qu'il existe sur le terrain des activit�s de soutien permettant de faciliter la compr�hension et de donner plus de force aux messages. Faire participer la collectivit� � la conception, � la planification et � l'ex�cution des activit�s permet de l'impliquer pleinement.

Encadr� 12. Le r�le d'�ducateur social des m�dias en Somalie Ecouter la radio fait partie du mode de vie en Somalie ; c'est donc un outil important pour essayer d'influer sur les attitudes et le comportement dans ce conflit notoirement complexe. Le Comit� international de la Croix-Rouge (CICR) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) ont essay� de diffuser des messages humanitaires par le BBC Somali Language Service ; l'UNICEF a en outre financ� la Radio Voice of Peace qui �met � partir d'Addis Ab�ba.

Lorsque le CICR et la section somali du BBC World Service ont commenc� � diffuser un feuilleton de fiction insistant sur la n�cessit� de pr�server les valeurs humanitaires en temps de guerre et explorant divers moyens de r�soudre le conflit, les r�actions ont �t� diverses. Certains auditeurs l'ont bien accueilli et ont appr�ci� le message de paix qu'apportait le feuilleton de la BBC. Mais une enqu�te du CICR a montr� que d'autres y voyaient une intrigue mont�e par un des clans pour critiquer ses rivaux. C'est le choix des acteurs qui a pos� un probl�me, car leurs accents trahissaient leur origine et le nom du village imaginaire, qui s'est r�v�l� �tre un village r�el, a encore ajout� � l'impression que le feuilleton n'�tait qu'une attaque d�guis�e d'un clan par un autre. Pour que les messages de paix aient une chance quelconque d'avoir du poids, il faudrait qu'ils soient per�us comme neutres et non partisans.

Cette histoire montre les pi�ges dans lesquels peut tomber ce type d'�mission lorsqu'il s'adresse � une soci�t� divis�e : les auditeurs somalis y sont tr�s sensibles. Ils font tout � faire couramment la comparaison entre les �missions de la BBC en somali, en anglais et en swahili et lorsqu'il y a des divergences, ils soup�onnent une conspiration de la BBC. C'est symptomatique d'un ph�nom�ne auquel tous les mass m�dia sont confront�s dans les zones de conflit : que ce soit du fait de leur engagement personnel ou de leurs souffrances, leurs auditeurs ont souvent perdu toute objectivit�.

172. L'aide des donneurs peut porter sur les domaines suivants :

-le soutien � l'�tablissement ou la modification de lois concernant l'ind�pendance et la libert� de la presse (par exemple, des lois anti-diffamation) ;
-la formation des journalistes locaux quant � la mani�re de rendre compte des conflits, de fa�on � aider � assurer une couverture pr�cise et de qualit� ;
-la cr�ation et le maintien de syst�mes de m�dias nationaux et locaux autonomes (voir ind�pendants, y compris des stations de radio communautaires ou rurales), et leur engagement � respecter des crit�res �thiques et d�ontologiques stricts, par un soutien technique et financier ;
-la couverture locale des �v�nements par les m�dias internationaux lorsque sans cela elle ne serait pas financi�rement viable ;
-les projets et programmes visant � aider les pouvoirs publics � comprendre et � favoriser le r�le des m�dias dans une soci�t� d�mocratique et � fournir � ces derniers une aide mat�rielle, financi�re et juridique pour poursuivre le m�me objectif.

173. Dans les pays o� l'acc�s aux informations est limit� ou restreint, ou leur contenu contr�l� par l'Etat ou par des groupes partisans, il peut �tre n�cessaire de trouver des circuits officieux d'information et de communication et d'en assurer le soutien. Dans de telles situations, les donneurs, en coop�ration avec les m�dias internationaux, peuvent contribuer � soutenir des m�dias locaux pers�cut�s.

174. Le soutien aux m�dias en tant que voies de communication entre des points de vue oppos�s doit �tre un processus continu : la formation des journalistes et producteurs locaux requiert un soutien suivi, surtout dans les conditions difficiles d'un conflit ; le soutien technique aux m�dias ind�pendants doit �tre li� � la formation dans les domaines �ditorial, technique et de la gestion, afin d'�lever la qualit� des programmes. Ce soutien ne doit pas concerner uniquement les journalistes, mais aussi les directeurs de l'information, les gestionnaires et, lorsque c'est possible, les autorit�s politiques qui peuvent avoir la ma�trise en dernier ressort des flux d'information. Les programmes de formation destin�s aux m�dias doivent veiller � une repr�sentation �quilibr�e des hommes et des femmes, et la composition des effectifs des m�dias devrait aussi refl�ter cet �quilibre.

175. Des efforts particuliers destin�s � accro�tre la repr�sentation des femmes dans la presse et les m�dias audio-visuels pourrait leur fournir des occasions de d�velopper leurs capacit�s dans ces domaines et par l� leur donner une visibilit� et une influence politique accrues. La pr�sence de femmes dans les m�dias d'information peut � la fois contribuer � leur donner des moyens d'expression et � assurer que les questions d'int�r�t particulier aux femmes sont plus souvent mises en avant.

D. Orientation � l'intention des donneurs

176. Les donneurs doivent s'efforcer de contribuer au d�veloppement, au sein de l'Etat et de la soci�t� civile, de structures et de modes de fonctionnement propres � favoriser et � conforter la d�mocratisation. Cela implique notamment de renforcer la capacit� de l'Etat de mettre en place des institutions politiques qui soient repr�sentatives, justes et � l'�coute du citoyen et d'en assurer la p�rennit�. Pour faciliter la transition vers un syst�me d�mocratique de gouvernement, les donneurs devront peut-�tre r�pondre � des demandes d'aide pour l'organisation, le d�roulement et la surveillance des consultations �lectorales. La d�mocratisation peut aussi n�cessiter de d�velopper dans la soci�t� civile l'aptitude � s'exprimer par des voies non violentes et � utiliser ou � mettre en place les m�canismes n�cessaires pour d�fendre ses int�r�ts sur la place publique.

177. Les organismes de d�veloppement disposent pour cela de comp�tences particuli�res et de r�seaux dans les pays en d�veloppement, mais c'est une t�che qui exige aussi des relations de travail efficaces avec d'autres acteurs --dirigeants politiques et militaires du pays, diplomates, institutions financi�res internationales (IFIs) et forces de maintien de la paix.

178. Pour encourager la participation aux initiatives de consolidation de la paix et de pr�vention des conflits, il faut d'abord d�terminer quels sont les �l�ments, aussi bien dans l'Etat que dans la soci�t�, qui peuvent y contribuer efficacement ou au contraire y faire obstacle. La coop�ration pour le d�veloppement doit chercher � renforcer les �l�ments constructifs tout en mod�rant les effets de ceux qui constituent un frein. Plus pr�cis�ment, elle doit �viter de centraliser ind�ment l'aide au renforcement des institutions de l'Etat, si cela risque de les rendre plus ind�pendantes des groupes et structures au niveau local et par cons�quent moins soucieuses d'�tablir un dialogue et une coop�ration.

179. Le renforcement des institutions publiques doit �tre adapt� au contexte politique, �conomique, social, culturel et historique du pays consid�r�. Il peut �videmment s'inspirer entre autres des exemples et des exp�riences des pays donneurs mais, en fin de compte, les institutions adopt�es dans un pays donn� peuvent �tre tr�s diff�rentes par la forme sinon par la fonction.

180. Plus pr�cis�ment, les Membres du CAD doivent continuer � soutenir des actions visant � :

-faire en sorte que les structures et organismes de l'Etat fonctionnent tous dans la transparence et l'ouverture, au profit de tous les membres de la soci�t� et notamment des minorit�s et des groupes marginalis�s et vuln�rables ;
-encourager une consultation et une participation active de la communaut� � la formulation, � la mise en oeuvre et � l'�valuation de la politique publique ;
-assurer l'acc�s � des services et �quipements efficaces et d'un co�t raisonnable et leur r�partition �quitable entre toutes les communaut�s ;
-veiller � ce que le gouvernement dialogue avec le public, les organisations et les groupes d'int�r�t sans exclusive, discrimination ni sectarisme ;
-faciliter l'initiation du public, notamment des femmes, au fonctionnement, aux politiques et aux projets du gouvernement ;
-veiller � ce que les personnels des administrations et des structures de l'Etat soient repr�sentatifs des communaut�s qu'ils servent ;
-faire participer les agents de l'Etat � tous les niveaux de planification et de prise de d�cisions ; et enfin
-veiller � ce que les agents de la fonction publique b�n�ficient de la formation ou du recyclage n�cessaires, pour avoir les comp�tences administratives, de communication et autres indispensables � la r�alisation des objectifs pr�c�dents.

181. Dans les cas extr�mes, o� l'Etat ou certaines de ses institutions opposeraient une r�sistance particuli�re � la r�alisation de ces �l�ments-cl�s de la pr�vention des conflits et de la consolidation de la paix, les donneurs pourraient se voir oblig�s d'envisager l'utilisation s�lective d'incitations et/ ou de d�sincitations pour l'octroi des cr�dits d'aide. De telles approches, malgr� leurs limitations, pourraient dans certains cas d�cider les b�n�ficiaires � renforcer ces volets indispensables de leurs programmes nationaux de d�veloppement.

182. Le soutien au r�glement des conflits doit avoir pour premier objectif de contribuer � la mise en place de capacit�s locales elles-m�mes durables. Les bailleurs de fonds ne peuvent jouer qu'un r�le d'accompagnement et doivent �tre aussi ouverts que possible aux besoins et aux priorit�s exprim�s par la soci�t� elle-m�me, afin que les solutions soient durables.

183. Les interventions des organismes de d�veloppement en faveur du dialogue et de la n�gociation ne doivent pas chercher � imposer des solutions venant de l'ext�rieur. Les intervenants doivent constamment se discipliner de fa�on � aider � cr�er l'espace dans lequel les parties au conflit pourront elles-m�mes rechercher des solutions et travailler ensemble � instaurer la paix et une bonne gestion des affaires publiques.

184. L'aide doit se poursuive � moyen et � long terme, faute de quoi les individus et les groupes r�unis pour g�rer une crise dans l'urgence risquent de "retourner � leurs affaires" avant que les causes fondamentales de la crise aient �t� v�ritablement trait�es.

185. Toutes les interventions visant � appuyer des m�canismes locaux de r�glement des conflits -- qu'il s'agisse d'autorit�s traditionnelles ou de groupes mod�r�s --doivent tenir le plus grand compte de la dynamique politique, sociale et �conomique qui sous-tend le conflit.

186. Les donneurs savent bien que les interventions visant � renforcer ou � soutenir les institutions de la soci�t� civile ne peuvent pas toujours � elles seules emp�cher ou contenir le conflit dans l'imm�diat. Il faut donc que, parall�lement � leur action de renforcement des �l�ments de la bonne gestion des affaires publiques qui peuvent �tre propices � la paix, les donneurs soutiennent de fa�on durable les efforts de consolidation de la paix et de r�conciliation qui se d�ploient au niveau des communaut�s.

V. Aide au rel�vement apr�s un conflit : les priorit�s op�rationnelles A. Vue d'ensemble

187. L'objectif de la reconstruction apr�s un conflit n'est pas de restaurer les conditions d'avant la crise mais de jeter les fondations de la paix et d'un d�veloppement durable. Lorsque l'autorit� civile s'est effondr�e, la premi�re priorit� est de restaurer la cr�dibilit� d'une administration l�gitime au niveau de l'Etat, consid�r�e par les citoyens comme �tant au service de tous les groupes et capable d'all�ger les tensions qui persistent in�vitablement apr�s le conflit.

188. Certains syst�mes et institutions ont pu par le pass� contribuer � des in�galit�s �conomiques et sociales, et � alimenter le conflit. Les situations post conflictuelles offrent donc souvent des possibilit�s inhabituelles de r�forme politique, �conomique et administrative. Les domaines o� une r�forme est souvent indispensable comprennent l'administration et le r�gime fonciers, le fonctionnement de l'appareil judiciaire et les syst�mes de s�curit� int�rieure, etc.

189. Quelle que soit la phase du conflit, les donneurs doivent d�ployer tous leurs efforts pour appuyer l'�mergence d'un consensus interne sur un ensemble d'orientations et de programmes appropri�s refl�tant le contexte �conomique, social et culturel du pays concern�. Les autorit�s nationales et locales ou des groupes y compris des repr�sentants les parties en conflit doivent participer � l'�laboration de ces programmes, jetant ainsi les bases d'un processus de d�veloppement men� par les acteurs nationaux.

190. D�s l'ouverture d'un dialogue politique sur des questions aussi essentielles que la bonne gestion des affaires publiques ou la participation, tous les groupes, y compris les groupes marginalis�s, doivent �tre encourag�es � s'exprimer. La libert� d'association et l'encouragement des partis politiques doivent �tre imp�rativement au programme. La participation du public au processus de reconstruction politique ne peut exister que si les droits civiques et les droits de l'homme des intervenants sont garantis.

191. Sur le plan op�rationnel, le soutien � la reconstruction au lendemain d'un conflit doit �tre ax� en priorit� sur le r�tablissement de la s�curit� int�rieure et de l'Etat de droit, la l�gitimation des institutions, l'�tablissement de conditions propices � une croissance �conomique �quilibr�e et l'am�lioration de la s�curit� alimentaire et des services sociaux. Il peut aussi �tre n�cessaire de r�former les forces de s�curit� et les syst�mes judiciaires, ou m�me d'aider � mettre sur pied des institutions nouvelles, lorsque les structures existantes sont per�ues comme ill�gitimes par la soci�t�.

192. D'autres priorit�s concernent plus sp�cifiquement les besoins particuliers des pays qui sortent d'un conflit violent, � savoir la r�int�gration des r�fugi�s et des personnes d�plac�es, la d�mobilisation des combattants, l'�limination des mines terrestres, souvent condition sine qua non de la normalisation de toutes les activit�s �conomiques. Ces autres priorit�s sont d�crites en d�tail plus loin.

B. R�tablir une capacit� de gestion �conomique

a) Questions principales et besoins prioritaires

193. Les pays en situation de crise ou se relevant d'un conflit violent ont un besoin urgent de mobiliser des ressources financi�res tant � l'int�rieur qu'� l'ext�rieur dans des circonstances exceptionnelles de p�nurie. Manquant cruellement d'exp�rience en mati�re de gestion macro-�conomique, les autorit�s nouvellement en place doivent aussi faire face simultan�ment aux imp�ratifs concurrents de la consolidation de la paix et du redressement �conomique. La n�cessit� de sauvegarder la paix civile, de remettre en �tat les infrastructures de base, de r�former les institutions publiques, de relancer l'�conomie et de cr�er des emplois, exerce une lourde ponction sur les ressources budg�taires. Dans le m�me temps, l'imp�ratif de jeter les bases d'une �conomie �quilibr�e et stable, et de r�tablir la confiance des investisseurs priv�s implique de ma�triser les tensions inflationnistes.

194. L'�laboration d'un cadre macro-�conomique sain --m�me rudimentaire --pour la reconstruction est donc une priorit�. L'objectif doit �tre d'�tablir une estimation r�aliste du co�t des activit�s de reconstruction et des efforts de paix et de s'assurer qu'il est compatible avec les ressources probablement disponibles ainsi qu'avec la capacit� d'absorption du pays. Cela contribuerait � r�duire le risque de disparit�s entre les accords politiques conclus au cours des n�gociations de paix et les ressources financi�res disponibles pour les mettre en oeuvre et, par l� m�me, � favoriser la stabilisation �conomique. Con�u comme un effort conjoint associant les autorit�s �tablies ou appel�es � exercer le pouvoir et les principales parties impliqu�es dans le processus de paix, ce cadre macro-�conomique servirait �galement � garantir la bonne utilisation de l'aide fournie par les organisations officielles et non gouvernementales.

195. Imm�diatement apr�s un conflit, la politique �conomique d'un gouvernement doit essentiellement viser � faire en sorte que les d�penses prioritaires indispensables � l'�tablissement de la paix et � la reconstruction (notamment les sommes vers�es aux soldats d�mobilis�s, la remise en �tat d'infrastructures essentielles d�truites par la guerre et le maintien de services sociaux essentiels) soient programm�es de fa�on compatible avec la n�cessit� de r�tablir un environnement macro-�conomique stable (notamment par l'application de politiques budg�taires et mon�taires appropri�es, la normalisation des relations financi�res avec les cr�anciers y compris les institutions financi�res internationales).

196. Il est �galement essentiel que ces d�penses publiques soient explicitement pr�vues dans un budget compatible avec : i) l'aide budg�taire et l'aide-projet ext�rieures disponibles, dans les limites de l'aptitude du pays � assurer le service de sa dette (en prenant en compte que le financement des donneurs se tarira avec le temps) et, ii) un financement int�rieur non inflationniste qui ne d�tourne pas les ressources n�cessaires � la satisfaction des besoins en capitaux du secteur priv� naissant.

b) Recommandations

197. La mobilisation et l'affectation de ressources financi�res pour la reconstruction peut �tre grandement facilit�e par la pr�paration dans les plus bref d�lais par le gouvernement et l'organisme "chef de file" d'un cadre macro-�conomique de reconstruction, en vue de l'organisation de l'assistance technique et du soutien financier en concertation avec les autres institutions et organismes int�ress�s: Ce document pourrait �tre similaire � la note d'orientation �tablie pour les pays � faible revenu qui b�n�ficient d'une aide financi�re du FMI. Il devra toutefois �tre moins d�taill� et s'inscrire dans un horizon temporel plus court. Lors de la pr�paration des programmes d'aide aux pays en crise, tous les donneurs et organismes concern�s devraient s'attacher � :

-engager des discussions avec les parties en pr�sence sur un cadre g�n�ral d'action �conomique destin� � servir de guide � la formulation des efforts de reconstruction le plus rapidement possible au cours des n�gociations de paix;
-engager de vastes programmes de formation et d'assistance technique afin de d�velopper les capacit�s n�cessaires � l'�laboration des politiques �conomiques et � la gestion des finances publiques ; et notamment � l'�tablissement d'un budget.

Encadr� 13. La gestion �conomique : besoins prioritaires en mati�re d'assistance technique Il se peut que les autorit�s mises en place de fra�che date, en particulier les instances issues d'un conflit violent, n'aient que peu ou pas d'exp�rience de l'action gouvernementale, d'o� la n�cessit� de les former dans un certain nombre de domaines sp�cialis�s de la gestion �conomique et des finances publiques. Il importe de restaurer le plus t�t possible la capacit� d'appliquer une gestion �conomique de base. Lorsque le troc et l'�conomie informelle ont remplac� ou supplant� les transactions mon�taires et celles ayant lieu sur les march�s officiels, les services de base dans le domaine des changes, du commerce et de la banque peuvent �galement devoir �tre remis sur pied. Les autorit�s nationales ont besoin d'assistance dans les domaines suivants :

Gestion des finances publiques Le contenu et les priorit�s de cette assistance peuvent inclure le r�tablissement des capacit�s de pr�paration et d'ex�cution du budget, de collecte des informations n�cessaires � l'imputation et au contr�le des d�penses, de suivi du recouvrement des recettes ainsi que de gestion de l'aide ext�rieure et de v�rification de son utilisation.

Formulation de la politique mon�taire et de la politique de change Les besoins en mati�re d'assistance technique peuvent notamment concerner :
i) la cr�ation d'une autorit� mon�taire ;
ii) la r�ouverture de la Banque centrale ;
iii) l'amorce d'une r�forme mon�taire ;
iv) le r�tablissement de proc�dures comptables appropri�es � la Banque centrale comme dans les banques commerciales ;
v) le renforcement de la capacit� de la Banque centrale � assumer l'administration du syst�me de paiements, les pratiques de gestion mon�taire et la supervision des banques ; et
vi) la remise sur pied des m�canismes de collecte des informations �conomiques cl�s (prix, statistiques mon�taires, dette publique, balance des paiements, etc.). Ces m�canismes � et la proc�dure budg�taire correspondante � sont essentiels pour assurer l'efficacit� de l'aide.

Parmi les questions auxquelles une r�ponse rapide doit normalement �tre apport�e, figurent g�n�ralement les suivantes :

a) Dans le domaine budg�taire :
-quelles sont les mesures susceptibles de produire rapidement des recettes et les d�penses ordinaires prioritaires n�cessaires pour relancer l'�conomie et remettre sur pied les infrastructures et les services sociaux de base.

b) Dans le domaine mon�taire :
-comment se procurer des devises ;
-quels instruments utiliser pour contr�ler le cr�dit et les agr�gats mon�taires ;
-quelles conditions minimales imposer pour l'ouverture ou la r�ouverture des banques commerciales ;
-quelles banques mettre en liquidation ; et quelle r�ponse apporter au probl�me de l'indemnisation des d�posants ;
-comment �tablir un programme financier reposant sur des r�gles simples pour chaque agr�gat mon�taire et prenant en compte les besoins financiers du gouvernement et du secteur priv�, ainsi que l'objectif de contenir les pressions inflationnistes.

c) Dans le domaine des changes et du commerce international
-quel taux de change et quel r�gime commercial adopter ;
-quel type de contr�les des changes appliquer le cas �ch�ant ;
-comment r�tablir les m�canismes de commercialisation des exportations et assurer que les importateurs locaux aient acc�s aux moyens de paiement internationaux.

C. Domaines prioritaires de soutien

a) R�tablir la s�curit� int�rieure et l'Etat de droit

198. La s�curit� des personnes et le respect des droits fondamentaux de l'�tre humain sont la cl� de vo�te de tout effort de stabilisation politique et �conomique. Il est capital de reconstruire des institutions cr�dibles non seulement � l'�chelon central mais aussi � l'�chelon local, car elles auront une influence d�terminante sur l'ensemble de l'effort de reconstruction, depuis la remise en route des secteurs productifs de l'�conomie jusqu'� la collecte et � l'�limination des armes. Dans le cadre de leurs r�gles et proc�dures, et en concertation avec d'autres formes d'assistance, les agences de coop�ration pour le d�veloppement devront s'efforcer de soutenir ces objectifs.

199. Beaucoup d'�l�ments constitutifs d'un Etat de droit peuvent n�cessiter une aide pour prendre toute leur efficacit� . Ils comprennent:

i) la formation de la police, des avocats et des juges et,
ii) le renforcement des capacit�s de r�glement des litiges civils en mati�re fonci�re.
b) L�gitimer les institutions de l'Etat 200. Les accords de paix peuvent faire des �lections nationales la priorit� des priorit�s. De mani�re plus g�n�rale, la rel�gitimation et le renforcement des capacit�s des institutions politiques sont essentiels pour le r�tablissement durable de la paix et � la justice. Si des �lections sont importantes pour instaurer la l�gitimit� politique, elles ne suffisent pas, en elles m�mes, � instaurer ou � maintenir la d�mocratie. Le processus de d�mocratisation doit se concevoir dans un contexte plus large de changement des relations non seulement au niveau du gouvernement et de l'Etat mais aussi � celui de la soci�t� civile.
c) Soutenir la r�emergence de la soci�t� civile

201. La polarisation des relations sociales compte parmi les cons�quences les plus d�vastatrices des conflits violents. Des conditions d'ins�curit� contribuent � la cr�ation d'un climat de m�fiance durable. Il est donc essentiel, pour soutenir la r�conciliation nationale, d'aider � la reconstruction des liens et relations intercommunautaires, et d'appuyer la participation de la soci�t� civile � la vie politique nationale.

d) Am�liorer la s�curit� alimentaire et les services sociaux

202. Am�liorer la s�curit� alimentaire est fondamental pour toute strat�gie de pr�vention syst�matique comme pour assurer, dans le prolongement de l'aide d'urgence, une pr�paration aux catastrophes et un d�veloppement durable. Cela comprend des efforts pour am�liorer la productivit� agricole et le fonctionnement des march�s et circuits de distribution ainsi que d'autres mesures propres � favoriser la stabilisation des prix � la production. La remise en route des services essentiels de sant�, d'�ducation, d'approvisionnement en eau et la reconstitution de moyens d'existence pour les femmes et les enfants sont aussi des priorit�s fondamentales.

e) D�velopper les capacit�s administratives

203. Quelle que soit l'urgence des autres besoins, le d�veloppement des capacit�s techniques et administratives des principales administrations ne saurait �tre diff�r� sans compromettre la durabilit� du

processus de reconstruction. Lorsque l'insuffisance de personnel qualifi� est critique, il se peut que les donneurs soient oblig�s de mettre � la disposition des pouvoirs publics du personnel d�tach� pour une courte dur�e. Comme le montre l'exemple de divers programmes parrain�s par les Nations Unies, il est possible aussi de mobiliser, gr�ce � des incitations sp�ciales, des membres de la diaspora en exil.

D. R�int�gration des populations d�racin�es

a) Principes et consid�rations � prendre en compte

204. Les d�placements de personnes contre leur gr� sont un signe indubitable de conflit au sein de la soci�t�, d'ins�curit� sociale et de l'incapacit� du gouvernement de prot�ger les citoyens. A l'inverse, le r�tablissement de l'Etat de droit, le respect des droits de l'homme et la restauration des conditions de la paix et de la s�curit� civile peuvent aider � encourager le retour, dans la dignit�, et la r�int�gration r�ussis des r�fugi�s, des personnes d�plac�es et des anciens combattants d�mobilis�s.

205. La pr�sence de nombreux r�fugi�s fait �galement peser sur les pays voisins h�tes une charge �conomique et sociale qui peut �tre source de d�stabilisation politique. Le retour dans la s�curit� et en bon ordre des r�fugi�s dans leur pays d'origine, lorsque la situation le permet peut favoriser la sauvegarde de la stabilit� politique dans la r�gion.

206. La r�int�gration constitue souvent le premier pas vers la r�conciliation nationale. Il doit s'inscrire dans un cadre juridique offrant des garanties juridiques aux anciens combattants et r�fugi�s rapatri�s. Les personnes d�plac�es doivent �galement �tre assur�es de ne pas �tre victimes de mesures punitives ou discriminatoires � leur retour. Les besoins sp�cifiques des populations d�racin�es doivent �tre explicitement pris en compte dans les n�gociations de paix afin que les accords officiels englobent des strat�gies de r�int�gration et de d�mobilisation. La responsabilit� qui incombe aux Etats de prot�ger leurs citoyens, qu'il s'agisse de r�fugi�s rapatri�s ou d'autres groupes touch�s par la guerre, est une consid�ration essentielle.

207. Outre la restauration d'une s�curit� minimale, les priorit�s de la r�int�gration incluent l'acc�s aux ressources en eau et � l'assainissement, des intrants agricoles y compris des cr�dits pour am�liorer la production vivri�re, des infrastructures de transport et de communication, des services sociaux, notamment de sant� et d'�ducation, ainsi qu'une aide � l'�tablissement de documents juridiques et d'�tat-civil. A cet �gard, il est essentiel que la formulation des budgets de d�penses publiques tant au niveau national que local, prenne clairement en compte les co�ts r�currents de services publics essentiels, tels les salaires des professeurs et personnels m�dicaux requis pendant la phase de r�int�gration. La question du r�glement des litiges en mati�re de droits fonciers doit �galement �tre trait�e au plus t�t.

208. Le processus de r�int�gration ne peut �tre engag� avant que les zones s�res ou � faible risque aient �t� identifi�es Les mesures d'identification, de d�minage et de signalisation des zones min�es constituent une des grandes priorit�s dans ce contexte. En outre, il faut garder � l'esprit que le processus de rapatriement ne peut �tre viable � long terme que s'il est soutenu et consolid� par des programmes plus larges de d�veloppement. Il importe donc d'�tablir au plus t�t des liens op�rationnels entre ces deux types de programmes.

b) Programmes de reconstruction et de r�int�gration au niveau local

209. Des programmes locaux de rel�vement et de r�insertion ont �t� �labor�s pour faciliter la r�int�gration des populations d�racin�es. Mis en oeuvre au niveau des communes, des districts et des provinces, ils se concentrent sur le renforcement de la capacit� des collectivit�s d'accueil � int�grer de nouveaux r�sidents. En associant secours d'urgence et strat�gies de d�veloppement, ils contribuent � att�nuer les dommages �conomiques caus�s par la guerre et � promouvoir la r�conciliation sociale au niveau local.

210. Ces programmes s'appuient sur l'initiative locale et r�pondent � des priorit�s d�termin�es localement avec la participation de la soci�t� civile, des ONG, des syndicats et des entreprises priv�es ayant une implantation locale. Ils favorisent l'autonomie locale et contribuent � activer le potentiel d'auto-assistance des populations int�ress�es. Ils permettent d'int�grer des activit�s allant de la prestation de services sociaux essentiels � l'assistance juridique dans le domaine de l'�tablissement de documents d'�tat-civil et de l'enregistrement des titres de propri�t� fonci�re, en passant par la reconstruction des infrastructures mat�rielles. De tels programmes ont �t� mis en oeuvre dans un certain nombre de pays d�chir�s par la guerre en Am�rique centrale, en Asie et en Afrique.

i) Principales caract�ristiques des programmes

211. Orientation g�ographique : Le choix de zones g�ographiques sp�cifiques pour la mise en oeuvre de tels programmes permet d'�viter les distinctions entre diff�rentes fractions de la population et de r�pondre sans discrimination aux besoins des personnes d�plac�es, des r�fugi�s, des anciens combattants et des autres victimes de la guerre. Les programmes facilitent �galement la participation de populations vuln�rables aux initiatives de d�veloppement local, veillant � maintenir un �quilibre entre les int�r�ts des groupes les plus actifs et organis�s et ceux qui le sont moins. Cela peut contribuer � soutenir concr�tement des strat�gies plus larges visant � promouvoir la consolidation de la paix et la solidarit� sociale. C'est indispensable pour �viter de nouvelles iniquit�s et de nouvelles tensions dans la collectivit�. Les zones choisies pour la mise en oeuvre de ce type de programme sont celles o� le processus de paix est le plus fragile et o� l'exclusion sociale est la plus aigu� ou dans lesquelles un grand nombre de personnes d�plac�es doivent se r�installer.

212. Enclenchement de la r�conciliation : Ces programmes visent � offrir une forte incitation � une v�ritable r�conciliation. Ils fournissent des ressources financi�res et une assistance technique � des groupes de population qui � quelle que soit leur appartenance politique et leur place dans la soci�t� � veulent travailler ensemble. S'il faut beaucoup de temps et de longues n�gociations pour renforcer la participation et la prise de d�cision au niveau local, la r�action des populations int�ress�es a g�n�ralement �t� positive.

213. Gestion d�centralis�e : La planification et la gestion des programmes rel�vent des repr�sentants de la soci�t� civile locale r�unis � cet effet. Ils ont la responsabilit� de formuler et mettre en oeuvre les plans d'investissement de premi�re priorit�, de trouver des sources de financement et d'�tablir les m�canismes de recouvrement des co�ts. Les structures socio-�conomiques sont ainsi revitalis�es dans des conditions compatibles avec les traditions et la culture locales.

214. Liaison �troite entre les initiatives locales et nationales : Un autre objectif central de ces programmes est d'�tablir des liens �troits entre les institutions locales et leurs homologues au niveau provincial et national afin d'assurer la coh�rence des strat�gies adopt�es. La viabilit� � long terme des syst�mes administratifs mis en place au niveau local d�pend de leur int�gration � ceux qui existent au niveau national. Dans certains cas, le renforcement des institutions dans le cadre d'un programme de reconstruction locale a ouvert des possibilit�s de r�formes plus g�n�rales, certains des syst�mes de gestion des affaires publiques mis en place au niveau local �tant par la suite transpos�s ailleurs.

215. Strat�gies int�gr�es de r�habilitation �conomique et sociale : La reconstitution du tissu social des zones cibles exige la revitalisation de l'activit� �conomique et la reconstruction des infrastructures de base d�truites par la guerre. Cela peut se faire en partie gr�ce � des travaux publics � forte intensit� de main-d'oeuvre ou des programmes "vivres contre travail". La fourniture des services sociaux et la reconstruction du patrimoine de la communaut� rendent les avantages de la paix et de la r�conciliation plus tangibles. L'am�lioration des conditions de vie, des perspectives d'emploi et des possibilit�s de formation aide � cr�er un environnement tel que les individus ont le sentiment d'avoir r�ellement int�r�t � soutenir le processus de paix. Pour que le d�veloppement soit durable, il est essentiel que les hommes et femmes habitant des zones d�vast�es par la guerre passent du statut de victimes � celui de b�n�ficiaires, puis d'acteurs � part enti�re.

ii) Principales composantes des programmes

216. Plusieurs activit�s distinctes peuvent �tre men�es � bien simultan�ment dans le cadre d'une gestion int�gr�e :

217. La protection des droits de l'homme : Il s'agit notamment de cr�er ou de renforcer des m�canismes visant � prot�ger les droits de l'homme et les droits civiques et � r�tablir la confiance des citoyens � l'�gard du syst�me juridique et leur acc�s � la justice. C'est l� un important �l�ment des efforts pour combattre l'exclusion sociale et favoriser l'insertion des groupes de population marginalis�s dans la vie �conomique et sociale.

218. La sant� : Il s'agit notamment de mettre en place des syst�mes de sant� au niveau local conform�ment � une strat�gie de d�centralisation des services et des soins de sant� primaires. Les services de sant� ne se limitent pas � la pr�vention et au traitement des maladies mais couvrent �galement le bien-�tre social et collectif. L'efficacit� des activit�s entreprises dans ce domaine exige la collaboration de l'Etat, ainsi que des collectivit�s et ONG locales.

219. L'�ducation : Il s'agit notamment d'instituer des syst�mes locaux d'�ducation permettant de mettre la gestion des infrastructures et des services �ducatifs en accord avec les principes admis de coexistence pacifique des diff�rentes communaut�s et de respect des diff�rences culturelles.

220. L'appareil productif : Il s'agit notamment de fournir aux paysans des intrants et une aide � la commercialisation et de cr�er des organismes de d�veloppement �conomique local ou de mettre en place des mesures d'assistance technique ou de soutien financier aux entrepreneurs.

221. L'infrastructure mat�rielle : Il s'agit de reconstruire les routes, les r�seaux d'irrigation, les syst�mes d'approvisionnement en eau potable, les �coles, les centres de soins, des logements d'un confort minimal, des r�seaux d'assainissement et des latrines. Ces activit�s sont g�n�ralement men�es � bien par des ONG, des PME, des coop�ratives et des associations locales.

222. La r�habilitation de l'environnement : Il s'agit d'�tablir des m�canismes de planification de l'utilisation des terres permettant d'identifier et d'�valuer les diff�rentes pratiques agricoles et les diff�rents modes d'exploitation envisageables et de mettre en oeuvre des programmes de port�e locale pour remettre en �tat les bassins versants et prot�ger les zones �cologiquement fragiles.

c) Quelques enseignements de l'exp�rience

223. La r�ussite du processus de reconstruction au lendemain d'un conflit d�pend pour beaucoup de la participation des r�fugi�s et des personnes d�plac�es � leur retour, car ils repr�sentent souvent des factions qui se sont oppos�es au gouvernement durant le conflit. L'aide au lendemain d'un conflit doit en tenir compte.

224. La conduite des parties en guerre pendant le conflit, et en particulier le comportement des combattants � l'�gard des populations civiles, d�termine les chances de r�conciliation et de l'instauration d'une paix durable. La mise en place de m�canismes permettant de faire la lumi�re sur les violations des droits de l'homme et de poursuivre en justice les individus accus�s de crimes de guerre, y compris le viol, peut �tre une partie int�grante d'un processus de r�conciliation nationale viable. Les cons�quences sociales, psychologiques et mat�rielles de la violence doivent �galement �tre prises en compte dans les programmes de r�int�gration.

225. Dans certains cas, les parties en conflit prennent d�lib�r�ment les populations civiles pour cible d'actes de violence dans le cadre d'une strat�gie politique. En cons�quence, la situation des personnes d�plac�es dans leur propre pays peut �tre bien plus pr�caire que celle des r�fugi�s, qui ont b�n�fici� de la protection internationale et du minimum vital. D'autre part, les besoins des populations d�plac�es qui reviennent ne sont pas n�cessairement plus grands que ceux des populations locales rest�es chez elles pendant toute la dur�e des troubles. Dans ces situations les efforts pour satisfaire les besoins des personnes de retour doivent aussi r�pondre � ceux de la population locale.

226. Bien qu'on ne puisse �tre certain que les personnes de retour veuillent n�cessairement se r�installer dans leur r�gion d'origine ou revenir � leur ancienne activit�, les �tudes portant sur les probl�mes auxquels sont confront�s les rapatri�s montrent l'importance capitale de l'acc�s aux terres agricoles et la valeur de la solidarit� de la parent� dans la phase initiale de r�installation. Parmi les rapatri�s, seule une minorit� peut mettre � profit les nouvelles comp�tences acquises en exil, et beaucoup sont oblig�s de retourner � la terre.

227. L'exp�rience des nombreux programmes de rapatriement et de r�insertion de r�fugi�s montre qu'une grande partie des ressources de l'aide disponible a souvent �t� allou�e aux op�rations de rapatriement. La r�insertion vient au second plan. Or, on s'aper�oit de plus en plus que la r�insertion des rapatri�s est la partie la plus complexe du processus et celle qui exige le plus de moyens. Il importe en outre de synchroniser les programmes de r�insertion avec le retour des r�fugi�s et d'�viter un hiatus prolong� entre le rapatriement et l'aide � la r�installation.

d) Acteurs et partenariats

228. Dans le cadre de son mandat qui inclut la protection, le travail de pr�paration de la r�insertion des r�fugi�s est en g�n�ral entrepris par le HCR dans le cadre des op�rations de rapatriement, avec le lancement de projets d'effet imm�diat visant � aider les collectivit�s � accueillir les rapatri�s. En r�gle g�n�rale, les ONG nationales et internationales sont associ�es � ces op�rations en tant que partenaires de l'ex�cution des programmes du HCR.

229. Souvent, l'aide initiale au retour se prolonge par des programmes plus vastes tels que les programmes de rel�vement et de r�insertion au niveau local parrain�s par le PNUD et l'UNOPS (le bureau des services d'appui aux projets des Nations Unies), dont la structure de gestion d�centralis�e sert aux diverses activit�s men�es par des autres agences sp�cialis�es des Nations Unies, les autorit�s locales ou par des ONG.

e) Meilleures pratiques recens�es

230. Avant le rapatriement, il convient de proc�der � une �valuation pour v�rifier si les voies d'acc�s, les terres agricoles et les sites de retour sont libres de mines terrestres et, lorsque c'est n�cessaire, affecter des cr�dits � des programmes de signalisation des zones min�es et de d�minage.

231. Les programmes de r�insertion des personnes d�plac�es, en particulier lorsqu'il s'agit de programmes de port�e locale, exigent une parfaite connaissance des besoins pour d�terminer de fa�on r�aliste la nature et l'ampleur de l'action n�cessaire. Cela n�cessite une analyse approfondie de la situation politique, �conomique et sociale, de l'�tat des infrastructures et des conditions de s�curit� imm�diatement apr�s le conflit, analyse qui doit �tre effectu�e, au plus t�t, avant que l'aide humanitaire prenne fin.

232. L'aide ne doit pas �tre cibl�e sur des groupes particuliers de b�n�ficiaires. Pour qu'elle contribue � la r�conciliation sociale, elle doit b�n�ficier de fa�on visible � l'ensemble de la population locale et offrir des avantages � tous ceux qui r�sident dans les zones o� des populations d�racin�es doivent se r�installer, qu'elles aient �t� d�plac�es � l'ext�rieur ou � l'int�rieur du pays, qu'elles aient particip� au conflit en qualit� de combattants, ou qu'elles soient rest�es chez elles pendant les hostilit�s. Les programmes doivent �tre aussi d�centralis�s que possible et viser � promouvoir la coop�ration au sein des communaut�s victimes du conflit comme entre elles, ainsi qu'� assurer au niveau local la d�termination des besoins prioritaires et des moyens d'y faire face.

f) Orientations � l'intention des donneurs

233. L'importance des moyens n�cessaires pour organiser le rapatriement des r�fugi�s peut parfois masquer les besoins et les difficult�s consid�rables qu'implique ensuite la r�insertion aussi bien des r�fugi�s que des personnes d�plac�es � l'int�rieur du pays. La r�insertion est un processus long et complexe qui demande autant de pr�paration et de soutien, que le rapatriement ou le transfert lui-m�me.

234. Les institutions des Nations Unies directement impliqu�es dans l'effort de r�insertion faisant appel � des contributions volontaires des bailleurs de fonds, il est important que les engagements correspondants soient d�finis suffisamment longtemps avant l'op�ration de rapatriement pour que ces organismes puissent mettre en place les structures administratives n�cessaires pour assurer les op�rations de r�insertion � plus long terme. En effet, un hiatus dans l'acheminement de l'aide apr�s le retour, risque de compromettre gravement l'efficacit� des programmes.

235. D�s le d�but des op�rations, il est n�cessaire d'�tablir des liens strat�giques et op�rationnels entre l'aide initiale � la r�int�gration et les programmes plus larges de d�veloppement. Cela est n�cessaire pour assurer le retrait progressif de l'aide humanitaire.

E. D�mobilisation et r�insertion sociale des anciens combattants

a) Principes et consid�rations � prendre en compte

236. La r�ussite de la d�mobilisation et du retour des anciens combattants � la vie civile est une condition essentielle de la stabilit� politique et de la reconstruction des soci�t�s d�chir�es par la guerre. Elle

est souvent au lendemain d'un conflit une premi�re priorit� pour les gouvernements et ceux-ci font appel � l'aide internationale pour divers aspects des programmes de d�mobilisation.

Encadr� 14. L'op�ration "Flamme de la paix" au Mali Apr�s des ann�es de troubles et de violences dans le nord du pays, les n�gociations entre le gouvernement du Mali et les dirigeants de la r�bellion touar�gue se sont sold�es par la conclusion, en 1992, d'un accord de paix (le "Pacte national"). L'amorce de r�conciliation et de d�mobilisation a toutefois �t� de courte dur�e, le gouvernement du Mali ayant rencontr� de graves difficult�s pour g�rer le programme convenu de d�mobilisation et de r�insertion et pour apporter au Nord l'assistance �conomique promise.

Certains �l�ments du mouvement touareg ont fait s�cession avec l'organisme central de coordination du Pacte national et de nombreux anciens combattants touareg, qui avaient �t� int�gr�s dans l'arm�e nationale, sont retourn�s � la r�bellion. Des combats sporadiques ont �clat� entre les forces gouvernementales et les milices, les rapines et les op�rations de contrebande se sont multipli�es, et la s�curit� s'est d�t�rior�e au point d'emp�cher la mise en oeuvre de nombreux programmes de d�veloppement dans le nord du Mali. L'ampleur du stock d'armes en circulation, en sapant les efforts de d�mobilisation, a manifestement contribu� � cette d�gradation des conditions de s�curit�.

En octobre 1993, le Pr�sident du Mali a cr�� un pr�c�dent en sollicitant l'aide du Secr�taire g�n�ral des Nations Unies pour une op�ration de saisie et d'�limination des armes de petit calibre d�tenues illicitement. Une mission consultative s'est rendue au Mali pour �valuer la situation et est parvenue � la conclusion que les conditions de s�curit� �taient telles dans ce pays qu'elles g�naient la mise en oeuvre des programmes de d�mobilisation et de r�insertion, et le retour des r�fugi�s, et emp�chaient de ce fait toute avanc�e du d�veloppement �conomique et social. La mission a donc propos� l'adoption d'une strat�gie ax�e avant tout sur la s�curit� pour rem�dier � ce probl�me, laquelle impliquait une aide ext�rieure pour mettre en place des programmes de renforcement des capacit�s dans la police et les autres forces charg�es de la s�curit� int�rieure, une intensification des contr�les aux fronti�res et d'autres mesures encore. Le gouvernement du Mali s'est ralli� � cette strat�gie et a �labor�, dans le cadre du Pacte national, un programme d'urgence pr�voyant, outre des mesures de d�mobilisation et des projets de d�veloppement, la mise en place d'un nouveau syst�me renforc� de s�curit� et des dispositions propres � favoriser la r�int�gration des soldats d�mobilis�s dans la vie civile et dans les structures administratives.

Le PNUD a accept� d'appuyer ce programme sous r�serve que des experts des Nations Unies approuvent les plans concernant le syst�me de s�curit� et assurent le suivi de leur mise en oeuvre, et il a apport� son soutien au programme d'urgence de r�int�gration et de construction de la paix. En mars 1996 a �t� organis�e � Tombouctou une grande manifestation, lors de laquelle les anciens combattants des milices et de la r�bellion touareg ont restitu� leurs armes qui ont ensuite �t� jet�es dans un immense brasier sous les yeux d'inspecteurs envoy�s par les Nations Unies. Outre qu'elle a permis l'�limination d'une �norme quantit� d'armes l�g�res, cette "Flamme de la paix" a largement contribu�, par sa signification politique et symbolique, au processus de paix.

Le gouvernement du Mali a �galement cr�� une Commission nationale charg�e de coordonner les efforts entrepris pour lutter contre l'extension de la d�tention, licite ou illicite, d'armes l�g�res. Un code de conduite r�gissant les relations entre civils et militaires a par ailleurs �t� �labor�, exercice auquel ont particip� des repr�sentants de l'arm�e, de la police, des autorit�s civiles, du parlement et de divers segments de la soci�t� civile ainsi que des experts des Nations Unies. Cela a permis notamment de donner des orientations pour renforcer les garanties quant � la bonne utilisation de l'aide fournie pour le r�tablissement de la s�curit�. Malgr� ces avanc�es, le processus de paix engag� � la suite des conflits demeure fragile, compte tenu du fait que de nombreuses armes l�g�res continuent � circuler et de la m�diocrit� des conditions int�rieures de s�curit�.

237. L� o� la d�mobilisation n'a pas �t� bien conduite, on a pu voir des troupes qui ne percevaient plus leur solde ou qui n'�taient plus encadr�es, se transformer en bandes de pillards, s'attaquant aux villageois et � la circulation routi�re, ou se remobiliser pour fomenter des insurrections contre le r�gime en place. Outre ses effets sur la stabilit� politique, l'ins�curit� qui en r�sulte peut avoir des r�percussions d�vastatrices sur l'activit� �conomique. Le probl�me est d'�laborer des programmes de d�mobilisation efficaces par rapport � leur co�t et qui soient satisfaisants pour les anciens combattants eux-m�mes.

238. La situation politique dans les pays voisins peut avoir une incidence majeure sur le succ�s et la cr�dibilit� des efforts de d�mobilisation nationaux, qui doivent donc �tre replac�s dans le contexte plus large des relations politiques et militaires au niveau r�gional.

239. La fourniture d'une aide � la r�insertion des anciens combattants pose aux donneurs deux probl�mes particuliers:

-En premier lieu, certains d'entre eux peuvent �tre confront�s � certaines restrictions juridiques en ce qui concerne la fourniture d'une aide financi�re � des organisations militaires, m�me � des fins de d�mobilisation et de lib�ration.
-En second lieu, le risque toujours pr�sent d'une reprise des hostilit�s peut faire beaucoup h�siter � financer des programmes d'aide � la d�mobilisation.

240. Dans le m�me temps, la r�alisation d'un accord sur la d�mobilisation peut elle-m�me �tre facilit�e par la connaissance du fait que des programmes ont �t� mis en place pour venir en aide aux combattants d�mobilis�s. Une fois l'accord conclu, sa mise en oeuvre doit suivre rapidement pour r�duire le risque d'une reprise du conflit. Il faut un certain temps pour pr�parer ce genre de programmes. La d�cision de les soutenir ne peut attendre la conclusion d'accords de paix et doit �tre bas�e sur une �valuation de la probabilit� d'un aboutissement des n�gociations politiques.

b) Besoins et domaines de coop�ration

i) Cantonnement et lib�ration

241. En g�n�ral, la d�mobilisation commence par le regroupement des anciens combattants dans des cantonnements o� ils rendent leurs armes et leurs uniformes et attendent leur lib�ration. La p�riode de cantonnement souvent supervis�e par des observateurs militaires des Nations Unies, sert l'objectif essentiel de la s�curit�, � savoir recenser les combattants et leurs armes et �tablir entre les parties en guerre une confiance mutuelle quant au respect des termes d'un accord de paix n�goci�.

242. Les besoins des troupes cantonn�es, � savoir des vivres, de l'eau, un abri, des installations sanitaires, des soins de sant� �l�mentaires, et autres besoins fondamentaux peuvent �tre faciles � satisfaire. Cependant, le gouvernement, qui est d�j� souvent en retard dans le paiement des soldes, peut avoir besoin d'aide pour couvrir les co�ts qu'ils entra�nent.

243. Bien que tout soit fait pour que la p�riode de cantonnement soit aussi courte que possible afin de r�duire les risques de d�sordres, le contexte politique dans lequel a lieu la d�mobilisation est extr�mement impr�visible et la dur�e effective du cantonnement peut �tre difficile � estimer � l'avance. Si la p�riode de cantonnement se prolonge, les besoins des soldats regroup�s dans les camps, qui sont souvent rejoints par leurs familles, peuvent augmenter consid�rablement, et n�cessiter la mise en place de nouveaux �quipements, notamment de sports et de loisirs.

244. Cela dit, la p�riode de cantonnement permet aussi de d�terminer le nombre de combattants � d�mobiliser et d'effectuer des enqu�tes d�taill�es sur leurs comp�tences, leur situation sociale, leurs intentions, ainsi que leurs attentes, ce qui facilite l'�laboration des programmes de r�insertion. Il est possible aussi de donner aux anciens combattants et aux personnes � leur charge une premi�re id�e de ce � quoi ils doivent s'attendre dans la vie civile ainsi qu'une orientation et une formation professionnelles.

Encadr� 15. Les enfants soldats Selon une r�cente �tude des Nations Unies intitul�e "L'impact des conflits arm�s sur les enfants", depuis 30 ans les Etats et les arm�es rebelles � travers le monde ont recrut� des dizaines de milliers d'enfants, la plupart du temps des adolescents de moins de 18 ans, mais aussi des enfants de 10 ans, voire moins encore. Ils sont g�n�ralement originaires de familles pauvres et en sont souvent s�par�s de force pour �tre mobilis�s. Principales victimes des bouleversements sociaux et de la violence, les enfants deviennent ainsi eux-m�mes les auteurs de violences.

Les arm�es cherchent toujours � masquer la pr�sence d'enfants dans leurs rangs. C'est pourquoi les accords de paix ne pr�voient rien pour cette cat�gorie d'anciens combattants, malgr� tout ce que leur doit la soci�t� pour les avoir priv�s � un �ge critique des chances d'un d�veloppement �motionnel et intellectuel normal.

Les mesures particuli�res n�cessaires pour d�mobiliser les enfants et les r�ins�rer dans la soci�t� sont presque prises par raccroc. La premi�re priorit� est d'essayer de les rendre � leurs familles, si on peut en retrouver la trace, et de localiser leur collectivit� d'origine. L'ach�vement de leur scolarit� primaire est aussi une priorit� et, dans la mesure o� les enfants soldats ne pourraient pas �tre int�gr�s dans les classes normales, il faudrait en organiser de sp�ciales. En grandissant, les enfants soldats risquent d'avoir assimil� l'id�e que la violence paie et une v�ritable reconversion qui leur donne des qualifications professionnelles fait partie d'un processus de sevrage qui comporte une aide psychologique et une r�adaptation.

Comme dans bien d'autres situations, les solutions les meilleures sont pr�ventives. Cela peut aller d'une coop�ration avec les gouvernements pour qu'ils adoptent et ratifient les dispositions du Protocole facultatif � la Convention relative aux droits de l'enfant, qui concerne la situation des enfants dans les conflits arm�s, � l'instruction des plaintes ou � la n�gociation avec les groupes rebelles d'accords interdisant le recrutement d'enfants soit comme combattants soit pour des fonctions militaires de soutien.

ii) R�insertion et r�int�gration

245. La lib�ration effective des anciens combattants est g�n�ralement subordonn�e � la bonne application d'autres �l�ments des accords de paix. En quittant le cantonnement, les anciens combattants sont souvent dispers�s et ramen�s dans leur district d'origine. A leur arriv�e, il faut les mettre en rapport avec les repr�sentants de l'administration locale et avec les ONG pr�sentes localement.

246. L'aide initiale � la r�insertion prend d'ordinaire la forme d'allocations destin�es � aider � la satisfaction des besoins essentiels des anciens combattants � logement, soins m�dicaux, vivres, habillement, etc. � pendant une p�riode allant de plusieurs mois � deux ans. Il peut s'agir de versements en esp�ces, de bons ou de transferts en nature ; une autre fonction importante de cette aide transitoire est d'all�ger le poids que repr�sentent les anciens combattants et les personnes � leur charge pour les communaut�s qui les accueillent. La composition de l'aide � la r�insertion doit tenir compte de l'environnement culturel et des modes de subsistance locaux.

247. Si le versement d'allocations permet la plus grande souplesse au moindre co�t, le choix du m�canisme d'aide � la r�insertion et � la r�int�gration d�pend de la situation locale, et notamment de la pr�sence d'agences bancaires locales. Lorsque l'aide est fournie sous forme d'allocations, il est g�n�ralement pr�f�rable qu'elles soient vers�es en plusieurs fois, avec possibilit� d'obtenir des avances pour investissement, plut�t qu'en une seule.

Encadr� 16. D�mobilisation et r�insertion en Ouganda et en Ethiopie Historique En 1992, le gouvernement de l'Ouganda a annonc� la d�mobilisation et la r�int�gration dans la soci�t� civile d'environ 50 000 soldats. Une Commission d'aide aux anciens combattants ougandais a �t� cr��e � cet effet. En Ethiopie, apr�s plusieurs d�cennies de conflit arm�, le gouvernement s'est trouv� confront� � la n�cessit� de fournir une aide � 3.5 millions de personnes d�racin�es : anciens combattants et leurs familles, personnes d�plac�es et rapatri�es. Les anciens combattants d�mobilis�s �taient consid�r�s comme pr�sentant un risque potentiel pour la s�curit�, �tant donn� leur exp�rience militaire et les mentalit�s de "hors-la-loi" acquises apr�s de nombreuses ann�es de combat. Un programme � long terme initi� par le gouvernement �thiopien a apport� une aide � la r�insertion des anciens combattants.

En Ouganda, l'objectif d'ensemble est de r�ins�rer les anciens combattants en cr�ant des possibilit�s d'emploi dans leurs collectivit�s d'origine. Il s'agit pour cela de cr�er de petites entreprises ougandaises autonomes, dans le secteur de l'entretien des routes. L'ouverture de possibilit�s d'emploi de ce type doit faciliter la r�int�gration sociale des anciens combattants et leur acceptation par la collectivit�. Le programme vise aussi � leur donner de nouvelles qualifications ainsi qu'� leurs familles.

En Ethiopie, l'objectif essentiel est de cr�er des emplois et des activit�s g�n�ratrices de revenu, en coop�ration avec les ONG et les administrations locales et r�gionales. Un "fonds ouvert" et cr�� � cette fin, pour aider les ONG, les associations locales et les groupes d'auto-assistance de base � entreprendre des initiatives de r�insertion. Ces initiatives sont de divers types : vivres contre travail, travail r�mun�r�, fourniture d'intrants agricoles et formation. Le projet vise aussi � renforcer les structures �conomiques locales d�truites par la guerre.

Quelques le�ons de l'exp�rience En Ouganda, la strat�gie consistant � aider � ins�rer les anciens combattants dans la soci�t� locale en les employant dans le secteur de la reconstruction et de l'entretien des routes s'est r�v�l�e positive, bien que le taux de participation des anciens combattants soit rest� inf�rieur � 50 pour cent. En Ethiopie, les r�sultats obtenus ont montr� que la r�insertion des anciens combattants gr�ce � des offres d'emploi � court terme �tait de nature � faciliter la compr�hension et la r�conciliation.

Cette exp�rience permet de tirer quelques enseignements g�n�raux :

--La d�livrance d'un certificat de d�mobilisation non transf�rable : i) garantit que les anciens combattants ont acc�s � leurs prestations et, ii) r�duit le risque d'erreurs de ciblage. La fourniture permanente d'informations aux b�n�ficiaires sur les possibilit�s, les limitations et les proc�dures favorisent beaucoup la r�insertion.

--Il convient que les anciens combattants et leurs conjoints participent � la conception des aides. Les dons en nature doivent correspondre � leurs besoins sp�cifiques ; l'aide financi�re ne doit pas �tre vers�e en une fois mais par acomptes et une partie de l'allocation doit aller directement aux femmes

--L'acc�s � la terre et au cr�dit est indispensable � la r�insertion des diff�rents groupes dans la soci�t�. Les m�canismes de micro-cr�dit ont leur importance, mais ils doivent �tre compl�t�s par des conseils professionnels afin de garantir une utilisation efficace des sommes mises � disposition.

--Une coordination centrale par un organisme temporaire, avec d�centralisation de l'ex�cution aupr�s des collectivit�s, repr�sente un dispositif institutionnel efficace. Les bureaux de terrain permettent : i) aux b�n�ficiaires d'avoir plus facilement acc�s aux prestations du programme et, ii) au gouvernement de mieux adapter le programme aux besoins locaux.

248. Il est cependant essentiel que cette aide ne soit pas per�ue comme un droit devant durer ind�finiment. La date o� elle prendra fin doit �tre clairement indiqu�e aux anciens combattants d�s le moment de leur d�mobilisation. Des dispositions sp�ciales doivent cependant �tre pr�vues pour l'octroi d'une aide � long terme aux anciens combattants gravement handicap�s.

249. Bien que le soutien � la r�int�gration se concentre g�n�ralement sur les anciens combattants, il ne faut jamais perdre de vue le fait que de nombreuses autres cat�gories de personnes se trouvent confront�es � des difficult�s �normes lors de leur r�int�gration au sein de groupes familiaux ou villageois au terme de conflits arm�s. Il s'agit en particulier de m�res c�libataires, de victimes de viol ou de filles et femmes qui ont d� avoir recours � la prostitution pour survivre. Dans les soci�t�s traditionnelles, ces personnes ont en particulier beaucoup de mal � se faire accepter � leur retour. Il arrive aussi que dans certaines soci�t�s les familles rejettent leurs filles c�libataires. La r�int�gration dans les situations de ce genre doit faire l'objet de mesures particuli�res, allant de l'assistance socio-psychologique, tant pour les victimes de l'exclusion que pour leurs familles, � la formation dans des domaines tels que la nutrition, le soin des enfants et l'�ducation �l�mentaire.

c) Quelques enseignements de l'exp�rience

250. Les anciens combattants ont souvent le sentiment qu'ils m�ritent une attention particuli�re car ils ont consenti de grands sacrifices personnels pour le pays et ont endur� l'essentiel des souffrances caus�es par la guerre. Leur capacit� de casser le processus de paix justifie d'ailleurs qu'on leur accorde une attention particuli�re. La situation politique peut donc imposer de fournir une aide hors de proportions aux anciens combattants, m�me si c'est en contradiction avec les principes humanitaires et d'�quit� g�n�ralement reconnus. R�soudre ce dilemme n�cessite beaucoup de pragmatisme et de sens politique.

251. Dans le m�me temps, les anciens combattants les moins grad�s issus de l'arm�e ou des forces rebelles peuvent souvent constituer une cat�gorie sociale vuln�rable partageant un grand nombre de caract�ristiques avec les autres personnes d�racin�es par le conflit. Du fait qu'ils ont �t� enr�l�s tr�s jeunes, un grand nombre d'entre eux n'ont qu'un tr�s faible niveau d'instruction, gu�re de comp�tences utilisables dans le civil, et peu ou pas du tout d'exp�rience sur le march� du travail. Qui plus est, beaucoup souffrent de handicaps physiques et psychologiques. Le ressentiment � l'�gard des anciens combattants, qui sont souvent tenus pour responsables des destructions en temps de guerre, est �galement un obstacle � leur r�insertion dans la soci�t� civile.

252. Le retour des anciens combattants � la vie civile a d'ordinaire lieu dans un contexte de stagnation �conomique, o� les perspectives d'emploi sont rares et les possibilit�s de cr�ation d'entreprise limit�es. Dans ces conditions, le risque est �lev� de voir les soldats d�mobilis�s tomber dans la d�linquance. Les indemnit�s de d�mobilisation ne sont qu'� court terme et doivent �tre compl�t�es par des programmes plus vastes de redressement �conomique. A long terme, en effet, seule la reprise de la croissance �conomique peut leur ouvrir des possibilit�s de r�insertion �conomique et sociale.

253. L'exp�rience a montr� que les primes de d�mobilisation ne peuvent � elles seules suffire � assurer la r�int�gration en douceur des anciens combattants dans la vie civile. Une aide sp�ciale en mati�re de formation professionnelle, de validation des qualifications et de recherche d'emploi est �galement n�cessaire. Afin de r�duire au minimum le risque de polarisation de la soci�t�, les programmes de r�insertion doivent en outre �tre ax�s sur les collectivit�s d'accueil, dans le cadre des programmes plus vastes destin�s � assister l'ensemble des populations touch�es par la guerre.

Encadr� 17. Faut-il verser une prime pour la restitution des fusils ? Dans la plupart des cas o� il a �t� d�cid� de d�sarmer les forces r�guli�res ou les gu�rillas, on propose souvent que les armes qui n'ont pas �t� rendues � la d�mobilisation soient r�cup�r�es moyennant le versement d'une prime pour chaque arme rendue.

Des programmes de rachat d'armes de ce genre ont �t� essay�s dans divers cas. L'exp�rience montre qu'ils sont rarement applicables � l'�chelle du pays ou � grande �chelle. Tout d'abord, il est pratiquement impossible de fixer un "prix du march�" d'application g�n�rale pour les armes, ou un prix qui ait des chances de satisfaire tous les anciens combattants et d�tenteurs d'armes. Le prix d'une arme est relatif et d�pend de trop de facteurs, depuis sa possibilit� d'emploi par un individu � des fins criminelles jusqu'� la vente syst�matique et � la contrebande d'armes � destination d'un mouvement insurrectionnel dans un pays voisin. Les programmes de rachat d'armes cr�ent une demande et peuvent �tre submerg�s par une offre � la mesure des stock d'armes accumul�s au cours des ann�es de guerre. Des efforts plus larges, refl�tant les cultures locales sont n�cessaires pour encourager le d�sarmement volontaire, lorsque les conditions de s�curit� s'am�liorent.

L'offre d'un paiement en �change des armes rendues a bien fonctionn� dans des cadres plus limit�s, lorsque la population est tout � fait en faveur de ce type d'op�ration, ou lorsque l'op�ration peut �tre g�r�e par une organisation non gouvernementale ou une �glise de fa�on relativement ind�pendante des influences ext�rieures qui s'exercent sur les individus pour qu'ils se d�barrassent de leurs armes ou au contraire les conservent.

d) Dispositifs institutionnels 254. La conception des programmes de d�mobilisation exige une �troite coop�ration entre les nombreux acteurs impliqu�s, et ce dans les plus brefs d�lais. Les structures militaires doivent identifier aussi pr�cis�ment que possible le nombre et le grade des combattants � d�mobiliser et parvenir � un accord avec le gouvernement sur un ensemble d'allocations de d�mobilisation compatible avec les contraintes budg�taires. Les donneurs doivent se mettre d'accord avec le gouvernement sur les modalit�s de la d�mobilisation et sur le volume d'aide qu'ils sont en mesure d'apporter. Les ONG, qui jouent souvent un r�le important dans la mise en oeuvre de ces programmes, doivent �galement �tre associ�es au processus de planification. Ces programmes doivent aussi tenir compte des attentes des soldats d�mobilis�s, ainsi que du point de vue des communaut�s dans lesquelles ils vont retourner.

255. L'exp�rience montre que la mise en place d'une commission mixte civile para-gouvernementale est un bon moyen d'assurer le pilotage du processus de d�mobilisation et de r�int�gration en m�me temps que la coordination au sein de la communaut� des donneurs. Les anciens combattants ont aussi besoin d'une organisation qui les repr�sente et d�fende leurs droits. L'objectif premier doit cependant �tre d'aider les anciens combattants et non de cr�er une structure administrative complexe.

256. Les programmes de d�mobilisation et de r�int�gration doivent comporter un autre �l�ment essentiel, � savoir une capacit� effective de suivi et d'�valuation permettant d'y apporter les ajustements n�cessaires pour les rendre aussi efficaces que possible pour les b�n�ficiaires.

257. Lorsque la d�mobilisation s'inscrit dans le cadre d'un processus de paix supervis� par les Nations Unies, une mission de maintien de la paix peut �tre charg�e de la coordination de l'aide entre les donneurs. Dans les autres cas, il est souhaitable de d�signer � cet effet un organisme bilat�ral ou multilat�ral chef de file.

258. Parall�lement aux programmes de d�mobilisation, il est important de mettre en place des moyens de r�duire la quantit� d'armes en circulation et de g�rer la destruction d'armes "exc�dentaires". En outre, l'une des priorit�s est souvent de renforcer les capacit�s de contr�le des fronti�res afin, entre autres, de contr�ler et limiter tant les importations illicites d'armes que leur exportations vers d'autres r�gions en proie � des tension ou � des conflits.

e) Meilleures pratiques recens�es 259. La r�insertion/ r�int�gration est un probl�me qui touche toute la famille : l'aide quelle qu'elle soit ne doit pas s'adresser uniquement aux soldats mais aussi aux personnes � leur charge. Les programmes qui ne tiennent pas compte du fait qu'un grand nombre d'anciens combattants ont beaucoup de personnes � charge ne peuvent r�pondre � tous leurs besoins et risquent de retarder leur r�int�gration dans la soci�t�.

260. La r�insertion/ r�int�gration est �galement un probl�me qui touche l'ensemble de la communaut� : la r�int�gration des anciens combattants est d'autant plus rapide qu'ils b�n�ficient d'un soutien plus important de la communaut�. Dans la mesure o� la famille �largie est un soutien important pour les soldats r�cemment d�mobilis�s, les anciens combattants doivent �tre encourag�s � �lire domicile l� o� r�sident des membres de leur famille. Il est cependant souhaitable de proc�der, au cours de la phase de planification, � une enqu�te par sondage aupr�s des communaut�s afin de s'assurer de leur attitude � l'�gard des anciens combattants et de leur aptitude � les aider. L� o� c'est possible, des efforts doivent �tre entrepris pour sensibiliser les dirigeants aux probl�mes auxquels sont confront�s les anciens combattants et leurs familles et les informer de la fa�on dont les communaut�s locales peuvent leur faciliter le passage � la vie civile. Les programmes de reconstruction � l'�chelon local peuvent �tre un moyen d'aider les collectivit�s qui accueillent un grand nombre d'anciens soldats.

261. Les programmes doivent tenir compte des besoins des groupes de population particuli�rement vuln�rables. Les handicap�s, les malades chroniques, les enfants soldats et les femmes comptent parmi ceux qui exigent la plus grande attention. Les femmes soldats et les veuves de guerre sont souvent confront�es � de graves difficult�s �conomiques et sociales et peuvent n�cessiter une aide particuli�re.

f) Orientations � l'intention des donneurs 262. Compte tenu de leur caract�re �minemment politique, les programmes de d�mobilisation sont tr�s sujets � des retards et � des modifications. Les soldats peuvent devoir rester dans les zones de regroupement beaucoup plus longtemps que pr�vu. Lorsqu'� l'issue du conflit aucun vainqueur ne s'est clairement impos�, les pressions politiques en faveur d'une modification du contenu des enveloppes de prestations et des conditions � remplir pour en b�n�ficier sont particuli�rement fortes. Malgr� ces difficult�s, les programmes de d�mobilisation doivent �tre �tablis tr�s t�t afin qu'ils r�pondent � l'�volution de la situation politique sans retarder la mise en oeuvre du processus de paix.

263. Les accords de paix devraient explicitement pr�voir la mise en oeuvre de programmes de d�mobilisation. La planification de la d�mobilisation et de la r�int�gration doit par cons�quent commencer bien avant que les troupes entrent dans les zones de regroupement et tenir compte le plus possible des risques d'impr�vus et de retard. Il est �galement essentiel de disposer de ressources mobilisables rapidement et avec souplesse.

264. Les programmes doivent, dans toute la mesure du possible, s'appuyer sur des enqu�tes effectives sur les profils de comp�tences et les aspirations professionnelles des soldats, et pr�voir les possibilit�s d'emploi de formation correspondantes dans les collectivit�s o� ils doivent retourner. Il convient �galement d'examiner les possibilit�s d'adapter les programmes existants pour r�pondre aux besoins des anciens combattants.

265. Les gouvernements qui sortent de longues p�riodes de guerre civile peuvent �tre tr�s d�sireux de consolider leur pouvoir, de r�compenser leurs fid�les partisans et de renforcer leur attachement en leur promettant des avantages qu'ils ne sont pas en mesure de fournir. Le non respect de promesses faites aux anciens combattants risque de susciter un m�contentement social. Les donneurs doivent aider les gouvernements � �laborer des programmes r�alisables et financi�rement viables.

F. Elimination des mines terrestres a) Principes et consid�rations � prendre en compte 266. Peu de cons�quences des conflits de ces derni�res d�cennies sont plus traumatisantes que les mutilations et les morts provoqu�es par les mines terrestres. Elles sont souvent pos�es au hasard, sans s'occuper du fait que la grande majorit� des victimes sont des civils innocents en qu�te de leur subsistance. Bien qu'elles soient une arme de guerre, les mines terrestres demeurent une menace bien apr�s la fin du conflit violent.

267. La menace omnipr�sente et impr�visible que repr�sentent les mines demeur�es en place est un obstacle majeur � la reprise d'une vie normale et au d�veloppement �conomique, social et politique. Les souffrances humaines caus�es par les mines terrestres sont une source de pr�occupation croissante pour la communaut� internationale depuis dix ans. Face aux cons�quences d'une s�rie de guerres civiles, les organisations humanitaires sont confront�es � deux probl�mes majeurs :

-A court terme, d'importantes ressources sont n�cessaires pour venir en aide aux bless�s qui ont besoin de soins m�dicaux et de r��ducation.

-A long terme, la localisation et l'enl�vement des mines terrestres sur l'ensemble du territoire en cause exigeront des efforts et des moyens consid�rables, probablement pendant des d�cennies, et d�tourneront de maigres ressources qui auraient pu �tre consacr�es � la reconstruction et au d�veloppement.

268. La question essentielle � r�soudre a d�j� �t� d�finie et d�battue au sein des instances internationales : l'utilit� militaire des mines terrestres, et en particulier des mines antipersonnel, l'emporte-t- elle sur les dommages corporels involontaires qu'elles infligent in�vitablement aux populations civiles ? Les n�gociations n'ont pas � ce jour abouti � une conclusion d�finitive sur le champ d'application, les questions de transfert et de v�rification, non plus que sur certains points techniques et �conomiques relatifs � la production et � l'utilisation des mines.

269. De plus en plus de pays sont d�sormais d'avis qu'il est indispensable de r�glementer la production, le commerce et l'utilisation des mines terrestres. L'Assembl�e g�n�rale des Nations Unies a � maintes reprises appel� � un moratoire des exportations de mines terrestres antipersonnel, et le Secr�taire g�n�ral a �nergiquement plaid� en faveur d'une interdiction totale de ces mines. Parall�lement, le processus d'Ottawa vise � un accord sur une interdiction totale pour d�cembre 1997.

b) Besoins et domaines de coop�ration 270. Pendant et apr�s un conflit, l'enl�vement des mines terrestres constitue fr�quemment une priorit� imm�diate. Le d�minage et la sensibilisation � la menace que repr�sentent les mines sont directement li�s aux actions d'urgence, en raison de la n�cessit� imm�diate de sauver des vies, d'assurer l'acc�s par voie de surface aux points de distribution des secours et de garantir la s�curit� de circulation et de r�int�gration des personnes d�plac�es.

271. Le d�minage est �galement un pr�alable essentiel � la reprise de l'activit� �conomique. Il est li� � la transition de la phase des secours d'urgence � celle du d�veloppement et � la normalisation progressive de tous les aspects de la vie nationale.

Encadr� 18. Co�ts compar�s du minage et du d�minage Les mines sont extr�mement bon march� � produire et � mettre en place mais difficiles et donc ch�res � localiser et � enlever. Le co�t moyen de production d'une mine est de 10 � 20 dollars environ, alors que les co�ts directs et indirects du d�minage sont de 300 � 1 000 dollars par mine. On estime que le co�t d'enl�vement de toutes les mines pos�es dans le monde pourrait se situer entre 33 et 85 milliards de dollars.

Pendant ce temps, le probl�me ne cesse de s'aggraver, la pose de mines terrestres se poursuivant � un rythme plus rapide que leur enl�vement. On estime � plus de 2 millions le nombre de mines pos�es en moyenne chaque ann�e alors que les op�rations de d�minage ne permettent d'en enlever qu'environ 100 000.

272. La premi�re chose � faire est de d�terminer l'ampleur du probl�me des mines terrestres dans le pays concern� en proc�dant � des relev�s d'urgence destin�s � fournir des informations de base. Des relev�s pr�cis sont ensuite n�cessaires, car il est indispensable de localiser les champs de mine et les tron�ons de route min�s afin de d�terminer les priorit�s et l'ordre dans lequel ces zones doivent �tre d�min�es. Les caract�ristiques physiques de ces zones et la densit� des mines sont importantes pour le choix des techniques de d�minage � utiliser.

273. La formation de personnel national de d�minage est �galement une priorit�. Quelle que soit la technique finalement appliqu�e dans les op�rations de d�minage, il est n�cessaire de disposer d'un corps de sp�cialistes form�s au d�minage manuel et de personnel d'encadrement poss�dant une exp�rience pratique. Il est la plupart du temps possible de recruter des volontaires dans les rangs de l'arm�e et le d�minage peut ainsi fournir des emplois aux militaires d�mobilis�s. Les enfants et les femmes qui de par leurs activit�s agricoles et de ramassage du bois de feu sont particuli�rement vuln�rables aux mines, doivent �tre cibl�s en priorit� dans les programmes de sensibilisation au danger des mines. Outre l'am�lioration de la s�curit�, de tels programmes peuvent �galement fournir aux femmes, qui exercent traditionnellement une fonction �ducatrice dans la soci�t�, des opportunit�s �conomiques et leur permettre de renforcer leur statut dans la soci�t�.

274. Des enqu�tes pr�liminaires sur l'ampleur du probl�me des mines et sur la formation de personnel national de d�minage sont fr�quemment entreprises pendant les op�rations de maintien de la paix. Pour ce qui est du d�minage, un principe fondamental des missions de maintien de la paix veut que l'enl�vement des mines rel�ve de la responsabilit� des organismes et du personnel nationaux. Mis � part le signalement de l'existence des champs de mine, les contingents �trangers n'assurent en principe pas eux-m�mes le marquage des p�rim�tres min�s ou la neutralisation des mines. Ils peuvent toutefois facilement fournir des instructeurs et mettre en place des centres temporaires de formation du personnel national aux bases th�oriques et pratiques du d�minage.

275. Le choix et la formation du personnel d'encadrement doivent �tre effectu�s avec grand soin car les gestionnaires et les responsables du d�minage jouent un r�le op�rationnel cl�. Une exp�rience pratique de l'encadrement de ce type d'op�rations est essentielle et des dispositions sp�ciales doivent �tre prises pour que les unit�s de maintien de la paix permettent aux nationaux d'acqu�rir une exp�rience en la mati�re dans des conditions op�rationnelles. En g�n�ral, les ONG sp�cialis�es dans le d�minage se sont montr�es capable de mettre en place rapidement et avec efficience des programmes de formation et de d�minage. Cependant, leur capacit� d'intervention ne leur permet g�n�ralement pas de mener ces activit�s � une �chelle qui soit � la mesure du probl�me

Encadr� 19. Munitions non explos�es Dans la plupart des pays o� des mines terrestres ont �t� pos�es, on trouve aussi un grand nombre de munitions d'infanterie et d'artillerie et de bombes non explos�es. Comme les mines terrestres, les munitions non explos�es constituent une menace pour toute personne qui les d�placerait d�lib�r�ment ou accidentellement ou qui essaierait de les r�cup�rer ou de jouer avec.

La neutralisation des munitions non explos�es exige des techniques diff�rentes de celles utilis�es pour le d�minage, bien que la plupart des types de munitions d'infanterie et d'artillerie puissent g�n�ralement �tre manipul�es par le personnel charg� du d�minage. Quoi qu'il en soit, les risques caus�s par les munitions non explos�es persistent dans beaucoup des pays qui ont particip� aux deux guerres mondiales, et ce sont g�n�ralement des unit�s sp�cialis�es de l'arm�e ou de la police qui se chargent de les enlever.

276. Une fois engag�es les op�rations de d�minage, les principaux besoins consistent d'abord � d�terminer comment instaurer une base institutionnelle durable pour toutes les activit�s en rapport avec les mines et en second lieu comment financer � long terme les op�rations de d�minage. Le d�minage de tout un pays est immanquablement une op�ration co�teuse, et le plus souvent aucun d�lai ne peut �tre fix� pour atteindre cet objectif.

c) Quelques enseignements de l'exp�rience 277. L'aide internationale a ax� ses efforts sur la cr�ation d'une capacit� locale faisant appel � des m�thodes manuelles qui se caract�risent par une forte intensit� de main-d'oeuvre et sont lentes � donner des r�sultats. Cela est en partie d� au fait que les techniques plus rapides de d�minage militaire, con�ues pour ouvrir des br�ches dans les d�fenses de l'ennemi, n'ont pas encore �t� adapt�es aux besoins civils, et que des essais compl�mentaires sont n�cessaires pour d�terminer dans quelles conditions on peut avoir avantage � les utiliser.

278. Bien �videmment, �tant donn� que les mines terrestres font tous les jours de nouveaux bless�s et de nouveaux morts, des pressions consid�rables s'exercent pour que l'on intervienne d'urgence. C'est pourquoi l'examen des aspects institutionnels des op�rations de d�minage, essentiels pour en assurer la durabilit�, est trop souvent n�glig� ou remis � plus tard.

279. Les pressions qui s'exercent pour que des programmes de d�minage soient entrepris rapidement accroissent le risque d'une pr�paration insuffisante. Si l'ampleur du probl�me n'est pas �valu�e correctement, et si les lieux de concentration de mines ne sont pas pr�alablement bien identifi�s, le choix de la technique de d�minage peut �tre inadapt�. Une plus grande attention doit �tre accord�e � la productivit� et � l'efficacit� par rapport aux co�ts des op�rations de d�minage. L'exploration manuelle m�tre carr� par m�tre carr�, qui est une t�che de longue haleine, peut �tre compl�t�e par d'autres techniques l� o� la densit� des mines est faible et o� les conditions topographiques le permettent.

280. Avec le temps, une fois cr��e une capacit� nationale d'enl�vement des mines, la dimension socio-�conomique du d�minage doit faire l'objet d'une attention accrue. Les objectifs humanitaires du d�minage sont intimement li�s au d�veloppement, en raison des cons�quences pour les transports, la production agricole, le secteur de la sant� et les services sociaux. Les questions d'utilisation des terres et le choix des collectivit�s b�n�ficiaires en font appara�tre la dimension politique. Il est par cons�quent essentiel que les m�canismes mis en place pour traiter et approuver les demandes de d�minage comportent un syst�me transparent d'�valuation des priorit�s.

d) Partenariats et acteurs 281. Les ONG et les organisations humanitaires ont �t� les premi�res � affronter les probl�mes pos�s par les mines terrestres. Tr�s t�t, les soci�t�s de la Croix-Rouge et les ONG ont pris en charge la r��ducation des handicap�s victimes des mines terrestres. En cr�ant des centres d'orthop�die et des ateliers de fabrication de proth�ses, elles ont apport� une contribution importante aux soins de sant� dans de nombreux pays. Ces activit�s ont conduit plusieurs ONG � �largir leur champ d'action et � se sp�cialiser �galement dans la mise en oeuvre de programmes pr�ventifs de sensibilisation � la menace que repr�sentent les mines, dans la signalisation des champs de mine et dans le d�minage.

282. Au sein du syst�me des Nations Unies, le D�partement des Affaires humanitaires a �t� nomm� comme le centre nerveux des activit�s de d�minage. Il a jou� un r�le d�terminant dans l'organisation des programmes et dans le suivi des activit�s de formation entreprises dans le cadre des op�rations de maintien de la paix. Il a constitu� pour cela un groupe de d�minage et cr�� un fonds d'affectation sp�ciale destin� � procurer des ressources permettant d'engager rapidement des op�rations de d�minage qui auraient risqu� d'�tre report�es � plus tard faute de cr�dits imm�diatement disponibles. Le D�partement des Affaires humanitaires met par ailleurs actuellement en place des moyens internes de conseil sur toutes les questions relatives aux mines terrestres et notamment sur le choix des techniques de d�minage en fonction des divers facteurs qui influent sur leur rapport co�t/ efficacit� et leur productivit�.

283. La coop�ration dans le domaine du d�minage se caract�rise par la contribution des �tablissements de d�fense de plusieurs pays donneurs. Celle-ci fait g�n�ralement suite � une participation aux op�rations de maintien de la paix ; les pays qui y ont contribu� continuent � d�tacher du personnel militaire pour r�pondre aux besoins d'assistance technique des organismes nationaux de d�minage, puisant en partie pour cela dans leurs budgets de d�fense.

284. Chacun dans son domaine, le HCR, le PAM et l'UNICEF contribuent directement en apportant un soutien financier aux programmes de d�minage et de sensibilisation � la menace que repr�sentent les mines. L'UNESCO a mis en place les comp�tences voulues pour promouvoir l'action de sensibilisation. En r�gle g�n�rale, le PNUD et le Bureau des services des projets des Nations Unies sont appel�s � apporter leur concours au renforcement des institutions. Ils fournissent � cet effet une aide en mati�re de gestion g�n�rale de la conduite des op�rations de d�minage et veillent � ce que les ressources affect�es � l'enl�vement des mines terrestres servent �galement les objectifs socio-�conomiques.

285. Le PNUD compl�te le D�partement des Affaires humanitaires en assurant la poursuite des op�rations de d�minage au-del� du stade de l'urgence. Ne disposant que de peu de ressources propres susceptibles d'�tre consacr�es � ces op�rations, le PNUD doit r�unir des moyens de financement fournis par plusieurs donneurs � travers des fonds d'affectation sp�ciale ou d'accords de partage des co�ts. M�me lorsque les donneurs bilat�raux pr�f�rent apporter une aide en nature, le PNUD joue un r�le de coordination g�n�rale et structure les contributions de telle sorte qu'elles se renforcent mutuellement.

e) Meilleures pratiques recens�es 286. Les donneurs ont en particulier int�r�t � soutenir : -la r�alisation � un stade pr�coce de relev�s d�taill�s de la pr�sence des mines afin de d�terminer l'ampleur des op�rations futures et d'examiner les diff�rentes techniques de d�minage envisageables ; -le lancement imm�diat d'op�rations de d�minage, en faisant appel � des ONG sp�cialis�es et en leur donnant les moyens d'�quiper et de d�ployer des d�mineurs ;

-la cr�ation dans les plus brefs d�lais d'une capacit� nationale de d�minage ; -la mise en place par les gouvernements, pour le long terme, de dispositifs institutionnels int�grant les syst�mes d'information et de v�rification, les activit�s de sensibilisation au danger des mines et les op�rations de signalisation des champs de mines et de d�minage ; -la mise en oeuvre de la strat�gie de d�minage du gouvernement, y compris les mesures visant � assurer sa compatibilit� avec les plans nationaux de d�veloppement �conomique et social, ainsi qu'avec les objectifs humanitaires ; -les activit�s d�ploy�es par les organisations non gouvernementales pour soigner les victimes des mines terrestres, notamment dans le domaine de la r��ducation post-traumatique et de la formation � des m�tiers productifs.

f) Orientations � l'intention des donneurs 287. L� o� des mines ont �t� d�ploy�es � grande �chelle, les mesures curatives sont co�teuses et longues � mettre en oeuvre. Un engagement � long terme de la part des donneurs est n�cessaire pour soutenir les efforts men�s par les pays victimes pour d�barrasser leur territoire de ces mines.

288. Les contributions financi�res aux op�rations de d�minage peuvent prendre diverses formes : i) dons en esp�ces au fonds d'affectation sp�ciale volontaire du Secr�taire G�n�ral pour l'aide au d�minage dont la gestion est assur�e par le D�partement des Affaires humanitaires ; ii) aide � la mise en place pour les Nations Unies de moyens de r�serve permettant d'assurer en urgence des missions de relev� et l'envoi de formateurs, de gestionnaires et de mat�riel de d�minage ; et iii) contribution � des fonds d'affectation sp�ciale ou � des arrangements de partage des co�ts destin�s � financer les op�rations nationales de d�minage.

289. Les essais indiquent que l'application de nouvelles techniques pourraient offrir des possibilit�s consid�rables. Une intensification des efforts de recherche destin�s � affiner les m�thodes actuelles de d�tection et � permettre un d�minage plus efficace pourrait acc�l�rer sensiblement les op�rations de d�minage, ce qui pr�senterait des avantages incalculables du point de vue des co�ts �conomiques et sociaux.

VI. Approches r�gionales de pr�vention des conflits et de construction de la paix A. Principes et approches 290. L'accroissement des conflits violents internes au cours des derni�res ann�es ne fait pas qu'aggraver les probl�mes socio-�conomiques, environnementaux et de d�veloppement, il cr�� aussi des risques d'instabilit� r�gionale. Les flux de r�fugi�s, en particulier, soulignent la n�cessit� d'aborder les questions telles que le nationalisme ethnique transfronti�re, la d�gradation de l'environnement et la p�nurie de ressources dans une perspective et un cadre r�gional. L'attention accrue port�e aux conflits internes ne doit pas conduire � ignorer que des conflits inter-�tats persistent dans certaines r�gions, exigeant de meilleures r�ponses de la part de la communaut� internationale.

291. La pr�vention des conflits suppose souvent de s'attaquer � des probl�mes de port�e nationale mais aussi r�gionale. L'un des d�fis auxquels se trouvent confront�s les initiatives externes provient du fait que l'Etat a traditionnellement �t� consid�r� comme l'expression exclusive de l'unit� politique souveraine et le gardien de sa s�curit�. La plupart des organisations internationales et bilat�rales sont organis�es pour mener les efforts d'aide au niveau des Etats. Ainsi, elles n'ont que des moyens limit�s de s'attaquer de fa�on efficace aux aspects r�gionaux des conflits tant en ce qui concerne leurs causes que leur cons�quences

292. Le sentiment de m�fiance envers les initiatives ext�rieures peut-�tre particuli�rement fort dans des situations de conflit violent. Les gouvernements post-coloniaux peuvent en effet avoir des raisons particuli�res de r�sister � toute forme d'assistance de la part de communaut� internationale qui pourrait sembler mettre en cause leur souverainet� et leur int�grit� territoriale en tant qu'Etats ind�pendants. Ce blocage peut repr�senter un obstacle majeur � une action rapide et efficace des Nations Unies et d'autres acteurs non r�gionaux. C'est peut-�tre ce qui justifie le plus de privil�gier des approches r�gionales des conflits et de la paix.

293. Le fait que les conflits internes entra�nent presque in�vitablement l'instabilit� � l'�chelon r�gional signifie que, pour �tre efficaces, les strat�gies d'intervention dans les situations de conflit devront �tre coordonn�es � l'�chelon r�gional et se fonder sur des principes d�cid�s et accept�s d'un commun accord. L'�laboration de cet ensemble de principes communs est la premi�re priorit�. Ces principes doivent consacrer la volont� des Etats membres de respecter les normes existantes telles qu'elles sont d�finies par les Nations Unies et le droit international, en s'appuyant sur les instruments r�gionaux existants

294. La fin de la guerre froide a d'ailleurs permis aux Nations Unies de r�affirmer sa Charte en privil�giant les organisations et arrangements r�gionaux en tant que moyen de pr�venir et g�rer les conflits et les phases de transition qui leur font suite. Parall�lement � cela on a pu observer une multiplicit� d'initiatives institutionnelles et de r�formes des mandats de diverses organisations r�gionales, qui t�moigne de l'�volution des structures r�gionales de dialogue et de coop�ration pour la s�curit�. L'Organisation des Etats am�ricains (OEA) et l'Organisation de l'unit� africaine (OUA) en particulier ont d�montr� une d�termination renouvel�e � essayer de traiter les conflits internes et le d�veloppement d�mocratique.

B. Dimension r�gionale des conflits a) Les conflits inter-�tats et l'instabilit� r�gionale 295. Beaucoup de tensions intergroupes et d'in�galit�s structurelles graves qui --conjugu�es � une carence de m�canismes politiques efficaces peuvent conduire � des conflits internes violents --pourraient �tre r�solues par des initiatives au niveau r�gional. La participation politique, la d�centralisation et le partage des pouvoirs, des garanties constitutionnelles et juridiques et la r�forme du r�le des forces arm�es sont autant de questions essentielles qui ont une dimension r�gionale. Dans le domaine �conomique, la reconstruction � long terme peut �tre mieux assur�e par des mesures concr�tes d'int�gration r�gionale des march�s. En outre, l'harmonisation au niveau r�gional des normes et pratiques en mati�re de droits de l'homme (notamment en ce qui concerne les minorit�s) peut contribuer pour beaucoup � la stabilit� et r�duire les risques de soutien ext�rieur � d'�ventuelles r�bellions.

Encadr� 20. R�ponses aux initiatives locales � Contr�le des armes en Afrique de l'Ouest Tant de par leurs causes que leurs cons�quences, qu'il s'agisse de d�placements de r�fugi�s en grand nombres, de trafic d'armes, ou de la mont�e du banditisme, parfois suite � des programmes de d�mobilisation mal conduits, les probl�mes d'ins�curit� interne d�passent tr�s souvent les fronti�res nationales, et appelle � une coop�ration r�gionale. Ainsi, un groupe de pays d'Afrique de l'Ouest comprenant le Mali, le Burkina Faso, le Tchad, la Cote d'Ivoire, la Mauritanie, le Niger, le S�n�gal ont cherch� depuis 1994 � d�velopper leur coop�ration dans les domaine de la s�curit� et de la construction de la paix. Les domaines sp�cifiques de coop�ration comprennent notamment l'harmonisation des r�glementations nationales relatives � l'importation ou la vente d'armes et de munitions, et le renforcement de la coop�ration entre les services de police et forces arm�es des diff�rents pays concern�s, afin de mieux lutter contre le banditisme et le trafic d'armes.

Suite � des initiatives prometteuses men�es au Mali, o� des strat�gies ont �t� sp�cialement con�ues pour s'attaquer au probl�me de l'ins�curit� en vue de consolider la paix, et le d�veloppement, des tentatives similaires sont mises en oeuvre dans d'autres pays de la r�gion. En novembre 1996, des repr�sentants des gouvernements et d'organisations r�gionales ainsi que des experts ind�pendants se sont r�unis � Bamako sous l'�gide du PNUD et de l'Institut des Nations Unies pour la Recherche sur le D�sarmement (UNIDIR) pour �tudier les possibilit�s de coop�ration sous-r�gionale dans le domaine de la s�curit�. Parmi les approches prometteuses examin�es on peut citer: une meilleure coordination des mesures volontaires de contr�le des importations d'armes, l'adoption de codes de bonne conduite r�gissant les relations entre civiles et militaires, le renforcement et l'harmonisation des r�glementations relatives � la circulation et � la possession d'armes � feu, la cr�ation d'un registre infra r�gional pour le recensement des armes aux fronti�res, et le renforcement de la coop�ration pour les contr�les.

296. Les probl�mes en jeu dans un conflit interne prolong� sont g�n�ralement plus importants pour les pays voisins que pour la communaut� internationale en g�n�ral. Les acteurs r�gionaux peuvent souvent, mais pas toujours, non seulement s'int�resser plus directement aux possibilit�s d'intervention ext�rieure efficace mais aussi en avoir une appr�ciation plus nuanc�e. La communaut� internationale a appris, par exp�rience, que c'est souvent l'organisation ou le groupement r�gional qui peut �tre le mieux plac� pour organiser une action multilat�rale de pr�vention d'un conflit interne.

297. Les approches r�gionales (qu'il s'agisse de groupes de contact plurilat�raux ou d'organisations r�gionales) offrent l'avantage de permettre de r�soudre le probl�me de la souverainet� en engageant effectivement les Etats dans un processus � la fois supranational et localis�. Un gouvernement qui est membre d'une organisation r�gionale a des chances de se sentir moins menac� par un processus r�gional d'intervention et d'engagement coordonn� par cette organisation que par l'intervention d'acteurs non r�gionaux. Ce type d'approche permet aussi une contribution cr�ative des puissances moyennes r�gionales au dialogue. Cela correspond � l'approche dite � sud-sud �, en vertu de laquelle les pays voisins coop�rent et apportent leur appui � la consolidation de la paix, � la reconstruction et � la mise en oeuvre des r�formes. Il faut toutefois reconna�tre que l'impartialit� des organisations r�gionales ou des pays voisins est parfois discutable. Lorsque que se d�roulent des luttes pour le pouvoir r�gional ou que les craintes d'influences h�g�moniques sont fortes, les institutions internationales peuvent s'av�rer de meilleurs instruments pour apporter des r�ponses et un soutien de la communaut� internationale.

298. La consolidation de la paix et la pr�vention des conflits doivent pouvoir perdurer une fois que le soutien ext�rieur des donneurs a pris fin ou est redevenu un soutien ordinaire au d�veloppement. Cela pose l'importante question de � l'appropriation � par les pays en cause de ces processus, de leur enracinement dans des approches locales/ r�gionales de la pr�vention et de la gestion des conflits, et du r�le que doivent jouer par la suite les organisations locales et r�gionales dans la mise au point et l'ex�cution des programmes. En fondant ces programmes sur des approches r�gionales, les donneurs auront probablement plus de chances d'assurer plus efficacement leur viabilit� � long terme et leur compatibilit� avec les normes r�gionales. Les protagonistes du conflit seront davantage incit�s � poursuivre un processus qui r�pond � leurs int�r�ts et � leurs pr�occupations.

b) L'impact des populations de r�fugi�s sur les pays d'accueil 299. Abstraction faite de leurs r�percussions politiques � l'�chelle r�gionale, les mouvements massifs de r�fugi�s ont d'importantes retomb�es sociales et �conomiques dans les pays h�tes. D�s leur arriv�e, les besoins des r�fugi�s en ressources et biens dont l'offre est limit�e, qu'il s'agisse de terres, d'eau, de bois de chauffage, de logements ou de vivres, entrent en concurrence avec ceux des ressortissants nationaux. Leur pr�sence soumet in�vitablement les am�nit�s locales � de lourdes ponctions, obligeant les autorit�s du pays d'accueil � d�tourner des sources d'�nergie et des ressources de leurs efforts de d�veloppement.

300. A maints �gards, les afflux de r�fugi�s en grand nombre constituent donc un obstacle suppl�mentaire au d�veloppement des pays h�tes. Leurs retomb�es directes et indirectes peuvent se faire sentir longtemps encore apr�s que les r�fugi�s sont retourn�s dans leur pays d'origine. Par exemple, les dommages caus�s � l'environnement par un afflux soudain et inattendu de population d�munies sont souvent d�vastateurs. Les probl�mes induits par la consommation de bois pour le chauffage et la construction d'abris dans des zones � l'�cosyst�me d�j� fragile, sont particuli�rement graves.

301. La pr�sence de r�fugi�s n'a pas que des retomb�es n�gatives pour les r�gions d'accueil ; elle g�n�re en effet souvent diverses sortes d'activit�s �conomiques, de m�me que des possibilit�s d'�changes, d'emploi et de revenu, qui sont autant d'avantages pour les populations locales. Dans l'ensemble toutefois, ces aspects positifs compensent rarement les cons�quences dommageables d�coulant de la pr�sence de r�fugi�s en grand nombre et sur de longues p�riodes.

302. Lorsque les r�fugi�s appartiennent au m�me groupe culturel et linguistique que la population locale, leur situation suscitent souvent une vague de sympathie. Lorsque les liens sont plus l�ches, il n'est pas rare que naissent des frictions et des jalousies. La population locale, surtout si elle est pauvre, est souvent m�contente de voir les r�fugi�s recevoir des soins et des services dont elle ne b�n�ficie pas elle-m�me. C'est pourquoi les organismes d'aide doivent s'employer � promouvoir l'�galit� de traitement pour les r�sidents des zones d'accueil, particuli�rement dans des domaines comme l'�ducation et la sant�.

303. Il est de plus en plus reconnu que le fait d'accorder asile � des r�fugi�s impose un lourd tribut aux pays h�tes, lesquels appartiennent souvent � la cat�gorie des pays les moins avanc�s. Si, jusqu'� pr�sent, la r�action des donneurs a �t� variable, la communaut� internationale se pr�occupe d�sormais davantage d'aider � att�nuer les effets n�fastes de la pr�sence de r�fugi�s, surtout lorsque celle-ci tend � se prolonger.

304. Le plus souvent, le fait qu'un pays accorde le droit d'asile n'implique pas que la pr�sence de r�fugi�s sur son territoire n'est pas source de tensions politiques pouvant affecter les relations entre les pays de la r�gion. En cons�quence, les probl�mes soulev�s par le droit d'asile et le rapatriement des r�fugi�s ont un caract�re �minemment r�gional et ne peuvent souvent trouver de solution que dans le cadre d'un dispositif politique r�gional.

Encadr� 21. Fournir des moyens d'existence aux r�fugi�s afghans dans les zones d'accueil au Pakistan Plus de trois millions de r�fugi�s afghans, accompagn�s d'autant de t�tes de b�tail, ont afflu� au Pakistan pour �chapper � la guerre qui s�vissait dans leur pays d'origine. Leurs besoins quotidiens (en bois de chauffage, eau, foin pour le b�tail, etc.) ont caus� de graves dommages au milieu naturel, notamment aux p�turages et aux zones foresti�res, d�j� soumis � de fortes pressions, et leur pr�sence en aussi grand nombre a conduit � un engorgement des infrastructures rurales locales.

Le programme Income Generating Project for Refugee Areas (IGPRA), mis au point en 1984 par le HCR et le Gouvernement et administr� conjointement avec la Banque mondiale, a mis l'accent sur les besoins �conomiques des r�fugi�s et les probl�mes environnementaux li�s � la pr�sence des r�fugi�s.

Les principaux objectifs de l'IGPRA �taient, entre autres, de : --cr�er des emplois et g�n�rer des revenus, principalement pour les r�fugi�s afghans et pour les communaut�s locales au travers de projets ruraux � forte intensit� de main-d'oeuvre ; --de r�parer une partie des dommages physiques caus�s par les r�fugi�s et leur b�tail aux infrastructures et � l'environnement; et cr�er des infrastructures durables pour le pays d'accueil ; ---former sur le tas les r�fugi�s afghans pour leur r�insertion future dans leur pays.

Ces projets �taient principalement divis�s en trois secteurs :

--la reforestation et la conservation des sols (productions de plantules, plantations sur des terres tr�s d�grad�es, etc.); --la gestion des bassins versants, l'irrigation, le drainage et la protection contre les inondations ; --l'am�lioration des infrastructures routi�res.

Sur plus d'une d�cennie, pr�s de 300 sous-projects ont �t� mis en oeuvre, financ�s par un fonds commun mis en place par plusieurs membres du CAD administr� par la Banque mondiale. Le co�t total de ces projets s'est �lev� � plus de 86 millions de dollars E. U. Le programme a eu de nombreux effets positifs durables pour le pays h�te, sous forme de r�duction des pertes de terre fertiles, de r�duction de la pression sur les for�ts restantes, et de r�duction de l'�rosion des sols et des d�g�ts caus�s par les inondations, etc.). De plus, les nouvelles routes am�lior�es ont permis l'acc�s � des zones isol�es et les opportunit�s d'�changes marchands ont augment�.

C. Meilleures pratiques recens�es a) M�canismes r�gionaux pour la pr�vention des conflits et la construction de la paix 305. Les principes de la s�curit� r�gionale doivent reposer sur les principaux �l�ments de la s�curit� humaine en g�n�ral. �tat de droit, justice sociale, d�veloppement �quitable et durable, protection des droits fondamentaux de l'�tre humain, d�mocratisation et dialogue et r�conciliation entre les groupes. A cet �gard, les donneurs doivent s'efforcer d'aider les organisations r�gionales � faire respecter les principes et les engagements internationaux �tablis. En m�me temps, ils doivent encourager les organisations r�gionales � adopter des politiques de pr�vention des conflits et de consolidation de la paix et orienter leur efforts de renforcement des capacit�s des organisations r�gionales de fa�on qu'elles puissent assurer la liaison entre la communaut� internationale et les Etats de la r�gion. Les moyens techniques et financiers d�terminent souvent les activit�s que les organisations r�gionales peuvent entreprendre. Les donneurs peuvent leur fournir des comp�tences techniques dans de nombreux domaines y compris la communication et la logistique.

306. Les organismes de d�veloppement doivent aussi envisager d'assurer un soutien dans d'autres r�gions o� il existe encore peu de dispositifs efficaces pour la pr�vention des conflits et la consolidation de la paix au niveau r�gional, comme l'Asie du nord-est et l'Asie du sud. Les nouveaux arrangements r�gionaux comme l'Association de Coop�ration R�gionale Sud-Asiatique (SAARC), qui se concentrent sur des questions relatives � la coop�ration �conomique et commerciale, pourraient �tre encourag�s � �largir leur champ � d'autres questions concernant la s�curit� r�gionale ou sous-r�gionale, telles le droit des minorit�s, la distribution des ressources et l'instauration de la confiance sur le plan militaire.

307. Les organismes donneurs peuvent aussi apporter un soutien financier et technique aux ONG r�gionales et locales qui travaillent � mettre au point des strat�gies r�gionales communes en mati�re de conflit et de s�curit�. Une attention particuli�re doit �tre port�e � l'am�lioration des capacit�s des organisations f�minines nationales et locales, afin d'�tablir des r�seaux r�gionaux de soutien au dialogue et � la r�conciliation. Soutenues par la communaut� des donneurs, les organisations r�gionales doivent aussi �tre incit�es � coop�rer de fa�on syst�matique avec les ONG r�gionales et locales.

b) Gestion des ressources naturelles communes et pr�vention des conflits 308. Une comp�tition accrue pour l'acc�s � des ressources naturelles communes, telle la terre ou l'eau peut inciter les groupes les plus puissants � s'en r�server l'usage exclusif, provoquant l'�migration des groupes marginaux ou vuln�rables, vers des zones moins habitables et souvent �cologiquement fragiles. Ce genre de ph�nom�ne peut contribuer � accentuer les pressions sur l'environnement et les risques de tensions sociales. Dans certains cas, l'insuffisance de ressources renouvelables, telles que les terres cultivables, les for�ts ou l'eau, peut provoquer des troubles civils � l'�chelon communautaire ou national et �tre source de suspicions et de tensions entre pays.

309. Pour r�gler les probl�mes pos�s par la gestion des ressources naturelles communes � une r�gion, il est souvent indispensable de mettre en place un syst�me de cogestion des ressources. Un tel syst�me devra �tre adapt� aux caract�ristiques de la r�gion concern�e, mais il peut encourager la gestion � long terme des ressources, par des m�thodes fond�es sur une coop�ration de tous les int�ress�s afin de r�duire les risques de conflit. D'une mani�re g�n�rale, plus solide sera l'assise du syst�me de cogestion des ressources --du point de vue de sa neutralit� par rapport aux int�r�ts des diverses parties --mieux il sera en mesure de contribuer au r�glement des diff�rends.

310. Tout en tenant compte de fa�on r�aliste des int�r�ts et moyens d'influence respectifs des parties en pr�sence, un solide syst�me de cogestion des ressources exploite les id�es novatrices et les connaissances scientifiques pour cerner les probl�mes et proposer des solutions. Il utilise ses comp�tences en mati�re de n�gociation pour influer sur la fa�on dont les probl�mes sont d�finis et abord�s, de mani�re � servir les int�r�ts de toutes les parties en pr�sence. Il peut ainsi mettre au point, au nom de ces derni�res, des moyens efficaces d'aboutir � des solutions qui recueillent l'assentiment g�n�ral. Les syst�mes de cogestion des ressources peuvent aussi aider les d�cideurs nationaux � mieux appr�hender dans quels domaines une intervention se r�v�lera la plus productive; permettre la collecte et la diffusion de donn�es utiles et contribuer � affiner les m�thodes et les th�ories sur lesquelles s'appuient les d�cideurs pour cerner les causes des probl�mes de d�veloppement.

311. Le plus important est que la gestion des ressources se fonde de plus en plus sur des observations rationnelles concernant l'�volution de la qualit� et du volume des ressources disponibles. Lorsque les parties en pr�sence �changent les r�sultats de leurs recherches, cela contribue souvent � att�nuer les tensions et � faire prendre conscience de l'universalit� du probl�me rencontr� et du fait que sa solution passe par une coop�ration pour le d�veloppement et non par un conflit.

312. Les donneurs peuvent apporter leur soutien dans de nombreux domaines, et notamment: -le transfert de connaissances et de comp�tence, y compris dans les domaines de la formulation des politiques, de la planification et de l'�tablissement de proc�dures institutionnelles de prise des d�cisions; -le transfert de technologie; -le d�veloppement des capacit�s dans le domaine de l'environnement; et

-la facilitation, la m�diation et la coordination. D. Orientations � l'intention des donneurs 313. Les pays voisins sont souvent � la fois tr�s d�sireux et particuli�rement bien plac�s pour contribuer � la mise en oeuvre et � la r�ussite de programmes de consolidation de la paix et de reconstruction. La capacit� d'apporter une assistance technique et une formation appropri�e, la confrontation des exp�riences de r�forme et la connaissance intime des probl�mes et des communaut�s de la r�gion sont autant d'�l�ments qui militent en faveur d'un engagement plus pouss� des autres pays de cette r�gion, pour autant qu'ils puissent intervenir en l'absence de tout parti pris.

314. L'absence de v�ritable m�canismes de dialogue entre l'Etat et les diff�rents acteurs du pays est un probl�me difficile � r�soudre pour les Etats et les organismes donneurs, alors que c'est peut-�tre la question centrale pour une pr�vention efficace. Les organisations non gouvernementales r�gionales et locales et les organisations communautaires (parmi lesquelles les groupes de femmes qui militent pour la paix) peuvent souvent offrir des perspectives int�ressantes � cet �gard. Les organismes donneurs et les organisations r�gionales doivent s'employer � identifier les principales ONG r�gionales qui pourraient servir d'interm�diaires et assurer la coordination de la fourniture sur le terrain, par les ONG locales, d'une aide en faveur de la paix. Une strat�gie r�gionale int�gr�e pourrait donc comporter une double approche, le travail se faisant � la fois avec les organisations et groupes r�gionaux � l'�chelon supranational, et avec les ONG r�gionales et locales � l'�chelon infra-national.

315. Les donneurs doivent encourager les initiatives visant � une plus grande coop�ration et int�gration �conomique r�gionales, car, outre l'expansion des gains �conomiques locaux, cela favoriserait la confiance mutuelle et la coop�ration. Encourager la coop�ration � sud-sud � sur des aspects fonctionnels particuliers de secteurs sp�cifiques pourrait �tre un moyen d'instaurer le dialogue r�gional et de d�velopper une conception commune des int�r�ts mutuels.

316. Les organes sous-r�gionaux constitu�s pour s'occuper de probl�mes fonctionnels comme les �changes ou la gestion des ressources peuvent parfois servir de base pour aborder les probl�mes de tensions et conflits r�gionaux. Ces moyens plus indirects de contribuer � la pr�vention des conflits et � la consolidation de la paix peuvent s'av�rer efficaces, particuli�rement sur le long terme. Les donneurs doivent aussi appuyer la cr�ation de m�canismes de prise de d�cision inter-�tats comportant un dispositif expr�s de r�glement des litiges.

317. Il est rare que les stocks et les flux de ressources naturelles soient confin�s � un territoire et ne d�bordent pas les fronti�res nationales et l'exp�rience r�cente met en �vidence la n�cessit� de revenir sur la pratique consistant � en confier le contr�le administratif exclusif � des institutions nationales. Les donneurs doivent encourager et faciliter la mise en place de syst�mes de cogestion des ressources qui deviendront une mat�rialisation formelle du r�seau de relations bilat�rales unissant des pays voisins, Pour fonctionner efficacement, un syst�me de cogestion des ressources doit avoir le pouvoir de faire appliquer un plan de gestion et donc b�n�ficier des moyens techniques et op�rationnels n�cessaires pour garantir sa cr�dibilit� aux yeux des �tats qui y participent.

Encadr� 22. La r�gion du M�kong --Risques de conflits et potentiel de coop�ration Les ressources du bassin du M�kong �tant de plus en plus exploit�es pour promouvoir les objectifs �conomiques des �tats riverains --Tha�lande, Vietnam, Laos, Cambodge et Chine --le risque de divergences et de conflits d'int�r�ts constitue une menace pour la stabilit� dans la r�gion.

Les disparit�s consid�rables de dimension et de puissance des Etats, qui suscitent parmi les plus petits pays une certaine crainte d'�tre domin�s par les plus grandes puissances, et un enthousiasme in�gal pour une exploitation rapide des ressources de la r�gion, peuvent cr�er des risques de tensions dans une r�gion d�j� d�chir�e par la guerre pendant la plus grande partie de ce si�cle.

L'�volution de la situation politique et �conomique dans le bassin du M�kong appelle des approches nouvelles et souples de la gestion des ressources et des strat�gies qui permettraient d'assurer une mise en valeur au profit de tous et l'existence de m�canismes efficaces de r�glement des litiges entre les pays.

La Commission du M�kong est bien plac�e pour veiller � ce que cette exploitation se fasse d'une mani�re �quitable et durable. La structure de cette organisation et la volont� de coop�rer qui y pr�side lui donne la possibilit� d'assumer un r�le pratique et une autorit� morale consid�rables dans la gestion des affaires r�gionales en Asie du sud-est.

En m�me temps que les tensions diminuent entre les Etats, les occasions de conflit entre des groupes d'int�r�t sur des questions d'environnement ou d'utilisation et de distribution des ressources risquent de se multiplier, pour divers motifs :

-tensions ethniques d�coulant des modes d'utilisation des ressources --notamment entre les cultivateurs itin�rants et les autres utilisateurs;

-tensions inter-r�gionales cr��es en particulier par les disparit�s de revenus et les conflits entre les besoins des diff�rentes r�gions d'un pays, souvent aggrav�s par l'acc�s ou le manque d'acc�s aux ressources du fleuve; -divisions sociales qui apparaissent souvent lorsque la propri�t� des ressources est mal d�finie; -mise en question des int�r�ts de la majorit� r�sultant de la d�mocratisation et de la lib�ralisation socio-politique, avec l'�mergence de nouvelles ONG et de nouveaux groupes d'int�r�t qui entretiennent souvent des liens transfronti�res. Ces nouveaux foyers de tension et d'ins�curit� appellent de nouveaux types d'approches de la coop�ration, du r�glement des conflits et de la paix dans la r�gion du M�kong et au-del�. Consid�rer les choses uniquement du point de vue des �tats-nations n'est peut-�tre pas l'approche la plus efficace, du moins dans certains th��tres de conflit.

318. Les approches r�gionales de la r�forme des forces arm�es et du secteur de la s�curit� devraient, le plus possible s'appuyer sur les comp�tences acquises par d'autres partenaires r�gionaux dans des domaines comme la d�mobilisation et la r�insertion. Elles peuvent consister � organiser des �changes intra-r�gionaux d'officiers des forces arm�es et de la police afin de d�gager des enseignements des exp�riences men�es pour accro�tre leur professionnalisme et renforcer le contr�le exerc� par le pouvoir civil.

319. Il faut toutefois reconna�tre que, si elles ont un certain potentiel, beaucoup d'organisations r�gionales du monde en d�veloppement souffrent de certaines limitations : elles ont souvent peu de moyens, financiers ou autres, et une capacit� institutionnelle ou administrative insuffisante pour mettre en place des m�canismes globaux et int�gr�s de pr�vention des conflits et de consolidation de la paix. Cela dit des arrangements r�gionaux ad hoc peuvent aussi �tre un moyen efficace de pr�venir les conflits mais cela suppose cependant que l'objectif ultime vis� par l'approche r�gionale pr�conis�e est la pr�vention des conflits et non la cr�ation d'institutions en soi. Ce qui importe, c'est de soutenir l'instrument le plus efficace pour r�soudre le conflit, qu'il s'agisse d'une organisation intergouvernementale officielle, d'une ONG, d'un groupement ad hoc ou d'une autre solution.

320. Les imp�ratifs de la coordination, l'�change d'information et le r�le d'agence ou de donneur chef de file s'appliquent tout autant aux approches r�gionales qu'aux situations nationales. La coordination peut beaucoup aider les organisations ou groupes r�gionaux � d�terminer les priorit�s des programmes et faciliter l'�laboration (avec certaines ONG, institutions financi�res internationales et organismes donneurs bilat�raux), des grandes orientations � suivre pour assurer l'efficacit� de l'aide aussi bien en termes de pr�vention des conflits et de consolidation de la paix que de d�veloppement. Cette coordination entre donneurs qui est indispensable impliquera souvent, de subordonner les objectifs nationaux aux int�r�ts r�gionaux communs. Dans certains cas, les banques r�gionales de d�veloppement pourraient servir d'instances pour la coordination des strat�gies r�gionales int�gr�es et en m�me temps lancer des programmes visant � renforcer les capacit�s r�gionales. Les donneurs pourraient en outre encourager l'�change de comp�tences et de donn�es d'exp�rience, non seulement entre les Etats et les groupes non gouvernementaux d'une m�me r�gion, mais aussi entre diff�rentes organisations r�gionales.


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