Préambule
La Conférence générale,
Rappelant qu'en vertu de son Acte constitutif l'UNESCO sepropose "de contribuer au maintien de la paix et de lasécurité en resserrant, par l'éducation, la science et laculture, la collaboration entre nations afin d'assurer lerespect universel de la justice, de la loi, des droits del'homme et des libertés fondamentales" (art. I, 1) et qu'àcette fin l'Organisation s'attachera à "faciliter la librecirculation des idées, par le mot et par l'image" (art. I, 2),
Rappelant en outre qu'en vertu de l'Acte constitutif les Etatsmembres de l'UNESCO, "résolus à assurer à tous le plein etégal accès à l'éducation, la libre poursuite de la véritéobjective et le libre échange des idées et des connaissances,décident de développer et de multiplier les relations entreles peuples en vue de se mieux comprendre et d'acquérir uneconnaissance plus précise et plus vraie de leurs coutumesrespectives" (Préambule, 6e alinéa),
Rappelant les buts et les principes des Nations Unies telsqu'ils sont définis dans la Charte,
Rappelant la Déclaration universelle des droits de l'hommeadoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1948 etparticulièrement l'article 19 qui stipule que "tout individu adroit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui impliquele droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui dechercher, de recevoir et de répandre, sans considérations defrontières, les informations et les idées par quelque moyenque ce soit", ainsi que le Pacte international relatif auxdroits civils et politiques, adopté par l'Assemblée généraledes Nations Unies en 1966, qui proclame les mêmes principes enson article 19 et condamne en son article 20 l'incitation à laguerre, l'appel à la haine nationale, raciale ou religieuse outoute forme de discrimination, d'hostilité ou de violence,
Rappelant l'article 4 de la Convention internationale surl'élimination de toutes les formes de discrimination racialeadoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1965, etla Convention internationale sur l'élimination et larépression du crime d'apartheid, adoptée par l'Assembléegénérale des Nations Unies en 1973, aux termes desquels lesEtats adhérents à ces conventions s'engagent à adopterimmédiatement des mesures positives pour éliminer touteincitation à une telle discrimination ou tout acte dediscrimination et ont décidé d'empêcher que le crimed'apartheid et autres politiques ségrégationnistes semblablesou leurs manifestations ne soient encouragés de quelquemanière que ce soit,
Rappelant la Déclaration concernant la promotion parmi lesjeunes des idéaux de paix, de respect mutuel et decompréhension entre les peuples, adoptée par l'Assembléegénérale des Nations Unies en 1965,
Rappelant les déclarations et les résolutions adoptées dansles différentes institutions des Nations Unies concernantl'instauration d'un nouvel ordre économique international etle rôle que l'UNESCO est appelée à jouer dans ce domaine,
Rappelant la Déclaration des principes de la coopérationculturelle internationale, adoptée par la Conférence généralede l'UNESCO en 1966,
Rappelant la résolution 59 (I) de l'Assemblée générale desNations Unies, adoptée en 1946, qui déclare :
"La liberté de l'information est un droit fondamental del'homme et la pierre de touche de toutes les libertés à ladéfense desquelles se consacrent les Nations Unies... Laliberté de l'information exige nécessairement que ceux quijouissent de ses privilèges aient la volonté et le pouvoir dene pas en abuser. L'obligation morale de rechercher les faitssans préjuger et de répandre les informations sans intentionmalveillante constitue l'une des disciplines essentielles dela liberté de l'information...",
Rappelant la résolution 110 (II) adoptée en 1947 parl'Assemblée générale des Nations Unies, condamnant toutepropagande qui est destinée ou de nature à provoquer ou àencourager toute menace de paix, rupture de la paix ou toutacte d'agression,
Rappelant la résolution 127 (II) de la même Assemblée quiinvite les Etats membres à lutter dans les limitesconstitutionnelles contre la diffusion des nouvelles faussesou déformées qui sont de nature à nuire aux bons rapportsentre Etats, ainsi que les autres résolutions de la mêmeAssemblée concernant les moyens de grande information et leurcontribution au renforcement de la confiance et des liensd'amitié entre les Etats,
Rappelant la résolution 9.12 adoptée par la Conférencegénérale de l'UNESCO en 1968, qui réaffirme l'objectif ques'est assigné l'Organisation de contribuer à éliminer lecolonialisme et le racisme, ainsi que la résolution 12.1adoptée par la Conférence générale en 1976, qui déclare que lecolonialisme, le néocolonialisme et le racisme sous toutes sesformes et manifestations sont incompatibles avec les objectifsfondamentaux de l'UNESCO,
Rappelant la résolution 4.301 adoptée en 1970 par laConférence générale de l'UNESCO sur la contribution des moyensde grande information au renforcement de la compréhension etde la coopération internationales dans l'intérêt de la paix etdu bien-être de l'humanité et à la lutte contre la propagandeen faveur de la guerre, du racisme, de l'apartheid et de lahaine entre nations, et consciente de la contributionfondamentale que les moyens d'information peuvent apporter àla réalisation de ces objectifs,
Rappelant la Déclaration sur la race et les préjugés raciauxadoptés par la Conférence générale de l'UNESCO à sa vingtièmesession,
Consciente de la complexité des problèmes posés parl'information à la société moderne et de la diversité dessolutions qui leur ont été apportées, mise en lumièrenotamment par la réflexion menée au sein de l'UNESCO, et enparticulier du légitime souci des uns et des autres de voirpris en compte leurs aspirations, leurs points de vue et leuridentité culturelle,
Consciente des aspirations des pays en développement àl'instauration d'un nouvel ordre mondial de l'information etde la communication plus juste et plus efficace,
Proclame en ce vingt-huitième jour de novembre 1978 la présentDéclaration sur les principes fondamentaux concernant lacontribution des organes d'information au renforcement de lapaix et de la compréhension internationales, à la promotiondes droits de l'homme et à la lutte contre le racisme,l'apartheid et l'incitation à la guerre.
Article premier
Le renforcement de la paix et de la compréhensioninternationale, la promotion des droits de l'homme, la luttecontre le racisme, l'apartheid et l'incitation à la guerreexigent une circulation libre et une diffusion plus large etmieux équilibrée de l'information. Les organes d'informationont à cette fin une contribution primordiale à apporter; cettecontribution sera d'autant plus efficace que l'informationreflétera les différents aspects du sujet traité.
Article II
1. L'exercice de la liberté d'opinion, de la libertéd'expression et de la liberté de l'information, reconnu commepartie intégrante des droits de l'homme et des libertésfondamentales, est un facteur essentiel du renforcement de lapaix et de la compréhension internationale.
2. L'accès du public à l'information doit être garanti parla diversité des sources et des moyens d'information dont ildispose, permettant ainsi à chacun de s'assurer del'exactitude des faits et de fonder objectivement son opinionsur les événements. A cette fin, les journalistes doiventavoir la liberté d'informer et les plus grandes facilitéspossibles d'accès à l'information. De même, il importe que lesorganes d'information répondent aux préoccupations des peupleset des individus, favorisant ainsi la participation du publicà l'élaboration de l'information.
3. En vue du renforcement de la paix et de la compréhensioninternationales, de la promotion des droits de l'homme et dela lutte contre le racisme, l'apartheid et l'incitation à laguerre, les organes d'information, partout dans le monde, enraison du rôle qui est le leur, contribuent à promouvoir lesdroits de l'homme, notamment en faisant entendre la voix despeuples opprimés qui luttent contre le colonialisme, lenéocolonialisme, l'occupation étrangère et toutes les formesde discrimination raciale et d'oppression et qui ne peuvents'exprimer sur leur propre territoire.
4. Pour que les organes d'information soient à même depromouvoir dans leurs activités les principes de la présenteDéclaration, il est indispensable que les journalistes etautres agents des organes d'information, dans leur propre paysou à l'étranger, jouissent d'une protection qui leurgarantisse les meilleures conditions pour exercer leurprofession.
Article III
1. Les organes d'information ont une contribution importanteà apporter au renforcement de la paix et de la compréhensioninternationale et dans la lutte contre le racisme, l'apartheidet l'incitation à la guerre.
2. Dans la lutte contre la guerre d'agression, le racisme etl'apartheid ainsi que contre les autres violations des droitsde l'homme qui sont, entre autres, le résultat des préjugés etde l'ignorance, les moyens d'information, par la diffusion del'information relative aux idéaux, aspirations, cultures etexigences des peuples, contribuent à éliminer l'ignorance etl'incompréhension entre les peuples, à sensibiliser lescitoyens d'un pays aux exigences et aux aspirations desautres, à assurer le respect des droits et de la dignité detoutes les nations, de tous le peuples et de tous lesindividus, sans distinction de race, de sexe, de langue, dereligion ou de nationalité, et à attirer l'attention sur lesgrands maux qui affligent l'humanité, tels que la misère, lamalnutrition et la maladie. Ce faisant, ils favorisentl'élaboration par les Etats des politiques les plus aptes àréduire les tensions internationales et à régler de façonpacifique et équitable les différends internationaux.
Article IV
Les organes d'information prennent une part essentielle àl'éducation des jeunes dans un esprit de paix, de justice, deliberté, de respect mutuel et de compréhension afin depromouvoir les droits de l'homme, l'égalité des droits entretous les êtres humains et toutes les nations, et le progrèséconomique et social. Ils ont également un rôle important àjouer en faisant connaître les vues et les aspirations de lajeune génération.
Article V
Pour que soit respectée la liberté d'opinion, d'expression etd'information, et afin que l'information reflète tous lespoints de vue, il est important que soient publiés les pointsde vue présentés par ceux qui considéreraient quel'information publiée ou diffusée à leur sujet a gravementporté préjudice à l'action qu'ils déploient en vue derenforcer la paix et la compréhension internationale et depromouvoir les droits de l'homme, ou de lutter contre leracisme, l'apartheid et l'incitation à la guerre.
Article VI
L'établissement d'un nouvel équilibre et d'une meilleureréciprocité dans la circulation de l'information, conditionfavorable à l'avènement d'une paix juste et durable et àl'indépendance économique et politique des pays endéveloppement, exige que soient corrigées les inégalités dansla circulation de l'information à destination et en provenancedes pays en développement ainsi qu'entre ces pays. Dans cebut, il est essentiel que les organes d'information de cespays disposent des conditions et des moyens qui leurpermettront de se renforcer, de s'étendre et de coopérer entreeux et avec les organes d'information des pays développés.
Article VII
En diffusant plus largement toutes les informations concernantles objectifs et les principes universellement acceptés, quisont à la base des résolutions adoptées par les différentesinstitutions des Nations Unies, les organes d'informationcontribuent efficacement au renforcement de la paix et de lacompréhension internationale, à la promotion des droits del'homme, ainsi qu'à l'établissement d'un ordre économiqueinternational plus juste et plus équitable.
Article VIII
Les organisations professionnelles, ainsi que les personnesqui participent à la formation professionnelle desjournalistes et autres agents des moyens de grande informationet qui les aident à s'acquitter de leurs tâches de façonresponsable, devraient accorder une importance particulièreaux principes de la présente Déclaration dans les codesdéontologiques qu'elles établissent et à l'applicationdesquels elles veillent.
Article IX
Dans l'esprit de la présente Déclaration, il appartient à lacommunauté internationale de contribuer à établir lesconditions d'une circulation libre et d'une diffusion pluslarge et mieux équilibrée de l'information et les conditionsd'une protection, dans l'exercice de leurs fonctions, desjournalistes et autres agents d'information. L'UNESCO est bienplacée pour apporter une précieuse contribution dans cedomaine.
Article X
1. Dans le respect des dispositions constitutionnellesvisant à garantir la liberté de l'information et desinstruments et accords internationaux applicables, il estindispensable de créer et de maintenir partout dans le mondeles conditions permettant aux organes et aux personnes qui seconsacrent professionnellement à la diffusion de l'informationde réaliser les objectifs de la présente Déclaration.
2. Il importe qu'une circulation libre et une diffusion pluslarge et mieux équilibrée de l'information soient encouragées.
3. A cette fin, il est nécessaire que les Etats facilitentl'obtention, par les organes d'information des pays endéveloppement, des conditions et des moyens qui leurpermettront de se renforcer et de s'étendre, et favorisentleur coopération entre eux et avec les organes d'informationdes pays développés.
4. De même, sur la base de l'égalité des droits, del'avantage mutuel et du respect de la diversité des cultures,éléments du patrimoine commun de l'humanité, il est essentielque soient encouragés et développés entre tous les Etats, enparticulier entre les Etats qui ont des systèmes économiqueset sociaux différents, les échanges tant bilatéraux quemultilatéraux d'information.
Article XI
Pour que cette Déclaration soit pleinement efficace, il estnécessaire, dans le respect des dispositions législatives etadministratives et des autres obligations des Etats membres,que soit garantie l'existence de conditions favorables àl'action des moyens d'information, en conformité avec lesdispositions de la Déclaration universelle des droits del'homme et les principes correspondants énoncés dans le Pacteinternational relatif aux droits civils et politiques adoptépar l'Assemblée générale des Nations Unies en 1966.