Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, 83 ILO Official Bull., Série A, No. 3 (2000).
(adoptée par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail à sa 204e session (Genève, novembre 1977), telle qu'amendée par le Conseil à sa 279e session (Genève, novembre 2000))
Le Conseil d'administration du Bureau international du Travail,
Rappelant que l'Organisation internationale du Travail s'occupe depuis de nombreuses années de certains problèmes sociaux liés aux activités des entreprises multinationales;
Notant en particulier que diverses commissions d'industrie et conférences régionales ainsi que la Conférence internationale du Travail ont demandé, depuis 1965 environ, que le Conseil d'administration prenne des mesures appropriées dans le domaine des entreprises multinationales et de la politique sociale;
Ayant été informé des activités d'autres organisations internationales, en particulier la Commission des sociétés transnationales des Nations Unies et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE);
Considérant que l'OIT, du fait de sa structure tripartite unique, de sa compétence et de sa longue expérience dans le domaine social, a un rôle essentiel à jouer en élaborant des principes pour orienter les gouvernements, les organisations de travailleurs et d'employeurs ainsi que les entreprises multinationales elles-mêmes;
Rappelant qu'il avait convoqué, en 1972, la Réunion tripartite d'experts sur les relations entre les entreprises multinationales et la politique sociale qui a recommandé un programme de recherche et d'études de l'OIT et, en 1976, la Réunion consultative tripartite sur les relations entre les entreprises multinationales et la politique sociale, aux fins de passer en revue le programme de recherche de l'OIT et de suggérer une action appropriée de l'OIT dans le domaine social et celui du travail;
Gardant à l'esprit les délibérations de la Conférence mondiale de l'emploi;
Ayant décidé par la suite de constituer un groupe tripartite chargé d'élaborer un projet de Déclaration de principes tripartite englobant tous les secteurs du ressort de l'OIT qui ont trait aux aspects sociaux des activités des entreprises multinationales, y compris la création d'emplois dans les pays en voie de développement, en tenant toujours compte des recommandations formulées par la Réunion consultative tripartite qui s'est tenue en 1976;
Ayant également décidé de convoquer derechef la Réunion consultative tripartite afin qu'elle examine le projet de Déclaration de principes que le groupe tripartite a élaboré;
Après avoir étudié le rapport et le projet de Déclaration de principes qui lui étaient soumis par la Réunion consultative tripartite convoquée une nouvelle fois, Par les présentes, approuve la déclaration ci-après, qui sera dénommée Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, adoptée par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail, et invite les gouvernements des Etats Membres de l'OIT, les organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées et les entreprises multinationales exerçant leurs activités sur leurs territoires à respecter les principes qu'elle contient.
1. Les entreprises multinationales jouent dans les économies de la plupart des pays et dans les relations économiques internationales un rôle important qui intéresse de plus en plus les gouvernements ainsi que les employeurs et les travailleurs et leurs organisations respectives. Ces entreprises peuvent, grâce à leurs investissements directs internationaux et par d'autres moyens, apporter aux pays du siège comme aux pays d'accueil des bénéfices tangibles en contribuant à l'utilisation plus efficace du capital, des techniques et de la main-d'÷uvre. Dans le cadre des politiques de développement instaurées par les gouvernements, elles peuvent aussi contribuer largement à la promotion du bien-être économique et social, à l'amélioration des niveaux de vie et à la satisfaction des besoins essentiels, à la création, directement ou indirectement, de possibilités d'emploi et à la jouissance des droits fondamentaux de l'homme, y compris la liberté syndicale, dans le monde entier. Mais les progrès réalisés par les entreprises multinationales dans l'organisation de leurs activités hors du cadre national peuvent conduire à des concentrations abusives de puissance économique et donner lieu à des conflits avec les objectifs des politiques nationales et avec les intérêts des travailleurs. En outre, la complexité des entreprises multinationales et le fait qu'il est difficile de discerner clairement la diversité de leurs structures, de leurs opérations et de leurs politiques suscitent parfois des préoccupations dans les pays du siège, dans les pays d'accueil ou dans les uns et les autres.
2. La présente Déclaration de principes tripartite a pour objet d'encourager les entreprises multinationales à contribuer positivement au progrès économique et social, ainsi qu'à minimiser et à résoudre les difficultés que leurs diverses opérations peuvent soulever, compte tenu des résolutions des Nations Unies préconisant l'instauration d'un nouvel ordre économique international.
3. Cet objectif sera favorisé grâce à une législation, une politique, des mesures et des initiatives appropriées qu'adopteront ou prendront les gouvernements, ainsi que par une coopération entre gouvernements et organisations d'employeurs et de travailleurs de tous les pays.
4. Les principes énoncés dans la présente Déclaration sont préconisés à l'intention des gouvernements, des organisations d'employeurs et de travailleurs des pays du siège et des pays d'accueil et des entreprises multinationales elles-mêmes.
5. Ces principes sont destinés à guider les gouvernements, les organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que les entreprises multinationales en prenant telles mesures et initiatives et en adoptant telles politiques sociales, y compris celles qui se fondent sur les principes énoncés dans la Constitution et dans les conventions et recommandations pertinentes de l'OIT, qui soient de nature à encourager le progrès social.
6. Une définition juridique précise des entreprises multinationales n'est pas indispensable pour que la présente Déclaration puisse répondre à son but; le présent paragraphe est destiné à mieux faire comprendre la Déclaration et non à donner une telle définition. Les entreprises multinationales comprennent des entreprises, que leur capital soit public, mixte ou privé, qui possèdent ou contrôlent la production, la distribution, les services et autres moyens en dehors du pays où elles ont leur siège. Le degré d'autonomie de chaque entité par rapport aux autres au sein des entreprises multinationales est très variable d'une entreprise à l'autre, selon la nature des liens qui unissent ces entités et leur domaine d'activité et compte tenu de la grande diversité en matière de forme de propriété, d'envergure, de nature des activités des entreprises en question et des lieux où elles opèrent. Sauf indication contraire, le terme «entreprise multinationale», tel qu'il est utilisé dans la présente Déclaration, se réfère aux diverses entités (société mère ou entités locales ou les deux, ou encore tout un groupe) en fonction de la répartition des responsabilités entre elles, dans l'idée qu'elles coopéreront et s'entraideront, le cas échéant, pour être mieux à même d'observer les principes énoncés dans cette Déclaration.
7. Dans la présente Déclaration sont exposés des principes concernant les domaines de l'emploi, de la formation, des conditions de travail et de vie et des relations professionnelles qu'il est recommandé aux gouvernements, aux organisations d'employeurs et de travailleurs et aux entreprises multinationales d'observer sur une base volontaire; ses dispositions n'ont pas pour effet de restreindre ou de modifier en quoi que ce soit les obligations découlant de la ratification d'une convention de l'OIT.
Politique générale
8. Toutes les parties que la présente Déclaration concerne devraient respecter les droits souverains des Etats, observer les législations et réglementations nationales, tenir dûment compte des pratiques locales et se conformer aux normes internationales pertinentes. Elles devraient respecter la Déclaration universelle des droits de l'homme et les Pactes internationaux correspondants que l'Assemblée générale des Nations Unies a adoptés, de même que la Constitution de l'Organisation internationale du Travail et ses principes en vertu desquels la liberté d'expression et d'association est une condition indispensable d'un progrès soutenu. Elles devraient contribuer à la réalisation de la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi, adoptée en 1998. Elles devraient également tenir les engagements pris librement par elles, en conformité de la législation nationale et des obligations internationales acceptées.
9. Les gouvernements qui n'ont pas encore ratifié les conventions nos 87, 98, 111, 122, 138 et 182 sont instamment priés de le faire et, en tout état de cause, d'appliquer dans la plus large mesure possible, dans le cadre de leur politique nationale, les principes énoncés dans ces conventions et dans les recommandations nos 111, 119, 122 , 146 et 190 (Note 1). Sans préjudice de l'obligation incombant aux gouvernements de faire observer les conventions ratifiées par eux, dans les pays où les conventions et recommandations citées au présent paragraphe ne sont pas observées, toutes les parties devraient s'en inspirer dans leur politique sociale.
10. Les entreprises multinationales devraient tenir pleinement compte des objectifs de politique générale que se sont fixés les pays où elles opèrent. Leurs activités devraient s'harmoniser avec les priorités du développement ainsi qu'avec les structures et les objectifs sociaux du pays où elles s'exercent. A cet effet, des consultations devraient avoir lieu entre les entreprises multinationales, le gouvernement et, le cas échéant, les organisations nationales d'employeurs et de travailleurs intéressées.
11. Les principes formulés dans la présente Déclaration ne visent pas à instaurer ou à faire subsister des différences de traitement entre entreprises multinationales et entreprises nationales. Ils traduisent de bonnes pratiques pour toutes les entreprises. Chaque fois que les principes de la présente Déclaration sont applicables tant aux entreprises multinationales qu'aux entreprises nationales, on devrait attendre des unes et des autres la même conduite en général et les mêmes pratiques sociales en particulier.
12. Les gouvernements des pays du siège devraient encourager, conformément à la présente Déclaration de principes, de bonnes pratiques sociales, compte tenu de la législation, de la réglementation et des pratiques sociales dans les pays d'accueil, ainsi que des normes internationales pertinentes. Les gouvernements aussi bien des pays d'accueil que des pays du siège devraient être prêts à avoir des consultations réciproques, chaque fois que besoin en est, à l'initiative des uns ou des autres.
Emploi
Promotion de l'emploi
13. Pour stimuler la croissance et le développement économiques, relever le niveau de vie, faire face aux besoins de main-d'÷uvre et remédier au chômage et au sous-emploi, les gouvernements devraient formuler et appliquer, comme un objectif essentiel, une politique active visant à promouvoir le plein emploi, productif et librement choisi (Note 2).
14. Cela est particulièrement important dans le cas des gouvernements des pays d'accueil situés dans les régions en développement du globe où les problèmes de chômage et de sous-emploi revêtent le plus de gravité. A cet égard, il convient de garder à l'esprit les conclusions générales adoptées par la Conférence mondiale tripartite sur l'emploi, la répartition du revenu, le progrès social et la division internationale du travail (Genève, juin 1976) (Note 3).
15. Les paragraphes 13 et 14 tracent le cadre dans lequel il devrait être dûment tenu compte, aussi bien dans les pays du siège que dans les pays d'accueil, de l'impact des entreprises multinationales sur l'emploi.
16. Les entreprises multinationales devraient, surtout lorsqu'elles exercent leur activité dans des pays en développement, s'efforcer d'accroître les possibilités et normes d'emploi, compte tenu de la politique et des objectifs des gouvernements en matière d'emploi, ainsi que de la sécurité de l'emploi et de l'évolution à long terme de l'entreprise.
17. Avant de commencer leurs activités, les entreprises multinationales devraient, dans tous les cas appropriés, consulter les autorités compétentes et les organisations nationales d'employeurs et de travailleurs de manière à harmoniser autant que praticable leurs plans concernant la main-d'÷uvre avec les politiques nationales de développement social. Elles devraient poursuivre ces consultations, comme dans le cas des entreprises nationales, avec toutes les parties intéressées, y compris les organisations de travailleurs.
18. Les entreprises multinationales devraient donner la priorité à l'emploi, à l'épanouissement professionnel, à la promotion et à l'avancement des ressortissants du pays d'accueil à tous les niveaux, en coopération, le cas échéant, avec les représentants des travailleurs qu'elles emploient ou des organisations de ces derniers et avec les autorités gouvernementales.
19. Lorsqu'elles investissent dans des pays en développement, les entreprises multinationales devraient prendre en considération l'importance de l'utilisation de techniques génératrices d'emploi soit directement, soit indirectement. Dans toute la mesure possible, compte tenu de la nature du procédé et des particularités du secteur économique en cause, elles devraient adapter les techniques aux besoins et caractéristiques des pays d'accueil. Elles devraient aussi participer, lorsque cela est possible, à l'élaboration de techniques appropriées dans les pays d'accueil.
20. Pour promouvoir l'emploi dans les pays en développement, dans le contexte d'une économie mondiale en expansion, les entreprises multinationales devraient, chaque fois que cela est faisable, envisager de conclure avec des entreprises nationales des contrats pour la fabrication de pièces et d'équipements, d'utiliser des matières premières locales et d'encourager progressivement la transformation sur place des matières premières. Elles ne devraient pas utiliser de tels arrangements pour éluder les responsabilités contenues dans les principes de la présente Déclaration.
Egalité de chances et de traitement
21. Tous les gouvernements devraient poursuivre des politiques destinées à promouvoir l'égalité de chances et de traitement en matière d'emploi afin d'éliminer toute discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, les opinions politiques, l'origine nationale ou sociale (Note 4).
22. Les entreprises multinationales devraient s'inspirer dans toutes leurs activités de ce principe général, sans préjudice des mesures envisagées au paragraphe 18 ou des politiques gouvernementales conçues pour corriger des situations historiques de discrimination et pour promouvoir ainsi l'égalité de chances et de traitement dans l'emploi. Les entreprises multinationales devraient en conséquence faire des qualifications, de la compétence et de l'expérience les critères du recrutement, du placement, de la formation et du perfectionnement de leur personnel à tous les échelons.
23. Les gouvernements ne devraient jamais exiger des entreprises multinationales - ou les encourager dans cette voie - de pratiquer une discrimination fondée sur l'une des caractéristiques mentionnées au paragraphe 21. Ils sont encouragés à fournir, dans des cas appropriés, une orientation continue en vue d'éviter une discrimination de ce genre dans l'emploi.
Sécurité de l'emploi
24. Les gouvernements devraient étudier soigneusement l'impact des entreprises multinationales sur l'emploi dans les différents secteurs industriels. Les gouvernements, de même que les entreprises multinationales, de tous les pays devraient prendre des mesures appropriées pour faire face aux répercussions des activités de ces entreprises sur l'emploi et le marché du travail.
25. Les entreprises multinationales devraient, au même titre que les entreprises nationales, s'efforcer d'assurer par une planification active de la main-d'÷uvre un emploi stable à leurs travailleurs et s'acquitter des obligations librement négociées concernant la stabilité de l'emploi et la sécurité sociale. En raison de la souplesse que les entreprises multinationales peuvent avoir, elles devraient s'efforcer de jouer un rôle d'avant-garde dans la promotion de la sécurité de l'emploi, en particulier dans les pays où la cessation de leurs activités serait susceptible d'accentuer le chômage à long terme.
26. Les entreprises multinationales qui envisagent d'apporter à leurs activités des modifications (y compris celles qu'occasionnent les fusions, rachats ou transferts de production) pouvant avoir des effets importants sur l'emploi devraient signaler suffisamment à l'avance ces modifications aux autorités gouvernementales appropriées et aux représentants des travailleurs qu'elles emploient, ainsi qu'à leurs organisations, afin que les répercussions puissent en être examinées en commun et qu'en soient atténuées le plus possible les conséquences défavorables. Cela est particulièrement important dans le cas de la fermeture d'une entité entraînant des congédiements ou des licenciements collectifs.
27. Les procédures de licenciements arbitraires devraient être évitées
28. Les gouvernements devraient, en coopération avec les entreprises tant multinationales que nationales, assurer sous une forme ou une autre la protection du revenu des travailleurs à l'emploi desquels il est mis fin
Formation
29. Les gouvernements devraient, en coopération avec toutes les parties intéressées, développer des politiques nationales de formation et d'orientation professionnelles étroitement liées à l'emploi (Note 7). Tel est le cadre dans lequel les entreprises multinationales devraient poursuivre leur politique de formation.
30. Les entreprises multinationales devraient veiller, en déployant leurs activités, à ce que leurs travailleurs bénéficient à tous les niveaux, dans le pays d'accueil, d'une formation appropriée en vue de répondre aux besoins de l'entreprise ainsi qu'à la politique de développement du pays. Cette formation devrait, dans la mesure possible, développer des aptitudes utiles en général et promouvoir les possibilités de carrière. Cette responsabilité devrait s'exercer, le cas échéant, en coopération avec les autorités du pays, les organisations d'employeurs et de travailleurs et les institutions locales, nationales ou internationales compétentes.
31. Les entreprises multinationales exerçant leur activité dans des pays en développement devraient participer de même que les entreprises nationales à des programmes, y compris des fonds spéciaux, encouragés par les gouvernements des pays d'accueil et soutenus par les organisations d'employeurs et de travailleurs. Ces programmes devraient viser à encourager l'acquisition et le développement de compétences ainsi qu'à fournir une orientation professionnelle. Ils devraient être administrés en commun par les parties qui les soutiennent. Autant que praticable, les entreprises multinationales devraient, à titre de participation au développement national, fournir les services de personnel de formation qualifié pour aider à mettre en ÷uvre les programmes de formation organisés par les gouvernements.
32. Les entreprises multinationales devraient, en coopération avec les gouvernements et dans la mesure admissible pour ne pas entraver le fonctionnement efficace de l'entreprise, offrir dans l'entreprise tout entière des possibilités pour élargir l'expérience des cadres de direction locaux dans des domaines appropriés tels que les relations professionnelles.
Conditions de travail et de vie
Salaires, prestations et conditions de travail
33. Les salaires, prestations et conditions de travail offerts par les entreprises multinationales ne devraient pas être moins favorables pour les travailleurs que ceux qu'accordent les employeurs comparables dans le pays en cause.
34. Lorsque les entreprises multinationales opèrent dans des pays en développement où il peut ne pas exister des employeurs comparables, elles devraient octroyer les meilleurs salaires, prestations et conditions de travail possibles dans le cadre de la politique du gouvernement (Note 8). Ceux-ci devraient être en rapport avec la situation économique de l'entreprise, mais devraient être au moins suffisants pour satisfaire les besoins essentiels des travailleurs et de leurs familles. Lorsque des entreprises multinationales font bénéficier leurs travailleurs d'avantages essentiels tels que le logement, les soins médicaux ou l'approvisionnement en denrées alimentaires, ces avantages devraient être d'un niveau correct
35. Les gouvernements, en particulier ceux des pays en développement, devraient s'efforcer d'adopter des mesures appropriées afin d'assurer que les groupes à bas revenus et les régions peu développées profitent autant que possible des activités des entreprises multinationales.
Age minimum
36. Les entreprises multinationales ainsi que les entreprises nationales devraient respecter l'âge minimum d'admission à l'emploi ou au travail, en vue d'assurer l'abolition effective du travail des enfants (Note 10).
Sécurité et hygiène
37. Les gouvernements devraient faire en sorte que les entreprises tant multinationales que nationales fassent bénéficier leurs travailleurs de normes adéquates en matière de sécurité et d'hygiène. Les gouvernements qui n'ont pas encore ratifié les conventions de l'OIT (nº 119) sur la protection des machines, 1963, la protection contre les radiations (nº 115), le benzène (nº 136) et le cancer professionnel (nº 139) sont instamment priés, néanmoins, d'appliquer dans toute la mesure possible les principes énoncés dans ces conventions ainsi que dans les recommandations correspondantes (nos 118, 114, 144 et 147). Les recueils de directives pratiques et les guides figurant sur la liste des publications du BIT consacrées à la sécurité et à l'hygiène du travail devraient également être pris en considération (Note 11).
38. Les entreprises multinationales devraient maintenir les normes de sécurité et d'hygiène les plus élevées, conformément aux exigences nationales, compte tenu de leur expérience correspondante acquise dans l'entreprise tout entière, y compris la connaissance de risques particuliers. Elles devraient aussi mettre à la disposition des représentants des travailleurs dans l'entreprise et, sur leur demande, des autorités compétentes et des organisations de travailleurs et d'employeurs de tous les pays où elles exercent leur activité des informations sur les normes de sécurité et d'hygiène applicables à leurs activités locales qu'elles observent dans d'autres pays. En particulier, elles devraient faire connaître aux intéressés tous les risques particuliers et les mesures de protection correspondantes qui sont associés à de nouveaux produits et procédés. De même que les entreprises nationales comparables, elles devraient être appelées à jouer un rôle prépondérant dans l'examen des causes des risques en matière de sécurité et d'hygiène du travail et dans l'application, dans l'entreprise tout entière, des améliorations qui en découlent.
39. Les entreprises multinationales devraient coopérer à l'activité déployée par les organisations internationales qui s'occupent de préparer et d'adopter des normes internationales de sécurité et d'hygiène.
40. Les entreprises multinationales devraient, conformément à la pratique nationale, coopérer pleinement avec les autorités compétentes en matière de sécurité et d'hygiène, les représentants des travailleurs et leurs organisations et les organismes établis de sécurité et d'hygiène. Le cas échéant, les questions concernant la sécurité et l'hygiène devraient figurer dans les conventions conclues avec les représentants des travailleurs et leurs organisations.
Relations professionnelles
41. Les entreprises multinationales devraient appliquer, en matière de relations professionnelles, des normes qui ne soient pas moins favorables que celles qu'appliquent des employeurs comparables dans le pays en cause.
Liberté syndicale et droit d'organisation
42. Les travailleurs employés tant par les entreprises multinationales que par les entreprises nationales devraient jouir, sans distinction d'aucune sorte, du droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières (Note 12). Ils devraient également bénéficier d'une protection adéquate contre les actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi (Note 13).
43. Les organisations représentant les entreprises multinationales ou les travailleurs employés par elles devraient bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes d'ingérence des unes à l'égard des autres soit directement, soit par leurs agents ou membres, dans leur formation, leur fonctionnement et leur administration (Note 14).
44. Lorsque les circonstances locales s'y prêtent, les entreprises multinationales devraient donner leur appui à des organisations d'employeurs représentatives.
45. Les gouvernements qui ne le font pas encore sont instamment priés d'appliquer les principes de la convention no 87, article 5, étant donné l'importance qu'il y a, en relation avec les entreprises multinationales, à permettre aux organisations représentant ces entreprises ou les travailleurs qu'elles emploient de s'affilier à des organisations internationales d'employeurs et de travailleurs de leur choix.
46. Là où les gouvernements des pays d'accueil offrent des avantages particuliers pour attirer les investissements étrangers, ces avantages ne devraient pas se traduire par des restrictions quelconques apportées à la liberté syndicale des travailleurs ou à leur droit d'organisation et de négociation collective.
47. Les représentants des travailleurs des entreprises multinationales ne devraient pas être empêchés de se réunir pour se consulter et échanger leurs points de vue, étant entendu que le fonctionnement des opérations de l'entreprise et les procédures normales régissant les relations avec les représentants des travailleurs et leurs organisations n'en pâtissent pas.
48. Les gouvernements ne devraient pas apporter de restrictions à l'entrée de représentants d'organisations d'employeurs et de travailleurs qui viennent d'autres pays et sont invités par des organisations locales ou nationales intéressées aux fins de consultations sur des questions d'intérêt commun, du seul fait qu'ils sollicitent l'entrée dans cette capacité.
Négociation collective
49. Les travailleurs employés par les entreprises multinationales devraient avoir le droit, conformément à la législation et à la pratique nationales, de faire reconnaître des organisations représentatives de leur propre choix aux fins de la négociation collective.
50. Des mesures appropriées aux conditions nationales devraient, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs en vue de régler les conditions d'emploi par le moyen de conventions collectives (Note 15).
51. Les entreprises multinationales, de même que les entreprises nationales, devraient fournir aux représentants des travailleurs les moyens nécessaires pour aider à mettre au point des conventions collectives efficaces (Note 16).
52. Les entreprises multinationales devraient faire en sorte que les représentants dûment autorisés des travailleurs employés par elles puissent, dans chacun des pays où elles exercent leur activité, mener des négociations avec les représentants de la direction qui sont autorisés à prendre des décisions sur les questions en discussion.
53. Lors des négociations menées de bonne foi avec les représentants des travailleurs sur les conditions d'emploi, ou lorsque les travailleurs exercent leur droit de s'organiser, les entreprises multinationales ne devraient pas menacer de recourir à la faculté de transférer hors du pays en cause tout ou partie d'une unité d'exploitation en vue d'exercer une influence déloyale sur ces négociations ou de faire obstacle à l'exercice du droit d'organisation; elles ne devraient pas non plus déplacer des travailleurs de leurs filiales dans des pays étrangers pour nuire aux négociations de bonne foi engagées avec les représentants des travailleurs ou à l'exercice par les travailleurs de leur droit de s'organiser.
54. Les conventions collectives devraient comporter des dispositions en vue du règlement des conflits auxquels pourraient donner lieu leur interprétation et leur application et des dispositions assurant le respect mutuel des droits et des responsabilités.
55. Les entreprises multinationales devraient fournir aux représentants des travailleurs les renseignements nécessaires à des négociations constructives avec l'entité en cause et, lorsque cela est conforme à la législation et à la pratique locales, elles devraient également fournir des informations de nature à leur permettre de se faire une idée exacte et correcte de l'activité et des résultats de l'entité ou, le cas échéant, de l'entreprise dans son ensemble (Note 17).
56. Les gouvernements devraient fournir aux représentants des organisations de travailleurs, à leur demande et pour autant que la législation et la pratique le permettent, des informations sur les branches dans lesquelles opère l'entreprise qui puissent leur être utiles pour définir des critères objectifs dans le cadre de la négociation collective. A cet égard, tant les entreprises multinationales que les entreprises nationales devraient répondre constructivement aux gouvernements qui leur demandent des informations pertinentes sur leurs activités.
Consultation
57. Dans les entreprises tant multinationales que nationales, des systèmes élaborés d'un commun accord par les employeurs, les travailleurs et leurs représentants devraient prévoir, conformément à la législation et à la pratique nationales, des consultations régulières sur les questions d'intérêt mutuel. Ces consultations ne devraient pas se substituer aux négociations collectives (Note 18).
Examen des réclamations
58. Les entreprises multinationales, comme les entreprises nationales, devraient respecter le droit des travailleurs qu'elles emploient de faire examiner toutes leurs réclamations de manière conforme aux dispositions suivantes: tout travailleur qui, agissant individuellement ou conjointement avec d'autres travailleurs, considère avoir un motif de réclamation devrait avoir le droit de présenter cette réclamation sans subir de ce fait un quelconque préjudice et de faire examiner cette réclamation selon une procédure appropriée (Note 19). Cela est particulièrement important lorsque les entreprises multinationales opèrent dans des pays qui n'observent pas les principes des conventions de l'OIT relatifs à la liberté syndicale, au droit d'organisation et de négociation collective et au travail forcé (Note 20).
Règlement des conflits du travail
59. Les entreprises multinationales, tout comme les entreprises nationales, devraient, de concert avec les représentants et les organisations des travailleurs qu'elles emploient, s'efforcer d'instituer un mécanisme de conciliation volontaire et adapté aux circonstances nationales, pouvant comporter des dispositions relatives à l'arbitrage volontaire, afin de contribuer à prévenir et à régler les conflits du travail entre employeurs et travailleurs. Ce système de conciliation volontaire devrait comporter l'égalité de représentation des employeurs et des travailleurs (Note 21).
Note: Les paragraphes 1, 7, 8, 10, 25, 26 et 52 (précédemment paragraphe 51) ont fait l'objet d'une interprétation conformément à la procédure pour l'examen des différends relatifs à l'application de la Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale. On peut obtenir une copie des interprétations en s'adressant au Bureau pour les activités des entreprises multinationales, Bureau international du Travail, 4, route des Morillons, CH-1211 Genève 22, Suisse, ou en consultant le site http://www.ilo.org.
Notes
Note 1
Convention (nº 87) concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (nº 98) concernant le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; convention (nº 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958; convention (nº 122) concernant la politique de l'emploi, 1964; convention (nº 138) concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi, 1973; convention (nº 182) concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination, 1999; recommandation (nº 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958; recommandation (nº 119) concernant la cessation de la relation de travail à l'initiative de l'employeur, 1963; recommandation (nº 122) concernant la politique de l'emploi, 1964; recommandation (nº 146) concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi, 1973, recommandation (nº 190) concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination, 1999.
Convention (no 122) et recommandation (nº 122) concernant la politique de l'emploi, 1964.
OIT, Conférence mondiale de l'emploi, Genève, 4-17 juin 1976.
Convention (nº 111) et recommandation (nº 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958; convention (nº 100) et recommandation (nº 90) en matière d'égalité de rémunération entre la main-d'÷uvre masculine et la main-d'÷uvre féminine pour un travail de valeur égale, 1951.
Recommandation (nº 119) sur la cessation de la relation de travail à l'initiative de l'employeur, 1963.
Ibid.
Convention (nº 142) et recommandation (nº 150) concernant le rôle de l'orientation et de la formation professionnelles dans la mise en valeur des ressources humaines, 1975.
Recommandation (nº 116) concernant la réduction de la durée du travail, 1962.
Convention (nº 110) et recommandation (nº 110) concernant les plantations, 1958; recommandation (nº 115) concernant le logement des travailleurs, 1961; recommandation (nº 69) concernant les soins médicaux, 1944; convention (nº 130) et recommandation (nº 134) concernant les soins médicaux et les indemnités de maladie, 1969.
Convention nº 138, art. 1; convention nº 182, art. 1.
Les conventions et recommandations de l'OIT dont il est fait mention sont indiquées dans le Catalogue of ILO Publications on Occupational Safety and Health, édition 1999, BIT, Genève. Voir aussi http://www.ilo.org/public/english/protection/safework/publicat/index. htm.
Convention no 87, art. 2.
Convention no 98, art. 1.1.
Convention no 98, art. 2.1.
Convention no 98, art. 4.
Convention (nº 135) concernant les représentants des travailleurs dans l'entreprise et les facilités à leur accorder, 1971.
Recommandation (nº 129) concernant les communications entre la direction et les travailleurs dans l'entreprise, 1967.
Recommandation (nº 94) concernant la consultation et la collaboration entre employeurs et travailleurs sur le plan de l'entreprise, 1952; recommandation (nº 129) sur les communications dans l'entreprise, 1967.
Recommandation (nº 130) concernant l'examen des réclamations dans l'entreprise en vue de leur solution, 1967.
Convention (nº 29) concernant le travail forcé ou obligatoire, 1930; convention (nº 105) concernant l'abolition du travail forcé, 1957; recommandation (nº 35) concernant la contrainte indirecte au travail, 1930.
Recommandation (no 92) concernant la conciliation et l'arbitrage volontaires, 1951.