MANUEL DE FORMATION SUR LA SURVEILLANCE DES DROITS HUMAINS

CHAPITRE VIII: L'ENTRETIEN


MATIÈRES

A. Introduction

B. Identifier les Personnes à Interviewer

1.) Identifier les Témoins

2.) Protéger les Témoins

C. Préparer l'Entretien

1.) Qui Doit Conduire l'Entretien

a.) Nombre d'Interviewers

b.) Compétences Linguistiques

c.) Différences Interculturelles

2.) Les Interprètes

3.) Emplacement et Discrétion

4.) Enregistrement de l'Entretien

5.) Recherches Préalables

D. Aborder l'Entretien

E. L'Entretien

1.) L'Enoncé des Cironstances

2.) L'Interrogatoire Spécifique

F. Conclure l'Entretien et et Rester en Contact

G. Le Rapport d'Entretien

1.) Reconstituer l'Entretien

2.) Evaluer la Crédibilité

H. Approfondir l'Enquête

1.) Vérifier et Comparer l'Information de Documentation

2.) Suivre les Affaires

I. Interroger des "Groupes Spéciaux" ou des Personnes Présentant des Caractères Spécifique

1.) Les Victimes de Tortures

2.) Les Femmes

3.) Les Réfugiés et Autres Personnes Déplaceés

4.) Les Enfants

5.) Les Populations Rurales

6.) Les Communautés Autochtones

7.) Les Groupes à Faibles Revenus

8.) Les Foncionnaires du Gouvernement et et les Suspects de Violations

A. INTRODUCTION

 

1. L�entretien est la plus courante des m�thodes de recueil de renseignements sur les all�gations de violations des droits de l�homme. En outre, l�information orale est souvent n�cessaire pour compl�ter l�information �crite. Dans ce chapitre, on traitera de divers aspects de l�entretien, et notamment des techniques de base pour le pr�parer, le provoquer et le conduire. Parmi les sujets envisag�s, on s�int�ressera aux services des interpr�tes, � la v�rification du renseignement, et � l�interrogatoire de personnes pr�sentant des caract�res particuliers. Il importe de garder � l�esprit que les entretiens se d�roulent dans des contextes tr�s divers, bureaux, prisons, sur le terrain et sur la route. Le processus pr�sidant � l�entretien devra �tre adapt� � chaque situation. Il est �galement d�int�r�t strat�gique pour le HRO de savoir quelles informations ils ont � rassembler. O� peuvent-ils se la procurer ? Qui est au courant ? Quels sont les int�r�ts des t�moins qui se pr�sentent pour livrer leur version des faits ?

 

B. IDENTIFIER LES PERSONNES � INTERVIEWER

 

1. Identifier les t�moins

 

2. Bien souvent des personnes se font conna�tre, se pr�sentant comme cherchant protection ou r�paration de violations pass�es de leurs droits humains. Il est cependant courant que les victimes ou t�moins trouvent inutile ou dangereux pour eux de se faire conna�tre. Dans le cas de certaines violations particuli�res, comme les abus sexuels ou autres formes de violences notamment � l��gard des femmes, la r�pugnance des victimes � rapporter ces violations peut �tre plus forte encore. Il peut donc devenir n�cessaire pour le HRO de se montrer incitatif et non passif pour d�terminer quelles personnes interroger. Il est indispensable que les personnes charg�es d��tablir les faits nouent de bonnes relations avec les organisations travaillant sur leur zone, celles s�occupant des droits de l�homme et les autres. Cela implique une d�marche active, pour contacter ces organisations, organiser des r�unions r�guli�res, etc. Les organisations locales de droits de l�homme et autres peuvent mettre le HRO en contact avec les victimes et t�moins de violations de droits de l�homme. Les �tablissements de soins peuvent �galement servir de points de d�part; les avocats et journalistes peuvent �tre en mesure d�identifier d��ventuelles personnes � interviewer.

 

3. On l�a dit plus haut, les HRO doivent �tre disponibles, pr�ts � quitter leur bureau et � se rendre l� o� ils peuvent recueillir des renseignements d�une personne se consid�rant comme victime d�une violation. Les HRO doivent visiter r�guli�rement les prisons, les h�pitaux, les morgues, et les lieux de risque maximal pour la population, comme les bidonvilles, cit�s ouvri�res et communaut�s rurales. Lors de leurs d�placements dans des zones rurales recul�es, les HRO auront � choisir entre plusieurs d�marches possibles. L�une consiste � �tablir et � suivre un programme de visites permettant � tout t�moin de les approcher. Une autre consiste � proc�der � des visites al�atoires et inattendues. Une troisi�me, � pr�voir des visites occasionnelles par l�interm�diaire d�une tierce partie, comme un membre du clerg� local.

 

4. Le HRO ne paiera jamais pour un t�moignage, mais il peut envisager de prendre en charge les frais de d�placement des t�moins qui ont de longues distances � couvrir. L�une des raisons pour ne pas r�mun�rer un entretien est le risque que la personne interrog�e livre les d�clarations qu�elle estime que le HRO souhaite entendre.

 

2. Prot�ger les t�moins

 

5. Interroger les t�moins, tout particuli�rement dans le cadre d�une mission de droits de l�homme conduite sur le terrain, comporte cette autre consid�ration qu�est la n�cessit� de prot�ger les t�moins. Ce sujet de la protection des t�moins doit s�envisager dans le contexte de l�ensemble des mesures � prendre, depuis les premiers pr�paratifs de l�entretien jusqu�aux communications ult�rieures.

 

6. S�il ne peut y avoir d�assurance compl�te quant � la protection du t�moin apr�s l�entretien, il existe une solution partielle au probl�me des repr�sailles exerc�es � l�encontre du t�moin, solution privil�gi�e par les organisations intergouvernementales (OIG) : c�est celle d�un engagement du gouvernement � ne pas entreprendre des mesures de repr�sailles. C�est ainsi que l�article 58 du R�glement de la Commission interam�ricaine exige comme condition de toute mission que le gouvernement s�oblige � ne pas exercer de repr�sailles � l��gard de t�moins. Ou que l�accord portant cr�ation du Bureau du Haut Commissaire des droits de l'homme en Colombie dit en son article 31 que �Le gouvernement s�engage [...] � assurer qu�aucun individu ayant eu des contacts avec le Bureau soit soumis � des abus, menaces, repr�sailles ou proc�dures judiciaires sur ces seules bases�.

 

7. En l�absence d�un accord de protection, comme dans tous les cas d�ailleurs, on pourra prendre diverses mesures visant � prot�ger les t�moins :

 

(a) Les entretiens se d�rouleront dans un cadre tel que la mission n�attirera pas sur le t�moin une attention superflue. Les HRO s�efforceront d�interroger un nombre suffisant d�individus au sein d�une communaut�, de mani�re � �viter de focaliser l�attention sur quelques personnes.

 

(b) Les entretiens se d�rouleront dans des lieux o� la surveillance est minimale. La surveillance exerc�e par le gouvernement risque moins de poser probl�me si les HRO sont mobiles et se d�placent � l�int�rieur du pays.

 

(c) L�interviewer ne fera jamais explicitement r�f�rence aux d�clarations d�un t�moin en interrogeant un autre t�moin. Une telle erreur peut mettre en danger le premier t�moin, et rendra le second m�fiant quant � la confidentialit� de l�information fournie. Chaque contact doit �tre soigneusement prot�g�, et leur identit� ne doit jamais �tre divulgu�e, sauf en cas d�assurance absolue � propos de leur s�curit�.

 

(d) L�interviewer doit s�enqu�rir du danger �ventuel que court le t�moin, et des mesures de s�curit� que le t�moin estime n�cessaires.

 

(e) De fa�on br�ve au d�but de l�entretien, et plus approfondie vers la fin, l�interviewer devra demander quelles pr�cautions peuvent �tre prises pour apporter une certaine protection au t�moin � la suite de l�entretien. Certains t�moins pourront souhaiter disposer d�une carte indiquant qu�ils ont �t� interrog�s, de mani�re � pouvoir la montrer aux autorit�s pour certifier que l�ONU ne restera pas indiff�rente si un tort quelconque leur est caus�. D�autres consid�reront de telles cartes comme dangereuses � poss�der, car elles pourraient attirer l�attention des autorit�s. Ces t�moins pourront en revanche d�sirer trouver une m�thode pour garder le contact. Certaines personnes pourront pr�f�rer demeurer anonymes. En tous les cas il doit �tre clairement �tabli que le HRO ne peut pas assurer la s�curit� du t�moin.

 

8. Dans le souci de prot�ger les personnes interrog�es, il est essentiel de conserver tous les enregistrements en permanence en lieu s�r. Pr�caution suppl�mentaire, on pourra identifier les dossiers par num�ros plut�t que par noms de personnes. Les listes permettant d�identifier les personnes seront alors tenues dans un lieu s�par� des dossiers eux-m�mes, et des enregistrements des entretiens. Lorsqu�arrivent de nouvelles informations, le HRO y portera le num�ro du dossier, et non pas le nom de la victime. On fera des doubles de tous les enregistrements, que l�on conserva en lieu s�r.

 

C. PR�PARER L�ENTRETIEN

 

9. Dans la pr�paration de l�entretien, le HRO doit consid�rer qui interroger, comment le prot�ger, qui va conduire l�entretien, dans quelle langue l�entretien doit se d�rouler, qui va assurer la traduction de et vers la langue locale, o� l�entretien doit avoir lieu, comment il doit �tre enregistr�, ce que l�interviewer doit savoir avant l�entretien, et comment l�entretien doit �tre entrepris.

 

10. En raison de la r�ticence qu�il y a � d�crire des exp�riences traumatiques en pr�sence d�autres personnes, la pratique de la plupart des organisations consiste � interviewer les t�moins et les victimes individuellement. C�est ainsi que les r�gles type provisoires (Draft Model Rules) de l�ONU excluent les t�moins de la salle d�audition pendant le t�moignages d�autres, si le t�moin entendu en fait la demande. Amnesty International suit la m�me d�marche. On peut cependant constater que, dans un contexte carc�ral, le CICR interroge fr�quemment plusieurs personnes ensemble dans la m�me cellule; cette approche permet � l�interviewer de se faire une id�e g�n�rale de ce que les personnes du groupe ont � dire, avant de d�cider lesquelles interroger individuellement.

 

1. Qui doit conduire l�entretien

 

a. Nombre d�interviewers

 

11. En g�n�ral, il est pr�f�rable que l�entretien soit men� par deux personnes. L�une peut maintenir le contact visuel et poser les questions; l�autre peut discr�tement prendre des notes et relever d��ventuelles questions omises. Il peut cependant s�av�rer mat�riellement impossible de disposer de deux interviewers pour tous les entretiens, ni m�me pour la plupart d�entre eux. Si l�interviewer est seul, il limitera ses prises de notes, quitte � les compl�ter apr�s la s�ance. De m�me, si un interpr�te est n�cessaire, trois personnes peuvent former un auditoire trop large. Le plus souvent, les gens sont plus spontan�s en pr�sence d�un plus petit groupe. Les t�moins peuvent �tre r�ticents � s�exprimer face � une pl�iade d�auditeurs.

 

b. Comp�tences linguistiques

 

12. La mission de terrain de l�ONU devra d�terminer si un ou plusieurs de ses membres parlent une ou plusieurs des langues locales. Un grand nombre de ceux qui souffrent ne parlent qu�une langue locale; les HRO de l�ONU devront l�apprendre, dans toute la mesure du possible.

 

c. Diff�rences interculturelles

 

13. Les diff�rences culturelles entre l�interviewer et son interlocuteur peuvent cr�er des probl�mes de communication. Ces diff�rences interculturelles portent sur les attitudes envers le traumatisme subi, les r�les sexuels, ceux de l��ge, du statut et de l�origine, et les sujets de conversation abordables. M�me des conceptions diff�rentes de l�interaction physique (le croisement des regards, la distance corporelle, certaines perceptions de la pr�sentation et du corps) peuvent conduire � des malentendus. Il est absolument essentiel que l�interviewer soit sensible � ces diff�rences culturelles, soit compr�hensif envers ses interlocuteurs, et tente d�en apprendre davantage � propos de leurs codes (1).

 

14. Il peut exister une autre diff�rence culturelle qui r�side dans le r�le que joue la politique dans la vie des personnes interrog�es. Certaines pourront �tre profond�ment engag�es vis-�-vis d�une cause ou d�un parti, et d�crire en grand d�tail leurs activit�s politiques. L�interviewer les entendra avec respect, et enregistrera de m�me leur t�moignage, m�me s�il peut ne pas partager les opinions exprim�es.

 

2. Les interpr�tes

 

15. Il est de bien meilleure pratique pour les HRO de parler la langue pratiqu�e par la population du pays ou de la r�gion o� elles et ils interviennent. S�ils ont besoin d�interpr�tes, ils seront moins en mesure de comprendre enti�rement les renseignements qui leur sont communiqu�s. En outre, nombre de personnes seront plus r�ticentes � parler aux HRO par l�entremise d�un interpr�te, notamment si celui-ci est du pays o� se d�roule la mission. Si des interpr�tes s�av�rent n�cessaires, il faudra imp�rativement examiner m�ticuleusement leur pass� pour assurer que les op�rations de la mission de droits de l�homme conduite par l�ONU sur le terrain ne soit pas infiltr�e par des informateurs du gouvernement ou des groupes d�opposition. On prendra �galement soin de faire en sorte que les interpr�tes n�intimident pas les personnes interrog�es. Ainsi, il convient d��viter d�avoir recours � d�anciens militaires ou � des individus appartenant � l�ethnie des agresseurs. Par ailleurs, les femmes interpr�tes sont souvent moins intimidantes que les hommes dans le contexte d�un interrogatoire. Enfin, le HRO doit �tre certain que l�interpr�te parle la m�me variante locale ou le m�me dialecte que la personne interview�e.

 

16. Avoir recours � des interpr�tes suppose d��tablir des directives. Si un interpr�te va intervenir dans un entretien, l�interviewer doit lui expliquer en priv� les r�gles du jeu, et ce avant le d�but de l�entretien. Il faudra demander � l�interpr�te de relayer les questions exactement, mot � mot si possible. Si les questions sont peu claires ou si le t�moin ne les comprend pas, l�interviewer doit demander � l�interpr�te de le lui faire savoir, de sorte qu�il puisse les reformuler. L�interviewer s�exprimera par phrases concises, faciles � comprendre et � traduire. L�interpr�te doit transmettre les questions et d�clarations une � la fois de mani�re � faire en sorte que le t�moin les comprend bien. En cas de besoin, l�interviewer renouvellera ses questions � diverses reprises jusqu�� parvenir � une pleine compr�hension. L�interviewer s�adressera, par le regard et la parole, directement au t�moin, et non � l�interpr�te.

 

17. Comme tout autre employ� de l�ONU, les interpr�tes ont besoin de protection. Il peut �tre utile de recruter des interpr�tes en dehors de la zone o� ils auront � intervenir. La fiabilit� des interpr�tes et des chauffeurs est tr�s importante pour la cr�dibilit� du travail accompli par les fonctionnaires et l�ONU.

 

18. En travaillant avec des interpr�tes, il faut bien �tre conscient qu�ils peuvent en apprendre trop. Dans les pires des sc�narios, les interpr�tes peuvent subir ou avoir subi des pressions pour qu�ils fournissent des informations aux agresseurs; � tout le moins, l�interpr�te peut en arriver � conna�tre si bien certains faits ou certaines conditions locales que ses traductions en deviennent peu soigneuses, incompl�tes ou inexactes. L�une des solutions possibles � ce probl�me, employ�e par les contr�leurs de la Communaut� europ�enne dans l�ex-Yougoslavie, consiste � utiliser comme interpr�tes des �tudiants de l�Universit�, pendant deux semaines seulement � la fois; le syst�me fonctionnant par rotation des interpr�tes.

 

3. Emplacement et discr�tion

 

19. L�entretien sera conduit dans un emplacement qui pr�sentera le moins de risques possibles d��tre surpris et de comporter des repr�sailles � l�encontre du t�moin. Ce sont les endroits comme les h�tels qui pr�sentent les plus grands risques d��tre entendus, et la surveillance y est tr�s probable. On choisira pour l�entretien un lieu qui soit le moins susceptible possible d��veiller les soup�ons chez les personnes qui verront les participants y entrer, ou s�y parler. De m�me, ce lieu sera de nature � �tablir une ambiance propice � l�entretien, de sorte qu�une conversation franche puisse avoir lieu sans �tre interrompue ind�ment. Comme pour tant d�autres sujets, les interviewers seront bien avis�s de demander leur avis � leurs contacts quant aux lieux convenant au mieux � leurs entretiens.

 

4. Enregistrement de l�entretien

 

20. L�enregistrement magn�tique pr�sente le plus souvent de graves risques en mati�re de s�curit� et devrait �tre a priori exclu. Cependant, dans certains pays o� les conditions de s�curit� le permettent, on pourra envisager de se servir d�un magn�tophone. Celui-ci ne sera employ� qu�avec le consentement d�clar� de la personne interrog�e. Son usage sera donc r�serv� aux cas o� le t�moin a �tabli avec l�interviewer une relation de forte confiance. Les magn�tophones se montrent particuli�rement utiles lorsqu�un seul interviewer est pr�sent, et qu�il est donc tr�s difficile de prendre des notes. Ils sont �galement pr�cieux lorsque la traduction/interpr�tation est n�cessaire : il peut s�agir alors du seul moyen de v�rifier l�entretien, de mani�re � pouvoir l��tudier par la suite. La question du magn�tophone ne sera �voqu�e qu�une fois que l�interviewer aura �tabli sa cr�dibilit�, inform� le t�moin des objectifs de l�entretien, et l�aura rassur� quant � la confidentialit� de l�information. Il faudra demander au t�moin son autorisation de l�enregistrer, pour aider l�interviewer � se souvenir des renseignements fournis. On n�emploiera jamais de magn�tophone cach�. Les bandes ne comporteront jamais le nom de la personne interrog�e. L�identit� du t�moin sera conserv�e dans un autre lieu, et cod�e de mani�re � ce qu�aucun lien visible ne puisse �tre �tabli entre l�entretien enregistr� et le nom de la personne. Apr�s l�enregistrement, la bande sera dissimul�e, de fa�on � ce qu�on ne puisse la confisquer ni la relier facilement au t�moin.

 

21. Les appareils photographiques posent davantage de probl�mes encore. Il existe un risque de repr�sailles consid�rable � l�encontre des personnes par suite de l�utilisation de photographies. Certains t�moins pourront vouloir que l�on photographie leurs blessures caus�es par les tortures. M�me une photographie de ce type ne doit pas indiquer l�identit� du t�moin, en montrant son visage par exemple. Si l�on obtient la permission de prendre une photographie, il faudra demander au t�moin son autorisation de publier la photographie, ou de la diffuser de toute autre mani�re. Un individu tr�s en vue qui court un grand danger de mort pourra souhaiter �tre photographi�, y voyant un moyen de protection. N�anmoins, la plupart des t�moins ne voudront pas qu�on les photographie.

 

22. L�enregistrement vid�o est plus dangereux pour l�entretien, car il rendra plus difficile d�obtenir des informations et fera courir au t�moin un risque consid�rable, s�ils est d�couvert et confisqu�. La vid�o peut un peu plus utile pour enregistrer des manifestations ou autres �v�nements publics, mais elle comporte toujours un risque pour la s�curit�. Il est important de garder � l�esprit qu�en certains cas, la seule pr�sence de la cam�ra est de nature � pr�cipiter un �v�nement ou une manifestation. Le HRO doit �tre attentif � ne pas mettre des personnes en danger ou modifier le cours des �v�nements par des enregistrements vid�o.

 

5. Recherches pr�alables

 

23. L�interviewer se pr�parera � l�entretien en se renseignant autant que possible sur le t�moin et les circonstances en cause. Si un dossier a d�j� �t� pr�par�, l�interviewer le lira, aussi bien que tout autre document d�crivant le contexte. L�interviewer devra �galement se familiariser avec les termes et acronymes se rapportant � la situation.

 

24. L�interviewer se pr�parera aux entretiens (surtout les plus importants) en �tablissant un plan de l�entretien, comprenant une liste des sujets � traiter dans l�ordre o� ils devront �tre abord�s. L�interviewer pourra m�me r�diger les questions les plus essentielles. Certaines de ces derni�res sont propos�es plus bas, concernant les informations n�cessaires pour �tayer une plainte. Pr�parer cette liste de questions aidera l�interviewer � �laborer une strat�gie pour l�entretien. Il apprendra ses questions par c�ur, ou �vitera de trop se r�f�rer � sa liste. Le contact visuel et l��tablissement d�une relation sont plus importants que le strict respect d�un ordre particulier. La liste de sujets servira en fin d�entretien � s�assurer que toutes les principales questions ont �t� pos�es. Le HRO prendra soin d��viter que la liste de questions puisse devenir un obstacle artificiel � la communication avec le t�moin.

 

D. ABORDER L�ENTRETIEN

 

25. Avant l�entretien, l�interviewer aura d�j� rencontr� l�interpr�te et pr�sent� les r�gles de base de l�entretien. Au d�but de l�entretien, l�interviewer accueillera amicalement la personne (sourire, poign�e de mains ou autres selon les coutumes locales). Avant toute question, l�interviewer se pr�sentera et pr�sentera l�interpr�te, expliquera le mandat de la mission de doits de l�homme de l�ONU sur le terrain, �tablira le but de l�entretien, exposera les r�gles de base de l�entretien, �voquera la mani�re dont le t�moin pourra �tre prot�g� � la suite de l�entretien, et pr�sentera l�utilisation ult�rieure des informations obtenues. Le HRO insistera sur le caract�re essentiel de fournir des d�tails aussi nombreux que possible afin d��tablir les faits, et par exemple qu�une violation des droits de l�homme a �t� commise.

 

26. L�interviewer devra projeter une impression de professionnalisme, de sinc�rit� et de sensibilit�. Il devra �galement expliquer au t�moin les diff�rentes �tapes par lesquelles passera l�information, et les utilisations qui en seront faites.

 

27. Pour �tablir une premi�re relation avec la personne � interroger, on pourra lui offrir de l�eau, un caf�, une boisson ou tout autre rafra�chissement; il sera d�ailleurs utile de disposer au cours de l�entretien d�eau et de mouchoirs. L�interviewer parlera directement au t�moin et tentera de maintenir le contact visuel, m�me en pr�sence d�un interpr�te.

 

28. L�interviewer doit expliquer son mandat. L�un des probl�mes que pose cette explication, si on la veut de quelque pr�cision, est que le t�moin risque d�adapter son r�cit de mani�re � ce qu�il corresponde ou m�me imite les violations �voqu�es dans la pr�sentation du mandat. Le HRO expliquera encore que la mission de terrain est enti�rement s�par�e du gouvernement. � moins que ce soit in�vitable, le HRO ne devra g�n�ralement pas voyager dans des v�hicules gouvernementaux ni accepter d�escorte militaire. La mission de l�ONU pourra avoir � assurer le monitoring d�activit�s militaires, mais le HRO devra garder ses distances. Comme dans bien d�autres aspects de ce Manuel, sur de tels sujets les HRO demanderont l�avis politique de la direction de la mission.

 

29. De fa�on analogue, l�interviewer devra assurer au t�moin que l�information restera confidentielle et expliquer comment cette nature confidentielle sera maintenue (� noter cependant que les entretiens avec les responsables gouvernementaux ne sont g�n�ralement pas confidentiels). Les t�moins non gouvernementaux doivent �tre inform�s des objectifs de l�entretien et des raisons pour lesquelles il leur est demand� de prendre le risque de livrer des informations. Le t�moin sera conscient que des notes seront prises au cours de l�entretien, mais que ces notes resteront confidentielles. Le t�moin aura la possibilit� d�autoriser l�utilisation de ces documents, la mention de noms ou de d�tails, etc. Le t�moin sera �galement rassur� quant � la mani�re dont les notes de l�entretien seront prot�g�es. On l�encouragera � fournir autant de d�tails que possible. Il conviendra que le t�moin connaisse l�utilisation qui sera faite de ses renseignements, et l�interviewer lui demandera ce qu�il pense qui devrait en �tre fait. On demandera au t�moin comment la mission de droits de l�homme pourra demeurer en contact avec lui apr�s l�entretien, afin d�apporter quelque assurance quant � sa s�curit�. � la fin de l�entretien, on reviendra sur ces questions d�utilisation de l�information, de ce qu�il convient de faire, et de comment prot�ger le t�moin.

 

E. L�ENTRETIEN

 

30. Au cours de l�entretien, le HRO doit maintenir une relation avec son interlocuteur, et �tablir un climat de reconnaissance et de confiance. Il est absolument essentiel � l��tablissement de ce climat que l�interviewer �vite de donner l�impression de juger la personne, de d�sapprouver sa conduite, ou de douter de ses affirmations. L�interviewer doit toujours tenir ses promesses. Il fera montre d�un v�ritable int�r�t envers la personne comme individu, digne de respect et de sollicitude, et ayant besoin que l�on pr�te attention � son point de vue et � ses motivations. L�interviewer traitera l�informateur comme d�tenant des informations importantes et comme m�ritant son enti�re attention. Jamais la personne ne devrait-elle se sentir comme cas isol� dans une succession d�affaires anonymes d�int�r�t provisoire.

 

1. L��nonc� des circonstances

 

31. Il est pr�f�rable de laisser la personne interrog�e commencer par raconter son histoire, car ainsi elle se sentira moins d�poss�d�e de son contr�le ou d�sempar�e. Le HRO demandera au t�moin ce qui lui est arriv� pouvant faire l�objet d�une plainte. Il �coutera soigneusement le t�moin dans son expos� des circonstances, et il aura la patience d�entendre des d�clarations circulaires et r�p�titives, qui ne seront pas dans un ordre logique. Permettre au t�moin d�exprimer au HRO ce qu�il estime �tre important est un �l�ment essentiel pour �tablir une relation, et ce m�me si ces renseignement peuvent ne pas relever strictement du monitoring. En fait, le HRO devra faire preuve de patience en �coutant des discours politiques et autres, non v�ritablement li�s aux droits de l�homme. S�il n�est pas permis au t�moin de raconter son histoire � sa fa�on, il ou elle sera r�ticent(e) pour parler de questions sensibles (comme les s�vices) qui rel�vent, elles, directement de la mission sur les droits de l�homme. Il faut donc laisser au t�moin le temps d�acqu�rir foi et confiance envers l�interviewer.

 

32. Pour obtenir des pr�cisions, les questions seront formul�es sur un ton compr�hensif, et non froid ou dur. Le HRO posera plut�t des questions ouvertes, plut�t qu�un grand nombre de questions pr�cises � la mani�re d�un interrogatoire policier. En r�gle g�n�rale, l�interviewer passera de questions peu controvers�es et peu sensibles � des sujets plus d�licats. Il ne cherchera pas � pousser le t�moin. Si surgit un sujet trop bouleversant ou sensible pour le t�moin, on changera de sujet pour y revenir plus tard. M�nager une pause au cours de l�entretien, ou entre les entretiens, s�il appara�t que le t�moin, l�interpr�te ou l�interviewer se fatiguent ou se lassent. Une fois encore, on pourra proposer de l�eau ou du caf�. Le HRO fera montre de respect et de compassion pour l�exp�rience subie par la victime. Il pourra laisser entendre au t�moin que lui-m�me cherche � l�aider. La personne interrog�e peut avoir besoin d�exprimer ses �motions, et l�interviewer doit se montrer tol�rant et rassurant.

 

33. L�interviewer prendra grand soin de ne pas faire sentir par le langage corporel, les expressions faciales ou autres, qu�il ne croit pas ce qui lui est dit. Si la capacit� en existe, les entretiens simul�s avec ou sans vid�o peuvent aider les HRO � mieux percevoir comment ils m�nent un entretien, de fa�on � leur permettre d��viter de communiquer des messages n�gatifs qui inhiberaient le flux d�information. Prendre quelques notes tout en maintenant un contact visuel r�gulier semble bien �tre le meilleur moyen de recueillir un r�cit des circonstances.

 

34. On �vitera les questions directives, car le t�moin peut �tre tent� de donner les r�ponses que d�sire le HRO et non la v�rit� simple. L�interviewer ne contestera pas directement les exag�rations ou probl�mes de cr�dibilit�. Bien des exag�rations peuvent d�couler de l�incapacit� d�enqu�teurs pr�c�dents d��tablir leur propre cr�dibilit�, ou de leur d�faut d�action sur des cas individuels; aussi les informateurs peuvent-ils penser qu�il leur faut exag�rer pour engendrer une action. Les HRO ont � asseoir leur cr�dibilit�. Mais toute mise en cause directe de celle du t�moin peut conduire celui-ci � refuser toute autre d�claration; d�autres t�moins potentiels peuvent ainsi entendre dire que l�interviewer ne trouve pas ses t�moins cr�dibles.

 

35. Si l�interviewer estime que le r�cit est incoh�rent, il appartient � l�interviewer lui-m�me de mettre les choses au point en disant au t�moin qu�il n�a pas saisi le d�roulement des �v�nements. Une fois encore, il ne faudra pas ici faire montre de scepticisme, d�fiance ou condescendance. Il pourra �tre utile de poser les m�mes questions de fa�on diff�rente pour aider la personne � voir les faits de diff�rents points de vue et � pouvoir �valuer la fiabilit� du r�cit dans son entier.

 

36. Sur la base des informations requises pour �tayer une plainte pour violation des droits de l�homme, il est n�cessaire de r�unir un certain nombre de renseignements. Si le t�moin est alphab�tis�, on lui demandera d��peler chaque nom de lieu ou de personne. Il peut �galement �tre tr�s utile de poss�der une carte. Celle-ci comportera en effet les noms de lieux �ventuellement mentionn�s pendant l�entretien. Il est �galement utile d�avoir avec soi un calendrier, qui pourra aider le t�moin � ordonner les �v�nements. Si le t�moin cite des chiffres (de morts, de bless�s, etc.), l�interviewer doit lui demander comment il conna�t ces chiffres. Cette question permettra au HRO de se faire une id�e de la capacit� du t�moin � observer les faits.

 

2. L�interrogatoire sp�cifique

 

37. Apr�s avoir entendu l��nonc� des circonstances, l�interviewer aura sans doute des questions � poser sur des �v�nements pr�cis. Par exemple, si le t�moin d�clare que des militaires sont venus chez lui, on peut imaginer des questions comme :

 

� Comment savez-vous qu�il s�agissait de militaires ?

� Comment �taient-ils habill�s ? Un certain genre d�uniforme ?

� Combien de soldats sont venus ?

� Portaient-ils des armes ? Si oui, de quel genre ?

� Connaissiez-vous certains de leurs noms ? Ou leur unit� ?

� Une autre personne les a-t-elle vus chez vous ?

� Qu�ont-ils fait en arrivant ou pendant qu�ils �taient chez vous ?

� Ont-ils prof�r� des menaces, envers vous ou votre famille ?

� Ont-ils fait du mal � quelqu�un de votre famille ?

� Avez-vous eu avec eux un quelconque contact physique ?

� Si oui, vous ont-ils nui physiquement d�une fa�on quelconque ?

� Si oui, vous ont-ils battu(e) ou maltrait�(e) ?

� Si oui, pendant combien de temps ?

� De combien de coups ?

� De quoi se sont-ils servis pour vous battre ?

� Sur quelle(s) partie(s) du corps ?

� Qu�avez-vous ressenti sur le moment ? Et plus tard ?

� Cela a-t-il eu un effet sur votre corps ?

� Les soldats vous ont-ils demand� de faire quelque chose ?

� Vous ont-ils demand� de quitter la maison ?

� Avez-vous �t� emmen�(e) dans une prison ou un centre de d�tention ?

� O� ?

� S�est-il produit quelque chose pendant le transport ?

� Que s�est-il pass� � votre arriv�e dans cette prison ou ce centre de d�tention ?

� Quelles y �taient les conditions d�incarc�ration ? (dimensions des cellules, nombre d�occupants, quantit� et nature de la nourriture, hygi�ne, etc.)

� Connaissez-vous le nom d�autres personnes d�tenues en m�me temps que vous ?

� Quand avez-vous �t� rel�ch�(e) ? Comment ?

 

38. Certaines de ces questions sont reprises au Chapitre 20 �Rapports sur les droits de l�homme�, Annexe 1 : �Questionnaire � Formulaire d�entretien�.

 

39. L�interviewer devra aussi s�enqu�rir des autres t�moins ou sources d�informations. De plus, il lui faudra noter le nom, la date de naissance, l�adresse du t�moin, ainsi que les moyens de le contacter. Le HRO pourra prendre une mesure de s�curit� consistant � conserver les informations elles-m�mes s�par�ment des notes de l�entretien � proprement parler. Ainsi, au cas o� ces notes seraient d�tourn�es d�une mani�re quelconque, il serait peu probable que leur utilisation mette directement la personne en danger.

 

40. Le HRO s�efforcera d��tablir avec certitude le type d�informations dont le t�moin a une connaissance personnelle. Les questions pos�es � cet �gard permettront de pond�rer les renseignements qui suivront, mais ne laisseront en aucune mani�re supposer au t�moin que l�interrogatoire tend � le pi�ger. L�interviewer peut aussi poser les m�mes questions � diff�rents individus afin d�identifier des faits concordants. Mais il ne doit jamais dire � un t�moin ce qu�un autre a dit. Il est possible que certaines informations, m�me peu compatibles sous certains aspects, comportent certains �l�ments de concordance utiles � l��tablissement des faits.

 

41. En moyenne, un entretien ne prendra pas moins de 45 minutes pour un t�moin oculaire. Pour un bon informateur, au courant de ce qui s�est d�roul� au voisinage, cela peut prendre beaucoup plus longtemps.

 

F. CONCLURE L�ENTRETIEN ET RESTER EN CONTACT

 

42. Le HRO demandera au t�moin s�il lui reste des questions � poser ou s�il pense � d�autres informations �ventuellement utiles. Une fois de plus, il rappellera que ces renseignements sont confidentiels. L�interviewer pourra donner des conseils au t�moin, mais �vitera d��veiller en lui de faux espoirs. Il expliquera les actions qu�il sera possible d�entreprendre � l��gard du probl�me, ici encore sans encourager d�attentes peu susceptibles d��tre remplies. Peut-�tre l�interviewer souhaitera-t-il �galement revoir ses notes avec le t�moin.

 

43. Le HRO fera en sorte d�assurer un syst�me de maintien des communications avec le t�moin. Rester en contact pourra �tre possible gr�ce au t�l�phone, � un interm�diaire fiable, un responsable religieux, ou n�importe quelle autre personne en laquelle ont confiance � la fois la mission de droits de l�homme de l�ONU et le t�moin lui-m�me. C�est un minimum que le t�moin sache comment joindre la mission de l�ONU : toujours laisser la porte ouverte � toute personne ayant pris contact avec la mission, de sorte qu�elle puisse toucher rapidement un HRO � tout moment, que ce soit pour apporter de nouvelles informations, ou pour faire part de menaces ou repr�sailles exerc�es en raison de son t�moignage.

 

44. En fin d�entretien, le HRO souhaitera peut-�tre pr�voir une r�union d�apr�s-entretien avec le t�moin, ou bien une autre fa�on de se rencontrer quelques jours plus tard, ce qui donnera le temps de comparer la d�claration avec d�autres sources, de prendre les mesures pr�vues, etc.

 

45. L�interviewer devra �galement v�rifier que l�interview� a pleinement compris les modalit�s de l�entretien et le suivi n�cessaire, les actions � entreprendre, si les renseignements ont �t� communiqu�s � titre anonyme, et si des n�gociations ou autres interventions sont requises aupr�s du gouvernement. Si cette derni�re pr�caution est n�cessaire, c�est que la personne a toujours le droit de changer d�avis pendant ou apr�s la rencontre.

 

G. LE RAPPORT D�ENTRETIEN

 

1. Reconstituer l�entretien

 

46. Une fois l�entretien termin�, l�interviewer r�digera imm�diatement des notes compl�tes sur la base des annotations rapides prises au cours de l�entretien et du plan pr�par� � l�avance � et ce tout particuli�rement s�il n�y a pas eu d�annotations prises. Ces informations donneront le d�tail de ce qui est n�cessaire pour savoir ce qui s�est produit, quand, o�, comment, pourquoi, et qui �tait impliqu� (voir le Questionnaire � Formulaire d�entretien en Annexe 1 au Chapitre 20 �Rapports sur les droits de l�homme�). Plus le rapport d�entretien sera d�taill�, plus il sera utile pour prendre action et r�diger des rapports plus structur�s.

 

47. Les psycholinguistes nous ont appris que les strat�gies de rappel diff�rent des strat�gies de communication. Pendant l�entretien, le t�moin a sans doute eu recours � une strat�gie de rappel : il appartient � l�interviewer de remettre les �l�ments rassembl�s sous une forme logique. En r�digeant son rapport d�entretien, il importe que le HRO structure le r�cit d�une mani�re qui communique au mieux les faits intervenus. Par exemple, ceux-ci seront normalement pr�sent�s par ordre chronologique.

 

2. �valuer la cr�dibilit�

 

48. L�interviewer devra expliquer pourquoi il ne croit pas au r�cit d�un t�moin. Mais il ne doit pas se sentir tenu � un jugement d�finitif � cet �gard. Il n�est pas inhabituel de ne pas �tre s�r de soi quant � la cr�dibilit� d�une victime ou d�un t�moin. S�agissant des questions de cr�dibilit�, le HRO aura � l�esprit diverses consid�rations g�n�rales :

 

(a) D�ordinaire, un individu ne prendra ni le temps ni le risque de donner une interview � moins que quelque chose de grave se soit produit. Il appartient � l�interviewer d�identifier les renseignements fond�s sur l�exp�rience personnelle du t�moin. N�anmoins, toute information indirecte peut s�av�rer utile en fournissant des pistes pour trouver d�autres informations pertinentes.

 

(b) Bien souvent, les enqu�teurs consid�rent une personne comme cr�dible si elle est assur�e et claire. Or un t�moin peut parfaitement n��tre ni clair ni assur�. Il peut fort bien �tre relativement impuissant et traumatis�. La culture du pays peut lui interdire de communiquer aussi directement, ou m�me de regarder en face son interlocuteur en s�exprimant. Il n�en demeure pas moins qu�il y a sans doute l� un noyau d�informations importantes qu�il importe d�identifier.

 

(c) Comme en traite plus � fond la section consacr�e aux interrogatoires de victimes de tortures, les individus qui ont subi un traumatisme ont souvent des difficult�s de m�moire, raison pour laquelle ils risquent de n��tre ni assur�s ni clairs. Ce probl�me de perte de m�moire affecte tous les traumatis�s, et non pas seulement les victimes de tortures.

 

(d) L�interviewer devra �tre patient avec les t�moins peu clairs sur la datation des �v�nements. Bien des t�moins, dans leur vie quotidienne, n�ont pas affaire au calendrier. On peut les aider en reliant les �v�nements vis�s � des f�tes ou autres jours remarquables qui sont clairement �tablis.

 

(e) L�interviewer s�efforcera de rep�rer ceux des renseignements fournis par le t�moin qui concordent avec des informations de sources compl�tement ind�pendantes. Beaucoup d�enqu�teurs estiment qu�un fait ne peut �tre consid�r� comme �tabli sans que deux t�moins ind�pendants fournissent des t�moignages concordants. La fiabilit� des t�moins (et l�exp�rience des HRO vis-�-vis de cette fiabilit�) peut constituer un facteur important pour �valuer la v�racit� de l�information. Les d�tails contribuent � construire une cr�dibilit�, et le fait qu�un t�moin soit en mesure de fournir une abondance de d�tails est � prendre en compte. Par ailleurs, certains t�moins auront des pr�jug�s �vidents, qui seront pris en compte dans l��valuation de la v�racit� de leurs dires.

 

(f) L�interviewer enregistrera les informations fournies par un t�moin m�me s�il doute de sa fiabilit�, car elles pourront s�av�rer utiles � mesure que d�autres renseignements seront r�unis.

 

H. APPROFONDIR L�ENQU�TE

 

1. V�rifier et comparer l�information et la documentation

 

49. L�interviewer devra v�rifier aupr�s des personnes appropri�es les renseignements collect�s � par exemple la famille de la victime all�gu�e, ses amis, voisins et autres t�moins. Dans cette perspective, le HRO pourra rendre visite aux familles, aux voisins, aux lieux de travail, aux �coles, aux prisons, etc. Il souhaitera peut-�tre �tudier des documents ou autres archives (dossiers m�dicaux, certificats de d�c�s, sorties du territoire, etc.). Il pourra �galement rassembler, noter, photographier ou reproduire toute information n�cessaire.

 

50. Les HRO peuvent s�entretenir avec des m�decins, psychologues, psychiatres et l�gistes. Ils doivent se procurer tout rapport m�dical utile. Ils doivent aussi requ�rir l�assistance de toute organisation ou personne travaillant pour la protection des droits de l�homme, ayant connaissance de l�affaire ou de la situation g�n�rale.

 

51. Les HRO ou leurs sup�rieurs au sein de la mission sur les droits de l�homme doivent demander des renseignements aux autorit�s concern�es (voir Chapitre 19 �Suivi et action corrective�). En retour, ces autorit�s doivent apporter une r�ponse rapide et consciencieuse. Dans ce cadre, le HRO peut envisager de proposer aux autorit�s des solutions provisoires, pour �viter d�aggraver la situation. Si les autorit�s ne fournissent pas l�information demand�e dans des d�lais raisonnables, le HRO tirera ses propres conclusions et formulera ses recommandations et d�cisions en la mati�re en fonction des �l�ments dont il dispose. Par �d�lai raisonnable�, on entend en g�n�ral cinq jours, mais ce peut �tre vingt-quatre heures en cas d�urgence, ou bien plus pour une question de routine. La mission de l�ONU continuera d�intervenir courtoisement mais fermement aupr�s des autorit�s tant qu�elles n�auront pas fourni de r�ponse satisfaisante, n�ont pas pris les mesures requises, ou si l��volution de l�affaire le demande.

 

2. Suivre les affaires

 

52. Pour certains t�moins, comme les victimes de tortures, il faudra sans doute pr�voir plusieurs entretiens pour �tablir une relation et permettre � l�interviewer de se faire une id�e claire et pr�cise de leurs r�cits.

 

53. Si possible, le ou les HRO ayant trait� l�affaire seront charg�s de son suivi. Mais au bout du compte, c�est le bureau r�gional qui est responsable du suivi de chaque affaire (voir Chapitre 19 �Suivi et action corrective�). Ce principe est essentiel pour tenir compte des effets des mutations de personnel et autres changements dans l��quipe (cong�s, maladies, etc.). Jusqu�� ce qu�une affaire soit class�e, les HRO poursuivront l�enqu�te en tant qu�affaire �active� de violation.

 

I. INTERROGER DES �GROUPES SP�CIAUX� OU DES PERSONNES PR�SENTANT DES CARACT�RES SP�CIFIQUES

 

54. Les HRO doivent savoir que certaines personnes interrog�es pr�sentent des caract�res particuliers, comme leur �ge ou les traumatismes qu�elles ont subis, qui posent eux aussi des probl�mes particuliers. En outre, certains �groupes sp�ciaux� comme les femmes ou les enfants doivent �tre approch�s et trait�s diff�remment des autres. Pour que les entretiens avec ces personnes soient b�n�fiques, il faut une certaine pr�paration et un peu plus de patience.

 

1. Les victimes de tortures

 

55. Interroger des victimes de tortures (ou des t�moins si traumatis�s qu�ils ressemblent de tr�s pr�s aux victimes) � propos de leur exp�rience est une t�che tr�s d�licate, qu�il ne faut jamais prendre � la l�g�re. L�entretien d��tablissement des faits peut rappeler suffisamment les questions des tortionnaires pour raviver des peurs conscientes et inconscientes chez la victime de tortures. L�interviewer sera particuli�rement attentif � ce probl�me de sensibilit�, et �vitera de retraumatiser les victimes ou t�moins.

 

56. Si ce Manuel emploie des termes comme �victimes de tortures�, victimes� ou �affaires� pour la facilit� de l�expos�, le HRO doit savoir que ces termes sont de nature d�shumanisante et susceptibles d�approfondir le processus de d�gradation que le tortionnaire entendait sans doute infliger � la personne. Il faut faire en sorte que la personne se sente importante, et non pas objet de piti�.

 

57. Le HRO qui interroge une victime doit �tre pr�t � faire face aux �motions. Le HRO fera preuve de sympathie aupr�s de la victime, et l�encouragera � parler de cette exp�rience traumatisante. Si la victime se laisse submerger par l��motion, l�interviewer lui montrera son soutien. Il peut proposer de faire une pause dans l�entretien, et offrir de l�eau ou du caf�. Apr�s avoir laiss� le temps � la personne interrog�e de reprendre contenance, il devra si possible tenter de ramener l�entretien sur un terrain moins douloureux. Encore une fois, le HRO fera preuve de sympathie, mais il doit se souvenir qu�il n�a pas une formation de psychiatre et que son travail ne consiste pas � apporter un traitement.

 

58. Les victimes souffrant d�un �tat de stress post-traumatique (notamment apr�s avoir subi des tortures) sont affect�es d�anxi�t� s�v�re; d�insomnies avec cauchemars de pers�cutions, de violences, ou rappelant leur propre exp�rience de torture; de sympt�mes somatiques d�anxi�t�, de phobies, de suspicions et de peurs. Les victimes de tortures peuvent �galement souffrir d�engourdissement psychique, de minimisation, de refoulement ou de d�n�gation de l�exp�rience subie. Chez les victimes, le manque de confiance, la honte, l�humiliation et les troubles de m�moire peuvent amener des d�clarations confuses et apparemment contradictoires, ainsi qu�une incapacit� � se souvenir des d�tails. Bref, il peut arriver que les victimes soient incapables de d�crire les tortures qu�elles ont subies. En pareil cas, il peut devenir n�cessaire d�avoir recours � d�autres sources d�informations (comme les d�clarations d�amis et parents) pour conna�tre le pass� de la victime et le cadre dans lequel elle �volue. Chaque fois que possible, le HRO se procurera une expertise m�dicale.

 

59. L�examen m�dical d�une victime de tortures porte en g�n�ral sur les �l�ments suivants : (1) pouls; (2) tension art�rielle; (3) taille; (4) poids; (5) tout changement de poids marqu�; (6) toute cassure dentaire, fracture osseuse, etc.; (7) �tat des muscles et articulations (mollesse, gonflements, souplesse); (8) ecchymoses, cicatrices; (9) �valuation g�n�rale du fonctionnement intellectuel et du sens de l�orientation; (10) modulation vocale r�v�latrice de stress; (11) tout �tat d�hallucinations, d�interruptions du sommeil, de cauchemars, d�angoisses, etc.; (12) apparence �motionnelle, notamment larmes, l�vres tremblantes, d�pression, etc. Au cours de l�examen m�dical, chacun de ces �l�ments sera not� de fa�on d�taill�e. �tant donn� que les dommages neurologiques dus aux coups sont souvent parmi les effets les plus graves de la torture, le m�decin pratiquant l�examen en recherchera tous les signes.

 

60. Les dommages physiques, �motionnels et psychologiques peuvent �galement �tre confirm�s par des examens biologiques, des rayons X, des biopsies histopathologiques, ou des photographies. Pour �viter de permettre l�identification de l�individu, et obtenir son consentement pour les photographies, seules les parties du corps affect�es seront photographi�es. Tout ceci en sachant que les victimes de tortures doivent �tre trait�es avec une grande d�licatesse tenant compte de la nature des s�vices qu�elles ont subis, et des examens qu�elles sont en mesure d�endurer.

 

61. Le m�decin charg� d��tablir les faits tentera aussi d�avoir acc�s aux r�sultats d�autres examens m�dicaux ou psychiatriques effectu�s tant avant l�internement qu�au plus t�t apr�s les s�vices suppos�s. En questionnant les m�decins impliqu�s dans ces examens et en lisant leurs rapports, le m�decin charg� d��tablir les faits aura des chances de distinguer d�une part les maladies et blessures pr�existantes ou auto-inflig�es, de celles caus�es par les s�vices d�autre part; il saura y d�celer les ecchymoses et autres sympt�mes de s�vices qui sont susceptibles de se modifier avec le temps, et pourront confirmer ou mettre en question son propre diagnostic.

 

2. Les femmes (2)

 

62. Les femmes interrog�es peuvent montrer une particuli�re r�pugnance, voire une incapacit�, � parler du viol ou d�autres formes de violences sexuelles, en raison de la stigmatisation sociale attach�e � ces souffrances. �tablir une relation avec des femmes peut-�tre viol�es ou ayant subi des violences sexuelles exige un effort tout sp�cial. On doit plus encore �tre s�r que cette femme veut bien se laisser interroger, et qu�elle comprend que ces renseignements demeureront confidentiels ou ne seront utilis�s que comme elle l�aura accept�. La personne interrog�e sera inform�e qu�elle peut refuser de r�pondre � toute question qu�elle trouvera difficile � vivre, et qu�elle peut interrompre l�entretien � tout moment. Il faudra une grande d�licatesse pour �tablir les faits �l�mentaires de ces tortures ou autres abus, � savoir quoi, quand, o�, par qui, et s�il y a eu des t�moins. Mais une fois ces renseignements recueillis, il ne sera peut-�tre pas indispensable de s��tendre sur les d�tails des abus.

 

63. Dans toute la mesure du possible, l�entretien sera men� par un membre f�minin de la mission sur les droits de l�homme, et avec l�assistance d�une interpr�te elle aussi de sexe f�minin. Cette femme HRO sera r�ceptive tout en restant objective dans la conduite de l�entretien. Elle prendra garde aux signes indiquant que celui-ci est en train de retraumatiser le t�moin. Si ce dernier est submerg� par les souvenirs de ses souffrances, l�entretien sera bri�vement suspendu ou repris � une date ult�rieure. Le fonctionnaire sera conscient des diff�rences dans la communication interculturelle qui peuvent intervenir en parlant � un �tranger. C�est ainsi qu�une femme peut refuser le contact visuel en raison des imp�ratifs de sa culture. Le HRO demandera si la femme a besoin de soins m�dicaux et/ou psychologiques; toutefois, comme dans tout autre entretien, on aura soin de ne pas faire de propositions ou de promesses qui ne puissent �tre tenues.

 

3. Les r�fugi�s et autres personnes d�plac�es

 

64. Il importe d��tre sensible au fait que les r�fugi�s et personnes d�plac�es subissent un stress consid�rable du fait qu�ils sont sans ressources, et �loign�s de leur foyer et, parfois, de leur famille. L�interviewer devra d�terminer la situation actuelle du r�fugi� : court-il le risque d��tre renvoy� dans son pays ou sa r�gion d�origine ? demande-t-il l�asile ou la r�installation ? L�interviewer s�assurera du lieu o� s�journe le r�fugi� (camp, placement domiciliaire, etc.). Ces renseignements sont essentiels au suivi ult�rieur.

 

65. L�interviewer pourra commencer par demander pourquoi la personne a fui son pays ou sa r�gion. Cette question aboutira au r�cit des abus de droits de l�homme subis par le r�fugi�. L�interviewer se montrera en sympathie non seulement avec l�exp�rience du r�fugi� en tant que victime ou t�moin de violations des droits de l�homme, mais aussi avec ses sentiments d�incertitude, de d�racinement et de perte de contr�le.

 

66. Confirmer les t�moignages de r�fugi�s et de personnes d�plac�es pose un probl�me particulier, puisqu�il peut ne pas �tre possible de visiter leur pays ou r�gion d�origine. Il est donc particuli�rement important d�examiner avec la personne son t�moignage pour en v�rifier le d�tail et la v�racit�. On pourra obtenir d�autres �l�ments de confirmation en interrogeant d�autres r�fugi�s ou personnes d�plac�es provenant de la m�me zone.

 

4. Les enfants (3)

 

67. L�enfant a une perception du monde tr�s diff�rente de celle de l�adulte. L�interviewer aura cette diff�rence � l�esprit, et abordera l�entretien diff�remment selon l��ge, la maturit� et la compr�hension de l�enfant. Il sera sans doute n�cessaire d�employer un langage plus simple et de passer davantage de temps � �tablir une relation avec l�enfant � interroger. Si un interpr�te est n�cessaire, le HRO pourra chercher � identifier un interpr�te form� pour travailler avec des enfants ou habitu� � le faire. Il sera peut-�tre particuli�rement utile d�expliquer plus soigneusement le r�le du HRO, le d�roulement de l�entretien, et les raisons de poser certains types de questions. Le HRO encouragera l�enfant � poser des questions au cours de l�entretien, de dire s�il ne comprend pas une question, ou de demander pourquoi on la lui pose. Le HRO devra s�attendre � ce que l�entretien demande davantage de patience et de temps que d�habitude. Il sera attentif aux signes montrant que l�enfant devient anxieux ou qu�il est d�bord�. Il conviendra peut-�tre d�interrompre l�entretien, de faire une pause, ou de revenir un autre jour (d�autres informations figurent au Chapitre 12 �Les droits de l�enfant�).

 

68. En plus d�interroger l�enfant, l�interviewer devra, si possible, parler avec des membres de sa famille et de sa communaut�, des enseignants, des soignants, et autres personnes s��tant occup�es de l�enfant. Il pourra aussi �tre utile de demander l�avis de sp�cialistes de la perspective enfantine.

 

5. Les populations rurales

 

69. Tout comme les membres de communaut�s autochtones, les individus accoutum�s � la vie rurale peuvent avoir une conception diff�rente du temps. Il est important de pr�ciser toute d�claration concernant des dates et heures. Des dates pr�cises peuvent rev�tir peu de signification, aussi convient-il que l�interviewer se r�f�re � un cadre familier. Par exemple avec des questions comme : �Cela s�est-il produit avant ou apr�s les semis ?�

 

70. Il importe �galement de se souvenir que les personnes pauvres, peu �duqu�es ou autrement vuln�rables peuvent manquer de confiance en elles-m�mes et r�pugner � fournir des renseignements. Les organisations locales de droits de l�homme peuvent apporter une assistance � cet �gard, en contribuant � rassurer les t�moins qui ont peur d�apporter des informations (4).

 

6. Les communaut�s autochtones

 

71. Les communaut�s autochtones peuvent avoir un mode de vie tr�s diff�rent du reste de la soci�t� ou du pays, et a fortiori de celui de l�enqu�teur. L�interviewer sera sensible et respectueux vis-�-vis des diff�rences de langues, de m�thodes de communication, de notions du temps et de structures sociales. Si possible, il se renseignera avant l�entretien sur la culture et les coutumes du groupe.

 

7. Les groupes � faibles revenus

 

72. Les groupes � faibles revenus, qui comprennent les habitants des taudis, les occupants sans titre et ceux qui vivent dans la pauvret�, ont en g�n�ral des opinions et points de vue diff�rents de ceux qui travaillent dans une mission sur les droits de l�homme. Il est possible que les pauvres aient � l��gard de la mission de l�ONU des attentes d�une ambition irr�aliste quant � leur niveau de vie, mais tout aussi possible qu�ils soient compl�tement r�tifs envers toute intervention non d�sir�e dans leur communaut�. Les fonctionnaires de terrain prendront le plus grand soin de reconna�tre et de comprendre des points de vue qui peuvent, de prime abord, sembler difficiles � appr�hender. Par exemple, telle communaut� d�occupants sans titre � m�me occupant la terre en question depuis des d�cennies � peut devenir d�fiante si le fonctionnaire des droits de l�homme aborde imm�diatement des questions de droit. Le d�calage fr�quemment �norme, en termes de revenus et de possibilit�s, entre ce fonctionnaire et les personnes appartenant � des groupes � faibles revenus, peut �galement constituer un obstacle difficile � franchir pour la mise en �uvre d�une collaboration fructueuse.

 

8. Les fonctionnaires du gouvernement et les suspects de violations

 

73. Interviewer des autorit�s est tr�s diff�rent d�interviewer des victimes ou t�moins de violations des droits de l�homme; il y faut � la fois de la diplomatie et une pr�paration m�ticuleuse. L�interviewer doit sonder les d�clarations tout en �vitant une confrontation excessive; il doit rester courtois et rester ouvert en posant ses questions. Plus l�entretien aura de signification, et plus la pr�paration en sera importante. Comme on l�a vu, l�interviewer pr�parera une liste de questions et r�fl�chira bien � l�ordre de celles-ci. Cet ordre n�aura pas � �tre suivi rigidement, car il sera plus important de r�agir aux informations fournies par le fonctionnaire du gouvernement et de poser les questions qui en d�coulent. Si possible, les entretiens avec les fonctionnaires du gouvernement auront lieu apr�s que la mission sur les droits de l�homme de l�ONU ait rassembl� des informations en bonne quantit�, mais tant que l�on peut encore r�unir d�autres �l�ments. Dans ce cadre, le gouvernement pourra fournir des explications quant aux d�clarations des victimes et t�moins, permettant � la mission de l�ONU de proc�der � des investigations suppl�mentaires sur la base de ces explications.

 

74. La situation peut devenir difficile si, au cours d�un entretien, l�interviewer en vient � estimer que son interlocuteur est personnellement impliqu� dans des pers�cutions, ou l�a �t�. Ce cas de figure sera discut� � l�avance, afin que l�interviewer dispose d�un mode de conduite au cas o� il surviendrait. Il est en g�n�ral important d�entendre les informations fournies par l�individu, et de les faire figurer dans le rapport. Il arrive parfois qu�un responsable du gouvernement fournisse des renseignements inestimables concernant les abus des droits de l�homme.

 

 

___________________

1. Glenn Randal et Ellen Lutz, Serving Survivors of Torture 64-67 (1991).

2. Voir HCR, Lignes directrices pour la protection des femmes réfugiées (1991); HCR, Violence sexuelle à l'encontre des réfugiés, Principes directeurs concernant la prévention et l'intervention 32-34, 38-41 (1995).

3. D'autres informations sur les droits spécifiques des enfants figurent au Chapitre 12 - "Les droits des enfants".

4. Daniel J. Ravindran, Manuel Guzman, Babes Ignacio (éds.), Handbook on Fact-Finding and Documentation of Human Rights Violations 41 (1994).

 


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